L escamotage d une réforme municipale, Angers, 1589 - article ; n°2 ; vol.91, pg 107-134
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L'escamotage d'une réforme municipale, Angers, 1589 - article ; n°2 ; vol.91, pg 107-134

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Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest - Année 1984 - Volume 91 - Numéro 2 - Pages 107-134
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Publié le 01 janvier 1984
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Langue Français
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Xavier Martin
L'escamotage d'une réforme municipale, Angers, 1589
In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 91, numéro 2, 1984. pp. 107-134.
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Martin Xavier. L'escamotage d'une réforme municipale, Angers, 1589. In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome
91, numéro 2, 1984. pp. 107-134.
doi : 10.3406/abpo.1984.3154
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1984_num_91_2_3154L'ESCAMOTAGE
D'UNE REFORME MUNICIPALE
ANGERS, 1589
par Xavier MARTIN
En avril 1584, s'autorisant d'une prétendue volonté populaire, divers corps
et notables d'Angers avaient infligé une défaite à l'oligarchie de vingt-quatre
échevins perpétuels cooptés accaparant jusqu'alors l'administration urbaine :
Péchevinage avait été réduit, par un arrêt du parlement de Paris, à un maire et
quatre échevins biennaux, et douze conseillers perpétuels, les uns et les autres
élus par un collège désormais ouvert à des représentants des paroisses. Sous l'appa
rence, la défaite n'était toutefois que relative pour les vingt-quatre, maintenus
par dérogation conseillers de ville jusqu'à leur mort, et disposant de suffisam
ment d'atouts et d'adresse pour peser encore sensiblement sur le cours de la vie
municipale (1). Or, de cette oligarchie seulement ébranlée, les membres les plus
représentatifs et les plus décidés allaient même savoir exploiter une occasion
fortuite de revanche fournie, au printemps 1589, par l'évolution politique
nationale, et obtenir pour la ville le rétablissement du statu quo ante institu
tionnel. Si le cours des luttes communales d'Angers, en cette fin du XVIe siècle,
recoupe à plusieurs reprises celui des guerres de religion, c'est la seule fois qu'il
en suit exactement un méandre, et c'est pourquoi le film succinct des faits qui
ont offert cette occasion (§1) est nécessaire pour mieux saisir l'intrigue munic
ipale ourdie à sa faveur ( § II).
I - L'OCCASION
1588 voit la ville, dans son ensemble, s'orienter vers la Ligue. Ce glissement
s'accentue aux premiers mois de 1589 jusqu'à l'orée d'une rébellion ouverte (A),
ce qui suscite, en retour, une intervention du maréchal d'Aumont restaurant,
en avril, l'obéissance au roi (B) (2). C'est cette remise en ordre qu'une partie
de l'oligarchie saura infléchir dans son intérêt.
* Les notes de cet article sont regroupées à partir de la page 118. ANNALES DE BRETAGNE 108
A - Le glissement de la ville vers la Ligue
Les années 1588 et 1589, avec l'écartèlement du parti catholique, sont, dans
l'histoire nationale et locale, des plus complexes. Depuis 1584, la guerre civile
s'amplifie. La mort du duc d'Anjou, en faisant d'Henri de Navarre l'héritier
présomptif de la couronne, a relancé la fermentation religieuse dans le royau
me (3). Henri III, peu à peu enfermé dans une situation politique inextricable,
se heurte à une agitation qu'attisent les prédicateurs (4) et qu'aggravent les
ambitions. En 1588, sa souveraineté est battue en brèche : chassé de Paris en
mai, acculé à d'humiliantes compositions et manœuvres (5), contraint de convo
quer les seconds États Généraux de Blois qui lui réservent avanie sur avanie (6),
le roi croit trouver une issue dans le double assassinat des Guise (23 et 24
décembre 1588) (7), fuite en avant qui ne fera qu'exacerber les passions.
La fièvre qui gagne les contrées catholiques n'épargne pas Angers. Dans toutes
les couches de la population, la ville penche pour la Ligue (8). A cet égard,
les tendances de la masse populaire sont les plus nettes : son parti-pris passionné,
entretenu par les sermons (9) et amplifié par le danger militaire protestant (10),
trouve écho dans les excès verbaux de la chronique de Louvet (11). Mais les
choses se compliquent avec les notables urbains, dont l'attitude nous intéresse
au premier chef. Chez eux, mainte conscience est tiraillée entre la passion
religieuse et le sentiment monarchique. Pencher pour la Ligue n'implique pas
forcément que l'on soit prêt à rejeter l'autorité royale, d'autant moins que
peuvent interférer, avec de nobles scrupules, des calculs politiques (12). A
l'heure des choix décisifs, des positions s'accuseront de manière tranchée, sépa
rant des hommes très proches, qu'une nuance aura fait basculer de part et
d'autre (13).
Cette heure ne sonnera qu'après le double meurtre de Blois. Auparavant,
durant l'année 1588, la ville n'entre pas en rébellion ouverte. Nulle part, d'ail
leurs, en dépit du tour des événements, il n'y a rupture entre la Ligue et le roi.
Si la tonalité dominante, à la mairie d'Angers, est ligueuse (14), cela n'empêche
pas les ordres de la ville de réitérer spontanément, après la journée parisienne
des barricades, leur allégeance au roi (15); puis de prêter en grande pompe,
les 10 et 11 août, le serment qu'exige de manière si ambiguë l'Édit d'Union (16).
Un fait, toutefois, montre la détermination des ligueurs angevins, qui se savent
des appuis dans la noblesse locale (17) : c'est fermement qu'ils s'opposent,
clergé en tête, à la réception de leur nouvel évêque, Charles Miron, un homme
du roi (18).
Aussi, le meurtre des Guise, à la fin de 1588, met-il la ville en ébullition (19).
Les trois mois qui suivent sont confus. Le sentiment ligueur devient prépon
dérant dans la ville, mais celle-ci tarde à rompre avec l'autorité royale et, plus
encore, avec ceux qui sur place l'incarnent sans défaillance : La Rochepot et
Puchairic, respectivement gouverneurs de la province et de la ville (20). A ces
deux hommes de valeur (21), la ville est très attachée (22). Malgré leur loyalisme
à Henri III, elle leur conserve d'autant mieux sa confiance qu'elle voit en eux son
meilleur rempart contre les huguenots (23). Même lorsque les ligueurs angevins
entrent en rébellion ouverte, le 20 février (24), en dressant des barricades (25),
ils se tournent vers leurs gouverneurs pour les presser de « jurer l'union » , DE BRETAGNE 1 09 ANNALES
c'est-à-dire rallier officiellement la ligue. Ceux-ci, trop démunis pour maint
enir l'ordre, atermoient avec finesse (26).
Dès lors, de la dernière semaine de février aux derniers jours de mars, la situa
tion est paradoxale. Le temps est comme suspendu sur la ville (27), contrôlée
par les ligueurs qui peuvent escompter un soutien militaire du comte de
Brissac (28). Mais, en face, La Rochepot et Puchairic, avec une sagace fermeté,
gardent des positions qui leur permettent d'attendre un renfort royaliste : le
premier est replié à une lieue, aux Ponts-de-Cé, où il a sa liberté de mouve
ment (29) ; le second tient le château d'Angers (30) qui, situé à la périphérie
de la ville, communique avec l'extérieur (31). Et pourtant, malgré une tension
certaine, il n'y a pas rupture consommée entre eux et les ligueurs d'Angers,
qui n'ont pas expressément rejeté l'autorité royale (32), qui par ailleurs
redoutent une attaque protestante, et considèrent apparemment que de si bons
gouverneurs ne sauraient tarder à embrasser décidément leur cause (33), en voie
de triompher à peu près partout. Cette situation ambiguë dure jusqu'à l'arrivée
aux Ponts-de-Cé, dans les derniers jours de mars, d'une armée royale conduite
par le maréchal d'Aumont.
B - L 'intervention du maréchal d 'Aumont (34)
C'est alors seulement, et pour peu de temps, que la rupture se produit, au
cœur d'une semaine sainte dont la charge affective accroît l'exaltation des
esprits (35). Le mardi 28, à l'approche du maréchal et de ses gens, arrivés dans
La Flèche Pavant-veille (36), Brissac entre en ville pour stimuler la combativité
des habitants (37). Mais il ne peut proposer que quelques dizaines d'hom
mes (38), un renfort dérisoire face à la forteresse que tient Puchairic et aux
troupes qui, sous le commandement d'Aumont, vont s'accumuler près d'Ang
ers (39). C'est pourquoi La Rochepot, pressé d'agir par des royalistes ange
vins (40), hausse enfin le ton: le 30, il menace d'introduire quinze cents
hommes dans la ville si Brissac s'y maintient et si l'agitation n'y cesse pas. Si
au contraire tout rentre dans l'ordre, il éloig

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