L information généralisée comme procédure d éradication du monde social - article ; n°24 ; vol.12, pg 21-33
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L'information généralisée comme procédure d'éradication du monde social - article ; n°24 ; vol.12, pg 21-33

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Description

Flux - Année 1996 - Volume 12 - Numéro 24 - Pages 21-33
The information highway, and networks like Internet, aim to provide direct access to a potentially unlimited stock of information, and they intend to do this through standardized procedures. This is their real goal, rather than simply increasing the rapidity of the communication process. Thus they seem to operate a double process of rupture - with an initial elaboration (contextually situated) of the data involved (demateriali- zation of supply) and with the experimental process of know- ledge which leads to questioning (deserialization of demand, or inquiry). Both thus create a fictitious context in which a universal and timeless right to information is supposed to occur, within a general process of simulation of the real world. This leads to an eradication of the process of information of the practical social system, transporting it into a uni-demensional world of simulacrum: this is the very image which the major science fiction novels have always given us, dominated by a huge, omnipotent computer.
Les autoroutes de l'information, et les réseaux type Internet, se proposent, au-delà de la rapidité des communications, de procurer un accès direct à un stock, tendant à être illimité, d'informations, selon des procédures uniformisées. Elles opèrent ainsi un double processus de rupture - avec l'élaboration première, contextuellement située, des données en cause (dématérialisation de l'offre) et avec le processus expérimental de connaissance qui mène à l'interrogation (désocialisation de la demande). Elles aboutissent ainsi à instituer un contexte fictif où se met en place, dans le cadre d'une simulation du monde, un droit universel et intemporel à l'information. Cela aboutit à éradiquer le processus de l'information du monde social pour le transporter dans le monde unidimensionnel du simulacre, celui-là même que l'on voit géré par un ordinateur tout-puissant dans les grands textes d'anticipation.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 42
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

L'information généralisée comme procédure d'éradication du
monde social
In: Flux n°24, 1996. pp. 21-33.
Abstract
The information highway, and networks like Internet, aim to provide direct access to a potentially unlimited stock of information,
and they intend to do this through standardized procedures. This is their real goal, rather than simply increasing the rapidity of the
communication process. Thus they seem to operate a double process of rupture - with an initial elaboration (contextually situated)
of the data involved (demateriali- zation of supply) and with the experimental process of know- ledge which leads to questioning
(deserialization of demand, or inquiry). Both thus create a fictitious context in which a universal and timeless "right" to information
is supposed to occur, within a general process of simulation of the real world. This leads to an eradication of the process of
information of the practical social system, transporting it into a uni-demensional world of simulacrum: this is the very image which
the major science fiction novels have always given us, dominated by a huge, omnipotent computer.
Résumé
Les autoroutes de l'information, et les réseaux type Internet, se proposent, au-delà de la "rapidité" des communications, de
procurer un accès direct à un stock, tendant à être illimité, d'informations, selon des procédures uniformisées. Elles opèrent ainsi
un double processus de rupture - avec l'élaboration première, contextuellement située, des données en cause (dématérialisation
de l'offre) et avec le processus expérimental de connaissance qui mène à l'interrogation (désocialisation de la demande). Elles
aboutissent ainsi à instituer un contexte fictif où se met en place, dans le cadre d'une simulation du monde, un droit universel et
intemporel à l'information. Cela aboutit à éradiquer le processus de l'information du monde social pour le transporter dans le
monde unidimensionnel du simulacre, celui-là même que l'on voit géré par un ordinateur tout-puissant dans les grands textes
d'anticipation.
Citer ce document / Cite this document :
L'information généralisée comme procédure d'éradication du monde social. In: Flux n°24, 1996. pp. 21-33.
doi : 10.3406/flux.1996.1184
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/flux_1154-2721_1996_num_12_24_1184L'information généralisée
FLUX
comme procédure n°24
Avril -Juin
1996 ď eradication du monde social pp. 21 - 33
Bernard Poche
Comme bien d'autres questions actuelles, celle des autoroutes de
l'information apparaît comme introduisant au départ un artefact qui
semble échapper à toute mise délibérée en interrogation, et le sociologue, en
le questionnant, va risquer d'apparaître comme un peu idéaliste. C'est peut-
être là un des plus redoutables problèmes de la discipline à l'heure actuelle :
si le sociologue est un généraliste, cela ne veut pas dire qu'il soit un dilettan
te ; s'il se considère comme en charge des questions relatives à la société,
cela ne veut dire, ni qu'il est là pour tenter d'amortir par un « traitement
social » approprié les chocs du Progrès, ni moins encore pour étudier, dans
le but de la faciliter, l'adaptation de la société à ce que l'on appelle quelquef
ois « le monde moderne » comme si le monde, celui qui évolue, était une
chose, et que la société en fût une autre. Cependant, on constate que ces
contre-sens sont fréquemment commis...
Tout à l'inverse, ce qui légitime l'approche développée dans ce texte est
le droit imprescriptible que se donne le sociologue de considérer l'ensemble
des phénomènes comme un tout, produit par la société et qui engendre donc
un certain nombre de conséquences en retour, en boucle, d'effets de feed
back comme on dit en anglais ; ceci suppose deux attitudes initiales absolu
ment majeures, sans lesquelles aucune réflexion sur la société - qu'on
l'appelle ou non sociologie - n'est possible. Ce sont, premièrement, le
renoncement à toute espèce de transcendentalité, c'est-à-dire à toute forme
de pensée ou à tout système de valeurs ou de postulats qui domineraient
absolument l'homme, même s'ils avaient été antérieurement produits ou
reconnus par lui, et qui constitueraient ainsi, de fait sinon même de droit, un
nouveau « ciel des idées » ; en second lieu, le refus de considérer l'histoire
comme un ensemble continu et linéaire, affecté tacitement d'une cumulativité
de ses effets estimés positifs, et servant de repère à l'enregistrement progress
Bernard POCHE est chercheur au if, à l'« affichage » dans la « conscience universelle », des valeurs évoquées
CNRS, et il fait partie de l'équipe ci-dessus. Il ne serait peut-être pas inutile de présenter ces deux attitudes, CERAT à l'Université Pierre Mendès qualifiées ici d'a-sociologiques, comme les conséquences directes du travail France (Grenoble). Cet article reprend
le texte d'une communication présentée de laïcisation que les Lumières avaient entrepris sur la pensée théologique
lors du colloque « Autoroutes de sans en changer en rien la nature, aboutissant ainsi à jeter les bases d'une l'information et territorialités : véritable « métaphysique sociale » que le xixe siècle ne fera que structurer, et convergences technologiques et
divergences sociologiques » organisé dont nous portons encore le poids. Mais ceci nous emmènerait trop loin. par l'Association Canadienne- Revenons donc à notre sujet et commençons par jeter les bases de la Française pour l'Avancement des
question telle que, selon moi, elle se pose en face de l'approche socioloSciences à Chicoutimi (Québec),
du 22 au 26 mai 1995. gique. Je ne vais pas m'efforcer ici de rechercher s'il y a un bon ou un
21 FLUX n°24 Avril -Juin 1996
mauvais usage de ce que j'appelle le processus d'infor duisent de façon massive la problématique du simulacre
mation généralisée, ou de mise en communication génér et de la simulation, selon l'expression de Baudrillard1.
alisée, non plus qu'examiner s'il entraîne un accroiss Mais ce ne sera pas le coeur de mon sujet. Il s'agit donc
ement des écarts sociaux entre groupes privilégiés ou bien de rapport à l'information ; car l'aspect connexion,
non, pour la bonne raison que ces approches, sans que courrier électronique, etc., ne me paraît pas fondament
je veuille les invalider, se situent néanmoins très en aval al, ou plutôt me paraît n'en constituer qu'un aspect
de la démarche que je me propose de suivre ; que cette annexe, même s'il peut apparaître chronologiquement
dernière, comme une question préalable, me paraît comme un élément antérieur. Après tout, il existait déjà
rigoureusement indispensable ; et qu'il faut bien un jour le télégraphe, le téléphone, la poste aérienne, la téléco
ou l'autre s'y attaquer. Cette démarche est la suivante : pie ; on ne peut dire que notre monde était privé de
premièrement, quelle est la nature sociale fondamentale moyens de communiquer avec autrui avant le « miracle
du processus en question, et deuxièmement peut-on, une Internet ».
fois cette nature établie et en conséquence, le considérer J'articulerai mon exposé en deux temps, qui, à vrai
comme admissible sans réserve ou avec des réserves dire, ne sont pas totalement distincts et même se ren
mineures ? Ou doit-on au contraire être nettement réser voient en miroir de l'un à l'autre, mais dont chacun fait
ressortir un aspect différent. Un premier stade sera ce vé, voire plus, à son endroit ? Car rappelons-le une der
que je développerai comme correspondant à une décon- nière fois, pour que les choses soient bien claires ; il ne
saurait être question, pour un sociologue, de considérer textualisation de l'information donnée comme dispo
cette « marée » informationnelle et communicationnelle nible, laquelle a pour corollaire une dématérialisation,
comme historiquement inévitable, voire, pire encore, c'est-à-dire une dé-réalisation du monde social qui a naturelle. Rien n'est, dans l'ordre societal, natur produit cette information (on voit que le simulacre n'est
el non plus qu'inévitable ; ce qui advient et se dévelop pas loin). Le second temps

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