La gnose évolutionniste - article ; n°1 ; vol.49, pg 11-41
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Description

Communications - Année 1989 - Volume 49 - Numéro 1 - Pages 11-41
31 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Carlo Formenti
Dominique Férault
La gnose évolutionniste
In: Communications, 49, 1989. pp. 11-41.
Citer ce document / Cite this document :
Formenti Carlo, Férault Dominique. La gnose évolutionniste. In: Communications, 49, 1989. pp. 11-41.
doi : 10.3406/comm.1989.1735
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1989_num_49_1_1735Carlo Formenti
La gnose évolutionniste
Matière, mémoire, oubli
chez Bergson et dans les sciences de la complexité
/. Henri Bergson : matière, mémoire, oubli.
Dans Pavant-propos de Matière et Mémoire, Bergson définit le sou
venir comme le point d'intersection entre l'esprit et la matière, et
prend pour objet de son analyse un genre d'existence qui « est plus
que ce que l'idéaliste appelle une représentation, mais moins que ce
que le réaliste appelle une chose ' ». Cette existence qui se situe à mi-
chemin entre la chose et la représentation est Vintage. Bergson défi
nit la matière et l'univers entier comme un ensemble d'images, et il
affirme que, dans cet ensemble, tout se passe comme si « rien ne se
pouvait produire de réellement nouveau que par l'intermédiaire de
certaines images particulières, dont le type m'est fourni par mon
corps 2 ».
Sont ainsi définis deux ordres de phénomènes : d'un côté, la
matière en tant qu'ensemble d'images et, de l'autre, ces mêmes
images rapportées à l'action possible d'une certaine image détermi
née ; et le rapport entre ces deux ordres constitue, selon Bergson, le
problème irrésolu réalisme et idéalisme, ou entre matérialisme
et spiritualisme, que l'on peut résumer par la question suivante :
D'où vient que les mêmes images peuvent entrer à la fois dans
deux systèmes différents, l'un où chaque image varie pour elle-
même, et dans la mesure bien définie où elle subit l'action réelle
des images environnantes, l'autre où toutes varient pour une seule,
et dans la mesure variable où elles réfléchissent l'action possible de
cette image privilégiée A ?
En partant de cette question, Bergson s'interroge sur les conditions
d'émergence de la conscience, d'un noyau producteur de sens dans le
11 Carlo Formenti
monde ; le problème qu'il pose est celui de l'émergence d'une image
capable non seulement dinteragir avec les autres, mais aussi de se
référer à elle-même, c'est-à-dire d'assumer l'interaction en tant que
présupposé de variations intentionnelles (relations entre perception
et action).
Du point de vue du réalisme matérialiste (comme nous le verrons
mieux plus loin en analysant l'approche réductionniste en neurobiol
ogie), il s'agit ici d'un pseudo-problème : celui des conditions
d'émergence de la conscience est en effet destiné à se résoudre dans la
mesure où la science est à même de rendre compte des processus évo
lutifs qui déterminent l'organisation, les fonctions et la structure de
l'appareil neuro-cérébral. Intentionnalité et conscience se manif
estent comme des épiphénomènes d'un type particulier de percep
tion : celle d'un organe - le cerveau - qui est doté de la capacité de
percevoir sa propre activité de perception. Ce « type d'images parti
culières qui m'est fourni par mon corps », dont parle Bergson, ne se
distingue des autres images qui constituent le monde matériel qu'en
raison de sa qualité particulière « réfléchissante ». Le corps est un
miroir et le cerveau agit comme un autre miroir placé en face du pre
mier de façon que les deux surfaces réfléchissantes, situées l'une en
face de l'autre, engendrent les fantasmagories de la conscience.
Cette réunification du monde ne peut donc se produire qu'en effa
çant de celui-ci toute trace d'intentionnalité. La métaphysique du
réalisme matérialiste construit un monde d'« affects » qui diffèrent
exclusivement par degré, non par nature.
La métaphysique de Bergson se place aussi à un point de vue évo-
lutionniste, dont la perspective apparaît cependant totalement ren
versée : le point de départ n'est pas l'affect, mais bien plutôt l'action.
La conscience n'émerge pas de l'affinement croissant de la percept
ion, comme produit de déterminismes de plus en plus complexes et
intriqués, mais elle est au contraire le résultat d'une absence de
détermination. L'affinement de la perception est le corollaire de la
part croissante d'indétermination, de la « liberté de choix » dont
jouissent les êtres vivants. Au fur et à mesure que se forment, dans le
monde, des noyaux la perception s'ouvre pour en
mesurer l'étendue ; la perception doit conquérir l'espace dans la pro
portion exacte où l'action doit disposer du temps et contrôler un ave
nir contingent.
A l'extension de la maîtrise de la perception sur l'espace, corre
spond le travail de contraction du temps accompli par la conscience.
En effet, cette dernière, étant appelée à choisir entre des actions pos
sibles en fonction d'un avenir contingent, doit nécessairement être
12 La gnose évolutionniste
infiniment plus « pauvre » que les interactions qui constituent n'im
porte quel point matériel inconscient :
Percevoir toutes les influences de tous les points de tous les corps
serait descendre à l'état d'objet matériel. Percevoir consciemment
signifie choisir, et la conscience consiste avant tout dans ce disce
rnement pratique "*.
Il y a un rapport directement proportionnel entre, d'une part, la
croissance de l'indétermination, qui se développe conjointement avec
l'évolution des êtres vivants, l'accroissement et l'affinement de leurs
fonctions, et, d'autre part, la nécessité de supprimer toutes les parties
des objets auxquelles ces fonctions ne correspondent pas.
Mais si le développement de la conscience est mis en relation avec
la contingence qui résulte de la liberté croissante d'action, alors
« l'indétermination des actes à accomplir exige [...], pour ne pas se
confondre avec le pur caprice, la conservation des images perçues 5 ».
Aussitôt après avoir posé la dimension temporelle de la mémoire
comme conséquence du rapport entre action et contingence, Bergson
introduit sa conception dualiste selon laquelle, entre perception pure
et souvenir, il y a une différence non pas d'intensité mais de nature.
Le dualisme découle nécessairement de la thématisation berg-
sonienne de la perception subjective du temps comme durée :
Le passé immédiat, en tant que perçu, est [...] sensation, puisque
toute sensation traduit une très longue succession d'ébranlements
élémentaires ; et l'avenir immédiat, en tant que se déterminant,
est action en mouvement. Mon présent est donc à la fois sensation
et mouvement ; et puisque mon forme un tout indivisé, ce doit tenir à cette sensation, la prolonger en action 6.
Nous avons vu que la perception, le monde spatial des objets,
s'étend en fonction de l'indétermination croissante introduite dans le
monde par les êtres vivants, mais l'aspect proprement subjectif de la
perception n'appartient pas à la dimension de l'espace, mais bien
plutôt à celle du temps : les problèmes relatifs au sujet et à l'objet, à
leur distinction et à leur union, doivent être posés en fonction du
temps.
La contraction opérée par la mémoire ne permet pas de concevoir
le passé comme une sensation « affaiblie » ; le passé, le souvenir pur,
ne peut pas être pensé comme sensation, mais seulement comme vir
tualité :
13 Carlo Formenti
De mon passé, cela seul devient image, et par conséquent sensa
tion au moins naissante, qui peut collaborer à cette action [...] ,
mais, dès qu'il devient image, le passé quitte l'état de souvenir pur
et se confond avec une certaine partie de mon présent. Le souvenir
actualisé en image diffère [...] profondément de ce souvenir pur.
L'image est un état présent, et ne peut participer du passé que par
le souvenir dont elle est sortie. Le souvenir, au contraire, impuis
sant tant qu'il demeure inutile, reste pur de tout mélange avec la
sensation, sans attach

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