La question foncière aux Indes Néerlandaises, enjeux économiques et luttes politiques (1619-1942) - article ; n°3 ; vol.58, pg 73-88
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La question foncière aux Indes Néerlandaises, enjeux économiques et luttes politiques (1619-1942) - article ; n°3 ; vol.58, pg 73-88

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Description

Archipel - Année 1999 - Volume 58 - Numéro 3 - Pages 73-88
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Frédéric Durand
La question foncière aux Indes Néerlandaises, enjeux
économiques et luttes politiques (1619-1942)
In: Archipel. Volume 58, 1999. pp. 73-88.
Citer ce document / Cite this document :
Durand Frédéric. La question foncière aux Indes Néerlandaises, enjeux économiques et luttes politiques (1619-1942). In:
Archipel. Volume 58, 1999. pp. 73-88.
doi : 10.3406/arch.1999.3535
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1999_num_58_3_3535COLONISATION ET AMENAGEMENT DES ESPACES
Frédéric DURAND
La question foncière aux Indes Néerlandaises,
enjeux économiques et luttes politiques (1619-1942)
Depuis le début du XVIIe siècle, et surtout à partir du XIXe siècle, les
droits fonciers ont été profondément modifiés. Vers 1813, Thomas Stamford
Raffles a développé les impôts fonciers lors de l'occupation anglaise de Java.
Puis en 1830, van den Bosch a mis au point le «système des cultures», qui
obligeait à utiliser au moins 20% des terres de Java pour l'agriculture de ren
te et notamment le café. À partir de 1870, puis dans les années 1920, les
grands projets de loi agraire ont fortement influé sur les sociétés rurales et
sur l'éveil nationaliste. À la fin de l'époque coloniale, lorsque les Hollandais
durent quitter leur colonie, les questions foncières n'avaient toutefois pas été
tranchées et les situations inextricables qu'ils ont laissées, dans un contexte
de forte croissance démographique, sont à l'origine de nombreux troubles
sociaux, mais aussi de problèmes politiques et économiques, dont les réper
cussions se font sentir jusqu'à la crise asiatique de 1997.
1619-1870, le développement unilatéral d'un droit foncier occidental
face à des pratiques locales communautaires
Dans l'archipel indonésien, l'influence occidentale sur la gestion foncière
s'est dans un premier temps surtout exercée à Java, où s'est concentré, jus
qu'à la fin du XIXe siècle, l'essentiel de l'effort et même de la «réalité colo
niale »(!). À partir de 1619, et surtout des premières conquêtes territoriales
1. Lors de la période coloniale, toutes les terres et communautés regroupées sous le vocable
Archipel 58, Paris, 1999, pp. 73-88 74 Frédéric Durand
de 1677, la compagnie des Indes Orientales (VOC) n'a cessé d'accroître son
emprise, forçant les souverains locaux, notamment ceux de Banten et de
Mataram, à essayer de mieux contrôler les populations ou les communautés,
et à commencer à gérer les forêts en fonction de leur double fonction de
source de bois et de réserve de terres à défricher.
Dans cette première phase de colonisation par la VOC, le contrôle foncier
s'est surtout exercé à travers un monopole de la gestion des forêts de Java
(totalement réalisé en 1743), des systèmes de quota (contingenten) ou de
livraisons forcées de produits agricoles (gedwongene leveringen) par les sou
verains, ainsi que par l'octroi, à des particuliers, de domaines privés (parti
culière landerijeri) dans les zones conquises (2).
La faillite de la VOC et la reprise en main par le gouvernement néerlan
dais, à partir de 1799, a marqué une nouvelle phase dans l'approche foncière.
Le maréchal Daendels, arrivé à Java en 1808, pendant la période troublée
des guerres napoléoniennes en Europe, renforça l'emprise occidentale en
récupérant à son profit les droits de corvée des princes javanais en dévelop
pant le système des domaines privés, particulièrement au profit des exploi
tants chinois, et en entreprenant une série de grands travaux, dont la réalisa
tion de la «grande route» qui traverse l'île d'est en ouest, et qui a favorisé
l'extension des superficies cultivées 0). Toutefois, la première mutation
majeure a été le développement des impôts fonciers, en 1813, par l'Anglais
Thomas Stamford Raffles. Des systèmes d'impôts existaient à Java avant
l'arrivée des Européens, mais ils s'exerçaient sur l'ensemble des communaut
és, et leur montant était généralement assez peu élevé. Il existait par ailleurs
des systèmes de « villages francs » (desa perdikan), qui étaient dispensés de
taxes par les souverains.
Afin d'en accroître le montant, à partir de la conception erronée, ou en
tout cas exagérée, que les souverains «possédaient» la terre et donc que les
paysans lui devaient une rémunération, Raffles a développé un système
d'impôts individuels (landreni) et non plus communautaire (4). De plus, pour
la partie de l'île à l'est de Surabaya, la propriété privée a été largement favo-
des «Indes Néerlandaises» n'étaient pas soumises aux mêmes lois. Certaines dépendaient de
la couronne néerlandaise, d'autres de souverains locaux, d'autres encore de particuliers ou de
communautés. Par ailleurs hormis Java et des territoires relativement limités des îles exté
rieures, la majeure partie de l'archipel n'a été véritablement contrôlée par les Hollandais qu'à
la fin du XIXe siècle, soit seulement pendant une cinquantaine d'années.
2. Kano (H.), 1977, p. 33.
3. Lombard (D.), 1990, vol. 1, p. 63.
4. Raffles (T. S.), 1817/1994, p. 137.
Archipel 58, Paris, 1999 La question foncière aux Indes Néerlandaises 75
risée. À Java, ces mesures, ainsi que le développement de propriétés possé
dées par des Européens ou des Chinois, ont vraisemblablement favorisé la
tendance individualiste du droit foncier, au détriment de la gestion collective.
Toutefois, cette tendance a été rapidement contrebalancée par plusieurs
autres mesures. Avec le retour du contrôle néerlandais, la gestion collective a
été de nouveau considérée comme la norme générale, notamment avec des
décrets coloniaux en 1818 et enl819, sur la «redistribution équitable» des
terres entre les villageoise5). Ces mesures visaient à faciliter la collecte des
impôts fonciers qui pouvaient être, vers 1830, huit à neuf fois plus élevés
que ceux éventuellement demandés auparavant par les souverains (6). Mais la
pratique beaucoup plus contraignante du travail forcé, mise en œuvre dans le
cultuurstelsel ou « système des cultures », a eu un impact encore plus import
ant. Ce système, mis au point en 1830 par le gouverneur général van den
Bosch, obligeait les villages à accorder au gouvernement colonial 20 % des
terres cultivables et la même proportion de travail sous forme de corvées,
dans le but de développer les cultures commerciales et principalement le
café, l'indigo et le sucre. Il était assorti de primes aux notables javanais, qui
devenaient ainsi les garants et les contrôleurs du système, avec un zèle qui
excéda parfois les demandes des Hollandais. En pratique, dans certaines
régions, un tiers, voire plus de la moitié des terres fut aliéné et les corvées
eurent parfois tendance à excéder ce qui était prévu (7>. Cela amena les vil
lages à renforcer les pratiques collectives d'usage des terres et de culture,
afin d'éviter les famines, car les corvées portaient essentiellement sur ceux
qui possédaient la terre.
Juridiquement, le renforcement de cette emprise coloniale s'est traduit
par la promulgation d'un certain nombre de textes et notamment l'ordonnan
ce n° 27 de 1834, qui fixait les modalités d'enregistrement des terres, et par
des règlements qui interdisaient les populations isolées en 1844(8).
S'il a été vanté par bien des observateurs occidentaux de l'époque pour sa
réussite en termes économiques, le système des cultures posait toutefois un
certain nombre de problèmes. Tout d'abord, il s'est traduit par un appauvris
sement considérable et parfois un véritable asservissement des paysans java
nais. Cette situation a amené une partie de l'opinion métropolitaine à s'inter
roger sur le caractère inhumain de ces pratiques, notamment après le succès
5. Boomgaard (P.), 1989, p. 7.
6. Onghokham, 1979, p. 9.
7.Aass(S.), 1980, p. 118.
8. Effendi Peranggin, 1986/1989, p. 21.
Archipel 58, Paris, 1999 76 Frédéric Durand
du roman engagé

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