La révolte des bonnets rouges et l opinion internationale - article ; n°4 ; vol.82, pg 443-458
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Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest - Année 1975 - Volume 82 - Numéro 4 - Pages 443-458
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Publié le 01 janvier 1975
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Jean Bérenger
La révolte des bonnets rouges et l'opinion internationale
In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 82, numéro 4, 1975. pp. 443-458.
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Bérenger Jean. La révolte des bonnets rouges et l'opinion internationale. In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome
82, numéro 4, 1975. pp. 443-458.
doi : 10.3406/abpo.1975.2791
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1975_num_82_4_2791révolte des bonnets rouges La
et l'opinion internationale.
par J. BERENGER
Devant la conspiration du silence faite en haut lieu sur la révolte de
Basse-Bretagne (1), il est intéressant de noter que les puissances étrangères
manifestaient un intérêt certain pour le mouvement. Il ne faut pas oublier que
la France est alors en guerre avec une coalition européenne que dirige la
Hollande et qui regroupe l'Espagne, l'Empereur, l'Electeur de Brandebourg,
l'Electeur palatin, elle ne peut guère compter que sur la Suède, l'Electeur de
Bavière .et le roi d'Angleterre, ce qui l'oblige à faire de gros efforts militaires
(2). En 1675, l'ambassadeur de Venise à Paris fait observer à son gouverne
ment que la France ne pourra disperser son effort à l'infini, car elle est obli
gée d'aider la Suède, de maintenir une armée aux Pays-Bas, une autre sur la
Meuse, une troisième en Lorraine et en Alsace le long du Rhin, avec des gar
nisons considérables dans toutes les places et des corps d'armées mobiles
pour intervenir où cela est nécessaire ; en outre elle ne laissera pas la Cata
logne sans troupes, encore qu'elle sache que l'Espagne devra penser davanta
ge à Messine qu'à cette dernière contrée (3). A ce moment, l'effort de guerre
français représente l'entretien de plus de 200.000 hommes de troupes réguliè
res, sans compter une armée navale considérable. C'est pourquoi nos adver
saires pouvaient légitimement tenter de faire naftre une diversion à l'intérieur
du royaume, afin de disperser encore l'effort de guerre français. Même auvSiè-
cle de l'absolutisme monarchique, les puissances tentent de susciter des ré
voltes chez l'adversaire et à tout le moins d'encourager les sujets qui se
sont rebellés contre leur prince. Aussi l'histoire du siècle est-elle remplie
de tels mouvements ; vers 1640, la diplomatie française a suscité de nom
breux ennemis aux Habsbourg ; avec les Suédois elle a appuyé le prince de
Transylvanie Georges 1° Rakoczi qui a provoqué à son tour une nouvelle ré
volte de la noblesse hongroise contre l'Empereur Ferdinand III. Mais surtout
elle a mis en péril l'hégémonie des Habsbourg dans la péninsule ibérique ;
elle a, d'autre part, favorisé au Portugal la rébellion des Bragance qui mit fin
à l'union personnelle entre Espagne et Portugal ; elle a encouragé la révolte
des Catalans contre la centralisation castillane ; un peu plus tard, en 1647,
Mazarin appuyait, assez mollement il est vrai, la révolte des Napolitains con-
(1) Nous supposons comme l'ensemble des faits, dont le meilleur exposé a été fait par
POCQUET du HAUT JUSSE : Histoire de Bretagne, tome V, Rennes 1913 pages
480-534, reprenant l'ouvrage classique d'A. de la Borderie : la révolte du Papier
timbré en Bretagne Saint-Brieuc 1884 et donnant une abondante bibliographie. La
question a été reprise par Roland MOUSNIER : Fureurs paysannes Paris 1967. Il
est assez intéressant de noter que ni la Gazette, ni le Mercure français n'ont fait
état de la révolte des Bonnets rouges.
(2) Gaston ZELLER, Histoire des Relations internationales, tome III. pp. 40-45 Paris
Hachette 1955.
(3) Ascanio GIUSTINIANI au Sénat de Venise, 6 mars 1675, Venise. Archivio di Stato,
Senato, dispacci di Francia, filza 157 444
tre la fiscalité et l'administration des Habsbourg d'Espagne. Rien d'étonnant
si en 1648 le gouvernement de Madrid compta beaucoup sur la Fronde pour
venir à bout de la France et obtenir une paix favorable. Il s'ensuivit une véri
table jurisprudence : un gouvernement légitime n'appuyait les rebelles qu'en
cas de conflit déclaré. Une fois la paix revenue, il devait les abandonner, au
moins en apparence. En fait, les révoltés seront dorénavant des pions supplé
mentaires sur le jeu de l'échiquier international ; ils servaient les intérêts du
prince étranger qui les appuyait et celui-ci les abandonnait sans vergogne si
son intérêt le lui dictait; Louis XIV s'en eat longuement expliqué dans ses
Mémoires (4).
En 1675, celui-ci soutient deux révoltes chez ses adversaires, l'une en
Hongrie contre le Habsbourg de Vienne, l'autre en Sicile contre le Habsbourg
de Madrid. Dans les deux cas, il utilise les circonstances au mieux des inté
rêts de la France, sans qu'il soit permis d'affirmer qu'il les a provoquées. En
Hongrie, il s'agit d'une insurrection de la noblesse, provoquée par la politique
absolutiste, anti-protestante et antinationale de Léopold 1° (5). La brutale
répression qui s'abattit sur la Hongrie royale, après l'échec de la Conjuration
des Magmats, produisit une série de réactions en chaîne, l'insurrection kuruc,
dont le gouvernement français finit par profiter à l'instigation de son ambas
sadeur à Varsovie, le marquis de Béthune (6), Quant à l'affaire de Sicile, il
s'agit essentiellement de la rébellion du patriciat de Messine, qui administ
rait une véritable république autonome à l'intérieur du royaume. Le Sénat de
Messine était demeuré fidèle à la Monarchie d'Espagne lors de la révolte de
Masaniello, mais le gouverneur espagnol, Luis de Hoyos, a joué la plèbe
contre le patriciat et dès 1671 la diplomatie vénitienne s'attendait à une ré
volte de la métropole sicilienne. Les insurgés firent appel à la France à
l'automne 1674 et Louvois vit là une diversion "qui donnerait occasion au roi
catholique d'employer une partie de ses forces inutilement" (7). Si Louis XIV
se contenta d'envoyer des subsides aux insurgés hongrois (dans la mesure où
les réticences polonaises l'empêchaient d'aider plus efficacement les Mal
contents), il envoya immédiatement une escadre de six vaisseaux à Messine
qui, sous le commandement de Valbelle, força le blocus espagnol le 30 décem
bre 1674 et introduisit des renforts dans la. place. Les chancelleries europé
ennes ne s'y trompaient pas : un succès français en Sicile eût amené un sé
rieux bouleversement de l'équilibre en Méditerranée et l'ambassadeur de Veni
se à Paris suivait de près l'évolution de la situation, ainsi que l'envoi de
renforts, tant du côté français que du côté espagnol. (8)
(4) Mémoires de Louis XIV pour servir à l'instruction du Dauphin, publiés par Dreyss
en 1860 dans les Documents inédits pour servir à l'Histoire de France.
(5) Nous nous permettons de renvoyer à notre article du Bulletin de la Société d'His
toire du protestantisme français : "La Contre-réforme en Hongrie au XVIIe siècle"
1974, pp. 1 à 32, ainsi qu'à un ouvrage en préparation : La Conjuration des Magmats,
à paraître aux Editions de l'Académie des Sciences de Hongrie.
(6) Jean BERENGER : "Le royaume de France et les Malcontents de Hongrie, Contri
bution à l'étude des relations entre Louis XIV et Imre Thokoly 1678-1689" dans
Revue 6' Histoire diplomatique, 1973, pp. 1-43.
(7) Charles de LA RONCIERE : Histoire de la Marine française, Tome V, p. 580 sqq.
(8) La France obtint de Venise que celle-ci respecte une stricte neutralité etrefuse le
passage à des troupes allemandes qui, venues de Milan, se seraient embarquées à
Trieste pour la Sicile. Dépêche d'A. Giustinian 1675, Dispacci di Francia, filza
157. LEMOINE : La révolte des Bonnets rouges, page 169. 445
Dans ces conditions peut-on s'étonner que l'opinion internationale se soit
intéressée à la révolte des Bonnets rouges ? Une province "frontière", la
Bretagne, se trouvait en rébellion ; par sa situation géographique, elle était
apte à recevoir l'aide étrangère, à un moment où l'essentiel des forces armées
royales était engagé sur des théâtres d'opérations extérieurs. L'insurrection
bretonne pouvait être à tout l

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