Le comte-évêque. - article ; n°1 ; vol.5, pg 8-36
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Description

Bibliothèque de l'école des chartes - Année 1844 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 8-36
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1844
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Hercule Géraud
Le comte-évêque.
In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1844, tome 5. pp. 8-36.
Citer ce document / Cite this document :
Géraud Hercule. Le comte-évêque. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1844, tome 5. pp. 8-36.
doi : 10.3406/bec.1844.451766
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1844_num_5_1_451766T
LE COMTE-ÉVÈQUE.
Lorsque la féodalité se constitua définitivement par l'appro
priation héréditaire des bénéfices, le clergé, déjà puissant et
riche à cette époque, prit naturellement sa place dans la
nouvelle organisation sociale. Les évêques , les abbés , en leur
qualité de feudataires, eurent, comme les seigneurs séculiers,
des suzerains et des vassaux, et cette introduction de la féodal
ité dans l'Église ou de l'Eglise dans la féodalité , fut au sein du
catholicisme comme un germe de dissolution qui en prépara
lentement la ruine , et qui l'aurait inévitablement consommée
sans les héroïques efforts de la papauté. Mon projet n'est point
de discuter longuement cette proposition : je veux seulement ra
conter des faits , en laissant au lecteur le soin d'en tirer les con
séquences. A l'époque où je me place, la féodalité commençait à
déchoir , et les évêques tenanciers de terres féodales n'étaient
plus tenus de satisfaire en personne à l'obligation du service
militaire; il leur était loisible de se faire remplacer par des lieu
tenants. Malgré cette faculté, beaucoup de prélats aimèrent mieux
s'acquitter par eux-mêmes des devoirs attachés à leur dignité sé
culière ; et pourtant , chose étrange , parmi tant d'évêques guer-
royeurs, un seul semble avoir attiré sur sa tête toutes les cen
sures de l'histoire ; c'est celui dont je vais essayer d'esquisser la
vie (1). Je tâcherai de n'être pour lui ni un accusateur ni un pa
négyriste ; car, s'il est injuste d'imputer au caractère d'un homme
des fautes qui sont le résultat inévitable de sa position , il serait
contraire aux règles de la morale d'approuver, dans un évêque,
des actions incompatibles avec l'esprit et la dignité du sacerdoce.
Mais il est permis de montrer les vices d'un régime social qui
(!) M. Hurter, qui connaît à fond le treizième siècle, appelle notre héros le prélat
le plas belliqueux de son temps; nos historiens modernes se sont à peine occupés de
cet évêque, qui a cependant joué un assez grand rôle pendant tout le règne de Philippe
Auguste. Parmi les circonstances de sa vie, ils n'en ont signalé que deux : sa malheu
reuse expédition contre les routiers de Richard d'Angleterre, et les redoutables coups
de sa lourde massue à la bataille de Bouvines. 9
faisait d'un évèque un chef de partisans, et qui , mêlant dans une
confusion funeste le pouvoir temporel et l'autorité spirituelle ,
menait insensiblement l'Église à sa perte. C'est , je le répète , l'
unique but que je me sois proposé en entreprenant ce récit.
Roger Ier , trente-neuvième évêque de Beauvais , élu en 998 ,
reçut, en vertu d'un arrangement conclu avec son frère Eude,
comte palatin de Champagne, l'investiture du comté de Beauv
ais. Il fit don de ce fief à son église , et cette donation fut con
firmée en 1015 par le roi Bobert (1). Depuis cette époque, le
comté et l'évèché de Beauvais restèrent indissolublement unis ,
et les évêques successeurs de Roger portèrent à la fois les deux
titres de comte et d'évêque. Vers la fin du douzième siècle ou
au commencement du siècle suivant , le siège episcopal de Beauv
ais reçut un nouveau degré d'importance et d'éclat dans la per
sonne de Philippe de Dreux , qui en était le cinquante-quatrième
titulaire. Ce fut lui, on le présume, et son origine royale suffit
pour autoriser cette conjecture , qui le premier, grâce à la faveur
de Philippe-Auguste , réunit les prérogatives de la pairie à la
double dignité de comte et d'évêque. Il est formellement qualifié
de pair dans l'arrêt par lequel , en 12 1 6 , la cour du roi, présidée
par , maintint en possession de ses États Thi-
baud le Posthume, comte de Champagne, sous la tutelle de la
comtesse Blanche sa mère (2).
Philippe était fils de Bobert le Grand, premier comte de Dreux.,
frère du comte Robert II , petit-fils du roi Louis le Gros , neveu
de Louis le Jeune et cousin germain de Philippe-Auguste. Agnès
de Braine, sa mère, ayant épousé Robert le Grand comte de
Dreux, l'an 1 152 , on peut rapporter à l'année suivante la nais
sance de Philippe , qui , par conséquent , était âgé d'environ
vingt-deux ans lors de la mort de Barthélemi de Montcornet ,
cinquante-troisième évêque de Beauvais , arrivée le 17 mai 1 1 75.
Le siège métropolitain de Reims, d'où dépend l'évèché de Beauv
ais , était alors occupé par Henri de France , frère de Louis VII ,
oncle paternel de Philippe , et qui lui-même avait précédé Bar
thélemi de Montcornet dans l'administration du diocèse de Beauv
ais. Fortement appuyé par le crédit du primat son parent, Phi
lippe de Dreux, malgré sa jeunesse, son inexpérience et ses
(1) Gall. clir. , t. IX, p. 692, 706, et t. X, in sir., col. 243.
(2) D. Brial , .Disqtiis. de origine Pareriarum Franciœ, dans le liée, des hist, de
Fr. , t. XVII, p. xxvj. 10
défauts, parvint à se faire élire évêque (l). On ignore la date pré
cise de cette élection ; seulement , elle ne peut être ni antérieure
au 17 mai 1175, époque de la vacance du siège, ni postérieure
au 1 3 novembre de la même année, qui fut le dernier jour d'Henri
de France, archevêque de Beiras.
Comment l'élu de Beauvais avait-il employé les vingt-deux pre
mières années de sa vie? Sur cette question , nous en sommes ré
duits à des conjectures. Il est néanmoins probable que sa jeu
nesse avait été plus occupée d'exercices militaires que d'études
ecclésiastiques , et ce fut sans doute pour lui laisser le temps de
compléter son éducation cléricale , qu'on différa de quatre années
sa consécration (2). Avant de l'avoir reçue, Philippe entreprit
un pèlerinage en terre sainte. Il partit l'an 1 178 , avec Pierre de
Courtenai, son oncle paternel, et une troupe décroisés commandée
par Louis, comte de Troyes, fils de Thibaud VIII, comte de
Blois (3). Nous n'avons aucun détail sur la part que prit Philippe
à cette expédition. Les frères Sainte-Marthe (4) et Duchesne(5)
rapportent, il est vrai, qu'il tomba dans les mains des Sarrasins
et qu'il fut conduit au vieux Caire, où il racheta sa liberté. Mais
le père Anselme (6) et les auteurs du nouveau Gaïlia Christiana (7)
reculent cet événement jusqu'à la croisade de 1190, à laquelle
Philippe de Dreux prit aussi une part très-active. Du reste , ni
les uns ni les autres n'appuient ce fait d'aucune citation : Loysel
a été plus exact ; il allègue (8) , à ce sujet , le témoignage de Cé-
saire, moine d'Heisterbach, mais il ne dit même pas que Phi
lippe ait fait deux fois le voyage d'Orient.
Sans révoquer en doute le fait en lui-même , on peut au moins
affirmer que la captivité de l'évêque de Beauvais ne fut pas lon
gue. A peine le perdrons-nous de vue quelques instants pendant
toute la durée de son second pèlerinage. Quant au premier , com-
(1) Albéric, dans le Bec. des Hist, de Fr. , t. XVIII, p. 745 с
(2) Un clerc ne peut être promu au sacerdoce avant l'âge de 25 ans. Il est vrai que
l'Église n'est pas avare des dispenses d'âge; il faut cependant pour les obtenir plusieurs
conditions que ne réunissait pas assurément l'élu de Beauvais.
(3) Guill. de Tyr., 1. XXI, ch. 30.
(b) Gall, chr. velus, t. Il, p. 390.
(5) Hist, de la maison de Dreux, p. 3.4.
(6)généal. , t. II, p. 260.
(7) T. IX, col. 732.
(H) Mém. de Vévesché el évesqves de Beauvais. 11
inencé en 1 178 , il était terminé l'année suivante. Le Ier novem
bre 1 179 , Philippe de Dreux, encore simple élu de Beauvais , as
sistait

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