Le gisement moustérien du château d'eau à Corbehem (Pas-de-Calais) - article ; n°2 ; vol.22, pg 371-389

Alain Tuffreau

Description

Gallia préhistoire - Année 1979 - Volume 22 - Numéro 2 - Pages 371-389
19 pages

Informations

• Publié par: GALLIA0
• Publié le: 01 janvier 1979
• Nombre de lectures: 30
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Alain Tuffreau
Le gisement moustérien du château d'eau à Corbehem (Pas-de-
Calais)
In: Gallia préhistoire. Tome 22 fascicule 2, 1979. pp. 371-389.
Citer ce document / Cite this document :
Tuffreau Alain. Le gisement moustérien du château d'eau à Corbehem (Pas-de-Calais). In: Gallia préhistoire. Tome 22 fascicule
2, 1979. pp. 371-389.
doi : 10.3406/galip.1979.1626
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/galip_0016-4127_1979_num_22_2_1626NOTES
LE GISEMENT MOUSTÉRIEN DU CHATEAU D'EAU
A CORBEHEM (Pas-de-Calais)
par Alain TUFFREAU
Les gisements moustériens sont particuli remarqua la présence de silex taillés et d'es
èrement nombreux dans les régions lœssiques quilles osseuses dans les déblais d'un terrass
du Nord de la France (R. Felix, 1968; ement destiné à la construction d'un nouveau
château d'eau, sur la commune de Gorbehem, R. Prévost, 1958; A. Tufîreau, 1976b) et de la
Picardie (V. Gommont, 1910; 1913; A. Tufîreau, le long de la route de Gouy-sous-Bellonne
1976a). Malheureusement, les industries ont (Feuille topographique 1/25 000e, Douai n° 1-2;
généralement été remaniées par des phéno coordonnées Lambert : x = 651,24; y =
mènes périglaciaires. Hormis le niveau inférieur 292,76; z =32). M. J. Guillouet, conservateur
du gisement moustérien de Saint-Just-en- du Musée de Douai, contacté par l'inventeur,
Ghaussée (A. Tuffreau, 1974, 1977b), où nous avertit aussitôt. Une fouille de sauvetage
H. Kelley réunit une abondante série, les fut menée du 12 au 30 juin 1973 avec l'autori
gisements en place, au sens archéologique du sation de M. R. Agache, directeur régional des
terme, sont inexistants. La découverte, à Antiquités préhistoriques et avec l'aide de
Corbehem (Pas-de-Calais), d'un site où a été MM. F. Carré, H. Décaillon, P. Demolon et
reconnu un niveau en place, « piégé » par la H. Masurel.
sédimentation lœssique, revêt donc un grand
intérêt.
Le gisement moustérien de Gorbehem se La stratigraphie. situe dans la partie septentrionale de l'Ostre-
vent qui appartient à la région limoneuse
A. Description des profils. occidentale du Nord de la France. L'épaisseur
des limons y est relativement faible (quelques Le terrassement. La stratigraphie suivante
mètres) et surtout marquée par l'ampleur que a été levée (fig. 3). De haut en bas :
peuvent prendre les formations weichséliennes
1. terre végétale s'épaississant vers le n.-e. ; aux faciès variés (J. Sommé, 1969; 1976). La
épaisseur : 0,20 à 0,60 m; parcelle où fut découvert le gisement archéo
logique se localise sur le versant tourné vers la. fosses d'époque historique, vraisembla
l'est d'un léger talweg emprunté par la Petite blement, correspondant à des sépultures à
Sensée et le canal de la Sensée. inhumation qui n'ont pas livré de mobilier.
Au début du mois de juin 1973, A. Mica Un dépotoir, situé dans le secteur n.-o. du
Gallia Préhistoire, Tome 22, 1979, 2. ALAIN TUFFREAU 372
terrassement a livré quelques tessons gallo- a livré quelques outils, dont un biface, et des
romains ; éclats;
2. limon brun jaunâtre {Munsell Soil Color 5. limon jaune brunâtre (10 YR 6/6 à 5/6),
Charts : 10 YR 5/4 à 5/6), non calcaire, à à litage centimétrique constitué de lits alte
structure prismatique et revêtements argileux; rnativement limoneux à granules de craie
horizon Bt; ép. : 0,60 à 0,75 m; éparses et de lits sableux; présence de petites
cryoturbations; pendage très marqué vers le 3. limon jaune brunâtre (10 YR 6/6 à 6/8),
n.-e; ép. : 0,75 à 1,20 m; non calcaire, ép. : 0,10 à 0,30 m. Un niveau
discontinu de silex taillés est observable à la 6. limon brunâtre légèrement jaunâtre (10
partie inférieure de ce limon. Il s'épaissit vers YR 5/4 à 6/4), argileux; ép. : 0,10 m;
le n.-o. (0,08 m) avec la présence de nombreux 7. limon jaune brunâtre (10 YR 6/6 à 5/6), silex taillés, charbons de bois et débris osseux calcaire, à lits d'épaisseur centimétrique alte
calcinés1; rnativement sableux et limoneux; ép. : 0,20 à
4. limon brun jaunâtre à grisâtre (10 YR 0,30 m. Le limon 7 conserve un niveau archéo
5/4 à 5/2), non calcaire; ép. : 0,08 m. Ce limon logique qui, dans le secteur n.-e. du sondage S2,
n'est plus observable dans la partie n.-o. du repose directement sur le limon 9 sous-jacent;
terrassement; 8. cailloutis discontinu, constitué de galets
5. limon argileux brun foncé à rouge jau landéniens et de silex fracturés et roulés;
nâtre (7,5 YR 5/6 à 5 YR 5/6), non calcaire,
9. limon argileux, non calcaire, rouge jaufendillé; ce limon est visible sur une épaisseur
nâtre (5 YR 5/6) à passées grisâtres. Ce limon de 0,55 à 0,60 m.
a été reconnu sur 0,60 m d'épaisseur.
Le sondage SI. La stratigraphie est la même
que dans le terrassement du nouveau château
B. Interprétation. d'eau. Cependant, le limon brun jaunâtre à
grisâtre 4 s'épaissit (ép. : 0,20 m). Il est jalonné La séquence stratigraphique observable dans à la partie supérieure par quelques rares silex le terrassement du nouveau château d'eau est roulés et galets landéniens. L'industrie lithique, surtout marquée par la présence d'un limon incluse dans le limon jaune brunâtre 3, appar argileux brun foncé, fendillé, qui, par sa positient à plusieurs niveaux difficilement diffé-
tion et ses caractéristiques, correspond à renciables (fig. 3). l'horizon profond d'un sol tronqué marquant
Le sondage S2. De haut en bas (fig. 4) : une pédogénèse attribuable au sol inter
glaciaire éémien, dénommé « limon fendillé » 1. terre végétale, horizon Ap; épaisseur :
(J. Ladrière, 1890) ou sol de Rocourt (F. 0,40 à 0,55 m;
Gullentops, 1954). Le limon sus-jacent est 2. limon brun jaunâtre (10 YR 5/4 à 5/6), non attribuable au « limon gris » de J. Ladrière calcaire, à structure prismatique, argileux; (1890), horizon humifère du Début Glaciaire horizon Bt; ép. : 0,90 à 1 m; weichsélien que l'on peut paralléliser avec le
3. limon jaune brunâtre (10 YR 6/6 à 6/8), sol de Warneton (R. Paepe, 1966). Le complexe
non lité, calcaire; présence de poupées; ép. : formé par le « limon fendillé » et le « limon gris »
0,35 à 0,40 m; de Ladrière se retrouve dans la plupart des
4. niveau de granules de craie, discontinu, coupes de la région limoneuse orientale du
affecté par des petites fentes de gel et des Nord de la France (J. Sommé, 1971 ; J. Sommé
cryoturbations ; ép. max. : 0,01 m. Ce niveau et A. Tuffreau, 1971 ; A. Tuffreau, 1974) et de
la Belgique (R. Paepe, 1966; R. Paepe et
J. Sommé, 1970). Il est raviné dans le sondage
1. Il n'a malheureusement pas été possible d'effectuer SI par un léger cailloutis témoignant de la des prélèvements pour une datation G14 car le terrass péjoration climatique du Pléniglaciaire inféement des fondations du nouveau château d'eau a été
rieur. bétonné peu de temps après notre arrivée sur les lieux. 1
!
A CORBEHEM 373 xMOUSTÉRIEN
_spkm
' rr?»»^— — Bapaume §
1 Le gisement moustérien de Corbehem. A : principaux gisements moustériens cités, dans le cadre des faciès du
Début glaciaire weichsélien et du Pléniglaciaire moyen du Nord-Ouest de la France : 1. Holocène marin ; 2. lœss
typique calcaire ; 3. limon à doublets ; 4. limon à doublets superposé à un lœss typique calcaire ; 5. formations
limoneuses litées reposant sur le complexe de Warneton-Rocourt ; 6. formations limoneuses litées reposant sur le
complexe des sables et limons (dominante limoneuse) ; 7. formations limoneuses litées reposant sur le complexe des
sables et limons (dominante sableuse) (d'après les travaux de J.-P. Lautridou et de J. Sommé). B : contexte régional :
1. région limoneuse occidentale; 2. région limoneuse orientale; 3. région de transition; 4. holocène marin (d'après
les travaux de J. Sommé). G : croquis de situation ; le gisement est indiqué par un triangle.
minium 'IIP
•1 1
▲ 3
I
château d'eau
Is! nnii
-terrassement- -S1-
route de Gouy
2 Plan des fouilles. 1, parcelle du nouveau château
d'eau ; 2