Les activités d un rassembleur de terres en pays de Rais vers le milieu du XVe siècle - article ; n°2 ; vol.88, pg 135-156
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Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest - Année 1981 - Volume 88 - Numéro 2 - Pages 135-156
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Publié le 01 janvier 1981
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Langue Français
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Jean-Luc Sarrazin
Les activités d'un rassembleur de terres en pays de Rais vers le
milieu du XVe siècle
In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 88, numéro 2, 1981. pp. 135-156.
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Sarrazin Jean-Luc. Les activités d'un rassembleur de terres en pays de Rais vers le milieu du XVe siècle. In: Annales de
Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 88, numéro 2, 1981. pp. 135-156.
doi : 10.3406/abpo.1981.3041
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1981_num_88_2_304135 A
LES ACTIVITÉS D'UN RASSEMBLEUR
DE TERRES EN PAYS DE RAIS
VERS LE MILIEU DU XVe SIÈCLE
par Jean-Luc SARRAZIN
La reconstruction des campagnes au lendemain de la guerre de Cent
Ans et plus généralement au sortir des crises de la fin du Moyen-Age
apparaît de plus en plus, au fil des recherches qui lui sont consacrées,
comme un épisode majeur de l'histoire rurale française (1). Par ses modali
tés, elle a conditionné, en effet, non seulement la reprise économique,
différente d'une région à l'autre, mais encore et peut-être plus profon
dément, elle a contribué au renouvellement des structures agraires et
sociales ébranlées dans la tourmente. De cette immense entreprise col
lective, les principaux artisans, anonymes le plus souvent, ont été, de
toute évidence, les paysans et les gens de métier qui, par un labeur
obstiné, ont fait reculer les friches, restauré les censives, remis en état
de marche les moulins. Toutefois d'autres catégories ont joué au XVe
siècle dans le renouveau des campagnes un rôle décisif et méritent de
retenir l'attention, d'une part ceux que l'on pourrait appeler les entrepre
neurs, qui ont pris les initiatives de repeuplement, de réorganisation des
seigneuries (2) et de promotion de telle ou telle culture, d'autre part les
prêteurs de numéraire qui ont pu favoriser ou contrarier suivant les ci
rconstances le travail de la paysannerie. C'est en partie à travers l'activité
spécifique de tels personnages que l'on peut saisir, dans le cadre étroit
d'une seigneurie ou de quelques terroirs, les processus de mutation des
sociétés rurales dans leur diversité à l'aube des temps modernes. L'abon-
(1) H. Neveux, première partie du tome 2 de l'Histoire de la France Rurale,
sous la direction de Georges Duby et Armand Wallon, Paris 1975, pp. 89 à 165.
Remarques de M. R. Fossier « Economies et sociétés rurales : France et Angleterre
(onzième - quinzième siècles) » dans Revue Historique avril - juin 1979, pp. 383-440,
p. 426 et n. 126 (bibliographie).
(2) Tel ce Bertrand Ardillon, homme de guerre reconverti, présenté par M. J.
Glénisson « La reconstruction agraire en Saintonge méridionale au lendemain de la
Guerre de Cent Ans » dans Revue de la et de l'Aunis t. I, 1975, pp. 65-102. 136 ANNALES DE BRETAGNE
dant chartrier de l'abbaye cistercienne de Buzay(3) en Pays de Rais,
dans le diocèse de Nantes, au sud de la Bretagne, a conservé les traces
des opérations de l'un d'entre eux, frère Jean Gauguet. Ce moine, qualifié
de « procureur des abbé et couvent » ou de « religieux de labbaie de
Buzay », parfois même simplement de « humble et honneste
frère » sans mention de son appartenance à l'abbaye, domine de belle
façon l'histoire du temporel monastique entre 1438 et 1473. Achetant
des rentes, défendant — assez peu ! — les intérêts de la communauté,
accumulant des terres pour ladite communauté mais surtout pour son
propre compte, irriguant ainsi les campagnes voisines de ses disponibilités
monétaires, il se présente comme une remarquable figure de rassembleur
de terres. Son œuvre, banale dans le principe — l'accumulation de biens
fonds est une pratique ordinaire et le type social du rassembleur de terres
n'est pas exceptionnel — prend tout son relief lorsqu'elle est replacée
dans le contexte particulier de la Bretagne, spécialement du Pays de
Rais. Elle apporte, à cet égard, un témoignage concret sur les structures
agraires et sociales de cette petite région et leur évolution en même
temps qu'elle aide à comprendre l'impact, au sein d'une conjoncture
économique et démographique fort complexe, de la politique du duc
François II à partir de 1458 sur la société des campagnes nantaises.
Peut-on parler, sans commettre un abus de langage, de reconstruction
agraire, à propos du comté de Nantes pour le milieu du XVe siècle ?
Prise dans son acception littérale, l'expression n'est pas la plus perti
nente pour rendre compte de la situation exacte dans laquelle se trouve
la province à cette époque, alors que la grande guerre appartient ici à un
passé déjà lointain. En effet, si l'on se place précisément en 1438,
lorsqu'est attesté pour la première fois notre rassembleur, il y a une
bonne cinquantaine d'années que le duché de Bretagne ne participe plus
directement aux hostilités de la guerre de Cent Ans. Depuis la conclusion,
en 1381, du second traité de Guérande qui a mis fin à la Guerre de
Succession, opposant Blois et Montfort, il vit, à quelques expéditions
militaires près, dans la paix que lui procure une active mais brouillonne
neutralité, alternativement plus favorable à un camp ou à l'autre. Son
potentiel humain et économique n'a pas été sérieusement entamé par le
conflit et les épidémies ; il n'apparaît pas que la grande peste y ait
causé des ravages importants ni que l'effondrement démographique y
(3) Fille de Clairvaux, fondée sur l'intervention directe de saint Bernard par le
Comte de Bretagne Conan III le Gros et sa mère Ermengarde d'Anjou en 1135 puis
vers 1144 après l'échec de la première mission, cette abbaye est située à une vingtaine
de kilomètres en aval de Nantes sur la rive gauche de l'estuaire de la Loire en
bordure du marais qui porte son nom. Son chartrier, rescapé des destructions de
la Révolution et des Guerres de Vendée, est conservé aux Archives Départementales
de Loire- Atlantique entre les cotes H 19 et H 72. Il a fait récemment l'objet d'un
article de Mme A. Lebigre, « Les débuts de l'abbaye cistercienne de Buzay en Pays
de Rais (1144-1250) » Revue historique de droit français et étranger, Paris, 1967 et
d'une publication des plus anciennes chartes Q135-1300) ainsi que d'une analyse dés
actes passés de 1301 à 1474 par J. L. Sarkazuj, Recueil et catalogue des actes de
l'abbaye cistercienne de Buzay en Pays de Rais (1135-1474) LXCV + 1090 p. dactyl.,
Nantes, 1977. L'implantation des monastères cisterciens en Bretagne a été étudiée
par M. André Dufief, Les cisterciens en Bretagne aux XIIe et XIII" siècles,
thèse de IIIe cycle. Rennes, 1978. ANNALES DE BRETAGNE 137
soit très profond (4). Au contraire, la densité kilométrique, élevée, en
fait une zone de fort peuplement et a permis, en dépit d'un affaissement
marqué dans la première moitié du XVe siècle (5), une « belle floraison
urbaine » (6). La Bretagne ne peut donc pas être considérée comme une
des provinces les plus désolées de l'Occident, il s'en faut : sa situation
n'est en rien comparable à celle de la Normandie voisine ou bien encore
du Poitou. Néanmoins, la guerre de Succession (1341-1381) n'a pas été
sans répercussions et durables. Durant le conflit, la présence quasi-
permanente des soldats de l'un ou l'autre des partis a été très durement
ressentie par la population. Les destructions, le paiement de pâtis aux
gens d'armes pour gage d'une tranquillité bien relative, une fiscalité de
plus en plus lourde ont sans conteste aggravé le sort des masses paysan
nes (7). Le Pays de Rais, en particulier, n'a pas échappé au cortège
habituel des calamités. Presque exclusivement ecclésiastique, la docu
mentation met l'accent sur le pillage des abbayes par les écorcheurs et
la ruine des églises de villages (8). Pour être trop sombre, le tableau
ainsi suggéré doit être tempéré car les suppliques au pape comportaient
une part d'exagérations intéressées. Du côté des paysans, l'état de guerre
a surtout provoqué le repli des communautés sur elles-mêmes et le
développement de pratiques anarchiques. Ce sont apparemment les
mara

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