Les dernières années de Marie Mancini et son inventaire après décès. - article ; n°1 ; vol.152, pg 129-157
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Les dernières années de Marie Mancini et son inventaire après décès. - article ; n°1 ; vol.152, pg 129-157

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Description

Bibliothèque de l'école des chartes - Année 1994 - Volume 152 - Numéro 1 - Pages 129-157
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Claude Dulong-Sainteny
Les dernières années de Marie Mancini et son inventaire après
décès.
In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1994, tome 152, livraison 1. pp. 129-157.
Citer ce document / Cite this document :
Dulong-Sainteny Claude. Les dernières années de Marie Mancini et son inventaire après décès. In: Bibliothèque de l'école des
chartes. 1994, tome 152, livraison 1. pp. 129-157.
doi : 10.3406/bec.1994.450724
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1994_num_152_1_450724LES DERNIERES ANNEES DE MARIE MANCINI
ET SON INVENTAIRE APRÈS DÉCÈS
par
Claude DULONG
Les débuts de Marie Mancini, la plus célèbre des nièces de Mazarin, sont
bien connus. En 1659, son idylle avec le jeune Louis XIV mit en danger la
conclusion de la paix des Pyrénées. Car la paix passait par le mariage du
roi avec l'infante d'Espagne, et le roi prétendait épouser Marie. Le cardinal
dut déployer des trésors de persuasion et mettre sa démission dans la
balance pour ramener son souverain et filleul à la raison, celle de l'Etat.
L'affaire défraya la chronique du temps et elle a été mainte fois évoquée
depuis. En revanche, les dernières années de Marie sont restées obscures.
Or cette période de son existence, si elle prête moins au romanesque, est la
plus intéressante au point de vue historique, car elle touche au grand
événement-charnière des XVIIe-XVIIIe siècles : la Succession d'Espagne.
Tout se tient, sans doute. Si Louis XIV n'avait pas renoncé à Marie pour
épouser l'infante, sa descendance n'aurait pu prétendre à l'héritage espa
gnol. Mais par quel biais, alors, Marie, après tant d'années, se trouva-t-elle
mêlée à cet événement et quel rôle y joua-t-elle ?
Il eût été impossible de le savoir si des sources jusqu'ici ignorées
n'étaient venues au jour. Quatre lettres de Marie, datées de 1702, dor
maient depuis près de trois cents ans dans le fonds des archives de la Bast
ille, à la Bibliothèque de l'Arsenal; elles n'avaient pas été identifiées, ni
donc recensées et exploitées 1. Autre fonds, richissime, celui de l'archivio
Colonna à Rome. On se souvient que Marie, après sa rupture forcée avec
Louis XIV, avait épousé un Colonna. Leurs descendants et héritiers ont
conservé jusqu'à ce jour plus de cinq cents pièces la concernant, lettres
d'elle ou à elle adressées et autres documents divers. Ce fonds privé reste
difficilement accessible aux chercheurs et il n'a pas encore fait l'objet d'un
classement méthodique. À la fin du siècle dernier, un biographe de Marie,
Lucien Perey (alias Luce Herpin), eut l'autorisation — et le mérite — d'y
travailler, mais sous certaines réserves imposées par la famille Colonna2; si
1. Arsenal, Archives de la Bastille, ms 10532, lettres des 9 mars, 22 et 23 avril 1702.
2. Lucien Perey, Une princesse romaine, Marie Mancini Colonna, Paris, 1896.
BIBL. ÉC. CHARTES. 1994. 1 9
Bibliothèque de l'Ecole des chartes, t. 152, 1994. 130 CLAUDE DULONG
bien que les plus significatives des lettres de Marie lui échappèrent, de
même que l'inventaire après décès qu'on trouvera ci-dessous en annexe. Il
m'est donc agréable d'exprimer ici ma reconnaissance à don Prospero
Colonna, prince d'Avella, qui a bien voulu m'accorder libre accès à ses
archives, et aussi à Gabriello Milantoni, le conservateur, qui a facilité mes
recherches.
Rappelons brièvement les faits saillants de la vie conjugale de Marie 3. Ils
nous expliqueront d'ailleurs la présence à l'archivio Colonna d'une telle
masse de documents la concernant.
C'est le cardinal Girolamo Colonna, fils d'un ancien padrone romain de
Mazarin, qui, en 1659, avait proposé pour Marie son neveu, le prince
Lorenzo Onofrio. Le jeune homme, à vingt-trois ans, se trouvait chef de sa
casa par la mort de son père. Une belle alliance, et qui offrait l'avantage
d'éloigner Marie de Louis XIV. Mais Mazarin ne put en traiter qu'après la
conclusion de la paix des Pyrénées et le mariage du roi, lorsqu'il fut de
retour à Paris, à la fin d'août 1660. Il n'avait plus que quinze jours à vivre,
quand, le 21 février 1661, à Vincennes, il signa le contrat, dressé par Le
Fouyn, son notaire. L'acte fut ensuite expédié à Rome où les Colonna le
signèrent à leur tour le 11 mars. On n'en connaît plus que des résumés ou
extraits, conservés à Paris, à la Bibliothèque nationale, parmi les papiers
successoraux du cardinal, et à Rome, à l'archivio Colonna, où se trouvent
aussi d'autres extraits de contrats, ceux des sœurs et cousines de Marie 4.
C'est que les Colonna avaient voulu pouvoir comparer. La comparaison les
satisfit. Marie était aussi richement dotée que les autres « mazarinettes » :
600 000 livres, plus 50 000 livres de biens libres, c'est-à-dire dont elle
pouvait disposer à sa guise sans contrôle marital. Mazarin, n'ayant pas cou
tume de verser en une fois de telles dots, n'avait pas provisionné intégral
ement cette dépense avant sa mort. Mais Marie partait et ne pouvait partir
sans ce qui lui avait été accordé. Si bien qu'il incomba aux héritiers du car
dinal de rassembler et de remettre la somme en espèces à l'envoyé des
Colonna. Ceux-ci tirèrent un autre avantage des circonstances en faisant
convertir à Paris ces 650 000 livres en monnaie italienne, afin de profiter
du bénéfice du change 5. Ainsi Marie put-elle apporter à son époux l'équiva-
3. Je renvoie d'une façon générale pour la biographie de Marie à mon récent ouvrage,
Marie Mancini, Paris, 1993, et ne donnerai ici en notes que les références qui n'y auraient
pas trouvé place.
4. Bibl. nat., Mélanges Colbert 103, fol. 549v, et Clairambault 1144, fol. 181v; Archivio
Colonna, Istrumenti diversi, III AA 92, n°27.
5. Voir, entre autres, sur cette question, Bibl. nat., Mélanges Colbert 103, fol. 60v (lettre
du duc Mazarin à Colbert évoquant les difficultés de paiement); Archivio Colonna, GM,
pacco 2 (lettre du marquis Angelleli, procureur des Colonna, sur le change); ibid., Miscella LES DERNIÈRES ANNÉES DE MARIE MANCINI 131
lent de 710 000 livres. Il n'y avait pas de petits profits dans les mariages
du temps.
La nouvelle princesse Colonna ne s'était résignée qu'avec « aversion » à
cette alliance qui l' éloignait non seulement de Louis XIV, mais aussi de la
France. Elle n'aimait pas ou plus son pays natal. Les coutumes de Rome,
dit-elle à satiété dans ses Mémoires et dans ses lettres, étaient contraires à
son humeur. Il est vrai que, dans la cité pontificale, les femmes de la haute
société jouissaient de beaucoup moins de liberté qu'à Paris. Néanmoins,
l'union fut d'abord heureuse. Jolie, spirituelle, auréolée de sa glorieuse
idylle avec le roi de France, Marie ne tarda pas à se tailler à Rome une posi
tion exceptionnelle. Elle y donnait le ton, elle flattait la vanité de son mari
qui, comme elle, aimait le faste et les fêtes. Lorenzo Colonna était l'un des
deux plus grands princes romains, l'autre étant Flavio Orsini, qui devait
plus tard épouser Marie-Anne de la Trémoille, la future princesse des
Ursins. Le palais Colonna, situé au pied du Quirinal et dont les jardins en
terrasses s'étagent sur la colline, devint, au temps de Marie, le centre de la
vie mondaine de Rome, le rendez-vous des plus illustri forestieri. Cet
ensemble architectural, fort remanié depuis, donne aujourd'hui au n°66 de
la piazza Santi Apostoli. C'est là que sont conservées les archives de la
famille, sans parler d'une célèbre collection de peintures et d'antiques.
Lorenzo Colonna possédait d'autres palais et domaines, tant dans les
Etats pontificaux qu'en Sicile et dans le royaume de Naples, où il occupait
la charge de grand connétable. Il se trouvait ainsi inféodé aux Habsbourg
d'Espagne de qui dépendait alors le royaume de Naples. Point à retenir,
car il explique que Marie, sans l'avoir cherché, se soit trouvée, à Rome,
affiliée à la faction espagnole, alors que les Orsini, grands rivaux des
Colonna, appartenaient à la faction française.
Au bout de cinq années à peine, un coup de tonne

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