Les Indiens à Ceylan  - article ; n°4 ; vol.17, pg 726-737
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Description

Revue française de science politique - Année 1967 - Volume 17 - Numéro 4 - Pages 726-737
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 9
Langue Français

Extrait

Monsieur Philippe Devillers
Les Indiens à Ceylan
In: Revue française de science politique, 17e année, n°4, 1967. pp. 726-737.
Citer ce document / Cite this document :
Devillers Philippe. Les Indiens à Ceylan . In: Revue française de science politique, 17e année, n°4, 1967. pp. 726-737.
doi : 10.3406/rfsp.1967.393035
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1967_num_17_4_393035Revue Française de Science Politique 726
Le problème est-il résolu pour autant ? Ce n'est pas certain, et
le double paradoxe souligné plus haut, reste toujours actuel : une minor
ité qui n'est assimilable ni dans le pays d'accueil, ni dans le pays
d'origine ; un Etat qui ne peut ni s'en désintéresser ni les protéger.
Les Dahoméens n'ont d'ailleurs pas renoncé à émigrer, donc il n'est
pas sûr que les conflits ne renaissent pas, tant il est vrai qu'une situa
tion de cette complexité peut difficilement trouver une juste solution.
S. B.
LES INDIENS A CEYLAN
La présence d'un million d'Indiens, d'immigration assez récente,
à Ceylan, pose à ce pays un de ses problèmes majeurs. Il serait tou
tefois exagéré de dire qu'il s'est développé à son propos un conflit
international au sens ordinaire du mot. Il s'agit plutôt d'un
mineur, sinon même d'un litige.
I
LES ORIGINES DU PROBLÈME
Les origines du problème sont très anciennes et remontent aux débuts
de la colonisation britannique.
Ayant soumis et annexé le royaume de Kandy (1815-1818), les
Britanniques disposèrent des domaines de la Couronne de Kandy qu'ils
avaient confisqués (en vertu de la Waste Lands Ordinance)1. La culture
du café se développa sur les hautes terres, puis céda la place à celle
du thé. Les planteurs anglais avaient besoin d'une main-d'œuvre nomb
reuse, disciplinée et sédentaire. Comme ni les Cinghalais, ni les
Kandyens ne voulaient accepter ce genre de travail, les planteurs
firent pression sur l'administration de Colombo pour que de la main-
d'œuvre soit amenée de l'Inde. C'est ainsi que des milliers de tra
vailleurs indiens entrèrent à Ceylan vers les années 1830-1840, « recru
tés » dans les régions de Trichinopoly, Salem, Madura et Tanjore.
1. Velupillai (C.V.), «The Problem of the Stateless», United Asia 2,
1963, pp. 121-126. Conflits Internationaux 727 Les
Ils furent installés dans la région de collines du Centre et employés
à défricher la jungle pour faire place aux plantations de café et de
thé. Ils étaient virtuellement prisonniers des planteurs et traités comme
des esclaves. Emu de ces conditions, et donnant suite à l'abolition
de l'esclavage (1833), le gouvernement de l'Inde, en 1839, interdit
l'émigration de travailleurs vers Ceylan 2, et ne l'autorisa à nouveau
qu'en 1847 contre des assurances formelles que les travailleurs indiens
recevraient un traitement équitable. Il avait un tel souci de ce trait
ement qu'il ne passa pas moins de vingt-quatre lois d'émigration entre
1847 et 1867. Soumis à un certain contrôle et désireux d'éviter les
critiques, les planteurs mirent sur pied une organisation très élaborée
de logements, de soins médicaux et d'autres avantages sociaux.
Beaucoup plus tard, après la première guerre mondiale, pendant
laquelle l'Inde suspendit l'émigration, les planteurs de Ceylan redout
aient encore à tel point de manquer de main-d'œuvre indienne qu'ils
envoyèrent une délégation au vice-roi pour lui demander que, « en ce
qui concerne le recrutement de la main-d'œuvre, Ceylan soit traitée
comme faisant partie de l'Inde ». Dans un mémorandum au vice-roi
(22 août 1921), le gouverneur de Ceylan soutint cette demande, assu
rant qu'il n'y avait à Ceylan aucune restriction à l'immigration des
Indiens. Le secrétaire aux Colonies (de Londres) ayant, de son côté,
assuré qu'en « ce qui concernait le droit de vote à l'échelon municipal,
les membres de la population résidente bénéficiaient des mêmes droits
que la population indigène », le gouvernement de l'Inde, en 1923, autor
isa à nouveau l'émigration des Indiens vers Ceylan.
Les immigrants indiens avaient déjà contribué de façon importante
au développement économique de l'île. Cultivé et cueilli sur les plan
tations par les travailleurs indiens, le thé était devenu la principale
ressource du pays et tenait la première place dans les exportations.
Mais d'autres avaient été recrutés, au xixe siècle aussi,
pour servir dans la Pioneer Force, organisation de type semi-militaire
qui, au début, avait la responsabilité des travaux publics à Ceylan.
C'est à cette organisation que sont dues les principales réalisations,
les routes de Colombo à Kandy et à Galle, de Kandy à Trincomalee,
les grands ponts, et plusieurs voies ferrées.
D'autres immigrants avaient accompagné les éléments « recrutés »,
et s'étaient installés à Colombo et dans la région des plantations, et
y exercèrent divers métiers. Parmi ces immigrants 3, les Nattykottai
Chettyars, banquiers et financiers, qui fournirent les capitaux pour le
développement de Colombo et des plantations de cocotiers de la côte
2. Mukerji (K.P.), « Indo-Ceylon relations», The Indian Journal of Poli-
tical Science, janv.-mars 1957, p. 44.
3. Velupillai (C.V.), art. cit., p. 123. Revue Française de Science Politique 728
sud (au-delà de Galle), ont joué un rôle capital. Les Borahs et Chet-
tyars prirent en main l'importation et l'exportation, sur une large
échelle, des produits alimentaires. Les Barathas étaient boutiquiers.
Les Nadars avaient le petit commerce, les Sindhis et les Menons se
spécialisèrent dans le textile, tandis que les musulmans de la côte de
Coromandel mettaient sur pied l'industrie du sel à Puttlam.
Cette contribution très importante au progrès économique de l'île
fut reconnue par divers rapports britanniques (rapport de Sir Edward
Jackson de 1938).
Le conflit ne prit forme que vers 1928, lorsque la commission
royale chargée de préparer une Constitution pour Ceylan recommanda
le suffrage universel pour toute la population mais précisa que, pour
réserver le droit de vote à ceux qui avaient un intérêt déterminant
(«abiding interest») ou qui étaient établis de façon permanente («per
manently settled»), il ne serait accordé qu'à ceux qui pourraient jus-
tifîer de cinq ans de résidence dans l'île (sans interruption supérieure
à huit mois). En 1929, lorsque le Conseil législatif de Ceylan discuta
ce « Rapport Donoughmore », les leaders cinghalais exprimèrent la
crainte de voir dans la région de Kandy les voix des Indiens submerger
celles des Cinghalais. Ils réclamèrent des restrictions supplémentaires
portant, en particulier, sur le domicile. Et pour avoir un « certificat
d'établissement permanent », il fallait faire une déclaration spéciale.
Ces modifications, qui seules permirent d'obtenir l'approbation (par
19 voix contre 17) de la Constitution par le Conseil législatif de
Ceylan, provoquèrent une protestation du gouvernement de l'Inde 4.
Cependant, le résultat de ces dispositions fut de porter l'effectif de
l'électorat indien de 12 438 (sous la Constitution précédente, 1924)
à environ 100 000 en 1931, puis à 145000 en 1936. A la veille de la
seconde guerre mondiale, sur 670 000 travailleurs indiens et leurs
familles, plus de 225 000 étaient des électeurs inscrits.
En mars 1938, les nationalistes cinghalais (du parti Sinhala Maha
Sabha) se plaignirent au gouverneur du libéralisme excessif dont l'a
dministration faisait preuve en ce qui concerne l'octroi du droit de
vote aux Indiens. Cédant à cette pression, l'administration britannique
commença à partir de 1940 à réviser les listes. Le chiffre des électeurs
indiens inscrits fut ainsi réduit à 168 000 en 1943. Politiquement, le
problème était désormais posé dans son ensemble.
La majorité cinghalaise au Conseil législatif menait déjà campagne
pour restreindre les droits des Indiens. Le fait que deux Indiens aient
été élus au State Council à l'élection générale de 1931, aggravait
4. Silva

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