Ministres et députés - article ; n°2 ; vol.18, pg 213-229
18 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Ministres et députés - article ; n°2 ; vol.18, pg 213-229

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
18 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue française de science politique - Année 1968 - Volume 18 - Numéro 2 - Pages 213-229
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1968
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Léon Noël
Ministres et députés
In: Revue française de science politique, 18e année, n°2, 1968. pp. 213-229.
Citer ce document / Cite this document :
Noël Léon. Ministres et députés. In: Revue française de science politique, 18e année, n°2, 1968. pp. 213-229.
doi : 10.3406/rfsp.1968.393079
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1968_num_18_2_393079MINISTRES ET DÉPUTÉS
LÉON NOËL
« Les ministres non députés veulent être élus, et
les élus rêvent d'être ministres. » (Georges Pomp
idou, Premier ministre, Déclarations à L'Express,
4-10 septembre 1967.)
LE professeur Marcel Prélot, sénateur du Doubs, qui a porté,
jusqu'à ce qu'elle cessât d'avoir cours, l'étiquette de l'U.N.R.-
U.D.T., a obtenu sans difficulté, de ses collègues du Sénat, le
26 octobre dernier, le vote, par 230 voix contre 22, d'une « propos
ition de loi constitutionnelle tendant à modifier l'article 23 de la
Constitution » *, de cette Constitution du 4 octobre 1958 que 79,2 %
des suffrages exprimés avaient approuvé lors du référendum du
28 septembre précédent. La presse n'a guère prêté attention à ce vote
et il a passé totalement inaperçu aux yeux de l'opinion qui ne se doute
ni de sa portée ni de ses conséquences possibles.
L'article 23 de la Constitution est pourtant d'une importance
cardinale : il a rendu incompatibles les fonctions de membres du
gouvernement avec l'exercice de tout mandat parlementaire.
L'idée d'édicter cette interdiction n'a pas été l'effet d'une improv
isation, contrairement à ce qu'a avancé M. Prélot dans le savant
rapport qu'il a présenté au Sénat en faveur de sa propre proposition.
L'article 23 n'a nullement été introduit par surprise dans la nouvelle
Constitution : depuis longtemps, et bien avant les événements de
mai 1958, qui portèrent au maximum l'animosité de la nation contre
les parlementaires, en inspirant à ceux-ci des craintes voisines de la
panique, les graves inconvénients du cumul, auquel la Constitution
de 1946, pas plus que celle de 1875, ne faisait obstacle, des fonctions
ministérielles avec l'appartenance au Parlement, avaient été mis en
* Le lecteur trouvera plus loin le texte intégral de cette proposition de loi ainsi
que le rapport présenté par M. Marcel Prélot.
213 Léon Noël
lumière. Dans les dernières années de la Quatrième République, plu
sieurs propositions ayant pour but d'y mettre fin avaient été formulées.
Le 23 mars 1955, l'auteur de ces lignes avait déposé à l'Assemblée
nationale une proposition de résolution en ce sens \ Elle fut renvoyée
à la commission du suffrage universel, des lois constitutionnelles, du
règlement et des pétitions, dont le président se trouvait être le même
M. Prélot, alors député. Cette commission la jugea, sans aucun doute,
aussi dépourvue de justification que d'intérêt ; elle la traita avec un
complet dédain et ne se donna pas la peine de l'examiner.
Mais le 5 juin de l'année suivante, douze « jeunes élus », appar
tenant à toutes les formations politiques, à l'exception de la S.F.T.O.
et du Parti communiste, entrés au Palais-Bourbon en janvier 1956,
se disant frappés du « déclin de l'Etat républicain », contre lequel ils
s'affirmaient résolus à « s'insurger », désireux d'amener « une mora-
lisation des mœurs politiques » et estimant qu'« une autorité plus
grande » serait « donnée au gouvernement si ses membres ne ré
duisent pas leur rôle à celui de mandataires des partis », proposèrent
de décider que les membres du Parlement qui deviendraient ministres
seraient « déclarés démissionnaires de leur mandat ».
Au début de 1958, la même idée était reprise par M. Corniglion-
Molinier (républicain social) et M. Buron (M.R.P.), qui la tenaient pour
une conséquence logique du régime parlementaire et du principe de la
séparation des pouvoirs exécutif et parlementaire.
Parallèlement à ces initiatives de membres de l'Assemblée natio
nale, l'interdiction du cumul entre la détention d'un portefeuille
ministériel et un mandat parlementaire était préconisée par des
spécialistes autorisés du droit public et de la science politique.
Sa nécessité fut soutenue notamment dans un rapport « sur les
causes de l'instabilité ministérielle », présenté au comité d'études pour
la République, par un collègue de M. Prélot à la faculté de droit de
Paris, un des plus éminents. et que nul ne saurait soupçonner de
complaisance quelconque, en quelque temps que ce fût, envers les
suggestions gaullistes, le doyen Georges Vedel.
Au comité consultatif constitutionnel, réuni en juillet et août 1958,
par application de la loi constitutionnelle du 3 juin précédent, la
thèse du non-cumul fut défendue catégoriquement par plusieurs
membres, tels que M. Malterre, secrétaire général de la C.G.C., et,
du côté des parlementaires, par l'un d'eux, appelé depuis à une grande
1. Il exposa la même thèse, le 13 juin 1955, devant l'Académie des sciences
morales et politiques (Revue des travaux de cette Académie, 1955, tome 1er, pp. 149-159).
214 Ministres et députés
notoriété, M. Pierre Marcilhacy. Le futur concurrent du général de
Gaulle à la présidence de la République invoqua ce qu'il appelait
« les vérités éternelles définies par Montesquieu » et affirma que l'i
nterdiction du cumul allait « dans le sens d'une véritable séparation
des pouvoirs » 2.
Cependant, l'opposition de la plupart des parlementaires qui y
siégeaient amena le comité consultatif constitutionnel à émettre un
avis défavorable à l'article de l'avant-projet dont il était saisi, formul
ant l'incompatibilité en question, encore que le président du comité,
M. Paul Reynaud, eût reconnu que cet article était « le plus essent
iel » du texte et que, « par la faute du Parlement qui n'a pas su se
réformer en temps utile », cette solution ne devait pas, à l'heure où
on se trouvait, être écartée. « Le gouvernement », avait observé en
vain, à ce propos, l'ancien président du conseil, « a raison de vouloir
donner une satisfaction à l'opinion publique qui exige un changement
radical, une sorte d'électro-choc ».
En droit et en fait, l'article 23 de la Constitution demeure pleine
ment justifié et les arguments que le Sénat a retenus à son encontre
ne résistent pas à l'analyse.
Son fondement juridique réside dans le principe de la séparation
des pouvoirs dont, depuis le début du mouvement gaulliste, la valeur
essentielle n'a cessé d'être affirmée et précisée par le général de Gaulle
et par ses principaux collaborateurs. L'impérieuse nécessité d'en assu
rer enfin le respect a été une des raisons d'être de l'avènement de la
Cinquième République et les dispositions prises pour qu'il soit sau
vegardé forment une des acquisitions fondamentales que le pays doit
à la Constitution de 1958.
Partant de cette constatation que, « pour qu'on ne puisse abuser
du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir
arrête le pouvoir » 3, Montesquieu avait observé que si « la puissance
exécutrice était confiée à un certain nombre de personnes tirées du
corps législatif, il n'y aurait plus de liberté, parce que les deux puis
sances seraient unies, les mêmes personnes ayant quelquefois et pou-
2. Le 26 octobre 1967, M. Marcilhacy n'a pas pris part au vote sur la proposition
Prélot. Il semble qu'on soit en droit de penser que, si, par exception, il ne s'est pas
joint, en la circonstance, à la majorité oppositionnelle du Sénat, ce ne fut pas
seulement dans un souci de correction, mais que les années écoulées n'ont pas modifié
son point de vue sur la justification de la règle contenue dans l'article 23.
5. De l'esprit des lo

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents