Les ostraca de Bu Njem - article ; n°3 ; vol.123, pg 436-452
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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1979 - Volume 123 - Numéro 3 - Pages 436-452
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Robert Marichal
Les ostraca de Bu Njem
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 123e année, N. 3, 1979. pp. 436-
452.
Citer ce document / Cite this document :
Marichal Robert. Les ostraca de Bu Njem. In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,
123e année, N. 3, 1979. pp. 436-452.
doi : 10.3406/crai.1979.13630
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1979_num_123_3_13630436 COMPTES RENDUS DE i/ ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
COMMUNICATION
LES OSTRACA DE BU NJEM,
PAR M. ROBERT MARICHAL, MEMBRE DE L* ACADÉMIE.
René Rebuffat a exposé à trois reprises à l'Académie1 les résultats
des huit campagnes de fouilles qu'il a conduites en Tripolitaine,
dans le camp romain et la ville de Golas, sur le site de Bu Njem, et
il a signalé la découverte à plusieurs reprises d'ostraca latins. Ils
sont actuellement au nombre de cent quarante six. Les premiers
ont été découverts en 1967, le plus gros lot l'a été en 1971, les der
niers en 1976. J'en ai actuellement achevé l'édition et le commentaire
et je voudrais esquisser ici les principaux résultats de cette étude.
Comme R. Rebuffat a pu l'établir d'après les inscriptions, les
Romains se sont établis à Golas en 201. De 201 à 238 la garnison
est composée d'une vexillation de la Légion III Augusta et d'un
Numerus sous le commandement d'un centurion légionnaire. Après
la dissolution de la Légion, en 238, seul le Numerus a subsisté, il est
commandé par un décurion. Après la recréation de la Légion en 253,
il n'est pas probable qu'une vexillation légionnaire soit revenue à
Golas, car le commandant est toujours un décurion.
Neuf ostraca sont datés : un de 253, un de 254, sept de 259, ceux-ci
sont les derniers documents datés de Golas ; ce ne sont peut-être pas
les derniers écrits à Golas, mais ce sont certainement des
documents qui étaient encore récents lorsque la forteresse a été
abandonnée par les armées romaines. D'autre part, c'est en 263,
au plus tard, que la Cohorte VIII Fida, qui a eu des cavaliers à
Golas, s'est repliée au Nord-Ouest à quelques 600 km à vol d'oiseau.
Sur les 146 ostraca, 117 sont militaires et proviennent des
bureaux de l'aile Sud des principia où se trouvait, auprès du
Scriptorium, le siège de l'administration du Numerus.
Les soldats que les ostraca nous font connaître sont, en effet, des
indigènes : 60 % d'entre eux portent des gentilices impériaux :
Aurelius, Julius et 40 % des gentilices tels que Aemilius, Caecilius,
Cornélius, etc., tous fréquemment attestés en Afrique du Nord ; leur
cognomina sont ou indigènes : Annibal, Bonilla, Bubeius, Buzuris,
Ipalacen, ou latins, plus de 45 %, spécifiquement africains : Crescens,
Datius, pour Datiuus, Donatus, Rogatus, etc. De plus les scribes
connaissent l'alphabet latino-punique. On possède un nombre assez
1. Cf. CRAI, 1969, p. 189-212 ; 1972, p. 319-339 ; 1975, p. 495-505. LES OSTRACA DE BU NJEM 437
important d'inscriptions gravées latino-puniques. Des ostraca encore
inédits du Musée de Tripoli ont montré que l'alphabet qui y est
utilisé ne l'a pas été seulement dans dés inscriptions plus ou moins
officielles ou funéraires, mais aussi dans la vie courante, sous une
forme cursive semblable à celle des documents latins analogues,
et il a été trouvé à Golas même une lettre latino-punique dont on
pourrait croire qu'elle a été écrite par les bureaucrates du Numerus.
Cet alphabet latino-punique est l'alphabet latin plus le shin et le
sadé, or, les soldats de Golas emploient ces deux lettres dans la
transcription des noms indigènes, par exemple dans Esuba, nom de
lieu, et isidarim, nom de mesure.
Nous avons donc affaire à un corps auxiliaire, Cohcrte equitata
ou Numerus et, puisque seul un Numerus est attesté avant 253, il
est plus simple de penser qu'il est encore demeuré seul à Golas
jusqu'en 259.
La langue latine de nos ostraca ne diffère guère de celle qu'écrivent
les soldats romains de Syrie ou d'Egypte, c'est le prétendu « latin
vulgaire », avec peut-être une pointe d'accent punique dans la
confusion totale des o et des u quels qu'ils soient. Mais la romanisa-
tion est superficielle : si les scribes bien entraînés, qui n'emploient
d'ailleurs le plus souvent que des formules usuelles, écrivent assez
correctement, les simples soldats, détachés dans de petits postes aux
environs, usent d'une langue aussi rudimentaire que leur écriture ;
ils disent : bice piciparis pour uice principalis, bone pour bene, pro-
positus pour praepositus, leur chef de corps dont ils devraient pour
tant connaître le grade ! L'un d'eux écrit (fig. 1) :
salutem a Gem-
inio Crescente
un asinu cuis n-
obis atulisti Bar-
las decimu cal(endas)
émit asinu ua-
lias opto te
bene uale-
re
«... bonjour de Geminius Crescens, un âne qui (sic) tu nous a
apporté, Barlas a acheté l'âne le dix des Kalendes, au revoir, je
souhaite que tu te portes bien », sait-il ce que veut dire ualeas ? Ce
n'est plus du latin vulgaire, c'est un pseudo-sabir, du latin créole ou
du latin « tiraillou », comme le « français tiraillou » des tirailleurs
sénégalais ! 438 COMPTES RENDUS DE L'ACADEMIE DES INSCRIPTIONS
Fig. 1. — Lettre de Geminius Crescens.
On devine d'ailleurs qu'il en était de même à Doura, avec un
autre substrat (ChLA, IX, p. 15).
Les textes conservés sont de trois types :
1) Des « Rapports journaliers » semblables aux « situations de
prise d'armes » de l'armée française, qui donnent : la date de jour,
l'effectif total, l'état numérique par emplois ou corvées des hommes
de l'unité, la liste nominative des malades, puis celles des disponibles
avec leur affectation au « bain » et au « four » (fig. 2).
2) Des comptes-rendus des événements de la journée.
3) De la correspondance reçue.
Nous avons, sur papyrus, quelques textes parallèles, entre autres,
en Egypte, le P. Gen. loi. 1 {ChLA, I, n° 7) et, surtout, à Doura,
les grands rôles P. Dura 100 et 101 (ChLA, VIII), les plus intéres
sants puisqu'ils sont de 205-256, les grands rôles étant de 219 et
de 222, Golas prend la suite de Doura. Doura est une forteresse du
limes comme Golas. Matériellement à tous les textes sont sur
papyrus, à Golas, ils sont sur tessons. Les P. Dura ont été écrits au LES OSTRACA DE BU NJEM 439
Fig. 2. — Rapport journalier.
vjm Ka(lenda)s Ian(uarias) n(umerus) lvji
in his librarius j
optio j
[[proculcator] [[]]]
5 (équités) vjii
quintanari xxji
de speclis i
ad porta j
ad p(rae)p(ositum) j
10 structor j
egri jii
Sulpicius Donatus
Titus Buzuris
Aurelius Rufus
Perpendiculairement :
15 ad uirgas j
reliqui repungent xvji
Fur[n]us XV
ji [balneus] COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 440
plus haut niveau, dans l'officium du tribun commandant la Cohorte ;
les ostraca de Golas l'ont été à un échelon inférieur : dans une petite
unité atypique. Les rôles de Doura étaient utilisés pendant plusieurs
jours : j'ai estimé qu'il fallait au moins une dizaine d'heures simple
ment pour les copier, sans compter le temps nécessaire pour rassem
bler les renseignements sur la « position » des soldats, qui figuraient
en marge de leurs noms ; ils portent d'ailleurs des signes de correc
tion qui indiquent qu'ils ont servi plusieurs jours de suite. Il a fallu
les conserver pour permettre les contrôles, les communiquer éven
tuellement à l' État-major de la Province, à Antioche, lors de l'ét
ablissement des comptes de* la solde, tous les quatre mois ; c'est
pourquoi ils étaient établis sur une matière noble. Les ostraca de
Golas n'ont q\i'un intérêt éphémère au sens strict du terme, ils
étaient présentés chaque jour à l'officium du praepositus qui en
extrayait les données pour les incorporer dans des rôles comme ceux
de Doura, dont l'existence est indispensable dans tout corps de
troupe pour les mêmes raisons administratives et financières. Mais
à Doura, la ville a été prise d'assaut, les archives n'ont pu être

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