«Taikô kenchi». Le cadastre de Hideyoshi Toyotomi - article ; n°1 ; vol.53, pg 7-69
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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1966 - Volume 53 - Numéro 1 - Pages 7-69
63 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 8
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Extrait

Guy Moréchand
«Taikô kenchi». Le cadastre de Hideyoshi Toyotomi
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 53 N°1, 1966. pp. 7-69.
Citer ce document / Cite this document :
Moréchand Guy. «Taikô kenchi». Le cadastre de Hideyoshi Toyotomi. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome
53 N°1, 1966. pp. 7-69.
doi : 10.3406/befeo.1966.3753
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1966_num_53_1_3753KENCHÍnm aTAIKO
LE CADASTRE DE HIDEYOSHI TOYOTOMI
par
Guy MORÉCHAND
Ce cadastre de la fin du xvie siècle a fait l'objet de plusieurs publications japo
naises importantes. On sait combien, dans ce pays, le goût pour l'histoire écono
mique s'est affirmé, en particulier depuis la dernière guerre, on pourrait donc
s'attendre à ce que cette opération d'envergure, qui a couvert une grande partie
du Japon et laissé des matériaux nombreux, soit considérée comme un sujet de
choix et suscite des travaux approfondis. Paradoxalement, ces matériaux sont
encore mal connus, et c'est plutôt dans le but d'éclairer l'action politique de
Hideyoshi que plusieurs savants japonais ont cherché à s'en servir.
C'est un sujet tentant pour deux raisons évidentes : il appartient à une époque
exceptionnelle, la fin du xvie siècle, période de transition peut-être la plus impor
tante dans l'histoire du Japon, et il a été conçu par un homme exceptionnel,
Hideyoshi Toyotomi, le premier grand homme d'État émergeant des temps
féodaux. Mais comme toute période de transition, son. étude est sujette à un
écueil : on a la tentation d'en juger les yeux fixés sur ce qui a suivi. On gonfle
de tout leur avenir les événements que l'on sait transitoires, on les charge de tout
le sens qu'ils ont pu prendre ensuite, ce qui conduit parfois à des erreurs dans la
manière de les présenter, et parfois même dans leur interprétation. Nous pensons,
par exemple, que la présentation du cadastre de Hideyoshi telle qu'on la trouve
dans plusieurs Histoires générales n'est pas satisfaisante car elle fausse le contexte.
En effet, comme ce cadastre apparaît vers la fin des guerres féodales, à l'époque
où le Japon est en partie unifié sous la bannière de Hideyoshi et va entrer dans
une ère de paix, la tendance est forte de le présenter comme l'acte d'un gouver
nement conscient de ses tâches, cherchant à réorganiser un pays pacifié ou sur le
point de l'être, ou encore comme la première mesure d'une politique très élaborée,
ce qui est inexact.
(!) Littéralement : « cadastre du Taikô ». On appelait Taikô un Kampaku retiré et Hideyoshi fut
désigné par ce titre à partir de 1592, lorsqu'il fit nommer Kampaku à sa place son fils Hidetsugu.
Kampaku est un titre créé à la fin du IXe siècle par les Fujiwara pour consolider leur position.
Il correspond à une fonction de « régent » exercée pendant une vacance du pouvoir impérial due à
une absence du souverain ou à son incapacité, il est distinct de la «régence de minorité » (sesshô).
Mototsuna Fujiwara (837-893) fut le premier Kampaku. Hideyoshi a été successivement Chûgoku
Tendai (1582), Nai-daijin (1584), Kampaku (1585) et Dajô-daijin (1586). En fait, seul le titre de
Kampaku, rappelé à partir de 1592 par l'appellation de Taikô, était retenu. 8 GUY MORÉCHAND
Le danger redouble lorsqu'il s'agit de l'œuvre d'un homme à qui tout le monde
s'accorde à trouver du génie. La personnalité peu commune de Toyotomi Hide-
yoshi a fasciné les historiens. Ii domine de très haut son époque. Non seulement
il fut un grand guerrier comme Nobunaga, son suzerain, et les plus redoutables
de ses rivaux, mais il fut surtout un grand général, sachant utiliser efficacement
les nouvelles techniques, organiser son armée, pousser à fond les avantages d'une
stratégie. Il sut toujours admirablement tirer parti de tout ce dont il disposait et
profiter de toutes les occasions qui s'offraient, se révélant tour à tour diplomate,
administrateur, tacticien et déployant ses talents dans tous les domaines. Il ne lui
a même pas manqué d'être un merveilleux mécène. Il est donc tentant de lui
accorder un immense crédit et de lui attribuer le bénéfice de beaucoup d'ini
tiatives, d'interventions et d'intentions qui ne sont pas toujours clairement éta
blies dans les faits. A cet égard, nous désirons soulever une polémique à propos
d'une interprétation récente du Taikô kenchi. Il s'agit d'une thèse originale qui
a fait son chemin officiel parmi les historiens japonais et qui pour cette raison
doit attirer l'attention. M. Araki Moriaki, professeur à l'Université de Tôkyô,
considère ce cadastre comme ayant eu une portée « révolutionnaire ». La paysan
nerie de l'époque se serait vu offrir par Hideyoshi une chance de s'approprier
directement le produit de son travail, sans rester davantage la proie de propriét
aires plus ou moins parasites. Or nous verrons quel rôle considérable il faut
attribuer à la pression des événements en ce qui concerne la plupart des mesures
dont il est question, et quelle portée exacte leur accorder. Il convient de situer
davantage le cadastre dans son époque.
Nous avons donc ici un sujet qui ne manque pas d'intérêt, et nous voudrions
contribuer, d'une part, à éclairer la genèse du Taikô kenchi, les circonstances et
les sollicitations qui ont entouré sa conception, sa mise en oeuvre et ses formes
successives; d'autre part, nous aimerions examiner ses conséquences réelles,
inscrites dans les faits, et les développements que l'on a pu en attendre au cours
de son exécution. Ce deuxième programme n'est pas près d'être épuisé, mais
nous pouvons au moins évoquer les interprétations qui s'imposent le plus fort.
Le principe même d'une enquête cadastrale n'était pas nouveau. Déjà au
VIIe siècle à l'époque où le Japon entreprit sa rénovation institutionnelle à l'image
de la Chine des T'ang, la « Grande Réforme », Tai-ka, comporta en 646 tout un
programme foncier nouveau. Le système dit du han-den devait théoriquement
redistribuer les terres cultivées tous les six ans à la population, selon les besoins
et les catégories sociales. Un paysan devait pouvoir cultiver de quoi récolter une
livre de riz par jour. Pour cela, 1 tsubo (3,305 m2) de rizière inondée était nécess
aire. Il lui fallait donc 360 tsubo pour l'année lunaire, soit 1 tan (environ 12 ares).
La Réforme accordait au paysan libre, 2 tan, et à sa femme, les deux tiers de cette
part; au serf, un tiers, et à une serve, les deux neuvièmes. D'autres proportions
étaient prévues pour les enfants. Sur cette base extrêmement précise a été édifié
le système cadastral appelé jôri (l). Il resta en vigueur au moins deux siècles dans
les provinces centrales et on en discerne des traces encore très perceptibles aujour
d'hui, en particulier dans le Yamato. La terre cultivée était divisée en sato par
M Cf. Takeo Tanioka, Systèmes agraires : le jôri dans le Japon ancien (Les Annales, Économie,
Sociétés, Civilisations, 14e année, n° 4, oct.-déc. 1959, p. 625 et suiv.). « TAIKO KENCHI » 9
des chemins et des canaux occupant une largeur moyenne de 14,5 mètres, tracés
selon des axes perpendiculaires. Le sato était un carré de 6 chô de côté (environ
665 m), représentant une superficie de 43 hectares. Chaque sato à son tour était
divisé en 36 aires égales et carrées appelées tsubo, de 1,2 hectare (différent du
tsubo ou bu mentionné plus haut). Puis chacun de ces tsubo carrés était sub
divisé en 10 tan rectangulaires, tantôt de 109 mètres sur 10,9 mètres, tantôt de
54,5 mètres sur 21,8 mètres. Les côtés de toutes ces surfaces faisaient en général
face aux quatre points cardinaux. La première ligne de sato d'Ouest en Est était
appelée : premier jô. La seconde, immédiatement au Sud de la précédente :
deuxième jô, etc. Recoupant celles-ci, la première colonne de sato d'axe Nord-
Sud, à partir de l'Ouest

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