Arguments - article ; n°149 ; vol.39, pg 7-23
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Description

L'Homme - Année 1999 - Volume 39 - Numéro 149 - Pages 7-23
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 64
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Bernard Juillerat
Jacques Galinier
Patrice Bidou
Arguments
In: L'Homme, 1999, tome 39 n°149. pp. 7-23.
Citer ce document / Cite this document :
Juillerat Bernard, Galinier Jacques, Bidou Patrice. Arguments. In: L'Homme, 1999, tome 39 n°149. pp. 7-23.
doi : 10.3406/hom.1999.453497
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1999_num_39_149_453497Arguments
Patrice Bidou, Jacques Galinier, Bernard JuMlerat
%■■* e numéro regroupe la plupart des communications présentées au sym
posium « Une anthropologie psychanalytique est-elle possible ? » qui s'est
tenu à la Maison des sciences de l'homme, à Paris, les 5 et 6 juin 1997,
sous les auspices de l'Association pour la recherche en anthropologie
sociale1. Il s'agissait de donner la parole d'une part à des anthropologues
ayant eu recours, lors de leurs recherches, aux concepts de la psychanalyse,
d'autre part à quelques psychanalystes dont le rôle consistait à commenter
les exposés des ethnologues, mais surtout à défendre leur propres idées sur
la coopération entre les deux disciplines. L'anthropologie psychanalytique
n'est pas nouvelle, elle est contemporaine du fondateur de la psychanalyse.
Il est néanmoins nécessaire de reconsidérer ce que peut être aujourd'hui
une anthropologie d'inspiration psychanalytique, compte tenu des avan
cées tant des travaux ethnologiques de terrain et de la pensée anthropolo
gique en général que de la théorie du psychisme humain. Ce premier
symposium - qui sera suivi d'autres rencontres similaires — n'a pas cherché
à canaliser dans un thème directeur la diversité des objets et des
démarches ; il ne pouvait que faire état d'expériences menées séparément
dans plusieurs sociétés et des interprétations que celles-ci ont suscitées.
La place du psychisme dans les productions culturelles ¡JJ
UJ
II est significatif qu'aux yeux de nombre d'ethnologues la question de <^j
savoir si la psychanalyse a quelque chose à dire en anthropologie appel- l/>
lerait à répondre par oui ou par non. Et devant la crainte que susciterait une q
1. Avec le concours du CNRS, du Laboratoire d'anthropologie sociale et du Laboratoire d'ethnologie et h»
de sociologie comparative de l'Université Paris X-Nanterre. VWJ
L'HOMME 149/ 1999, pp.7à24 réponse affirmative, le recul est immédiat : plutôt assumer un non catégo
rique que prendre un tel risque, au mieux opposer une fin de non-recevoir
qui ne se remet pas en cause par la réflexion ou la mise à l'épreuve des hypot
hèses. On est parfois amené à déceler sous cette défense une réelle panique
à l'idée que la psychanalyse, la discipline étudiant le psychisme, puisse
envahir l'anthropologie sociale et, du même coup, anéantir plus d'un siècle
de réflexions socio-anthropologiques et de considérations diverses sur la
notion de culture. En outre, l'intruse pourrait non seulement mettre à mal
les acquis récents des sciences sociales, notamment l'expérience capitale et
controversée qu'a été le structuralisme, mais aussi compromettre l'engou
ement — le dernier en date — de ceux qui se sont soudain persuadés que le
fonctionnement du cerveau, voire seulement celui (computationnel ?) de
l'esprit, allait nous apporter les clés, cognitives et comportementales, des
systèmes sociaux et des constructions culturelles.
Certaines raisons de cette réticence ont été relevées ailleurs2. Nous
aimerions revenir ici sur l'une d'entre elles, qui nous paraît être à la source
même du refus de la psychanalyse par les sciences sociales, à savoir l'arg
ument selon lequel une discipline qui porte d'abord sur le psychisme indi
viduel ne saurait expliquer quoi que ce soit de la vie sociale et de l'histoire.
L'erreur consiste à nos yeux à se convaincre que l'individuel (ce qui se
produit chez un sujet) n'a strictement rien à voir avec ce qui relève des
relations et des institutions sociales, qu'il s'agit là de deux domaines
irrévocablement incompatibles. Le seul lien habituellement reconnu est
que tout individu existe dans et par une socioculture particulière, qu'il ne
peut être qu'un produit social. Certes, nul ne contestera cette évidence.
Mais elle ne peut prendre sa pleine signification que si l'on admet simul
tanément que toute culture est le résultat de ce que des générations ont
produit au cours des millénaires. Qui d'autre, hormis des individus vivant
à la fois de leur environnement et des relations qu'ils tissent entre eux,
aurait pu construire les sociétés et y élaborer les valeurs culturelles qu'on y
trouve ? — Dieu ? Une thèse créationniste apparaît en effet comme la seule
autre réponse possible, mais nous ne nous engagerons évidemment pas sur
ce terrain. . . On nous objectera par ailleurs que notre exigence d'un aller-
retour entre le social et l'individuel aboutit à un cercle dont il est imposs
ible de sortir et que, de ce fait, notre entreprise se révèle stérile. Mais c'est
justement en assumant cette circularité, c'est-à-dire en renonçant à toute
forme de causalité entre individu et société (dans un sens ou dans l'autre)
que l'on est conduit à penser le social et le psychique ensemble, à les
mettre en dialogue permanent. Ce que nous nommons, faute d'un
2. Bernard Juillerat, « Anthropologie/psychanalyse : les handicaps d'un dialogue », Journal des
Anthropologues, 1996, 64-65 : 19-31.
P. Bidou, J. Galinier, B. Juillerat meilleur terme, anthropologie psychanalytique porte cependant sur la part
de la culture sédimentée tout au long de l'histoire de l'humanité à partir
de la production psychique des personnes vivant en société plutôt que '
dans l'héritage socioculturel que tout individu reçoit au cours de sa vie.
Cela étant dit, il faut aussi souligner que le travail psychique se manifeste
de manière différente lorsqu'il prend assise dans la vie individuelle ou lors
qu'il est produit dans le cadre de la collectivité, de la société déjà organis
ée, comme lieu d'accueil et d'intégration des individus3.
Pourtant, reconnaître le rôle de l'individu ne suffit pas. Après tout, le
structuralisme a défini la place de l'homme par ce que Claude Lévi-Strauss
appelle l'esprit humain, entité générale, abstraite, hors (du) sujet (cf. infra,
p. 13). On pourrait suggérer que l'intellect, comme élément «froid» de
l'humain, s'applique plutôt à comprendre le monde non humain (la
nature), alors que sa partie «chaude», le psychique, auquel le corps est
étroitement lié, intervient davantage dans les rapports avec les autres. Car
c'est l'homme comme sujet en construction que la psychanalyse réintro
duit dans le discours sur l'individu et la société. L'anthropologie, « étude
de l'homme », a besoin d'intégrer la psychanalyse, « analyse du psy
chisme », tout simplement parce que cette part intérieure de l'homme
qu'est sa vie pulsionnelle et affective, consciente et inconsciente, gouverne
son existence et ses rapports avec les autres de la naissance à la mort, et
qu'il ne saurait y avoir d'anthropologie sans la prise en compte de ce fo
rmidable « système de transformations » intra- et intersubjectif qu'est la vie
d'un individu dans la société. Si l'on admet de voir dans le cerveau l'i
nfrastructure biologique de la pensée et dans les computations de l'esprit la
réalisation structurelle de ces connexions, on est bien obligé de convenir
que le sujet humain, comme être de désirs et d'émotions, est ailleurs.
Il ne s'agit pas pour autant de prétendre substituer en bloc une « causal
ité psychique », individuelle et collective, à une causalité sociohistorique
(ou même structurale). Il y a une conjonction de causalités des product
ions humaines et c'est dans le cadre de cette diversité que nous revendi
quons une place pour la vie psychique qui, derrière les faits circonstanciels,
sous-tend les agissements des hommes et leurs constructions culturelles.
Même dans le champ de l'histoire en train de se faire, et plus particulièr
ement de la guerre et de ses cruautés, un auteur comme André Green4 sou
ligne l'importance des processus psychiques qui contribuent à ce que la ^
barbarie humaine se rép

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