Aspects économiques des guerres civiles - article ; n°174 ; vol.44, pg 269-296
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Description

Tiers-Monde - Année 2003 - Volume 44 - Numéro 174 - Pages 269-296
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2003
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Macartan Humphreys
Aspects économiques des guerres civiles
In: Tiers-Monde. 2003, tome 44 n°174. pp. 269-296.
Citer ce document / Cite this document :
Humphreys Macartan. Aspects économiques des guerres civiles. In: Tiers-Monde. 2003, tome 44 n°174. pp. 269-296.
doi : 10.3406/tiers.2003.5386
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2003_num_44_174_5386ASPECTS ÉCONOMIQUES
DES GUERRES CIVILES
par Macartan Humphreys*1
Connaître les causes économiques des conflits et les structures des
économies de guerre aide à comprendre et à promouvoir le développe
ment économique. Cet article présente les travaux quantitatifs récents
dans le domaine des guerres civiles, à partir des apports de recherches
plus qualitatives. L'auteur étudie le rôle de la richesse, de l'inégalité, des
ressources naturelles et des politiques économiques sur les conflits, leur
coût, les activités des rebelles, des entreprises et des communautés inter
nationales. Il insiste enfin sur les domaines restant à explorer.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les guerres civiles se
sont multipliées. Ces guerres sont maintenant devenues bien plus cou
rantes que les guerres internationales, touchant, au milieu des
années 1990, près du quart de l'ensemble des pays du globe. Les vict
imes de ces guerres civiles sont, plus que par le passé, les producteurs
plutôt que les cibles militaires. Les groupes qui combattent jouent sou
vent un rôle de premier plan en tant qu'agents économiques. Dans cer
taines régions, ils font tourner les industries, ils contrôlent la
production et fournissent des services ; dans d'autres régions, leur
principale activité est le pillage. Ces changements se sont produits lors
de l'augmentation rapide de la prospérité mondiale qui s'est accom
pagnée d'inégalités croissantes. Et, durant cette période, ces guerres
ont éclaté, de plus en plus, dans les pays les plus pauvres de la planète.
Résultat : un monde de plus en plus divisé entre ces pays qui sont
riches et en grande partie paisibles et ceux qui sont plus pauvres et
*. Université d'Harvard.
1 . Ce chapitre est une version très condensée d'un document accessible sur Internet : « Economies
and Violent Conflict » (Économie et conflit violent) sur le site www.preventconflict.org/portal/economics.
Je souhaite remercier spécialement Martin Evans, James Fearon, David Hecht, Stephen Humphreys,
Andrew Mack et Michael Ross pour leurs commentaires détaillés et leurs conseils.
Revue Tiers Monde, t. XLIV, n° 174, avril-juin 2003 270 Macartan Humphreys
pour lesquels la guerre devient la toile de fond de l'activité écono
mique quotidienne.
Pourquoi une telle situation ? Quelles sont les causes de ces nou
veaux types de guerre ? Quel rôle jouent les richesses ou les inégalités ?
Quels sont les coûts et les bénéfices ? Comment les économies fonc
tionnent-elles durant ces guerres ? Comment les activités économiques
des ONG internationales, des bailleurs de fond et des entreprises exa
cerbent-elles la guerre ou apportent-elles la paix ?
Un certain nombre de chercheurs ont tenté ces dernières années de
clarifier ces questions en employant de nouvelles approches et de nouv
elles méthodologies. Quelques-unes des nouvelles approches recon
ceptualisent les rôles de la violence. Tandis que les analyses tradition
nelles mettaient l'accent sur ce que les belligérants espéraient obtenir
en gagnant une guerre, les nouveaux travaux de recherche se concent
rent sur ce que les combattants pourraient gagner pendant le conflit
(Jean et Rufin, 1996; Keen, 1998; Kaldor, 1999). Ces travaux
n'appréhendent pas la guerre comme un événement qui interrompt
l'activité économique. Ils identifient plutôt un lien entre les motifs de
la guerre et les perspectives économiques qu'elle offre lors du déroule
ment du conflit.
Une série d'études récentes, prolongeant ces idées, ont adopté les
outils d'économie appliquée : l'économétrie - méthode statistique
d'étude des processus économiques - a été employée par un groupe
prolifique de chercheurs du projet de la Banque mondiale Economies
of Civil War, Crime, and Violence (Économie de la guerre civile, du
crime et de la violence) ainsi que par tout un ensemble d'uni
versitaires1. Le résultat de ce travail promet d'avoir un impact impor
tant sur l'élaboration des politiques. Dans bien des cas, les cher
cheurs employant cette méthodologie ont uni leurs efforts à ceux des
universitaires travaillant sur des études de cas plus traditionnelles qui
sont maintenant souvent combinées à des travaux statistiques. Un
recueil d'études de cas a été élaboré par la Banque mondiale pour
tester la logique des modèles économétriques de ces chercheurs.
D'autres études ont été publiées par des groupes de recherche et des
ONG tels que la Queen Elizabeth House à Oxford, Y International
Peace Academy à New York et Y Overseas Development Institute à
Londres.
1. Par exemple par le programme Ethnicity. Insurgency and Civil Wars (Ethnicité, insurrection et
guerres civiles) à l'université de Stanford, le Program on Human Security (Programme sur la sécurité
humaine) à Harvard, et le State Failure Task Force (Groupe de travail sur l'échec de l'État) sponsorisé
par le gouvernement des États-Unis. Voir également les travaux du Groupe PRIO à Oslo. Pour une analyse
de la plupart de ces textes économétriques, voir Sambanis (2001). Aspects économiques des guerres civiles 271
Cet article va se concentrer sur ce type de travaux ; il les décrit et en
évalue les principaux résultats. Mais tout en étant favorable à
l'utilisation de méthodes économétriques utilisant des données de panel
pour identifier des relations présentant un intérêt pour l'élaboration des
politiques, l'article tire également des conclusions de travaux et de
recherches d'ordre plus qualitatif, menés par des organisations non
gouvernementales et par des organisations internationales, afin
d'apprécier sous un autre angle les interprétations des données quantit
atives, d'évaluer le choix des questions étudiées et de proposer des
moyens de tirer parti des résultats qualitatifs pour enrichir les analyses
quantitatives. Je procéderai ainsi : j'examinerai tout d'abord le rôle de
la richesse, des inégalités, des ressources naturelles et des politiques éco
nomiques dans le démarrage des conflits. Puis j'aborderai les coûts des
conflits et les activités économiques des rebelles, des entreprises et de la
communauté internationale, avant de prendre en considération les
explications économiques à l'extension des guerres dans le temps. En
conclusion, je résumerai les leçons et indiquerai les voies méritant d'être
explorées pour faire progresser l'étude de l'économie des conflits.
I. LES ORIGINES DES CONFLITS
Richesse et guerre civile
On pourrait s'attendre à ce que les nations riches soient plus vio
lentes que les nations pauvres car les riches ont davantage de biens à
défendre1. Les données économétriques suggèrent cependant que le
niveau de richesse ainsi que la croissance économique réduisent la pro
babilité d'apparition des guerres civiles2, tandis que les récessions
l'augmentent (Collier et Hoeffler, 2002 a ; Fearon et Laitin, 2003).
Les chiffres issus de modèles économétriques de la Banque mond
iale (fig. 1) présentent une relation frappante entre la richesse d'une
1. Certains chercheurs suggèrent que si la croissance économique mène à une augmentation de la
valeur des biens au sein d'une économie, elle peut également stimuler l'utilisation de la violence pour sécu
riser ces biens, au moins lorsque les États sont faibles. Cela signifie que violence et prospérité marchent
main dans la main (Bates, 2001).
2. Il existe cependant des raisons d'être prudent dans l'interprétation de ces résultats. L'une est que
ce résultat économétrique emploie de manière caractéristique des données cumulées et, en tant que telle,
elle mesure la richesse de l'économie dans sa globalité plutôt que. par exemple, le nombre ou la concentrat
ion de personnes pauvres au sein des pays. Une autre raison tient au fait que, les chances étant moindres
d

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