Au-delà des logiques et des catégories : notre responsabilité (Commentaire) - article ; n°1 ; vol.11, pg 33-40
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Description

Sciences sociales et santé - Année 1993 - Volume 11 - Numéro 1 - Pages 33-40
8 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

Emmanuel Hirsch
Au-delà des logiques et des catégories : notre responsabilité
(Commentaire)
In: Sciences sociales et santé. Volume 11, n°1, 1993. pp. 33-40.
Citer ce document / Cite this document :
Hirsch Emmanuel. Au-delà des logiques et des catégories : notre responsabilité (Commentaire). In: Sciences sociales et santé.
Volume 11, n°1, 1993. pp. 33-40.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/sosan_0294-0337_1993_num_11_1_1250Sciences Sociales et Santé, Vol, XI, n° 1, mars 1993
Commentaire
Au-delà des logiques et des catégories :
notre responsabilité
Emmanuel Hirsch*
Hommage à Michaël Pollak
« Ainsi le sida a-t-il créé une situation quasi expérimentale de mise à l'épreuve
des valeurs de tolérance et de liberté individuelle et des capacités d'une
société moderne à répondre rapidement à une menace imprévue. La concent
ration de la maladie dans des groupes minoritaires et marginalisés est à l'or
igine de ce caractère expérimental in vivo. »
Michaël Pollak, Le sida : une question de justice sociale, in Actions et
recherches, n° 3, septembre 1988, p. 27.
Gérard Fabre nous livre une étude très subtile qui s'emploie à
décrypter dans le contexte de l'infection du VI H le recours privilégié à
la notion de transmissibilité plutôt qu'à celle de contagiosité. La mise
en mots comme l'articulation des discours impliquent nécessairement
un effort de cohérence, à défaut une tentative de régulation selon des
normes considérées opportunes, voire justifiées. Elles ne sont jamais
neutres. Ainsi, le choix d'un concept peut-il parfois relever d'une idéo-
logisation qui n'a rien à voir avec une élaboration, une requête de la
pensée.
* Emmanuel Hirsch, directeur d'études à l'IFREM. EMMANUEL HIRSCH 34
Force est de le constater, c'est à la notion de maladie chronique
transmissible qu'il est fait référence dans le discours circulant d'info
rmation et de prévention induit par l'épidémie. Cette option semble
consensuellement admise ; mieux, elle s'affirme dans son utilitarisme
apparent, favorisant la détermination de méthodologies et d'initiatives
de nature à prévenir les excès et à maintenir le phénomène sida dans
un champ d'évaluation de la sorte défini et comme délimité, pour ne pas
dire possiblement contrôlé.
En marge de l'étude conduite par Gérard Fabre, je me propose
donc de poser quelques points de vue, sans les envisager avec l'appar
eil critique scientifique développé par l'auteur. Dans un premier
temps, j'évoquerai quelques éléments propres à ce qu'il pourrait en être
d'une lecture des sensibilités avivées en temps de sida. Succéderont des
annotations relatives aux notions en question et comme en cause dans
l'article de Gérard Fabre.
Des mentalités pour exceptions
La revue Agora (1) consacrait son numéro d'automne 1991 à Sida
et société. Très certainement inspiré par les couleurs du temps qui
viraient ostensiblement en des tonalités incertaines, équivoques et à
bien des égards annonciatrices de tourmente, Emmanuel Maheu intitu
lait son éditorial : Sida, sommes-nous en échec ?
Dans ma contribution — De l'exception à la règle — politique,
individu et responsabilité — j'optais pour une analyse liminaire de
l'élaboration d'une logique d'exception, mode spécifique et sans précé
dent d'une prise en compte moderne et démocratique d'un phénomène
épidémique de dimension internationale. Je préférais envisager une
évaluation en creux ou plus précisément une approche qualitative des
dispositifs qui participaient d'une perception différente et inventive de
ce qu'était en mesure de constituer aujourd'hui une réponse éthique-
ment satisfaisante et pratiquement nécessaire à cette mise en cause glo
bale également perçue en tant que test social radical. Marc Auge (2)
(1) Agora = éthique, médecine, société, Hôpital Rothschild, 33, boulevard de Picpus,
75011 Paris Cedex 12.
(2) « La société, le sida et le diable », Entretien avec l'anthoropologue Marc Auge, par
Guitta Pessis-P aster nak, Le Monde, 20 décembre 1988 : « Le sida correspond à ce que
les ethnologues appellent, un «fait social total ». (...) En même temps, c'est un phéno
mène épidémique qui soulève des problèmes de prévention, de recherche, d'organisat
ion, bref des problèmes sociopolitiques, ne serait-ce que pour prévenir les injonctions CATÉGORIES ET RESPONSABILITÉS 35 LOGIQUES,
évoque à ce propos les notions de fait social total et d'épreuve de
liberté. On pourrait ramener cette conception à une formulation caus
tique : le sida comme fait de liberté.
J'articulais ma réflexion autour des élaborations et résolutions
qui semblaient rassembler, dans une certaine unité de pensée et à cer
tains égards d'action, ceux qui avaient découvert les principes d'une
solidarité par la pratique même de leur engagement effectif dans les
différentes formes actuelles de la lutte contre le VIH : qu'il s'agisse
d'information, de prévention, d'accompagnement et de prise en charge
des personnes séropositives ou malades, d'interventions publiques,
voire politiques. La solidarité comme expression d'une philosophie
pratique des droits et devoirs de la personne humaine, mais davantage
encore comme capacité d'assumer les temps difficiles de l'impuissance
thérapeutique, de la progression quantitative du nombre des personnes
contaminées ou malades dans le contexte éprouvé des menaces diffuses
que les peurs induites peuvent faire peser sur la vie démocratique.
Je concluais mon texte d'Agora par la caractérisation d'une
logique d'exception — à certains égards concevable comme idéologie
d'exception —forte des principes d'une conscience à la fois individuelle
et collective susceptible de générer une sensibilité morale et une atten
tion humaine de nature à comprendre et à vivre le sida autrement qu 'un
échec fatal justifiant dérives et abdications. Réalité d'une épidémie qui
en appelle impérativement à la qualité d'une résistance active — voire
d'une pédagogie de la résistance — contre ce que serait précisément
l'échec pour et de l'homme, dans son inaptitude à assumer intégrale
ment sa part de responsabilités comme ses obligations humaines. Plus
avant dans la réflexion, je constatais également que les efforts de ges
tion des impacts humains et psycho-sociaux du VIH relevaient d'une
prise en compte pragmatique d'un certain nombre de caractéristiques
certainement liées à notre perception de la personne malade comme de
la maladie aujourd'hui : en termes de souci de soi, de liberté, d'autono
mie mais également de responsabilités reconnues, acceptées, partagées.
de ceux qui, comme dans tous les cas d'épidémie grave, voudraient faire de l'ordre social
avec le malheur individuel et collectif. (...) Au nom de la lutte contre les ravages de
l'épidémie, on peut, morceau par morceau, entamer l'ensemble des libertés. Dès qu'on
est engagé dans un processus de remise en ordre, celui-ci gagne toutes les sphères de
la vie. Par conséquent, on ne peut pas être partisan d'un retour à l'ordre dans la vie
sexuelle et rester libéral sur d'autres plans. Je crois que cela peut être un test pour la
capacité démocratique d'un certain nombre de pays. Les individus vont s'y éprouver,
comme à l'occasion de tout malheur, de tout défi, mais aussi les systèmes politiques.
C'est fondamentalement d'une épreuve de liberté qu'il s'agit. » 36 EMMANUEL HIRSCH
Responsabilités qui fondent désormais notre sentiment et notre percept
ion ou vécu de l'appartenance à une communauté humaine.
On peut certainement évoquer à ce propos les acquis inhérents à
la tradition des droits de l'homme qui pose comme majeure et décisive
une notion comme le respect de l'autonomie de la personne morale. La
cause commune — dite par dénaturation des principes intérêt de la col
lectivité —

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