Bouffons sacrés du Cercle de Bougouni - article ; n°1 ; vol.24, pg 63-110
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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1954 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 63-110
48 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

V. Pâques
Bouffons sacrés du Cercle de Bougouni
In: Journal de la Société des Africanistes. 1954, tome 24 fascicule 1. pp. 63-110.
Citer ce document / Cite this document :
Pâques V. Bouffons sacrés du Cercle de Bougouni. In: Journal de la Société des Africanistes. 1954, tome 24 fascicule 1. pp.
63-110.
doi : 10.3406/jafr.1954.1862
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1954_num_24_1_1862SACHES DU CERCLE DE BOUGOUN1 BOUFFONS
(SOUDAN FRANÇAIS)
PAR
VlVIANA PÂQUES
Introduction
Dans la région de Bougouni certains cultes ou djo ont réussi à
conserver leurs caractères propres et leur autonomie malgré le déve
loppement des sociétés religieuses du komo (qui ont accompagné
l'expansion malinké vers l'est) et malgré la domination de l'Islam qui
a coïncidé avec l'invasion Foula. Ces cultes, à notre connaissance,
n'ont pas encore été étudiés. D'après des informations recueillies sur
place, le djo s'apparenterait au culte du kwore 4 Certains prétendent
qu'il est incompatible avec le komo ; toutefois, malgré l'insuffisance
des précisions que nous avons pu recueillir sur ces sociétés secrètes,
nous serons beaucoup moins affirmatifs. Il nous a semblé en effet
relever des ressemblances non négligeables, particulièrement dans le
rituel. Nous avons noté aussi que le djo composait parfois avec l'Islam,
qui est pourtant d'une nature totalement étrangère.
L'abbé Henry cite le djo parmi les « boli à grande envergure » 2.
Tauxier 3 écrit à son sujet : « Le Djo ou Dio ou Gyo, est une vieille
divinité, semble-t-il. On fait encore jurer sur elle. Pour cela, on creuse
un trou et l'on met dedans un couteau, une hache, une houe, des
clefs, des flèches et même des balles de fusil. L'on ajoute là-dessus
une grosse pierre et des racines d'arbre, puis on rebouche
soigneusement. C'est sur lui que l'on jure et, si l'on s'est parjuré,
la divinité vous tue. »
Les informations précédemment recueillies sur le djo nous ont paru
assez sommaires ou assez fragmentaires pour justifier de notre part
1. La société du Kworé a été décrite par l'abbé Henhy, Les Bambara, Munster W., 1910. —
Delafosse, Ht-Sénégal-Niger. (1923) — Tauxier, La religion bambara, Paris, 1927. — Germaine
Dieterlen, Essai sur la religion bambara, Paris, 1950.
2. Abbé Henry, Les Bambara, p. 146.
3. Tauxier, La religion bambara, p. 329. 64 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
une étude plus complète. Au cours de l'année 1953, nous avons pu
suivre, analyser et filmer un certain nombre de manifestations dans
la région de Bougouni, une des rares où il se soit conservé jusqu'à nos
jours.
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES djo
Les régions où l'on trouve encore le djo ont à peu près complètement
échappé à la domination directe des grands empires soudanais ;
elles sont restées à un stade d'anarchie familiale dans lequel le chef
de village est le vrai maître de la terre. C'est peut-être à ces circons
tances qu'elles ont dû de conserver leur particularisme religieux.
Le djo (on nomme ainsi le culte aussi bien que l'association cultue
lle) se pratique dans un grand nombre de cantons du cercle de
Bougouni, en particulier à Tinkadougou, Bern eledougou, Kokum,
Tiam, Dialakadougou, T*iendougou, Tiemala, Zana, Yoroubadougou,
Sibirila. On le trouvait récemment encore dans le Nienadougou
actuellement sous la domination Foula et dans le Niene où le Komo
a gagné quelques villages. Les cantons de Diban Keleyadougou»
Ba Sidibé, Guandiaka, Guanam, Kouroulamini et le Banimonotié
sont acquis au Komo ; cependant, certains villages tels que Guala-
mina (du Kouroulamini) font encore le djo. Dans d'autres cantons,
sous l'influence des chefîeries peuls, la population est passée à l'Islam.
La pratique du djo débordait le Cercle de Bougouni dans la direction
de Sikasso ; on la retrouve aujourd'hui encore dans le cercle de Kignan.
Un djo réunit quatre sociétés : le n'keniç, le n'tokofa, le dyôburu
et le bosso. A notre connaissance, le bosso n'a donné lieu à aucune
manifestation en 1953. Nous avons pu recueillir, en ce qui concerne
le cercle de Sikasso, des informations sur les pratiques du village
de Klila (canton de Kignan). Pour le cercle de Bougouni, nous avons
obtenu des détails sur les cantons de Sibirila (où le n'kenie et le
n'tokofa, pratiqués autrefois dans tous les villages ne subsistent plus
qu'à Garanko), du Kouroulamini, du Yenidougou. Enfin, dans le
canton du Tiemala, nous avons pu repérer plus nettement encore la
répartition : n'tokofa à Sansola, Soron et Banan, n'keniç à Banan et
à Веко (où l'on pratique aussi le bosso). Dans le village de Sola ou
Sogola, du même canton, les membres des diverses sociétés se répar
tissent par quartiers : au n'tokofa la nouvelle ville fortifiée, Sokura
et le quartier de Kerfala de l'ancienne ville ; au n'keniç, Diola, le
plus ancien quartier de la vieille vi le, Sokuro et les trois autres quart
iers, Temorola, Bankona et Nodia. Tiemara, chef du village de Sola,
résidant à Djola, est aussi le chef actuel (ou Siâ) du djo. SACRÉS DU CERCLE DE BOUGOUNI 65 BOUFFONS
Méthode suivie pour l'étude des djo
Nous avons pu prendre personnellement contact avec les sociétés
du dyôburu de Gualamina (Kouroulamini) du n'keniç et du rítokofa
de Garanko (Sibirila) et de Sola (Tiemala). Les films que nous avons
rapportés constituent des documents d'autant plus précieux que les
djo sont manifestement en voie de disparition. Pour la première fois
en 1953, Веко s'est abstenu, et Sola a peut-être célébré la cérémonie
pour la dernière fois.
Nous sommes loin d'être arrivés à une compréhension totale de ces
institutions. Les éléments que nous allons apporter ne sont que
l'amorce d'une étude rendue d'autant plus difficile que le sens de
toutes ces manifestations est tenu très secret. D'autre part, la pénurie
de documents expliquant l'organisation sociale des populations qui
font le djo complique encore son interprétation. Nous savons, par
le exemple, que les forgerons ne pratiquent pas les djo cités ci-dessus,
leur étant à part : celui des vautours (duga) (v. photo). Ex. : le djo du
Youroubadougou. Les villages qui le n'keniç et le n'tokoja
n'ont jamais eu de forgerons ; des colporteurs leur fournissent les
instruments nécessaires. Donc, en principe, ces Mariko, de Sola, qui
pratiquent le djo, ne devraient rien avoir de commun avec les forge
rons. Ce sont des cultivateurs ; même, en suivant une tradition (qu'on
retrouve d'ailleurs chez plus d'une population de la région de Bou-
gouni) une partie d'entre eux auraient été à l'origine des pêcheurs
venus du Siankadougou, réduits en esclavage par les Sangaré puis
libérés ; une autre branche serait venue de Koulikoro (Bélédougou)
où. se trouve .enterré l'ancêtre fondateur. (Lorsqu'un Mariko se rend
à Koulikoro, il reçoit encore l'épaule de l'animal sacrifié à l'ancêtre).
Or, ces cultivateurs dont une partie même étaient des pêcheurs
s'appellent pour la plupart Noamoudyon Mariko (пиши «forgeron»;
dyô «esclave ») ou Noumou Mariko, etc. Il existe même une tradition
à Bougouni selon laquelle les deux familles véritables de forgerons
sont les Kané et les Mariko, noms de deux frères, Kané étant l'aîné 1.
On voit par cet exemple avec quelle circonspection nous devons mener
notre étude.
Le djo, association cultuelle obligatoire, fournit à ses membres une
initiation qui a lieu tous les sept ans. Les jeunes gens, répartis en
différentes sociétés (n'keniç, n'tokoja, dyôburu et bosso), reçoivent
un enseignement et naissent à une vie nouvelle. Ils doivent pendant
1. Dans le cercle de Bamako, les véritables forgerons iont partie d'une des trois familles su
ivantes : Fané, Balo et Kané (qui étaient à l'origine trois frères). SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES 66
un an, sous la direction de leur chef (siâ) remplir un certain nombre
d'obligations, pour la plupart cérémonielles, dont le but est d'assurer
la survie du village et la fertilité de la terre. Au cours de ces céré

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