Contribution de l expérience latino-américaine à une théorie du développement politique après la colonisation - article ; n°21 ; vol.6, pg 59-80
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Tiers-Monde - Année 1965 - Volume 6 - Numéro 21 - Pages 59-80
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jacques Lambert
Contribution de l'expérience latino-américaine à une théorie du
développement politique après la colonisation
In: Tiers-Monde. 1965, tome 6 n°21. pp. 59-80.
Citer ce document / Cite this document :
Lambert Jacques. Contribution de l'expérience latino-américaine à une théorie du développement politique après la
colonisation. In: Tiers-Monde. 1965, tome 6 n°21. pp. 59-80.
doi : 10.3406/tiers.1965.2056
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1965_num_6_21_2056CONTRIBUTION DE L'EXPÉRIENCE
LATINO-AMÉRICAINE
A UNE THÉORIE
DU DÉVELOPPEMENT POLITIQUE
APRÈS LA COLONISATION
par Jacques Lambert (i)
Dans leur quasi totalité, les anciennes colonies espagnoles et portu
gaises de l'Amérique latine ont acquis l'indépendance entre 1811 et 1825,
mais, après plus d'un siècle d'indépendance, bien peu des vingt Répub
liques latino-américaines sont parvenues à se donner des institutions
politiques stables.
Bien que les troubles politiques n'aient pas été également fréquents
dans tous ces pays, ils en ont tous connus de nombreux dans le passé et
presque tous les voient se renouveler aujourd'hui. A un moment ou à
un autre de leur histoire, tous les pays latino-américains ont traversé
des périodes de dictature; les régimes politiques ont si souvent changé
que l'on peut compter, pour l'Amérique latine, 180 ou 190 constitutions,
dont certaines n'ont pas duré assez longtemps pour être appliquées;
lorsque ces constitutions, de forme généralement présidentielle, étaient
en vigueur, les successions présidentielles ont presque toujours été
difficiles et, dans quelques pays, les présidents qui n'ont pas été renversés
avant l'expiration de leur mandat sont une rare exception; partout le
fonctionnement régulier des institutions présidentielles est fréquemment
(1) Né en 1901. Professeur à la Faculté de Droit et des Sciences économiques de Lyon;
directeur de l'Institut de Droit comparé de Lyon; docteur honoris causa de l'Université
nationale du Brésil. — Principales publications : Histoire constitutionnelle des Etats-Unis ; Le
Brésil ; Os dois Brasis ; Problèmes démographiques contemporains ; Amérique latine, structures sociales
et institutions politiques (Presses Universitaires de France, collection « Thémis », 1963).
59 JACQUES LAMBERT
interrompu par le recours aux pouvoirs exceptionnels et à l'état de
siège; enfin, le coup de grâce est le plus souvent donné à des régimes
politiques fragiles par des insurrections militaires et ces pronunciamentos
se sont renouvelés et se renouvellent encore si rapidement que, en ne
citant que ceux qui ont réussi, on peut en compter plus de quarante-
cinq depuis 1930. L'Amérique latine s'est donc fait une solide répu
tation d'agitations politiques incessantes.
L'Amérique latine s'est fait aussi une réputation d'agitations poli
tiques incohérentes. En dehors, en effet, de trois révolutions sociales
profondes qui ont été opérées, au Mexique en 1910, en Bolivie en 1952,
et surtout à Cuba, en 1959, ces agitations politiques paraissent avoir
été stériles. Les multiples coups d'État militaires, les insurrections, les
dictatures et les pouvoirs exceptionnels, les changements de consti
tutions ont si peu modifié les structures sociales et les conditions de la
vie politique qu'il paraît difficile de leur découvrir un sens et de leur
attribuer une autre cause qu'une incapacité congénitale des Latino-
Américains à se gouverner suivant les formes de la démocratie repré
sentative auxquelles ils sont cependant attachés.
Et pourtant, en dépit d'une réputation si bien établie, l'expérience
politique de l'Amérique latine est très loin d'être négligeable. A l'époque
où tant de pays nouvellement indépendants se trouvent, comme s'est
trouvée l'Amérique latine, en face des problèmes politiques qui suivent
la décolonisation et accompagnent les premières phases du développe
ment économique et social, il y aurait intérêt à observer de façon plus
attentive une expérience latino-américaine qui est seule à exister et qui
est déjà plus que séculaire. En effet, si l'instabilité politique de l'Amérique
latine est incontestable, il est par contre inexact que les agitations poli
tiques qui se renouvellent soient incohérentes.
Si l'on s'efforce de classer les régimes politiques qui se sont succédé
en fonction des problèmes qu'ils avaient à résoudre, au lieu de se borner
à enregistrer les insurrections, les coups d'État militaires, les révolutions
et à en faire le total, en quelque endroit et à quelque époque qu'ils se
soient produits, on arrive à la conclusion que, sauf dans quelques pays
qui ne sont jamais véritablement entrés dans la voie du développement,
les troubles politiques se sont concentrés dans quelques grandes périodes.
Loin d'être dépourvus de causes profondes et d'effets sérieux, les
troubles politiques caractéristiques de chacune de ces périodes ont
correspondu à des phases nécessaires dans la construction de nations
60 CONTRIBUTION DE L'EXPÉRIENCE LATINO-AMÉRICAINE
sur la ruine des Empires coloniaux. Si les régimes ont eu une vie si
éphémère et si troublée c'est que ces phases se succédaient avec une
extrême rapidité et que les mêmes bouleversements qui s'étaient éche
lonnés sur cinq ou six siècles dans l'histoire de l'Europe s'accumulaient
en quelques décennies en Amérique latine. A l'issue de chacune de ces
phases d'agitations et de révolutions, on peut enregistrer des résultats
limités mais constructifs dans le développement politique de l'Amérique
latine.
A partir de l'expérience politique latino-américaine, on peut donc
tenter de construire une théorie du développement politique à l'issue
de la colonisation. Cette ne serait sans doute pas directement
applicable aux pays décolonisés après la seconde guerre mondiale,
car elle a commencé un siècle plus tôt, dans une conjoncture inter
nationale bien différente, alors que ne s'exerçait pas l'attraction des
démocraties populaires. Cela ne signifie cependant pas que cette théorie
soit sans valeur d'enseignement pour ces pays nouvellement indé
pendants; elle est, en tout cas, nécessaire pour comprendre la vie poli
tique latino-américaine et juger plus sainement de ses mérites aussi bien
que de ses défauts (i).
I. — La phase de construction de l'État
ET LE RÉGIME DE DICTATURE DU CauDILLO
Sauf au Brésil, où l'indépendance, pacifiquement proclamée, laissait
subsister la discipline monarchique, la première tâche qui s'imposait
était celle d'une construction des États. L'indépendance de l'Amérique
latine était le résultat d'une idéologie nationaliste importée du monde
nord-atlantique par de très petites élites, mais ce nationalisme, que
la masse des populations asservies ne pouvait pas partager, précédait
en Amérique latine l'existence de nations. Ce ne furent pas, non plus,
des États latino-américains qui devinrent indépendants, mais bien
plutôt de petites collectivités, constituées par les villes et surtout par
de grands domaines, les latifundios, qui étaient encore des seigneureries.
(i) Cette théorie n'est applicable, ni à l'Argentine, ni à l'Uruguay, ni sans doute
au Costa Rica, dont les deux premiers tout au moins, du fait de leurs populations entièrement
renouvelées par l'immigration européenne, ne connaissent pas la même survivance de
structures coloniales archaïques imposées dans les autres pays aux indigènes
ou aux populations africaines importées pour l'esclavage.
6l LAMBERT JACQUES
JLe remembrement de la souveraineté et le caudïïïisme
Sur des territoires, arbitrairement délimités par les anciens cadres
de l'administration contre laquelle il avait fallu lutter, la disparition des
autorités espagnoles laissait un vide que rien autre ne venait remplir
que l'existence, dans les villes, de corps municipaux, les cabildos et, dans
les campagnes, l'autori

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