Croissance démographique, progrès et pauvreté - article ; n°6 ; vol.47, pg 1533-1554
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Description

Population - Année 1992 - Volume 47 - Numéro 6 - Pages 1533-1554
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ronald D.lee
Croissance démographique, progrès et pauvreté
In: Population, 47e année, n°6, 1992 pp. 1533-1554.
Citer ce document / Cite this document :
D.lee Ronald. Croissance démographique, progrès et pauvreté. In: Population, 47e année, n°6, 1992 pp. 1533-1554.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_1992_num_47_6_3937г.
Croissance démographique,
progrès et pauvreté*
Ronald D. Lee**
On peut tirer quelques généralités de l'histoire de la croissance dé
mographique mondiale :
1 - la population est restée très faible, probablement de l'ordre de
3 à 8 millions, pendant des centaines de milliers, voire des millions, d'an
nées;
2 - durant les dix derniers siècles, la croissance s'est accélérée et
la population a eu tendance à augmenter plus qu'exponentiellement;
3 - les fluctuations à la hausse de la taille de la population ou des
taux de croissance sont souvent liées à des revenus en baisse et récipr
oquement ;
4 - mais les époques de croissance démographique soutenue ont aussi
fréquemment été des périodes d'expansion économique.
Pour expliquer et interpréter ces faits, on peut s'appuyer sur les deux
principales théories traitant des relations réciproques entre économie et dé
mographie en très longue période. D'une part, nous disposons de la théorie
de Malthus, fort bien décrite par les modèles d'équilibre et d'optimum
démographiques de Sauvy (1969) dans le volume I de la Théorie Générale
de la Population. D'autre part nous pouvons nous inspirer des théories
plus récentes émises par Boserup et Simon, soulignant que l'augmentation
de la taille de la population est le moteur du progrès technique et une
complexité sans cesse croissante de l'organisation socio-économique. Sau
vy avait déjà présenté nombre de ces idées dans les premiers chapitres du
second volume de la Théorie Générale. Mais aucune de ces théories ne
permet à elle seule d'expliquer les faits esquissés ci-dessus. Nous montre
rons cependant que leur combinaison est cohérente avec ces faits.
♦* * Traduction Université Rozenn de Californie Martinoia. à Berkeley (États-Unis).
Cette recherche a bénéficié de deux subventions du NICHD (RO1-HD24892 et ROI -
HD18107). Je remercie Hans Jonhson pour son aide pendant la recherche ainsi que W. Brian
Arthur, Shripad Tuljapurtear, Ken Wachter, Patrick Galloway et Gene Hammel pour leurs
commentaires.
Population, 6, 1992, 1533-1554 1 534 CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE, PROGRÈS ET PAUVRETÉ
Dans le cas, notamment, de rendements décroissants en agriculture,
les forces malthusiennes contribuaient, doucement mais sûrement, à diriger
la population vers un niveau d'équilibre. Les fluctuations démographiques
autour de cet équilibre donnaient lieu à des variations inverses du revenu
par tête. En même temps, le niveau d'équilibre lui-même se modifiait pro
gressivement à la hausse, et l'augmentation de la taille de la population
communiquait une impulsion à ce changement ; cette croissance démogra
phique tendait à favoriser le progrès technique. De cette façon, les deux
forces entretenaient une spirale ascendante entre population et économie.
Une telle spirale ne peut pas être infinie dans un monde où les ressources
sont limitées, et la population mondiale bute aujourd'hui sur des limites
que le capital et le progrès technique ont du mal à déplacer. Les idées
émises dans cet article sont donc plus pertinentes pour le passé que pour
l'époque actuelle ou le futur.
Après un rappel de la théorie malthusienne, nous présenterons quel
ques données empiriques sur sa portée. Nous exposerons ensuite la théorie
de Boserup. Enfin un modèle synthétique simple nous permettra d'effectuer
quelques simulations pour répondre aux questions suivantes : que se se
rait-il produit si la population avait atteint un niveau plus élevé à certaines
époques ? Que serait-il advenu si la population avait eu tendance à croître
plus rapidement ? Sous quelles conditions un planificateur choisirait-il une
impulsion démographique dans le but d'accélérer le développement éco
nomique? Si les variations de la taille de la population ou du taux de
croissance en longue période sont historiquement corrélées à des modifi
cations inverses du revenu par tête, est-ce pour autant un argument contre
l'hypothèse de Boserup?
La théorie malthusienne La théorie malthusienne est fondée sur
deux affirmations. Tout d'abord, lorsque la
population croît, la production augmente moins que proportionnellement,
du fait des rendements décroissants en agriculture et de la quantité limitée
de terre ; de telle sorte que salaires et revenus déclinent. Les rendements
décroissants étaient plus importants à l'époque de Malthus qu'ils ne le
sont de nos jours, puisque les ressources naturelles, et en particulier la
terre, jouaient un rôle prééminent dans la production agricole par rapport
aux autres facteurs tels que les engrais, les tracteurs, les systèmes d'irri
gation, les insecticides ou les nouvelles variétés de plantes à rendement
élevé. La terre représentait une bien plus grande contribution à la product
ion agricole que de nos jours (peut-être 40% en Angleterre vers 1700,
contre 10% dans certains pays actuellement), et l'agriculture constituait
une plus forte part de la production totale.
Ensuite, Malthus pensait que des salaires ou des revenus faibles in
duiraient des taux de croissance démographique plus faibles et inversement,
à travers différentes réactions démographiques connues sous le nom
d'« obstacles malthusiens». La mortalité s'élèverait lorsque la population CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE, PROGRÈS ET PAUVRETÉ 1535
est moins bien nourrie, vêtue, logée. Les gens, au moins dans la majeure
partie de l'Europe, différeraient leur mariage jusqu'à ce qu'ils aient les
moyens de fonder et élever une famille ; les salaires les plus bas conduisant
ainsi aux mariages les plus tardifs. La fécondité au sein du mariage dé
pendrait aussi des modifications du revenu. Mais Malthus lui-même désap
prouvait fortement la contraception et ne tenait généralement aucun compte
de cette éventualité.
Cette théorie est décrite par la figure 1. Le cadran supérieur illustre
la relation entre le taux de croissance de la population et le niveau de
revenu ou de salaire réel par tête. L'intersection entre la courbe représent
ative du taux de croissance démographique et la droite 0 correspond au
niveau de salaire qui induit une croissance nulle de la population. Ce salaire
(noté W* sur le graphique) est le salaire d'équilibre de longue période
vers lequel la population ramènera à chaque fois le système. Il est appelé
salaire de «subsistance» ou «prix naturel de la main-d'œuvre» par Malt
hus. La partie inférieure du graphique décrit la relation entre la taille de
la population (qui détermine l'offre de travail) et le salaire. La courbe
décroît du fait des rendements décroissants. Elle représente la demande de
travail et se décalerait vers le haut et la droite si on prenait en compte le
progrès technique, l'investissement, ou la découverte de nouvelles ressources,
puisqu'ainsi une population plus importante qu'auparavant pourrait subsister
pour un revenu inchangé(1). La taille de la population correspondant au salaire
Taux de Obstacles malthusiens croissance
démographique
Figure 1. - Détermination de la population et du salaire d'équilibre
dans un système malthusien
Voir Lee, 1980. 1
I
1
I
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I
I
I
CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE, PROGRÈS ET PAUVRETÉ 1536
d'équilibre est connue comme étant la population d'équilibre et est notée
P* sur le schéma.
La théorie malthusienne II existe de nombreuses confirmations em-
à l'épreuve des faits piriques de la théorie de Malthus, au moins
en ce qui concerne l'Europe pré-industrielle.
En voici brièvement deux exemples. Tout d'abord considérons la relation en
tre les tendances démographiques et les salaires réels pour ce qui est de
l'Europe pré-industrielle à l'exception de la Russie occidentale et d'une

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