Culture et durabilité - article ; n°130 ; vol.33, pg 339-354
17 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Culture et durabilité - article ; n°130 ; vol.33, pg 339-354

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
17 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Tiers-Monde - Année 1992 - Volume 33 - Numéro 130 - Pages 339-354
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 6
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Lourdes Arizpe
Fernanda Paz
Culture et durabilité
In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°130. pp. 339-354.
Citer ce document / Cite this document :
Arizpe Lourdes, Paz Fernanda. Culture et durabilité. In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°130. pp. 339-354.
doi : 10.3406/tiers.1992.4693
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1992_num_33_130_4693CULTURE ET DURABILITÉ
par Lourdes Arizpe*
et Fernanda Paz**
Le concept de durabilité est semblable à celui de démocratie, dont les
définitions varient selon le contexte social, vague dans ses applications,
et pourtant essentiel pour définir des objectifs à long terme. Ces deux
concepts représentent un idéal de comportement sociopolitique et
cependant il est impossible de mesurer leurs effets tant qu'ils n'ont pas
été intégrés dans les pratiques quotidiennes des différentes sociétés.
Deux questions peuvent nous aider à comprendre ce que signifie le
concept de développement durable. Il faut d'abord se demander si la
durabilité est un élément de culture, c'est-à-dire, un idéal à mettre en
pratique, et ensuite si cette idée de durabilité constitue le résultat
complexe et cumulatif de négociations sur le terrain entre acteurs
sociaux. Cette analyse suppose que les modèles de développement sont
des objectifs politiques communs d'une société qui porte en elle de tels
idéaux et de telles négociations.
Quelle place tient la durabilité dans un modèle de développement ?
Réside-t-elle dans les valeurs culturelles derrière les idéaux abstraits ?
Ou dans les perceptions et les intérêts qui poussent différents groupes
sociaux et politiques à agir d'une certaine manière face à l'environne
ment ? Ou encore dans les échanges biophysiques entre les sociétés et le
milieu naturel ? Il semblerait que les débats politiques et les médias mett
ent plutôt l'accent sur cette dernière hypothèse. Cependant, nous nous
attacherons ici à démontrer que les deux premiers arguments sont les
facteurs qui définiraient le mieux nos échanges biophysiques avec le
milieu naturel. C'est pourquoi nous tenterons d'analyser le concept au
regard de ces deux courants.
• Directrice de l'Instituto de Investigation antropológica, Universidad nacionál autonoma de
Méjico.
•* Chercheur associé à l'Instituto de Investigation antropológica.
Revue Tiers Monde, t. XXXIII, n° 130, Avril-Juin 1992 340 Lourdes Arizpe et Fernanda Paz
LA DURABILITÉ : UN IDÉAL POUR LE PROCHAIN MILLÉNAIRE
L'idée de développement durable telle que l'a d'abord définie la
Commission des Nations Unies pour le Développement et l'Environne
ment est l'expression d'une nouvelle volonté politique qui exprime, ni
plus ni moins, le désir de l'homme de continuer à vivre sur cette planète
de la même façon qu'il vit aujourd'hui. Cependant il devra s'adapter. En
effet, nous sommes actuellement confrontés au fait que nous connais
sons les faiblesses du système et pourtant nous n'avons pas encore eu le
temps de faire l'expérience de nouvelles formes d'organisation interna
tionale, de gouvernement et d'échanges commerciaux qui puissent être
porteurs.
Cela explique en partie le scepticisme de certains face à ce concept
de durabilité. Ils se demandent s'il a une valeur scientifique et pensent
plutôt qu'il est né d'une réalité politique et n'a pas sa place dans le
discours scientifique. C'est à mon avis une vue étroite, car n'oublions
pas que pratiquement tous les concepts classiques utilisés dans les
sciences sociales, dont on reconnaît aujourd'hui la valeur scientifique,
sont issus de la philosophie politique et de l'analyse sociale du siècle
dernier.
Ce scepticisme s'exprime également chez ceux qui connaissent bien
les processus de développement et qui doutent que l'idée de durabilité
puisse jamais être mise en œuvre, ceci en raison des puissantes rési
stances des intérêts macro-économiques et politiques. A travers cet
argument ils ne font que manifester une préoccupation majeure, à savoir
que le ralentissement du développement dans un monde déséquilibré ne
fera qu'aggraver les inégalités. C'est pourquoi, ces groupes mal informés
affirment que le concept de durabilité — c'est-à-dire les préoccupations
liées à l'environnement — va à rencontre du développement, un point
de vue qui heureusement tend à disparaître. Cependant, il est vrai que le
Nord souhaite la durabilité, alors que le Sud reste plus attaché au déve
loppement. Ce statu quo profite au Nord, mais sa surconsommation des
ressources naturelles menace tout autant la vie de la planète que la sous-
consommation sociale du Sud. Sortir de ce dilemme suppose que soit
mis en œuvre un processus de négociations extrêmement complexe et à
long terme, et qui devrait être au cœur des préoccupations internatio
nales dans les années à venir.
Pour ce faire, il faudra commencer par expliciter ce concept. Cet
article n'a d'autre prétention que de comparer le concept de durabilité à Culture et durabilité 341
d'autres concepts similaires utilisés dans l'analyse sociale et anthropolo
gique et ensuite d'essayer de voir si un système de croyances peut perdur
er en se fondant sur les données recueillies sur le terrain chez les habi
tants de la forêt tropicale Lacandon du Sud-Est mexicain. Puis, très
brièvement, nous décrirons les relations existant entre différents groupes
de la forêt tropicale, puis nous essayerons de voir quels sont les facteurs
qui donnent un caractère « durable » à leur relation à la forêt tropicale.
DURABILITÉ ET REPRODUCTION SOCIALE
La Commission Brundtland dans Our common future (Notre avenir
commun) définit le développement durable comme étant « le développe
ment qui répond aux besoins présents sans compromettre la capacité
des générations à venir à satisfaire leurs propres besoins ». Le problème
de cette définition, nous dit Robert Ayres, c'est que personne ne sait me
surer le bien-être en terme social. Il propose une définition plus
complexe : « La durabilité est un processus de changement dans lequel
l'exploitation des ressources, le choix des investissements, l'orientation
du développement technologique et les changements institutionnels, est
en harmonie avec les besoins et les aspirations de l'homme et favorise à
la fois notre capacité actuelle et future à les satisfaire. » Aussi précise
que soit cette définition, elle nous renvoie encore au problème de savoir
ce que sous-tend l'idée « d'harmonie ». Il est évident que des scientif
iques — anthropologues, sociologues, psychologues — doivent se pen
cher sur ce concept. En effet ce sont surtout les économistes qui jusqu'à
présent ont travaillé sur une définition opérationnelle du concept. Karl-
Goran Maler le définit ainsi : « Un développement économique dans
une zone circonscrite (région, pays, planète) est durable lorsque le stock
global des ressources — capital humain, capital physique renouvelable,
ressources du milieu naturel et ressources non renouvelables — ne
décroît pas dans le temps. » Selon la Commission économique d'Améri
que latine et des Caraïbes, une activité est durable et renouvelable si elle
ne va pas à l'encontre de certaines lois naturelles, mais toujours selon
cette même Commission, elle doit englober d'autres critères : la gestion
et l'utilisation des ressources naturelles se faisant aussi à travers la par
ticipation active des citoyens, les prises de décision politiques et les ins
titutions. Pour eux, la durabilité ne se définit pas tant d'après l'impor
tance des ressources naturelles disponibles que d'après l'utilisation
qu'on en fait. 342 Lourdes Arizpe et Fernanda Paz
La façon dont les sociétés se reproduisent a un impact direct sur
l'utilisation des ressources naturelles. Il est intéressant de noter que le
concept de durabilité est apparu peu de temps après les débats sur la
« reproduction sociale » en sociologie et dans les études sur les femmes.
L'utilisation de ce concept de reproduction sociale est issue des analyses
de la Sociologie française qui a tenté d'expliq

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents