Démographie et relations internationales - article ; n°4 ; vol.15, pg 625-654
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Population - Année 1960 - Volume 15 - Numéro 4 - Pages 625-654
Au cours du dernier siècle, l'évolution démographique a été marquée par la rapidité de l'accroissement de la population du monde et l'ampleur des migrations internationales. Les mouvements démographiques ont grandement modifié la puissance relative des Etats, au point de vue économique comme dans le domaine politique, et c'est là un aspect important de l'étude des relations internationales. Les déplacements de populations n'ont pas eu, à cet égard, un moindre rôle, mais ils ont été, en outre, tantôt la cause et tantôt l'occasion de litiges ou de conflits entre les Etats.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 9
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Pierre Renouvin
Démographie et relations internationales
In: Population, 15e année, n°4, 1960 pp. 625-654.
Résumé
Au cours du dernier siècle, l'évolution démographique a été marquée par la rapidité de l'accroissement de la population du
monde et l'ampleur des migrations internationales. Les mouvements démographiques ont grandement modifié la puissance
relative des Etats, au point de vue économique comme dans le domaine politique, et c'est là un aspect important de l'étude des
relations internationales. Les déplacements de populations n'ont pas eu, à cet égard, un moindre rôle, mais ils ont été, en outre,
tantôt la cause et tantôt l'occasion de litiges ou de conflits entre les Etats.
Citer ce document / Cite this document :
Renouvin Pierre. Démographie et relations internationales. In: Population, 15e année, n°4, 1960 pp. 625-654.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_1960_num_15_4_6676DÉMOGRAPHIE
ET RELATIONS INTERNATIONALES
Au cours du dernier siècle, l'évolution démographique a
été marquée par la rapidité de l'accroissement de la population
du monde et l'ampleur des migrations internationales. Les mou
vements démographiques ont grandement modifié la puissance
relative des Etats, au point de vue économique comme dans le
domaine politique, et c'est là un aspect important de l'étude
des relations internationales. Les déplacements de populations
n'ont pas eu, à cet égard, un moindre rôle, mais ils ont été, en
outre, tantôt la cause et tantôt l'occasion de litiges ou de conflits
entre les Etats.
I. — L'ESSOR DÉMOGRAPHIQUE
En dépit de toutes les incertitudes que comportent les évaluations anté
rieures à l'établissement des dénombrements, il est généralement admis que
la terre avait environ 900 millions d'habitants en 1800 ; il est établi qu'elle
en avait environ 2.460 en 1954 M. La population de l'Europe est passée
de 187 millions en 1800 à 266 en 1850, à 530 en 1938. C'est entre 1870 et 1914
que cet accroissement a été le plus rapide : 300 millions environ en 1870, 400
en 1900, 452 en 1914 — donc une augmentation de 50 °/0 approximativement.
Mais la part de chacun des grands Etats européens dans cet essor démogra
phique a été, au cours de cette période, fort inégale. La population de la
Russie d'Europe a augmenté de 60 millions; en Allemagne, l'augmentation
a été de 27 millions; en Grande- Bretagne (Irlande comprise), de 14 millions;
en Italie, de 8 millions ; en France, de 3 millions et demi seulement.
Le rôle du facteur démographique. Entre ces situations démographiques
diverses et la puissance respective des
Etats, quelles relations l'étude historique permet-elle d'établir, qu'il s'agisse
de la force militaire, de la prospérité économique ou des tendances de la psy
chologie collective ?
(*) Sur ces aspects généraux, la meilleure synthèse est donnée par Marcel Reinhard :
Histoire de la population mondiale de 1700 à 1948, Paris, 1949. Voir aussi la Géographie de la
Population, de J. Beaujeu, Paris, 1959. 626 DÉMOGRAPHIE ET RELATIONS INTERNATIONALES
Le chiffre de la population a été un élément essentiel de la puissance mili
taire, au cours de toute la période où l'efficacité d'une armée était liée au nombre
des combattants plus qu'à la puissance de feu. Cette importance des effectifs
était apparue nettement à l'époque de la Révolution française, avec l'adoption
de la conscription; elle avait pris sa pleine valeur après 1871, lorsque, sur le
continent européen, le recrutement de toutes les armées avait eu pour base
le service militaire obligatoire; elle s'était encore affirmée au cours de la pre
mière guerre mondiale, malgré les progrès considérables de l'armement.
C'est seulement au cours des vingt dernières années que le chiffre des effectifs
a perdu une partie de son importance, avec l'énorme développement de l'arme
aérienne pendant la seconde guerre mondiale, et surtout avec l'apparition de
l'arme atomique.
Pourtant, à l'époque même où il était couramment admis que la force
militaire d'un État dépendait du chiffre de sa population, cette affirmation
était souvent démentie par les constatations de fait.
L'Italie, bien qu'elle fût en pleine croissance démographique, n'avait
qu'une armée très inférieure en nombre à celle des autres grands États euro
péens : au printemps de 1914, les effectifs du temps de paix ne dépassaient
pas 275.000 hommes. Elle n'avait pas cherché à utiliser davantage son potent
iel humain pour augmenter son potentiel militaire. Était-ce seulement parce
que les pouvoirs publics n'estimaient pas nécessaire d'entretenir une armée
plus forte ? C'était surtout parce que la majorité parlementaire estimait
inopportun, ou même impossible, d'imposer au pays les charges financières
qu'aurait entraînées l'accroissement des effectifs et qu'elle était résolue à
comprimer toutes les dépenses « improductives ». Pendant vingt ans, de 1887
à 1907, ce principe avait été appliqué aux crédits militaires. Les conditions
économiques, au moins jusqu'aux toutes premières années du XXe siècle,
suffisaient à expliquer cette politique : dans ce pays, où les activités agricoles
étaient prépondérantes, et où la paysannerie, dans les deux tiers du pays, était
extrêmement pauvre, où trouver la matière imposable ?
La Russie, dont la population atteignait le double de celle de l'Empire
allemand, avait, en 1914, une armée active qui, même si la réforme militaire
décidée l'année précédente avait été réalisée intégralement, aurait dépassé
de 50 °/0 tout au plus, les effectifs de l'armée active allemande. Le chiffre des
réserves instruites était à peine supérieur à celui de cette armée. Les questions
financières avaient évidemment ici leur rôle, comme en Italie ; mais elles avaient
moins d'importance que les données économiques et sociales : l'accroissement
des effectifs était limité, dans ce pays où le développement industriel était retar
dataire, par l'insuffisance des fabrications d'armements; il l'était aussi par la
pénurie de l'encadrement : la moyenne et la petite bourgeoisie, où se recru
taient les cadres subalternes des formations de réserve, étaient peu nombreuses
et n'avaient guère l'esprit militaire.
L'Autriche-Hongrie, avec 51 millions d'habitants, c'est-à-dire avec une
population qui dépassait de 20 °/0 celle de la France, avait, au début de 1914, DÉMOGRAPHIE ET RELATIONS INTERNATIONALES 627
une armée active dont les effectifs n'atteignaient que 350.000 hommes environ,
c'est-à-dire 45 °/0 de ceux de l'armée française. Elle devait pourtant compter
au moins avec deux adversaires éventuels : Russie et Serbie — même si elle
faisait confiance à l'alliance italienne. Mais les populations hétérogènes n'a
vaient ni patriotisme austro-hongrois, ni même conscience d'un intérêt collect
if; et les Parlements, à Vienne comme à Budapest, hésitaient à leur demander
des sacrifices.
Parmi les principales puissances continentales (la Grande-Bretagne,
confiante en l'insularité, refusait la charge du service militaire obligatoire),
l'Allemagne et la France étaient donc à cette époque, les seules où la relation
entre le chiffre de la population et le chiffre des effectifs prenait toute sa valeur.
Pour maintenir son armée active à un niveau comparable à celui des forces
armées allemandes, la France était obligée d'imposer à sa population des
charges militaires particulièrement lourdes, c'est-à-dire d'incorporer une
part de plus en plus forte du contingent, en exerçant une sélection physique
de moins en moins rigoureuse.
La comparaison entre la Chine et le Japon était plus frappante encore.
En 1894, au moment de la première guerre sino-japonaise, la population de
l'Empire chinois était au moins huit fois supérieure à celle du Japon; or, le
Japon pouvait mettre en ligne des forces militaires qui ne possédaient pas seu

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