Divers aspects de la continuité wisigothique dans la monarchie asturienne - article ; n°1 ; vol.12, pg 81-99
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Description

Mélanges de la Casa de Velázquez - Année 1976 - Volume 12 - Numéro 1 - Pages 81-99
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1976
Nombre de lectures 20
Langue Français
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Extrait

M. Yves Bonnaz
Divers aspects de la continuité wisigothique dans la monarchie
asturienne
In: Mélanges de la Casa de Velázquez. Tome 12, 1976. pp. 81-99.
Citer ce document / Cite this document :
Bonnaz Yves. Divers aspects de la continuité wisigothique dans la monarchie asturienne. In: Mélanges de la Casa de
Velázquez. Tome 12, 1976. pp. 81-99.
doi : 10.3406/casa.1976.2220
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/casa_0076-230X_1976_num_12_1_2220DIVERS ASPECTS DE LA CONTINUITE
WISIGOTHIQUE DANS LA MONARCHIE ASTURIENNE
Par Yves BONNAZ
Membre de la Section Scientifique
Selon l'auteur de la Chronique d'Albelda x, clerc d'origine mozarabe
installé à Oviedo et courtisan d'Alphonse III, le roi Alphonse II le Chaste
(791-842) «établit à Oviedo l'ordre des Goths tout entier, tel qu'il avait
existé à Tolède, tant dans l'Eglise qu'au Palais.» Cette indication, à la
fois concise dans sa formulation et claire dans le programme qu'elle expri
me, a beaucoup attiré l'attention des historiens. Elle pose en effet la question
du retour à la tradition politique et religieuse tolédane dans la monarchie
asturienne et paraît impliquer une rupture entre le VIIe s. wisigothique et
le VIIIe s. asturien: puisque le Roi Chaste a rétabli l'ordre ancien, c'est
donc que celui-ci avait disparu après 711 dans la tourmente de l'invasion
musulmane et que le petit Etat chrétien, lors de sa fondation dans les
montagnes Cantabriques, n'avait à peu près rien de commun avec l'an
cienne monarchie. C'est du moins la thèse soutenue dans divers travaux
par Cl. Sanchez Albornoz a.
Selon cet historien, la tradition de la cour tolédane se serait interrompue
après 711; le mouvement insurrectionnel qui éclata dans les Asturies après
quelques années de domination arabe serait d'essence fondamentalement
populaire, et les Goths réfugiés dans les monts Cantabriques n'auraient pas
pris l'initiative de la révolte. Au temps de Pelage et de ses premiers succes
seurs, il n'y aurait eu ni cour, ni monarque mais seulement un caudillo,
c'est-à-dire un simple chef de guerre accompagné de ses guerriers: les pay-
Pour les chroniques asturiennes de la fin du IXe s., se reporter aux éditions de Z.
Garcia Villada, Crônica de Alfonso III, 1918, et de M. Gômez Moreno, Las primeras
crônicas de la Reconquista: el ciclo de Alfonso III, Boletin de la Academia de la
Historia, t. C, 1932. Nous éditons nous-mêmes l'ensemble de ces textes dans notre
thèse actuellement en cours de dactylographie.
Cl. Sânchez Albornoz, Otra vez Guadalete y Covadonga (II) dans Cuadernos de
Historia de Espafia, I-II, 1944. Pelayo antes de Covadonga, dans Anales de Historia
antigua y medieval, 1955. La sucesiôn al trono en los reinos de Leôn y Castilla, dans
Estudios sobre las Instituciones Médiévales Espanolas, 1965. 82 YVES BONNAZ
sans astures descendus de la montagne à son appel. La volonté de renouer
avec l'ancien ordre des Goths, pour reprendre l'expression de la Chronique
d'Albelda, ne serait pas antérieure à la fin du VIIIe s. et serait apparue lors
que les frontières du royaume s'étendirent vers le Sud et que l'aristocratie
gothique et le clergé parvinrent à s'imposer: c'est alors seulement que se
serait constitué un véritable Etat «où clercs et nobles firent reverdir la
tradition tolédane».
Il est vrai qu'un réel attrait pour le passé tolédan, pour les institutions
et la culture de la prestigieuse monarchie, que les historiens ont appelé
«néo-gothisme», se manifesta dans la cour et l'Eglise asturienne au IXe s.
Il est reconnu aujourd'hui, que renouant avec la tradition des synodes
tolédans, Alphonse II et Alphonse III tinrent chacun un concile à Oviedo,
et que cette ville, devenue capitale royale à la fin du VIIIe s., sans obtenir
le rang de métropole ecclésiastique, exerça une autorité religieuse indiscu
table sur l'ensemble du royaume. L'on sait aussi que l'agrandissement
territorial des Asturies permit un relatif étoffement de l'administration
centrale et locale, sans toutefois que les services palatins atteignissent ja
mais, tant s'en faut, le faste et la complexité de ceux de Tolède. La volonté
des monarques de faire revivre les institutions anciennes se manifesta en
core sous de multiples formes: réintroduction dans la langue officielle de
titres ou de formules d'inspiration étroitement wisigothique, remise à
l'honneur de cérémonies solennelles comme le sacre et peut-être même la
célébration du rituel du «retour de guerre», ou de symboles empruntés à
Tolède comme la Croix de la Victoire. La constitution d'une bibliothèque
royale où les œuvres de Saint Ildefonse, Isidore de Seville et Julien de
Tolède étaient à l'honneur, le désir de renouer avec l'historiographie d'ins
piration isidorienne, la volonté, enfin, exprimée par l'auteur de la Chronique
prophétique, porte-parole des aspirations politiques d'Alphonse III, de
restaurer prochainement «le royaume des Goths» sur toute la péninsule,
attestent suffisamment l'attrait d'une civilisation qui «avait jadis brillé par
l'éclat de sa culture et de son savoir» x. Toutefois, notre propos n'est pas de
développer ici les divers aspects du wisigothisme asturien 2, mais de montrer
que l'influence wisigothique fut sensiblement ressentie dès les origines de la
nouvelle monarchie chrétienne, en particulier dans les institutions et la vie
politique; car l'Etat constitué en 718 recueillit très tôt, pour le meilleur
et pour le pire, une part importante de l'héritage tolédan.
Cet héritage fut transmis par l'intermédiaire de l'aristocratie gothique,
qui refusant de se soumettre, émigra dans la cordillère Cantabrique à
partir de 711 et constitua très probablement le noyau de la cour royale à
Cangas de Onis, puis à Pravia. L'onomastique partiellement germanique
1 Chronique d'Alphonse III, Ed. Gômez Moreno, las primeras crônicas, p. 614.
2 Sur ce point, voir notre thèse: Etude critique des chroniques asturiennes. CONTINUITE WISIGOTHIQUE DANS LA MONARCHIE ASTURIENNE 83
des diplômes asturiens du VIIIe s. 1, ainsi que les noms même de plusieurs
souverains du royaume (Alphonse, Fafila, Fruela, Silo, Bermude) trahis
sent soit une origine gothique, soit un attrait significatif pour des noms à
consonance gothique. D'ailleurs, nous possédons des témoignages concor
dants sur l'installation des Goths dans les Asturies peu après 711. Ainsi le
«scribe érudit», qui composa vers 890 une version remaniée de la Chronique
d'Alphonse III, nous apprend que parmi les Goths de sang royal qui avaient
échappé au glaive et à la famine, «certains gagnèrent la France, tandis que
la plupart entra dans la patrie des Asturiens». L'auteur de la Chronique dite
de Silos remémore la fuite de Pelage, pourchassé par les Maures, et sa
venue chez les Asturiens avec ses compagnons, des soldats goths» 2. La
Crônica General, qui s'appuie probablement sur d'anciens récits musul
mans, signale que, parmi les gens de Tolède qui abandonnèrent leur ville en
711, «beaucoup s'enfuirent pour Amaya, et d'autres, en vérité, pour les
Asturies» 3. Les auteurs arabes ont également recueilli les échos de cette
émigration vers le Nord de l'Espagne, et, en particulier vers la «Galice»,
terme qui, chez les musulmans, désignait non seulement l'actuelle provin
ce galicienne, mais aussi les Asturies.
Ainsi rapportent-ils à propos du traité de paix imposé à la ville de
Mérida, «on confisqua les propriétés des chrétiens qui avaient émigré en
Galice» 4; et, selon Al Maqqari, «le premier qui réunit les fugitifs chrétiens
d'Espagne... fut un infidèle nommé Pelage, originaire des Asturies, en Gal
ice» 5. Ces témoignages montrent clairement comment les Asturies purent
constituer un important noyau de rassemblement des fugitifs chrétiens
et il est significatif que Pelage, un Goth venu de la cour de Tolède, passe
aux yeux des musulmans pour un Asturien de souche. Cl. Sânchez Al-
bornoz a d'ailleurs lui-même établi une filiation entre les hidalgos, qui étaient
particulièrement nombreux dans les Asturies du XVIe s. et les «Goths de
sang royal» exilés dans ce pays huit siècles plus tôt: «seule cette émigration
explique la présence en terre asturi

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