Éducation et itinérance : entre le passé et l actualité - article ; n°135 ; vol.34, pg 585-602
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Description

Tiers-Monde - Année 1993 - Volume 34 - Numéro 135 - Pages 585-602
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ahmed Moatassime
Éducation et itinérance : entre le passé et l'actualité
In: Tiers-Monde. 1993, tome 34 n°135. pp. 585-602.
Citer ce document / Cite this document :
Moatassime Ahmed. Éducation et itinérance : entre le passé et l'actualité. In: Tiers-Monde. 1993, tome 34 n°135. pp. 585-602.
doi : 10.3406/tiers.1993.4781
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1993_num_34_135_4781ÉDUCATION ET ITINÉRANCE :
L'ACTUALITÉ'
ENTRE LE PASSÉ ET
Moatassime** par Ahmed
L'éducation itinérante a sans doute acquis ses lettres de noblesse
dans le passé arabo-musulman. Mais elle semble aussi se renouveler
avec l'actualité euro-occidentale et les perspectives interculturelles euro-
arabes et méditerranéennes...
I - PASSÉ ARABO-MUSULMAN
L'islam ne s'est jamais propagé par le sabre et le fer, contrairement
aux fausses suppositions d'écrits étriqués. Il s'est d'abord bâti sur le
Savoir, comme le suggère le premier verset du Coran : Ikra (lis !). Car
« l'Homme apprend par la plume ce qu'il ne savait point ». Il ne faut
donc pas s'étonner si la quête de la connaissance est devenue dès le
vif siècle, avec l'avènement de l'islam, un devoir pour tout musulman et
une condition sine qua non de son entrée dans la nouvelle communauté
universelle d'alors. L'espace arabo-musulman est devenu ainsi, peu à
peu, traversé de fond en comble par les sentiers du savoir, au même titre
que les sentiers du commerce et de la communication. Même le désert,
personnifié par un Sahara — uni et indivisible — allant de l'Atlantique
au Golfe, y a apporté sa contribution : des tentes-écoles inaugurant un
enseignement mobile conduisaient souvent les jeunes disciples à des
gîtes d'étape ou Zaouïas avant de continuer cette itinérance ou Rihla à
travers les Médersas et la mobilité universitaire.
* Communication à la VIIIe session de l'uEAi/Université euro-arabe itinérante, tenue à Ghardaïa
du 2 au 10 mai 1992. Le sujet « Education et itinérance », qui s'insère dans la thématique générale de
la session — à savoir « Le désert, un enjeu pour le xx° siècle » — , n'en reste pas moins lié à une
réflexion prospective géoculturelle beaucoup plus large.
♦* cnrs/iedes, Université de Paris 1.
Revue Tiers Monde, t. XXXIV, n° 135, juillet-septembre 1993 586 Ahmed Moatassime
1. Tentes-écoles et enseignement mobile
Les tentes-écoles ne diffèrent guère des écoles coraniques de villages,
aussi bien dans leur contenu « élémentaire » que dans leurs méthodes
pédagogiques, fondées essentiellement sur la mémorisation et la mnémo-
technie. On y apprend à lire et à écrire le Coran — auprès ďunfquih ou
maître d'école, recruté par l'assemblée tribale — avant de pouvoir pré
tendre éventuellement à des études dans des institutions rurales ou
urbaines plus développées. L'originalité de ces tentes-écoles réside cepen
dant dans leur caractère mobile. Il s'agit d'une simple tente noire plantée
au milieu d'un douar et qui accompagne les nomades dans leurs déplace
ments continuels. Au Maghreb par exemple, ce système éducatif touchait
autrefois toutes les campagnes cultivables et les hauts plateaux qui s'adon
naient ainsi à un nomadisme agricole saisonnier. Aujourd'hui, il touche
encore les zones sahariennes dont l'économie pastorale ne permet guère
de fixation. Mais les populations de ces zones paraissent maintenant
désemparées à cause des frontières artificielles héritées de la colonisation
et imposées par les Etats, comme en témoigne la tragédie des Touaregs,
éclatés entre le Niger, le Mali, l'Algérie et autres... Cette marginalisation
forcée et forcenée répond sans doute à une certaine politique. Mais elle
n'en détruit pas moins — sans contrepartie — une grande culture qui, par
son horizontalité, avait joué jadis un rôle déterminant dans l'unité du
Maghreb et son ressourcement permanent. Ce n'est pas un hasard si de
grands Oulémas (savants de l'Islam) mais aussi de grands princes y fa
isaient leurs écoles, au sens propre et au figuré. Des Almoravides aux
Almohades, l'histoire du Maghreb fournit à cet égard des exemples écla
tants, comme elle en fournit aussi avec les routes commerciales et les pistes
caravanières, longtemps jalonnées de Zaouïas et de Ribats qui accueil
laient ainsi les lauréats des tentes-écoles.
2. Zaouïas et Ribats v
Les zaouïas, autrefois gîte d'étape d'une éducation itinérante sous
forme d'enseignement « secondaire », avaient illuminé toutes les campag
nes maghrébines jusqu'aux coins les plus reculés. Mais elles apparais
sent aujourd'hui comme des institutions dépassées, reflétant en cela une
décadence prolongée de la culture arabo-islamique. Ce n'est pas un
hasard si le réformisme musulman les avait prises pour cible au temps
de la colonisation, les accusant d'archaïsme et d'obscurantisme, voire Education et itinêrance 587
d'être devenues peu à peu des foyers de collaboration en faveur de l'a
dministration coloniale. Pourtant, les zaouïas peuvent aussi, outre leur
caractère religieux, se prévaloir d'une histoire prodigieuse : politique,
pour avoir organisé les premiers soubresauts de résistance à la pénétra
tion coloniale, avant de s'exposer à la destruction et au contrôle admin
istratif ; sociale, par leur ouverture sur la société grâce aux fondations
pieuses, Habouss, abritant les nécessiteux, les voyageurs et les étudiants
itinérants ; culturelle enfin, car elles ont longtemps servi de relais efficace
à l'acquisition de la connaissance pour tous les talebs (étudiants) qui,
d'une contrée à l'autre, allaient à la recherche du savoir. D'une manière
générale, l'apparition des zaouïas semble remonter au xf siècle avec le
début des dynasties berbères — Almoravides (1053-1147) et Almohades
(1147-1272) — qui avaient unifié le Maghreb et lui ont donné ses carac
téristiques culturelles actuelles. C'est autour d'une zaouïa saharienne,
située entre le Sud marocain et le Sénégal aux environs de l'Adrar que
les Almoravides, en particulier, avaient préparé la conquête qui allait
bouleverser l'histoire du Maghreb et de l'Espagne. Transformée en lieu
fermé de prière et de préparation religieuse, idéologique et militaire, leur
zaouïa devint ainsi un ribat, d'où leur nom, Almourabitine ou Almorav
ides. En l'espace d'un siècle, ces nomades itinérants, fondateurs au pas
sage de Marrakech en 1062, ont donc régné sur un empire allant de
l'Atlantique à Tlemcen et du fleuve du Sénégal à celui de l'Ebre en
Espagne. Ils avaient ainsi préparé la voie à leurs successeurs Almohades
dont la mission civilisatrice s'est caractérisée par la fondation de trois
grandes mosquées-universités, les « trois sœurs », situées sur une même
ligne topographique verticale : la Koutoubia de Marrakech, la Tour
Hassan de Rabat et la Giralda de Seville en Espagne. Il serait fastidieux
de citer tous les ribats et zaouïas qui ont joué au Maghreb des rôles
aussi déterminants, non seulement politiques et sociaux, mais aussi
culturels, dont la dimension éducative n'est pas des moindres. Qu'il suf
fise de se rappeler les prérogatives qui furent les leurs dans l'accueil des
étudiants ruraux, la formation de ceux-ci à la mobilité universitaire et,
partant, leur orientation possible vers les médersas urbains, pour s'en
convaincre.
3. Médersas et mobilité universitaire
Les médersas ou Madrassas, c'est-à-dire lieu où l'on enseigne, sont,
comme leur nom l'indique, des institutions réservées essentiellement à
l'enseignement. Mais elles ont aussi joué des rôles politico-religieux et 588 Ahmed Moatassime
socioculturels déterminants. Leur première apparition, sans doute à
Khorasan, semble remonter au xf siècle, parallèlement à d'autres
modes d'enseignement scientifîco-religieux qui leur préexistaient. Au
Machrek arabe, c'est la Moustancirya fondée en 1233 à Bagdad qui,

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