Facteurs sévillans au XVIe siècle, d après des lettres marchandes - article ; n°1 ; vol.12, pg 60-70
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1957 - Volume 12 - Numéro 1 - Pages 60-70
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1957
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

B.Bennassar
Facteurs sévillans au XVIe siècle, d'après des lettres
marchandes
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 12e année, N. 1, 1957. pp. 60-70.
Citer ce document / Cite this document :
B.Bennassar . Facteurs sévillans au XVIe siècle, d'après des lettres marchandes. In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 12e année, N. 1, 1957. pp. 60-70.
doi : 10.3406/ahess.1957.2599
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1957_num_12_1_2599ESSAIS
FACTEURS SÉVILLANS AU XVIe SIÈCLE
D'APRÈS DES LETTRES MARCHANDES
La correspondance de SiMO N Ruiz, marchand de Medina del Campo
n'est plus médite ; elle est même, pour longtemps encore, à l'ordre du
jour de la recherche historique qui a mis en chantier une prospection syst
ématique de cette source unique de renseignements. Les travaux de Henri
Lapeyre 1, de Gentil da Silva 2, de Felipe Ruiz Martin l'ont largement uti
lisée. Mais cette correspondance surabondante défie tout examen général 3.
De nombreuses lettres venues de presque toutes les grandes villes d'Espagne
sont encore inconnues et risquent de le rester longtemps. Aucun doute,
parmi ces liasses, que les lettres de Seville ne soient parmi les plus intéressant
es, ainsi qu'un bref examen, — l'objet même de cet article, — m'a permis
de l'établir.
Limité par le temps, je me suis malheureusement borné au seul examen
de la correspondance des dix premières années, au total quelque 330 lettres.
Peu nombreuses au début (1 en 1560, 5 en 1561, 11 en 1562), elles deviennent
abondantes à partir de 1565 (52 en 1565, 80 en 1566, 49 en 1567) 4. Leur
mérite est de nous introduire d'une manière désordonnée sans doute, mais
spontanée, immédiate, vivante au cœur complexe de Seville : alors beaucoup
plus qu'une ville, elle est le battement de cœur de l'Europe mercantile, la
porte ouverte sur un océan et un continent neufs, la raison de vivre de l'Occi
dent et même au delà, de trafics qui se prolongent jusqu'à l'Extrême-Orient.
La nature et le ton des renseignements ajoutent encore à leur valeur. La
langue de ces lettres est en effet savoureuse, charnue si l'on peut dire, notam
ment celle qu'emploient Géronimo de Valladolid et Francisco de Mariaca,
ces correspondants essentiels de Simon Ruiz. Elles restituent avec sa pitto-
1. Voir notamment Une famille de marchands : les Ruiz (thèse, Armand Colin, 1955).
2. J. Gentil da Silva, Stragédie des affaires à Lisbonne entre 1595 et 1607. Lettres
marchandes des Rodrigues ďEvora et Veiga (Publications du Centre de Recherches His
toriques, Collection a Affaires et Gens d'Affaires », S.E.V.P.E.N., 1957).
3. Voir les notes de Henri Lapeyre sur la richesse de ce fonds.
4. Sources : Archive Provincial de Valladolid, Section Simon Ruiz ; voir Cl (1560-
1562 ; C2 (1563-1564) ; C3 (1565) ; C4 (1566) ; C5 (1567) ; C7 (1568) ; C9 (1569) etc. Tout
cet article est construit en références à ce dossier, que nous citons d'entrée, une fois pour
toutes.
60 FACTEURS SÉVILLANS AU XVI* SIÈCLE
resque couleur la physionomie mouvante, baroque, attachante de la ville
qu'ils appelaient eux-mêmes la Babylone des temps modernes. Tout n'était-il
pas étrange et grandiose dans la ville florissante ?
Sur l'écran de ces lettres Seville se présente, avant toute chose, comme
la porte des Indes, le point de départ et le point d'arrivée des flottes améric
aines. Les facteurs des Ruiz, ceux d'autres grands négociants espagnols
(les Maluenda de Burgos par exemple), de maisons génoises et d'une façon
générale tous les hommes d'affaires sont suspendus aux fortunes de ces
flottes fabuleuses. A tout prix il faut des nouvelles de la mer, il faut connaître
les naufrages, être renseigné sur l'activité des corsaires. Tel navire s'est-il
échoué sur la barre de San Lucar, culbuté par le vent debout comme La
Trinidady en mars 1562 ? A-t-il brûlé sur le Guadalquivir comme le navire
de Rodrigo Baco en janvier 1566 ou comme la Santa Maria, en mars 1569 ?
A-t-il coulé près des Canaries, comme ces 22 navires disloqués par la tempête,
en février 1567 ? A-t-il été pris par les galères d'Alger (sombre année 1566),
par le Français (1561-1563) ou l'Anglais (1569) ? Au moindre écho, on se pré
cipite sur les registres : le navire contenait-il les cargaisons de nos débiteurs
— voire, car tout se tient, des débiteurs de nos débiteurs ? Si oui, ces cargai
sons étaient-elles assurées ? Par qui ? Les assureurs sont-ils solides ?
Le 9 janvier 1566, par exemple, Francisco de Mariaca écrit à Simon Ruiz
que, le 5 janvier, à la veille de son départ pour la Nouvelle-Espagne, la
nao de Rodrigo Baco, chargée de 500 tonnes de toiles, a brûlé sur le Guadalq
uivir avec toute sa cargaison, d'une valeur de 250 000 à 300 000 ducats.
Or, parmi les hommes d'affaires touchés par la catastrophe, figurent Gonzalo
et Gaspar Jorge, assurés, dit-on, en Flandres, à Burgos et à Lyon. Justement
Francisco de Mariaca désirerait savoir si Gonzalo et Gaspar (au nombre de
ses débiteurs) sont assurés effectivement. Petits faits, gros soucis...
Nouveau désastre quelques jours plus tard : cette fois le San Cosme y
San Damian qui gagnait Livourne, chargé de sucre, cuirs et cochenille,
coule dans la baie même de Cadiz : les pertes (cargaison et assurances valent
130 000 ducats) touchent les gens de Burgos. Toutes choses que Simon Ruiz
et Medina del Campo doivent savoir.
Les lettres ne négligent certes pas dans leur reportage repris sans fin, le
départ des flottes ; mais, à vrai dire, elles insistent plus encore sur la période
de chargement qui longtemps à l'avance annonce et prépare le départ.
Durant les premières années, en 1562 notamment, la flotte groupe sou
vent les navires destinés à la fois à la Nouvelle-Espagne et à la Terre-Ferme.
Elle part alors fin mars ou début avril : en 1562, 60 navires emportent quelque
5 millions de ducats de marchandises ; le 31 mars nous savons qu'ils ont quitté
61 ANNALES
Seville, mais le 15 avril nous apprenons qu'ils sont bloqués à Cadiz par les
vendavales, obligés d'attendre le beau temps.
Par la suite il y a presque toujours dédoublement. La flotte de Nouvelle-
Espagne se charge en mars-avril, part fin mai ou début juin (1566 par
exemple). Celle de Terre-Ferme chargée en juillet, appareille en septembre
(1563, 1565, etc.). Mais en 1566 elle est retardée par les galères d'Alger qui
tranquillement installées à San-Lucar attendent l'argent d'Amérique, inter
disent l'arrivée des bateaux de Terre-Ferme, heureusement prévenus. La
flotte destinée à Nombre de Dios ne pourra pas partir avant janvier 1567.
Pendant la période d'affrètement, les facteurs s'affairent ; leurs lettres
sont un fatras de récriminations : on ne leur a pas envoyé la marchandise
demandée ; les préférences des acheteurs ont évolué ; il faut placer les toiles
à des clients sûrs qui paieront, ce qui retarde la vente ; les concurrents sont
mieux servis ; la marchandise est arrivée trop tard, les registres étaient
déjà fermés-
Mais le départ des flottes n'est rien, comparé au retour : l'accostage des
navires des Indes au long des rives du Guadalquivir, c'est vraiment pour
Seville « l'août des laboureurs ». Durant les jours, voire les mois qui précèdent
l'arrivée des flottes, les affaires sont au point mort : il n'y a pas d'argent
et il ne saurait être question d'obtenir des débiteurs le paiement total ou
partiel de leurs dettes. Ils ne veulent point se démunir de leurs quelques
réserves sans connaître le volume exact de leurs partidas, de l'argent qu'ils
recevront d'Amérique. Pas question non plus de vendre, d'écouler des stocks
de marchandises. Car les exportateurs veulent connaître l'évolution de la
demande des Indes, les bénéfices réalisés sur les cargaisons anciennes, les
prévisions raisonnables : on imagine, on spécule, on échafaude des plans
pour faire rendre gorge aux débiteurs, on prévoit les commandes à passer
aux maisons que l'on représente.
Première alerte : l'arrivée de la Caravelle d'avis souvent plusieurs mois
avant le gros de la flotte. En 1567 et 1569 elle arrive à la mi-avril alors que
les autres navires seront attendus jusqu'en mai (Saint-Domingue), voire
jusqu'en août (Nouvelle-E

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