Fixation restreinte dans le salariat, secteur informel et politique  d emploi en  Amérique  latine - article ; n°110 ; vol.28, pg 347-367
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Fixation restreinte dans le salariat, secteur informel et politique d'emploi en Amérique latine - article ; n°110 ; vol.28, pg 347-367

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Description

Tiers-Monde - Année 1987 - Volume 28 - Numéro 110 - Pages 347-367
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Bruno Lautier
Fixation restreinte dans le salariat, secteur informel et politique
d'emploi en Amérique latine
In: Tiers-Monde. 1987, tome 28 n°110. pp. 347-367.
Citer ce document / Cite this document :
Lautier Bruno. Fixation restreinte dans le salariat, secteur informel et politique d'emploi en Amérique latine. In: Tiers-Monde.
1987, tome 28 n°110. pp. 347-367.
doi : 10.3406/tiers.1987.4557
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1987_num_28_110_4557FIXATION RESTREINTE
DANS LE SALARIAT,
SECTEUR INFORMEL ET POLITIQUE
D'EMPLOI EN AMÉRIQUE LATINE
par Bruno Lautier
Introduction
Concluant son article : « Urbanisation et sous-développement : sec
teur informel et stratégie de survie»1, Gilberto Mathias écrivait, en 1983 :
« Ces politiques (d'austérité en Amérique latine) risquent de déclencher,
avant même qu'un quelconque rééquilibrage des comptes externes
de ces pays puisse se produire, des révoltes urbaines sans précédent dans
le continent. Plus que leurs objectifs économiques, c'est l'évolution
libéralisante même des régimes politiques qui risque alors d'être compro
mise par la montée des tensions sociales dans la région. »
Pourtant, depuis trois ans, l'évolution libéralisante de l'Argentine,
de l'Uruguay, du Pérou et du Brésil semble s'être poursuivie, et, dans
la crise économique comme dans la reprise, les émeutes urbaines ont
été sporadiques et contenues. On peut alors se demander si le pronostic
était excessivement pessimiste, si — au-delà du problème de la réussite
en termes de politique économique — l'évolution récente de l'Amérique
latine n'est pas marquée par une réussite sociale. Ce point de vue com
mence à être partagé par de nombreux auteurs ; de même que le catas-
trophisme qui dominait voici vingt ans à propos de la situation al
imentaire de l'Inde a été balayé par la « Révolution Verte », de même
l'inquiétude à propos de la paupérisation urbaine ne serait plus de mise.
Et la Révolution Verte a ici pour nom « secteur informel »; chargé
auparavant de tous les vices (faible productivité, masque au sous-emploi),
1. [20], p. 39.
Revue Tiers Monde, t. XXVIII, n° 110, Avril-Juin 1987 348 BRUNO LAUTIER
le secteur informel est paré maintenant de toutes les vertus : forte capa
cité de génération d'emplois, solvabilité de ses agents (les revenus y
étant sous-estimés) qui leur permettrait d'absorber des hausses de prix
alimentaires2, potentialités de croissance et de limitation des conflits
urbains.
Le secteur informel serait-Д alors la clé de voûte des politiques sociales
en Amérique latine, offrant par là même des degrés de liberté à la poli
tique économique, et ouvrant alors la voie à l'hétérodoxie dans ce
domaine ? Les politiques sociales et les politiques du secteur informel
tendent, en effet, depuis cinq ans environ à s'intégrer : les premières
quittent le terrain exclusif de la main-d'œuvre « protégée » (35 à 65 %
de la population active urbaine), et les secondes délaissent de plus en
plus la problématique de la « formalisation de l'informel ». Les politiques
sociales, réorientées vers le secteur informel, se voient donc assigner
un rôle ainsi désigné : la « compatibilisation » des politiques économiques
et de leurs conséquences sociales.
Cependant, le dilemme fondamental de toute politique du secteur
informel n'est pas résolu : s'agit-il de politiques d'assistance sociale,
fondées sur des critères sociaux, ou de économiques, fondées
sur des critères d'efficience micro-économique et de fonctionnalité macro
économique. Les premières sont orientées par des visées paternalistes
(« aider les sous-employés pour qu'ils ne tombent pas dans la déli
nquance ») et répressives (le commerce de rue vu comme nid de la margin
alité), et se réfèrent à l'inutilité en termes économiques du secteur
informel3. Les secondes se proposent, sur la base de la sélection de
micro-entreprises dynamiques, de mettre au jour les gisements de pro
ductivité et d'emploi qu'elles recèlent, et de les intégrer aux processus
d'accumulation.
On peut être surpris de la rapidité avec laquelle les organismes
nationaux de planification, ainsi que la Banque mondiale, oscillent
entre l'une et l'autre de ces deux optiques. D'autant plus surpris que
l'extrême hétérogénéité du « secteur informel »4 semble condamner
a priori tout discours globalisant. La crise du début des années 1980 a
eu, en particulier, des effets extrêmement différenciés sur les divers
segments du secteur informel, et sur leur articulation avec le secteur
formel. Il faut donc interroger le sens qu'ont les discours actuels sur le
secteur informel en Amérique latine. L'hypothèse qui sera faite dans
2. C'est le point de vue défendu par J. Charmes ([10], p. 41), et que critique Cl. de Miras
[22], p. 29.
3. Sur ce point, cf. [17], p. 24-25.
4. Cette question est abordée dans [15]. FIXATION RESTREINTE DANS LE SALARIAT 349
cet article est que la valorisation récente de ce secteur informel en termes
de politique sociale joue le rôle d'alibi à l'absence de politique de l'emploi
structurée et cohérente. Cette absence n'est pas l'effet de la mauvaise foi
des responsables des politiques économiques nationales; une politique
d'emploi suppose une fixation dans le salariat sur une longue durée
(plus d'une génération), et l'importance du secteur informel (et son
corollaire : l'intensité de la mobilité entre activités formelles et infor
melles) est précisément le signe de cette absence de fixation. A défaut
de politique structurée, il y a néanmoins un pilotage à vue, dont les
effets sont repérables à plusieurs niveaux : développement d'un « sec
teur informel de survie », dispersion croissante des revenus, croissance
du chômage ouvert, accroissement du turnover pour les salariés non
qualifiés et renforcement des protections corporatistes pour les autres,
rejet sur le travail domestique de certaines tâches de reproduction. Si
des mesures de politique économique alliées à une conjoncture politique
de démocratisation ont pu éloigner les tensions sociales (comme à l'oc
casion du Plan Cru2ado i), celles-ci se révèlent bien vite toujours pré
sentes, voire accentuées (comme dans le cas du Plan Cruzado 2). La
question des conditions d'une politique d'emploi portant sur l'art
iculation : secteur formel - secteur informel demeure la question clé
posée aux régimes politiques récemment démocratisés en Amérique latine.
I. Politique de l'emploi
« assistentialisme » et formalisation
Depuis 1980, les programmes d'aide aux micro-entreprises se sont
multipliés en Amérique latine; ces programmes sont financés et gérés
par des institutions diverses : institutions internationales (Banque
mondiale, Banque Interaméricaine de Développement), nationales,
régionales et locales; fondations privées, patronales ou caritatives; et,
le plus souvent, plusieurs institutions collaborent à un même programme.
Malgré l'extrême diversité des situations, on peut ainsi synthétiser la
problématique, les mécanismes et les effets de l'aide aux micro-entreprises5 :
— La base de l'aide est le prêt bancaire, son complément la format
ion. L'organisme international fait un prêt à long terme, à taux d'intérêt
très faible (souvent 1 %) ; la masse de crédit octroyée est prêtée à court-
5. Hugo Lopez Castano décrit en détail le cas colombien dans [17] et [18], chap. V
(l'article reproduit dans ce numéro de Tiers Monde est un condensé de cette dernière réfé
rence). On trouvera des exemples portant sur toute l'Amérique latine dans [28], et, pour le
Nordeste du Brésil, dans [1]. 35О BRUNO LAUTIER
moyen terme (i à 3 ans) à un taux « réel » de 10 à 12 % aux micro
entrepreneurs; le différentiel d'intérêt permet le financement d'un pr
ogramme de formation et de conseil aux micro-entrepreneurs. L'idée
organisatrice est donc que ce sont essentiellement des

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