Imaginaire social et protection de l animal. Des amis des bêtes de l an X au législateur de 1850 (Ire partie) - article ; n°4 ; vol.21, pg 5-33
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Imaginaire social et protection de l'animal. Des amis des bêtes de l'an X au législateur de 1850 (Ire partie) - article ; n°4 ; vol.21, pg 5-33

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Description

L'Homme - Année 1981 - Volume 21 - Numéro 4 - Pages 5-33
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Valentin Pelosse
Imaginaire social et protection de l'animal. Des amis des bêtes
de l'an X au législateur de 1850 (Ire partie)
In: L'Homme, 1981, tome 21 n°4. pp. 5-33.
Citer ce document / Cite this document :
Pelosse Valentin. Imaginaire social et protection de l'animal. Des amis des bêtes de l'an X au législateur de 1850 (Ire partie). In:
L'Homme, 1981, tome 21 n°4. pp. 5-33.
doi : 10.3406/hom.1981.368231
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1981_num_21_4_368231IMAGINAIRE SOCIAL ET PROTECTION DE L'ANIMAL
Des amis des bêtes de l'an X au législateur de 1850
(l'e partie)
par
VALENTIN PELOSSE
Qu'est-ce que l'homme, et quelle différence y a-t-il entre lui
et les autres plantes, entre lui et tous les autres animaux de la
nature ? [...] Si les rapprochements sont tellement exacts
qu'il devienne absolument impossible à l'œil examinateur
du philosophe d' apercevoir aucune dissemblance, il y aura
donc alors tout autant de mal à tuer un animal qu'un homme,
ou tout aussi peu à l'un qu'à l'autre, et dans les préjugés
de notre orgueil se trouvera seulement la distance ; mais rien
n'est malheureusement absurde comme les préjugés de
l'orgueil. Pressons néanmoins la question. Vous ne pouvez
disconvenir qu'il ne soit égal de détruire un homme ou une
bête ; mais la destruction de tout animal qui a vie n'est-elle
pas décidément un mal, comme le croyaient les pythagoric
iens et comme le croient encore les habitants du bord du
Gange ?
Marquis de Sade, La Philosophie dans le boudoir.
Un discours sur l'animal ne s'énonce pas sans médiations1 :
« Malgré la chaleur de la saison, la séance publique de l'Institut National,
tenue le 17 de ce mois [messidor an x ; 6 juillet 1802], avait attiré beau
coup de spectateurs, parmi lesquels étaient un grand nombre d'étrangers.
Elle s'est ouverte à l'ordinaire par l'annonce des sujets de prix [...] Deux
autres sujets de prix ont été proposés par la classe des sciences morale et
politique ; savoir : — prix de morale. Jusqu'à quel point les traitements
barbares exercés sur les animaux intéressent-ils la morale publique ? et
conviendrait-il de faire des lois à cet égard ? Le prix sera une médaille d'or
du poids de cinq hectogrammes (environ 1 700 francs) : il sera décerné dans
la séance publique de vendémiaire an xi de la République. Les ouvrages
ne seront reçus que jusqu'au 15 messidor an xi [1803], terme de rigueur.
1. Dans les passages cités, j'ai (dans la mesure du possible) respecté l'orthographe et la
ponctuation originales.
L'Homme, oct.-déc. 1981, XXI (4), pp. 5-33. VALENTIN PELOSSE 6
— prix d'économie politique. Comment l'abolition progressive de la
servitude en Europe a-t-elle influé sur le développement des lumières et
des richesses des nations ? » {La Décade philosophique, 20 messidor an x,
n° 29, t. 34 : 123-124).
Comment préciser le lieu d'émission de cette question, posée à l'orée du xixe siècle
par l'Institut, sur les implications sociales du comportement humain envers
l'animal ? La tendance a longtemps été d'assimiler la « deuxième classe », dite des
« Sciences morale et politique », au groupe des Idéologues ; les démêlés politiques
des « idéologistes », comme ils se désignaient eux-mêmes, avec le Premier consul,
auraient été à l'origine de sa dissolution, après sept ans d'activité. Des travaux
récents nuancent cette convention historiographique2.
Il en ressort, premier point, qu'en dehors de la section « Analyse des sentiments
et des idées » — celle de Destutt de Tracy et de Cabanis — , les Idéologues furent
toujours minoritaires au sein de la deuxième classe, qui comptait six sections, et
loin de pouvoir y imposer leurs vues. Parmi les membres de la sixième section
— ■- « Morale » — , qui proposa le sujet sur la barbarie envers les animaux — Bernar
din de Saint-Pierre, Sébastien Mercier, l'abbé Grégoire, La Revéllière-Lépeaux,
Lakanal, Naigeon — , on ne relève aucun Idéologue ; bien plus, les deux premiers
d' « athéisme ». leur étaient hostiles, les soupçonnant, assez gratuitement,
Deuxième point : dans l'étude de l'antinomie entre la deuxième classe et le
pouvoir napoléonien, l'accent se déplace désormais du domaine immédiatement
politique à celui, idéologique (aux sens actuels du terme), de l'élaboration des
sciences humaines et de leur reconnaissance institutionnelle. Jeter les bases d'une
« science de l'homme » — la formule est de Cabanis, dans Rapports du physique et
du moral de — représenta un projet spécifique des Idéologues (encore
qu'ils n'aient pas manqué de précurseurs). Le problème serait alors d'évaluer
l'influence de ce projet « idéologiste » sur l'ensemble de la deuxième classe. En ce
qui regarde la sixième section, je verrais une médiation possible dans le sentiment
maintes fois exprimé de la nécessité d'une nouvelle fondation des valeurs sociales
sur la table rase laissée par les bouleversements révolutionnaires, réforme envi-
2. Créée en 1795 par la Convention, la deuxième classe des Sciences morale et politique
de l'Institut ne survécut pas à la réorganisation de celui-ci par Bonaparte en janvier 1803
(décret du 3 pluviôse an XI). En plus de précisions sur des points d'érudition, je dois à un
échange de vue avec Martin S. Staum, professeur associé d'histoire à l'université de Calgary
(Alberta, Canada), une appréhension moins conventionnelle des relations entre la deuxième
classe et les Idéologues {cf. S. Staum, « The Class of Moral and Political Sciences, 1795- 1803 »,
French Historical Studies, 1980, IX, 3) ; qu'il en soit ici remercié.
Je me suis référé aux ouvrages suivants : Jules Simon, Une Académie sous le Directoire,
Paris, 1885 ; Marc Régaldo, Un Milieu intellectuel : la Décade philosophique (1JQ4-180J),
Lille, Atelier de Reproduction des thèses (difî. par H. Champion), 5 vol., 1976 ; Georges
Gusdorf, La Conscience révolutionnaire. Les Idéologues, Paris, Payot, 1978 ; Gérard Leclerc,
L'Observation de l'homme, une histoire des enquêtes sociales, Paris, Le Seuil, 1979 ; ce dernier
auteur met en valeur la dimension idéologique et culturelle du rétablissement de la deuxième
classe primitive, sous la forme de l'Académie des Sciences morale et politique, en 1833 (p. 199). IMAGINAIRE SOCIAL ET PROTECTION DE L'ANIMAL J
sagée dans un esprit conservateur, mais ne s'identifiant nullement à une simple
restauration d'ordre politique. En l'an v, Bernardin de Saint-Pierre est chargé
de proposer des sujets de prix au nom de la sixième section. Il apporte trois sujets,
dont le second s'énonce ainsi : « Quelles seraient les institutions les plus propres à
ramener un peuple aux principes de la morale après les révolutions politiques ? » ;
les deux autres portent sur l'éducation des enfants (Simon, op. cit. : 229).
Quant aux motivations immédiates de la deuxième classe pour retenir ce
thème de la protection animale, on en trouvera l'impulsion en Angleterre où, en
avril 1800, un bill était déposé à la Chambre des Communes, demandant l'inter
diction des « bull-baiting » (combats de chiens avec des taureaux) ; il fut rejeté.
La presse anglaise, puis continentale, donna un large écho aux débats3, et cette
initiative britannique semble en général avoir été connue des rédacteurs de
mémoire :
« Le Parlement d'Angleterre n'a pas jugé la question indigne de l'occuper.
On a vu des orateurs des deux chambres discuter avec solennité s'il fallait
une loi pour proscrire les spectacles sanglants, les combats de taureau
par exemple, ceux d'ours, de coqs, etc. » (n° 24).
La question mise au concours à Paris se posait donc dans un contexte européen.
Le contexte d'émission indiqué, qu'en est-il des récepteurs, à savoir les auteurs
du corpus (un million huit cent mille signes environ), ces vingt-sept mémoires
restés manuscrits, à deux exceptions près, l'Essai philosophique du chirurgien
Granchamp (n° 20), et De l'Homme et des animaux, brochure du journaliste Sala-
ville (n° 18) ?4 Le peu de renseignements disp

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