L aristocratie française et le ballet de cour - article ; n°1 ; vol.9, pg 9-21
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1957 - Volume 9 - Numéro 1 - Pages 9-21
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1957
Nombre de lectures 46
Langue Français

Extrait

Nanie Bridgman
L'aristocratie française et le ballet de cour
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1957, N°9. pp. 9-21.
Citer ce document / Cite this document :
Bridgman Nanie. L'aristocratie française et le ballet de cour. In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises,
1957, N°9. pp. 9-21.
doi : 10.3406/caief.1957.2096
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1957_num_9_1_2096L'ARISTOCRATIE FRANÇAISE
ET LE BALLET DE COUR
Communication (Bibliothèque de Mme nationale) Nanie BRIDGMAN
au VIIIe Congrès de l'Association, le 3 septembre 1956
Le ballet de cour est, avec l'air de cour, la forme essentielle
de la musique profane française au début du xvne siècle. Son
succès fut considérable comme suffirait à le montrer le fait que
Descartes lui-même écrivit un ballet en vers à la demande de
la reine Christine (1) et que Malherbe fut obligé d'y prendre part
contre son gré et composa entre autres les vers du Ballet de
Madame dansé à Saint-Germain en mars 1609 (2). Bientôt, cette
mode de Paris gagna même les autres cours d'Europe (3). Ce ballet
de cour est doublement bien nommé car, non seulement il est le
divertissement favori à la cour, mais encore toute la cour parti
cipe à sa réalisation en la personne du roi lui-même et de ses court
isans. C'est même là que réside sa caractéristique la plus remar
quable car il est la seule forme d'art à laquelle ait participé
activement la noblesse de France. Dans le recueil de Michel
Henry (4), par exemple, qui énumère tous les ballets dansés à la
cour durant les vingt premières années du siècle, on trouve parmi
1. A. Thibaudet et J. Nordstrom, Un Ballet de Descartes, dans
Revue de Genève, août 1920, pp. 161-185.
2. Œuvres... recueillies et annotées par M. L. Lalanne. Nouvelle
édition. Tome III, Paris, 1862, p. 83.
3. M. Paquot, Une Fête politique à la française en 1668 chez
le prince d'Orange, Bruxelles, 1936. (Extrait de la Revue belge de
philosophie et d'histoire, XV, n° 1, 1936.)
4. F. Lesure, Le Recueil de ballets de Michel Henry, dans Les
Fêtes de la Renaissance, Paris, C.N.R.S., 1956. 10 NANIE BRIDGMAN
les danseurs, à côté du roi, beaucoup des grands noms de l'aris
tocratie.
Si l'on n'est pas surpris de trouver parmi les plus souvent
nommés le maréchal de Bassompierre, qui cependant « n'a jamais
bien dansé » (5) mais qui dans ses Mémoires revient très souvent
à ces « divertissemens qu'un jeune homme riche, desbauché et
mauvais mesnager pouvait désirer » (6) , le comte de Cramail, l'un
des dix-sept seigneurs de la cour qui paraissaient le plus (7),
monsieur de Montmorency qui, si l'on en croit Tallemant, avait
de l'esprit surtout aux pieds (8), par contre on peut s'étonner
d'y rencontrer ce baron de Termes, tué au siège de Clérac en
1621 et dont Malherbe rapporte «qu'il ne s'est passé occasion...
en laquelle, pour le service du Roy... il n'ait esté des premiers à
se mettre dans le péril et des derniers à s'en retirer » (9) . L'endu
rance de ces danseurs amateurs étonne et il n'est pas rare qu'un
ballet soit dansé jusqu'à trois fois de suite dans la même nuit.
Le Ballet du château de Bicêtre, par exemple, « fit aussi juger
quelle estoit la disposition de ces princes d'avoir pu danser depuis
huict heures du dimanche soir... jusques au lendemain
matin» (10).
Chaque seigneur, et quelquefois aussi le roi, avait sa troupe
à part composée d'une majorité de nobles assistés de quelques
danseurs de profession et avec lesquels il effectuait son Entrée.
11 n'est pas exact, comme le prétend de Pure, que le roi et les
grands seigneurs n'aient « pris que des personnages illustres... con
venables à leur dignité» (11). Si Luynes s'est réservé les rôles
glorieux de Renaud et de Tancrède, le comte de Soissons incar-
5. Tallemant des Réaux, Historiettes, éd. G. Mongrédien, Paris
(s.d.). III. p. 208.
6. Journal de ma vie... Ed. de Chantérac, Paris, 1870-1877, I,
p. 170.
7. Tallemant des Réaux, op. cit., I, p. 321.
8. Id., II, p. 188.
9. Lettres inédites de Malherbe, mises en ordre par Georges
Mancel, Caen, 1852, p. 47. (Lettre au duc de Bellegarde sur la mort
de son frère.)
10. P. Lacroix, Ballets et mascarades de cour, Genève, 1868-1870,
IV. p. 208.
11. De Pure, Idée des spectacles anciens et nouveaux, Paris, 1668,
p. 68. NANIE BRIDGMAN 11
пега un paysan ivre, le comte de Fiasque un gueux, et que dire
du roi en fermier ou en vieille femme gauloise (12). Sans doute
faut-il donner raison au Père Ménestrier lorsqu'il remarque que
« la grandeur est à charge aux grands dans leurs divertissements,
et pour les rendre plus agréables et plus libres, ils sont bien
aises de descendre de leur rang pour quelques heures, et de se
faire égaux à ceux qu'ils voyent presque toujours à leurs pieds
dans toutes les actions de la vie» (13). En tout cas, cette jeu
nesse dorée avide de se donner en spectacle prend le plus grand
plaisir à ces déguisements et il y avait d'ailleurs longtemps que
la mode des masques faisait fureur en France puisque François Ier
avait déjà dû les interdire dès 1539.
Non seulement ces gentilshommes dansent, mais certains
d'entre eux inventent aussi les sujets des ballets. Il suffit de rap
peler dans ce domaine le rôle souvent étudié des favoris de
Louis XIII, Luynes et Nemours. En 1615 à Rome, un ballet est
dansé par des cavaliers français dont l'auteur est l'ambassadeur
du roi lui-même, le marquis de Tresnel (14). Louis XIII non
plus ne dédaigne pas de composer le Ballet de la Merlaizon dont
il invente «les pas, les airs et la façon des habits» (15).
Le ballet est d'ailleurs une œuvre collective. Lorsqu'un noble
propose un sujet, il choisit ceux de ses compagnons qui seront
ses danseurs, puis il commence « à donner de l'emploi aux poètes,
violons, tailleurs et autres ouvriers de telles gentillesses» (16).
Lorsque les pas auront été appris avec l'aide de maîtres à danser,
nos seigneurs seront prêts pour la représentation qu'ils vont donner
au roi.
Ainsi, tout comme la guerre, la danse, comme le dit Marolles,
« a eu dans Paris ses héros, entre lesquels... plusieurs seigneurs
de grande condition» (17). Cependant il serait un peu superficiel
12. P. Lacroix, op. cit., IV. p. 55.
13. Le P. CF. Ménestrier, Des Ballets anciens et modernes, Paris,
1682, pp. 169-170.
14. P. Lacroix, op. cit., II. p. 28.
15. Gazette, 1635, p. 143.
16.p. 16.
17. M. de Marolles, Mémoires (Suite des Mémoires), Paris, 1656,
p. 252. 12 NANIE BRIDGMAN
de ne voir là que le passe-temps d'une jeunesse qui s'amuse et
il a semblé plus fécond d'en chercher les causes plus générales,
esthétiques ou sociales, et d'en tirer les conséquences pour l'art.
Certes, tout poussait le jeune seigneur à ces divertissements.
Dès son jeune âge, la danse, considérée comme « l'un des trois
exercices principaux de la noblesse », tenait une grande place dans
son éducation, car « chacun sçait qu'il est nécessaire pour pollir
un jeune gentilhomme qu'il aprene à monter à cheval, à tirer
des armes et à dancer», note Saint-Hubert (18). Il en était de
même dans l'éducation des futurs rois. Le journal d'Héroard con
cernant l'enfance de Louis XIII nous montre le tout jeune dau
phin, bien que n'aimant pas la danse « de son naturel », obligé
de prendre part à de nombreux ballets (19)- Henri IV son père
« se plaisait d'ailleurs à instruire ses guerriers escoliers en la
récréation mondaine» (20). Si la remarque de Voltaire à propos
de Louis XIV, « on ne lui apprit qu'à danser et à jouer de la
guitare» (21), n'a qu'une valeur de boutade, Madame de Motte-
ville nous dit avec plus de mesure « cependant, on lui faisait tra
duire les Commentaires de César, il apprenait à danser, à dessiner
et à monter à cheval » (22) . La Chétardie conseille la danse à
son jeune seigneur (23) et l'abbé de Pure s'exclame « comme si
la danse était une connaissance indigne d'un homme de qual
ité » (26) . Grenaille, qui reproche à la danse

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