L'école secondaire russe en mutation (d'après la situation à Moscou) - article ; n°3 ; vol.31, pg 99-125

Galina Čeredničenko

Description

Revue d’études comparatives Est-Ouest - Année 2000 - Volume 31 - Numéro 3 - Pages 99-125
L'article expose, à partir d'exemples pris dans les écoles de Moscou, la situation nouvelle de l'enseignement secondaire depuis le début des années 1990. La crise de société traversée par la Russie a provoqué et accéléré l'abandon progressif de l'école unifiée au profit des écoles et enseignements spéciaux, des écoles privées, sous couvert du respect de la diversité des élèves. Cette multiplication des écoles destinées en réalité à une nouvelle élite de dirigeants et de spécialistes, qui sont prêts à payer pour que leurs enfants reçoivent un enseignement plus performant, accentue la différenciation sociale qu'on observait déjà à la fin des années 1980 et qui culmine à l'entrée dans l'enseignement supérieur. Elle est encore favorisée par le fait que l'État non seulement finance de moins en moins le secteur de l'enseignement, mais substitue « la liberté et le pluralisme dans l'enseignement » au principe d'égalité qu'il s'efforçait jusqu'alors de garantir. L'auteur analyse à travers les résultats de deux enquêtes la montée de la sélection de plus en plus sévère des élèves du secondaire et les trajectoires de ces derniers en fonction de leur origine socio-culturelle.
The new situation in secondary education since the early 1990s is described through examples of schools in Moscow. The social crisis in Russia has led, at an ever faster pace, to abandoning the unified school system in favor of developing specialized schools and courses, as well as private schools with the claim of respecting student diversity. This multiplication of schools, in fact intended for a new elite of leaders and specialists who are willing to pay so that their children receive a better education and improve their chances for admission into post-secondary institutions, is intensifying social differentiation, a trend already observable in the late 1980s. It is reinforced by the fact that the state has increasingly withdrawn its financial backing from the public school system and that it has replaced the principle of equality, which it used to try to promote, with freedom and pluralism in education. On the basis of two surveys, the increasing severity of selection procedures as applied to secondary school students is analyzed as well as students' trajectories as a function of their social and cultural backgrounds.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: REVUE_D-ETUDES_COMPARATIVES_EST-OUEST
• Publié le: 01 janvier 2000
• Nombre de lectures: 16
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Galina erednienko
Dominique de Lapparent
L'école secondaire russe en mutation (d'après la situation à
Moscou)
In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 31, 2000, N°3. Les communistes en Europe centrale. Le
système éducatif en Russie. pp. 99-125.
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Čeredničenko Galina, de Lapparent Dominique. L'école secondaire russe en mutation (d'après la situation à Moscou). In: Revue
d’études comparatives Est-Ouest. Volume 31, 2000, N°3. Les communistes en Europe centrale. Le système éducatif en Russie.
pp. 99-125.
doi : 10.3406/receo.2000.3041
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_2000_num_31_3_3041Résumé
L'article expose, à partir d'exemples pris dans les écoles de Moscou, la situation nouvelle de
l'enseignement secondaire depuis le début des années 1990. La crise de société traversée par la
Russie a provoqué et accéléré l'abandon progressif de l'école unifiée au profit des écoles et
enseignements spéciaux, des écoles privées, sous couvert du respect de la diversité des élèves. Cette
multiplication des écoles destinées en réalité à une nouvelle élite de dirigeants et de spécialistes, qui
sont prêts à payer pour que leurs enfants reçoivent un enseignement plus performant, accentue la
différenciation sociale qu'on observait déjà à la fin des années 1980 et qui culmine à l'entrée dans
l'enseignement supérieur. Elle est encore favorisée par le fait que l'État non seulement finance de
moins en moins le secteur de l'enseignement, mais substitue « la liberté et le pluralisme dans » au principe d'égalité qu'il s'efforçait jusqu'alors de garantir. L'auteur analyse à travers
les résultats de deux enquêtes la montée de la sélection de plus en plus sévère des élèves du
secondaire et les trajectoires de ces derniers en fonction de leur origine socio-culturelle.
Abstract
The new situation in secondary education since the early 1990s is described through examples of
schools in Moscow. The social crisis in Russia has led, at an ever faster pace, to abandoning the unified
school system in favor of developing specialized schools and courses, as well as private schools with
the claim of respecting student diversity. This multiplication of schools, in fact intended for a new elite of
leaders and specialists who are willing to pay so that their children receive a better education and
improve their chances for admission into post-secondary institutions, is intensifying social differentiation,
a trend already observable in the late 1980s. It is reinforced by the fact that the state has increasingly
withdrawn its financial backing from the public school system and that it has replaced the principle of
equality, which it used to try to promote, with "freedom and pluralism in education". On the basis of two
surveys, the increasing severity of selection procedures as applied to secondary school students is
analyzed as well as students' trajectories as a function of their social and cultural backgrounds.GJSi
Revue d'études comparatives Est-Ouest, 2000, vol. 31, n° 3, pp. 99-125
l'école secondaire russe en mutation
(d'après la situation à Moscou)
Galina CEREDNICENKO *
Résumé : L'article expose, à partir d'exemples pris dans les écoles de Moscou, la situa
tion nouvelle de l'enseignement secondaire depuis le début des années 1990. La crise de
société traversée par la Russie a provoqué et accéléré l'abandon progressif de l'école uni
fiée au profit des écoles et enseignements spéciaux, des écoles privées, sous couvert du
respect de la diversité des élèves. Cette multiplication des destinées en réalité à une
nouvelle élite de dirigeants et de spécialistes, qui sont prêts à payer pour que leurs enfants
reçoivent un enseignement plus performant, accentue la différenciation sociale qu'on
observait déjà à la fin des années 1980 et qui culmine à l'entrée dans l'enseignement
supérieur. Elle est encore favorisée par le fait que l'État non seulement finance de moins
en moins le secteur de l'enseignement, mais substitue « la liberté et le pluralisme dans
l'enseignement » au principe d'égalité qu'il s'efforçait jusqu'alors de garantir. L'auteur
analyse à travers les résultats de deux enquêtes la montée de la sélection de plus en plus
sévère des élèves du secondaire et les trajectoires de ces derniers en fonction de leur ori
gine socio-culturelle.
Abstract : The new situation in secondary education since the early 1990s is descri
bed through examples of schools in Moscow. The social crisis in Russia has led, at an ever
faster pace, to abandoning the unified school system in favor of developing specialized
schools and courses, as well as private schools with the claim of respecting student divers
ity. This multiplication of schools, in fact intended for a new elite of leaders and special
ists who are willing to pay so that their children receive a better education and improve
their chances for admission into post-secondary institutions, is intensifying social diffe
rentiation, a trend already observable in the late 1980s. It is reinforced by the fact that the
state has increasingly withdrawn its financial backing from the public school system and
that it has replaced the principle of equality, which it used to try to promote, with "fre
edom and pluralism in education". On the basis of two surveys, the increasing severity of
selection procedures as applied to secondary school students is analyzed as well as stu
dents' trajectories as a function of their social and cultural backgrounds.
La nouvelle conjoncture des années 1990 a accentué la différenciation sociale
des jeunes au sein de l'école secondaire. L'école, jusque-là unique et unifiée, a
été touchée par les grandes mutations sociales. Elle est devenue le champ de
coexistence de types d'établissements et de courants pédagogiques nombreux et
variés, phénomènes qui méritent toute l'attention des chercheurs.
* Docteur en sciences sociales, chercheur à l'Institut de sociologie de l'Académie des
Sciences de Russie (IS RAN) (e-mail : [e-mail]). Galina Cerednicenko 100
Actuellement, ce sont les analyses pédagogiques et administratives (du
Ministère de l'éducation) qui donnent le ton. Les recherches sociologiques sur le
sujet sont très peu nombreuses (Sobkin, 1993 ; Subkin & Astaf ev, 1998 ;
Rutkevic, 1996 ; Konstantinovskij, 1999) alors que cette approche est justifiée
dans l'étude des transformations radicales intervenues dans le milieu scolaire. Il
est important de comprendre les tendances actuelles de la politique de l'État en
matière d'enseignement. Que cache la diversité scolaire ? Quelle est la nature
sociale de l'innovation dans l'enseignement ? Comment les écoles reconquièr
ent-elles leurs positions dans un espace devenu concurrentiel ? Quelles fonc
tions sociales remplit la différenciation scolaire en cours ?
Sur le plan méthodologique, nous disposons pour l'étude de ces questions
d'une importante base d'information - publications spécialisées sur les pro
blèmes d'enseignement, statistiques, documents du Ministère de l'éduca
tion - ainsi que du résultat des enquêtes sociologiques réalisées par le Centre de
sociologie de l'éducation et de la jeunesse de l'Institut de sociologie de
l'Académie des sciences de Russie dans divers types d'écoles secondaires mos
covites entre 1993 et 1998.
Pour définir l'objet de leurs enquêtes, les chercheurs se sont fondés sur l'idée
que la comparaison des caractéristiques sociales des écoles secondaires d'ense
ignement général (ESEG) de masse l avec celles des écoles privilégiées, par
exemple les traditionnelles écoles spéciales de langues étrangères, était l'outil le
plus efficace pour faire ressortir leurs particularités. Les écoles spéciales demeur
ent une institution qui peuple ses classes d'enfants appartenant aux élites et
notamment à l'intelligentsia. Bénéficiant d'une expérience de trente années de
fonctionnement, elles sont les plus aptes à assurer la transmission culturelle et la
reproduction sociale. Elles constituent donc un objet de comparaison idéal entre
les écoles ordinaires et les écoles privilégiées lorsqu'on veut montrer comm