L emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique. Le cas du don contre-don - article ; n°5 ; vol.43, pg 917-946
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L'emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique. Le cas du don contre-don - article ; n°5 ; vol.43, pg 917-946

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Revue économique - Année 1992 - Volume 43 - Numéro 5 - Pages 917-946
Use of economc theory in the sociological tradition : the case of gift exchange
By tradition, the study of gift exchange belongs to the field of sociology. Some recent works have tried to make the connexion between economy and sociology by transposing the archaic exchange pattern (gift exchange) into our modem economic societies. The purpose of these attempts is to give some insights inlo some particular relationships, like for example, the work relationship. It appears that these insights are very limited and deceptive because of some strong hypothesis such as the perfect rationality of the agents. Nevertheless, their merits are to provide an hypothesis for the appearance of an non-intentional cooperation within an entirely non-cooperative system. Moreover, it seems that the introduction of non-utilitarist motivations in the theory of decision could help to understand the gift exchange relationship, which is a sort of compromise between moral action and interested action.
L'emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique. Le cas du don contre-don
Le don contre-don est un objet d'étude qui appartient par tradition à la sociologie. Des travaux récents tentent de transposer les schémas de la réciprocité archaïque aux échanges qui ont cours dans la sphère économique des sociétés modernes. Le but de ces tentatives est de rendre compte de la forme atypique de certains échanges économiques, comme par exemple la relation de travail. Mais, à défaut de préciser davantage les hypothèses sur les comporte­ments des acteurs, ou en faisant reposer exclusivement le don contre-don sur la rationalité instrumentale, l'économie laisse évanouir ce nouvel objet. Le contraire exigerait, au minimum, la réintroduction de motivations non utilitaristes dans la théorie de la décision. Le don contre-don se situe en effet dans une sorte de compromis entre l'action morale et l'action intéressée.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Yves Zenou
Monsieur Philippe Batifoulier
Monsieur Laurent Cordonnier
L'emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique.
Le cas du don contre-don
In: Revue économique. Volume 43, n°5, 1992. pp. 917-946.
Abstract
Use of economc theory in the sociological tradition : the case of gift exchange
By tradition, the study of gift exchange belongs to the field of sociology. Some recent works have tried to make the connexion
between economy and sociology by transposing the archaic exchange pattern (gift exchange) into our modem economic
societies. The purpose of these attempts is to give some insights inlo some particular relationships, like for example, the work
relationship. It appears that these insights are very limited and deceptive because of some strong hypothesis such as the perfect
rationality of the agents. Nevertheless, their merits are to provide an hypothesis for the appearance of an non-intentional
cooperation within an entirely non-cooperative system. Moreover, it seems that the introduction of non-utilitarist motivations in the
theory of decision could help to understand the gift exchange relationship, which is a sort of compromise between moral action
and interested action.
Résumé
L'emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique. Le cas du don contre-don
Le don contre-don est un objet d'étude qui appartient par tradition à la sociologie. Des travaux récents tentent de transposer les
schémas de la réciprocité archaïque aux échanges qui ont cours dans la sphère économique des sociétés modernes. Le but de
ces tentatives est de rendre compte de la forme atypique de certains échanges économiques, comme par exemple la relation de
travail. Mais, à défaut de préciser davantage les hypothèses sur les comporte-ments des acteurs, ou en faisant reposer
exclusivement le don contre-don sur la rationalité instrumentale, l'économie laisse évanouir ce nouvel objet. Le contraire
exigerait, au minimum, la réintroduction de motivations non utilitaristes dans la théorie de la décision. Le don contre-don se situe
en effet dans une sorte de compromis entre l'action morale et l'action intéressée.
Citer ce document / Cite this document :
Zenou Yves, Batifoulier Philippe, Cordonnier Laurent. L'emprunt de la théorie économique à la tradition sociologique. Le cas du
don contre-don. In: Revue économique. Volume 43, n°5, 1992. pp. 917-946.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1992_num_43_5_409404L'emprunt de la théorie économique
à la tradition sociologique
Le cas du don contre-don
Philippe Batifoulier
Laurent Cordonnier
Yves Zenou*
Le don contre-don est un objet d'étude qui appartient par tradition à la
sociologie. Des travaux récents tentent de transposer les schémas de la
réciprocité archaïque aux échanges qui ont cours dans la sphère économique des
sociétés modernes. Le but de ces tentatives est de rendre compte de la forme
atypique de certains échanges économiques, comme par exemple la relation de
travail. Mais, à défaut de préciser davantage les hypothèses sur les comporte
ments des acteurs, ou en faisant reposer exclusivement le don contre-don sur la
rationalité instrumentale, l'économie laisse évanouir ce nouvel objet. Le contraire
exigerait, au minimum, la réintroduction de motivations non utilitaristes dans la
théorie de la décision. Le don contre-don se situe en effet dans une sorte de
compromis entre l'action morale et l'action intéressée.
INTRODUCTION
Durant la dernière décennie, la littérature économique s'est enrichie d'une
série de travaux sensiblement convergents sur le thème du don contre-don. Le
point commun de ces travaux est de rechercher dans la tradition sociologique de
quoi alimenter un renouvellement de la théorie de l'échange marchand. Les
auteurs de ce courant informel se classent volontiers parmi les « hétérodoxes ».
À juste titre d'ailleurs, pour au moins une raison : vue de loin, leur démarche
représente bien une tentative pour contourner complètement la problématique
standard (de type Arrow-Debreu) sur la question de la coordination des actions
interindividuelles par le marché.
* Nous tenons à remercier Olivier Favereau, Roger Frydman et Favrice Tricou,
ainsi que deux referee anonymes, pour les remarques et les critiques qu'ils ont
adressées à une première version de ce texte.
977
Revue économique — N° 5, septembre 1992, p. 917-946. Revue économique
Au nom d'un certain réalisme1, des auteurs comme Akerlof ou Leibenstein
introduisent des hypothèses alternatives sur les comportements individuels,
lesquelles ont comme conséquence de placer l'échange marchand sous l'exigence
d'une certaine réciprocité. De son côté, Camerer cherche à montrer que les
pratiques de réciprocité sont tout à fait efficientes pour assurer la coordination
et l'optimalité des décisions privées.
À côté du marché, de l'État et des équilibres de jeu, viendrait s'ajouter la
réciprocité comme mode d'allocation des ressources rares et comme principe
d'émergence de la coopération entre des individus, sinon égoïstes, du moins ne
prenant en compte que les conséquences privées de leurs actions. Vu sous cet
angle, la réciprocité est bien une question économique, et non des moindres.
L'objet de cet article est de confronter la version économique du don contre-
don à celle plus ou moins établie qu'en fournit la tradition sociologique.
L'emprunt à cette dernière discipline est en effet clairement revendiqué, par les
auteurs étudiés ici, pour justifier leurs hypothèses sur les comportements et
interpréter la nature de l'échange en question.
Il ressort de cette confrontation, comme on va le voir, que cet emprunt à la
tradition sociologique est assez limité, et que l'intérêt de ces travaux est peut-
être ailleurs. En particulier, ils suggèrent que la réciprocité introduit des
éléments de coopération involontaire, non concertée dans un système
d'interaction qui reste fondamentalement structuré par la compétition.
Mais l'inconvénient de ces travaux est de ne pas signaler clairement la
différence (s'il y a lieu de la faire) entre un don contre-don et un échange
marchand standard. Finalement, faute de véritablement clarifier leurs hypothèses
sur la rationalité des acteurs (Akerlof et Leibenstein), ou en transposant le
principe d'économicité à l'analyse du don contre-don (Camerer), ces auteurs
perdent la part de gratuité ou d'obligation qu'ils sous-entendent pourtant en
invoquant le schéma de l'échange archaïque.
Cependant, comme nous essaierons de le montrer, la convention d'effort,
telle que l'entend Leibenstein, laisse la porte ouverte à une explication non
strictement instrumentaliste de la réciprocité. Ici, l'enjeu est de produire une
théorie de la décision faisant sa part aux motivations mixtes des individus.
La première partie de l'article présente la version sociologique du don
contre-don, ce qui le distingue de l'échange marchand, et tente un bref exposé
des théories anthropologiques de la réciprocité archaïque. La seconde partie
présente la version économique du don contre-don telle qu'elle apparaît dans les
travaux d' Akerlof et de Camerer, ou telle qu'on peut l'interpréter dans les de Leibenstein. Enfin, la troisième partie expose en quoi l'emprunt des
économistes à la tradition sociologique est limité, et suggère que la rationalité
des comportements de réciprocité relève plutôt d'une théorie de la co-décision
qui reste à faire. La convention d'effort, telle que l'entrevoit Leibenstein, fournit
le point de départ de cette réflexion.
1. Comme en témoigne l'expression des « faits stylisés » qui est mobilisée
pour soutenir l' à-propos de ces recherches.
918 Philippe Batifoulier, Laurent Cordonnier, Yves Zenou
LE DON CONTRE-DON DANS LA TRADITION SOCIOLOGIQUE
L'utilisation en économie de schémas d'échange se référant au don contre-
don requiert qu'on ait répondu au préalable à deux questions :
— Quelles sont les spécificités du don réciproque par rapport aux autres
types d'échange, et en particulier par rapport à l'échange marchand ?
— Comment cette forme de relat

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