La femme malaise, productrice et gestionnaire - article ; n°102 ; vol.26, pg 359-370
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Description

Tiers-Monde - Année 1985 - Volume 26 - Numéro 102 - Pages 359-370
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 8
Langue Français

Extrait

Josiane Massard
La femme malaise, productrice et gestionnaire
In: Tiers-Monde. 1985, tome 26 n°102. pp. 359-370.
Citer ce document / Cite this document :
Massard Josiane. La femme malaise, productrice et gestionnaire. In: Tiers-Monde. 1985, tome 26 n°102. pp. 359-370.
doi : 10.3406/tiers.1985.3491
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1985_num_26_102_3491LA FEMME MALAISE,
PRODUCTRICE ET GESTIONNAIRE
par Josiane Massard*
La fédération de Malaisie, indépendante depuis 1957, se distingue
par un haut niveau de vie, se plaçant au quatrième rang des pays d'Asie
du Sud-Est, en termes de revenus per capita. Cette prospérité repose sur
des ressources naturelles abondantes; pourtant, grâce à une gestion
saine, la part des produits non transformés dans les exportations n'est
plus dominante aujourd'hui. Caractérisé par une agriculture de subsis
tance il y a deux siècles, le pays apparaît actuellement parmi les nations
nouvellement industrialisées, donc relativement urbanisées.
Rappelons en outre que la pénétration coloniale s'est accompagnée
de forts mouvements de main-d'œuvre : alors que les Chinois du sud
de la Chine étaient recrutés pour travailler dans les mines d'étain, des
Indiens du pays tamoul venaient mettre en valeur les grandes plan
tations. Ces immigrants, longtemps considérés comme temporaires, se
sont installés en pénétrant d'autres secteurs de l'économie. Pendant le
même temps, le peuplement de la péninsule par les Malais se réalisait
à la fois par un accroissement naturel et par une migration continue en
provenance du reste du monde insulindien (Sumatra, mais aussi Java
et pays Bughis). En 1980, sur 13 745 200 habitants, les Malais repré
sentaient 52 %, les Chinois 36 %, les Indiens 10 %, et les autres groupes
(aborigènes de la péninsule et populations autochtones de Sabah et
Sarawak) 2 %. Les Malais sont longtemps restés à l'écart du dévelop
pement, continuant à s'adonner à l'agriculture de subsistance et se
privant ainsi des bénéfices matériels de l'enrichissement général. La
période qui a fait suite à l'indépendance a vu se développer une classe
de fonctionnaires malais, et ce sont les Malais qui sont majoritaires
* Ethnologue. Dynamique, Espace, Variation en Insulinde (devi), er 297 du cnrs.
Revue Tiers Monde, t. XXVI, n» 102, Avril-Juin 1985 Збо JOSIANE MASSARD
aujourd'hui dans le secteur tertiaire, en même temps que se forme plus
modestement un groupe de commerçants et d'hommes d'affaires malais.
Les Malais constituent encore néanmoins 63 % de la population
rurale, et dominent le secteur primaire en termes de main-d'œuvre. Le
paysage agricole s'est diversifié; il était traditionnellement caractérisé
par un habitat de villages situés dans les vallées fluviales, ou en bord de
mer; ceux-ci se dépeuplent progressivement au profit de centres urbains,
mais surtout, de nouveaux agglomérats créés de toutes pièces au cœur
de périmètres d'agro-industrie gérés par des agences fédérales. L'agri
culture villageoise occupe de nos jours 60 % des terres cultivées, les
nouvelles formes de peuplement rural en occupent 10 %, les 30 % res
tants étant consacrées aux grandes plantations privées.
La part des cultures vivrières dans l'économie villageoise a cons
idérablement diminué et varie suivant les régions, et suivant le degré
d'intervention de l'agriculture commerciale, intervention soit spontanée,
soit encadrée par des agences d'Etat; il arrive qu'elle soit totalement
déplacée par des cultures de rapport.
La femme malaise. Arrière-plan historique et sociologique
Tout en paraissant privilégié par rapport à celui de ses compagnes
du reste de l'Asie (Japon notamment), le statut de la femme malaise
fait l'objet d'évaluations sinon contradictoires, du moins divergentes
de la part des spécialistes en sciences sociales, qu'ils soient occidentaux
ou malaisiens (Rosemary Firth, 1966; Hong, 1983; Manderson, 1980;
Smith, 1984; Whyte et Whyte, 1978). Les variations sont fondées sur
des différences de points de vue : selon que l'on observe les masses
paysannes, la classe moyenne urbanisée, ou l'aristocratie, ou qu'on
considère l'univers public ou la sphère domestique, ou encore
privilégie les nouveaux modèles islamiques plutôt que la tradition
villageoise, on voit se dessiner une image très différente.
Bien qu'islamisée depuis le xve siècle, la société malaise restait
marquée jusqu'à la fin du xixe par une position féminine sinon domin
ante, du moins forte, dans la vie familiale, et relativement affirmée
dans le domaine économique (Gullick, 1958). Alors que l'Islam défa
vorise les femmes en matière d'héritage, le droit coutumier s'imposait
souvent. Cela se concrétisait par un accès quasiment égalitaire au moyen
de production qu'est la terre, ou que sont dans une moindre mesure,
les bateaux dans les communautés de pêche. Dans les activités de pro
duction, qu'il s'agisse du petit commerce ou de l'agriculture, les femmes
participaient au même titre que les hommes, soit en s'adonnant aux LA FEMME MALAISE PRODUCTRICE ET GESTIONNAIRE 36 1
mêmes travaux, soit en jouant des rôles complémentaires. L'introduction,
dans les années 20, de petites plantations d'hévéaculture n'a pas fonda
mentalement modifié ce tableau qui s'impose encore dans les villages
fluviaux.
Cependant, le statut de la femme malaise doit être aussi considéré
à la lumière de pratiques culturelles plus générales. La société malaise
suit un système de parenté dit cognatique ou indifférencié : les res
sources, foncières ou autres, sont transmises aussi bien en voie patri-
linéaire que matrilinéaire. Il n'y a pas formation de groupes de parenté
(clans ou lignages), et les relations sont focalisées autour d'un individu,
constituant sa parentèle. L'unité sociale est la famille nucléaire, qui est
aussi le noyau de la plupart des maisonnées, et qui est également l'unité
de production. La résidence suit un modèle qui tend légèrement vers
l'uxorilocalité.
Les données ethnographiques présentées ici ont été collectées
entre 1978 et 1980 dans un village fluvial de l'Etat de Pahang (Malaysia
occidentale), situé à environ 25 km des rivages de la mer de Chine1.
Le village comptait alors 64 maisonnées dont la plupart tirent leurs
revenus de formes agricoles traditionnelles combinées à l'hévéaculture
implantée dans les années 30. Nous nous attacherons à mettre en évidence
le rôle économique des femmes malaises tant dans l'exploitation de
l'environnement naturel que dans la circulation des produits obtenus :
nous montrerons successivement que les femmes peuvent s'approprier
le foncier, qu'elles contrôlent certaines formes culturales, qu'elles gèrent
une partie de la main-d'œuvre, et qu'elles président à la redistribution
des fruits de leur travail.
Les femmes et la terre
Dans le contexte villageois, la terre est le bien le plus valorisé, comme
source de richesse et comme base de prestige; les villageois sans terre
(4 maisonnées seulement) sont considérés comme très pauvres2. En
l'absence de groupes de parenté de type lignager ou clanique, l'appro
priation de la terre s'exerce à titre individuel, même lorsque la mise en
valeur est assurée par un couple. La terre s'obtient par « occupation »,
par héritage, et par achat (Massard, 1983 л, р. 338-355); ces trois
1. Ce travail a pu être réalisé lors de deux missions (février 1978 - mars 1979, financ
ement dgrst et mai à août 1980, financement cedrasemi-cnrs et ehess).
2. Celui qui ne dispose d'aucune terre héritée est particulièrement défavorisé, non seul
ement économiquement mais aussi socialement; tel un immigré, il ne peut revendiquer
aucune attache territoriale, donc aucun ancêtre connu, dans le village où il s'est installé. 362 JOSIANE MASSARD
formes sont représentées dans les plantations d'hévéas par exemple,
où sur les 1 66 acres consacrées à ce cultigène dans le village, les femmes
en possèdent 67,75, et les hommes 98,25.
Si on considère maintenant le cas des lopins attenant à la maison <

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