La notion de temps d après saint Thomas d Aquin - article ; n°13 ; vol.4, pg 28-43
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La notion de temps d'après saint Thomas d'Aquin - article ; n°13 ; vol.4, pg 28-43

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Revue néo-scolastique - Année 1897 - Volume 4 - Numéro 13 - Pages 28-43
16 pages

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Publié le 01 janvier 1897
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Langue Français
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Extrait

D. Nys
La notion de temps d'après saint Thomas d'Aquin
In: Revue néo-scolastique. 4° année, N°13, 1897. pp. 28-43.
Citer ce document / Cite this document :
Nys D. La notion de temps d'après saint Thomas d'Aquin. In: Revue néo-scolastique. 4° année, N°13, 1897. pp. 28-43.
doi : 10.3406/phlou.1897.1528
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-5541_1897_num_4_13_1528III.
La notion de temps d'après saint Thomas d'Aquin.
Il en est de l'idée de temps comme de tant d'autres qui
nous sont familières : aussi longtemps que l'on s'en tient à la
pensée vulgaire, l'entente est unanime. De l'avis de tous, le
temps nous représente une durée successive, une sorte de
réalité idéale ou concrète, peu importe, dont les parties
se trouvent dans un flux continu, passent sans interruption
de l'avenir dans le passé que relie toujours entre eux un
instable présent. Mais pour peu qu'on y réfléchisse, on s'aper
çoit aisément que cette notion, apparemment si simple, renferme
des idées bien diverses, sinon incompatibles, On y découvre
en effet l'idée de durée qui pour tous est synonyme de persis
tance d'être, et l'idée de succession continue qui nous repré
sente l'être soumis à un renouvellement, à un changement
ininterrompu.
Mais la durée qu'est-elle ? Y-a-t-il dans la nature une réalité
quelconque qui réponde à cette idée, et, dans l'aflirmative,
quelle place faut-il lui accorder parmi les nombreux attributs
de l'être? Et la succession elle-même, dans quel genre de phéno
mènes sensibles la voit- on réalisée ? Comment enfin, de ces
phénomènes successifs, si multiples et si variés, l'intelligence
peut-elle, par un procédé naturel, élaborer ce concept de durée
successive qui constitue l'idée universelle du temps ?
Autant de questions qui s'imposent à notre esprit dès qu'il
soumet à l'analyse philosophique la notion vulgaire du temps. D' LA. NOTION DE TEMPS APRÈS SAINT THOMAS d'aQUIN. 29
On le voit, pour donner à cette étude une base solide, et
écarter dès l'abord le reproche d'apriorisme, il n'est point de
procédé plus sûr que de prendre pour point de départ l'idée
vulgaire du temps. Telle aussi sera la méthode que nous allons
suivre.
*
* v
La première notion renfermée dans le concept du temps est
la notion de durée. La durée ne s'applique évidemment qu'aux
êtres existants. Dire d'une créature qu'elle n'a eu qu'une
courte durée, c'est affirmer qu'elle n'a eu qu'une courte
existence. Nous attribuons à Dieu une durée sans commence
ment et sans terme, parce que nous lui reconnaissons une
existence qui possède ces mêmes caractères. Si nous conce
vons une existence idéale ou simplement possible, nous ne lui
attribuons qu'une durée possible ; est-elle au contraire réelle et
concrète, la durée se présente à nous comme une chose réelle,
indépendante de nos intelligences.
Qu'il y ait donc entre l'existence d'un être et sa durée une
relation étroite et intime, nul ne songera à le nier. D'autre
part, comme les substances seules jouissent de l'existence dans
le sens rigoureux du terme, elles seules aussi peuvent recevoir
une certaine durée. L'accident, en effet, n'est doué que d'une
existence d'emprunt ; il n'existe que dans et par la substance.
Enfin, puisque la durée se rattache à l'existence comme telle,
abstraction faite du mode d'existence et des imperfections qui
caractérisent la genèse de cette idée, il est clair que la durée
est attribuable à toute substance quelconque soit corporelle,
soit spirituelle, créée ou incréée.
La durée nous apparaît ainsi comme une existence continuée
ou, selon la définition des scolastiques, comme la persistance
d'une chose dans son être.
On discute la question de savoir quelle distinction il y a
lieu d'établir entre la durée et l'existence. Nous ne croyons
pas devoir aborder ici cette controverse. A notre avis, il
n'existe entre ces deux notions qu'une distinction de concept, 30 D. NYS.
et la durée substantielle des êtres s'identifie avec leur exis
tence l).
*
* *
Puisque le temps, de l'avis de tout le monde, est une
durée successive, s'il existe un temps réel, ce temps devra
s'identifier avec les choses réelles dont l'existence persistante
présente le caractère propre de la durée temporelle. En d'autres
termes, une durée réelle successive et continue ne peut être
que la persistance d'un être dont les parties s'écoulent les unes
après les autres, s'enchaînent sans interruption de manière à
confondre en réalité les limites que l'esprit seul peut leur
assigner.
Où trouver dans la nature un être doué de ces caractères ?
Si nous parcourons la série des êtres, nous n'en trouvons
qu'un seul qui répond adéquatement à cette conception ; c'est
le mouvement entendu au sens rigoureux du terme, c'est-à-dire
le successif et continu.
Qu'il existe entre le mouvement et le temps réel une étroite
relation, un instant de réflexion suffit pour s'en convaincre.
N'est-ce pas, en effet, par le mouvement de la terre autour
de son axe que nous évaluons dans la vie pratique la durée
des existences contingentes, des événements et des actes de
notre vie ?
De plus, nous arrive-t-il de nous livrer à un travail absor
bant et de soustraire ainsi à notre attention les divers change
ments qui se passent autour de nous ou dans l'intérieur de
notre être, la notion du temps nous échappe complètement ;
au moment où nous nous resaisissons, nous sommes incapables
d'apprécier même d'une manière approximative la durée du
!) Nous aurons bientôt l'occasion de justifier cette manière de voir dans
une étude sous presse, intitulée : La notion de temps d'après saint Thomas
d'Aquin. LA NOTION DE TEMPS D'APRÈS SAINT THOMAS d'aQUIN. 31
temps écoulé, à moins que nous ne retracions dans notre esprit
la série des actes successifs qui ont occupé cet espace de temps.
D'ailleurs, quoi de plus familier que de se représenter
concrètement le temps sous l'image d'une ligne qui s'étend
indéfiniment dans le passé, s'accroît constamment par l'éco
ulement continu d'un instable présent , et doit se prolonger sans
fin dans l'avenir ? Or, qu'y a-t-il dans cette image sinon la
représentation concrète du mouvement ? Quia ergo, dit saint
Thomas, simul cognoscimus motum et tempus, manifestum est
quod tempus est aliquid ipsius motus l) .
Le temps se rattache donc au mouvement, mais -à quel
mouvement ? Ces deux notions sont-elles identiques, et si elles
diffèrent l'une de l'autre, en quoi se distinguent-elles ?
Saint Thomas rattache, on le sait, l'idée de mouvement (motus)
à l'idée plus générale de changement (mutatio)2). Quand disons-
nous d'une chose qu'elle a réellement changé ? Lorsqu'elle
se présente à nous sous un aspect, sous une manière d'être
différente de celle qu'elle avait auparavant. Le changement
implique donc nécessairement deux termes, dont l'un est le
point de départ, l'autre le point d'arrivée ou terme final. Et,
pour que le changement soit réel, pour que le sujet passe d'un
terme à l'autre, il faut qu'il y ait entre ces deux termes une
opposition telle que l'acquisition de l'un soit inconciliable avec
la persistance de l'autre. Or, il n'y a que deux oppositions
possibles : ou bien ces deux termes sont contradictoires, ou
bien ils sont contraires. De là, deux catégories distinctes de
changements.
Si les termes sont contradictoires, comme le sont l'être et le
non-être, le passage de l'un à l'autre doit se faire d'une manière
instantanée, car entre les deux il n'y a point d'intermédiaire
possible. Cette espèce de changement, qui se réalise dans la
génération et la destruction naturelle des choses, s'appelle le
changement instantané.
1) Opusc. de tempore. C. II.
2) Phys., lib. II, lectio 2a. 32 D. NYS.
Les termes sont-i

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