La problématisation de la violence en milieux de vie conjugal et familial: la part du secret et celle du spectacle - article ; n°3 ; vol.23, pg 275-289

Daniel Tremblay

Description

Déviance et société - Année 1999 - Volume 23 - Numéro 3 - Pages 275-289
Taking a constructionist approach, the article presents the results of two studies (a review of the scientific and clinical literature as well as analysis of mediation as treatment) on violence within conjugal and family life. It concludes that violence which affects these milieux, as has been recognised socially after several decades in several western countries, is conceptualised in a way which is marked by the subjective views of the people concerned, especially in the scientific and clinical spheres and for mediation. This violence is no more hidden than it has been, but it is far from being perceived, defined or socially represented in an « objective » manner.
Dieser Artikel präsentiert die Ergebnisse zweier Untersuchungen mit einem konstruk- tivistischen Ansatz (eine Inhaltsanalyse wissenschaftlicher und klinischer Schriften und eine Medienanalyse) iiber Gewalt im Milieu der Ehe und der Familie. Er zeigt, daß die Gewalt, die diese Milieus betrifft, auch wenn sie seit einigen Jahrzehnten in verschiedenen westliche Ländern offentlich thematisiert wird, Gegenstand einer Problematisierung ist, die sich über die « Subjektivitüt» der Akteure kennzeichnen läßt. Dieser Gewalt ist nicht mehr geheim wie vorher, aber sie ist noch weit davon entfernt, offentlich als « objektiv » wahrgenommen, definiert und reprasentiert zu werden.
Vertrekkende vanuit een constructivistische aanpak bespreekt dit artikel de resultaten van twee onderzoeken (een recensie van wetenschappelijke en klinische artikels alsook een analyse van de mediatieke behandeling) betreffende geweld in echtelijk en familiaal ver- band. Hieruit kon worden afgeleid dat het geweld dat dit milieu treft, wetende dat het sinds enkele decennia sociaal erkend is in meerdere westelijke landen, desalniettemin het onder- werp vormt van een problematisering die wordt gekenmerkt door de «subjectiviteit» van de betrokken actoren, in hoofdzaak de wetenschappelijke, klinische en mediatieke milieus. Deze vorm van agressie wordt niet meer verhuld als voorheen, maar is ver van te worden genkenmerkt, gedefinieerd en sociaal voorgesteld op een « objectieve » manier.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: DEVIANCE_ET_SOCIETE
• Publié le: 01 janvier 1999
• Nombre de lectures: 17
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Daniel Tremblay
La problématisation de la violence en milieux de vie conjugal et
familial: la part du secret et celle du spectacle
In: Déviance et société. 1999 - Vol. 23 - N°3. pp. 275-289.
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Tremblay Daniel. La problématisation de la violence en milieux de vie conjugal et familial: la part du secret et celle du spectacle.
In: Déviance et société. 1999 - Vol. 23 - N°3. pp. 275-289.
doi : 10.3406/ds.1999.1697
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1999_num_23_3_1697Abstract
Taking a constructionist approach, the article presents the results of two studies (a review of the
scientific and clinical literature as well as analysis of mediation as treatment) on violence within conjugal
and family life. It concludes that violence which affects these milieux, as has been recognised socially
after several decades in several western countries, is conceptualised in a way which is marked by the
subjective views of the people concerned, especially in the scientific and clinical spheres and for
mediation. This violence is no more hidden than it has been, but it is far from being perceived, defined
or socially represented in an « objective » manner.
Zusammenfassung
Dieser Artikel präsentiert die Ergebnisse zweier Untersuchungen mit einem konstruk- tivistischen
Ansatz (eine Inhaltsanalyse wissenschaftlicher und klinischer Schriften und eine Medienanalyse) iiber
Gewalt im Milieu der Ehe und der Familie. Er zeigt, daß die Gewalt, die diese Milieus betrifft, auch wenn
sie seit einigen Jahrzehnten in verschiedenen westliche Ländern offentlich thematisiert wird,
Gegenstand einer Problematisierung ist, die sich über die « Subjektivitüt» der Akteure kennzeichnen
läßt. Dieser Gewalt ist nicht mehr geheim wie vorher, aber sie ist noch weit davon entfernt, offentlich als
« objektiv » wahrgenommen, definiert und reprasentiert zu werden.
Vertrekkende vanuit een constructivistische aanpak bespreekt dit artikel de resultaten van twee
onderzoeken (een recensie van wetenschappelijke en klinische artikels alsook een analyse van de
mediatieke behandeling) betreffende geweld in echtelijk en familiaal ver- band. Hieruit kon worden
afgeleid dat het geweld dat dit milieu treft, wetende dat het sinds enkele decennia sociaal erkend is in
meerdere westelijke landen, desalniettemin het onder- werp vormt van een problematisering die wordt
gekenmerkt door de «subjectiviteit» van de betrokken actoren, in hoofdzaak de wetenschappelijke,
klinische en mediatieke milieus. Deze vorm van agressie wordt niet meer verhuld als voorheen, maar is
ver van te worden genkenmerkt, gedefinieerd en sociaal voorgesteld op een « objectieve » manier.Déviance et Société, 1999, Vol. 23, No 3, pp. 275-289
LA PROBLEMATISATION DE LA VIOLENCE EN MILIEUX
DE VIE CONJUGAL ET FAMILIAL: LA PART DU SECRET
ET CELLE DU SPECTACLE
D. TREMBLAY*
A partir d'une approche de type constructionniste, cet article présente les résultats de
deux recherches (une recension des écrits scientifiques et cliniques de même qu 'une ana
lyse du traitement médiatique) sur la violence en milieux de vie conjugal et familial. Il en
ressort que la violence qui affecte ces milieux de vie, bien que reconnue socialement depuis
quelques décennies dans plusieurs pays occidentaux, fait l'objet d'une problématisation
marquée par la «subjectivité» des acteurs concernés, notamment les milieux scientifiques,
cliniques et médiatiques. Cette violence n'est plus occultée comme elle l'était autrefois,
mais est loin d'être perçue, définie et représentée socialement d'une manière «objective».
Mots-clés : Violence familiale - Violence conjugale - Secret - Médias -
constructionnisme social
L'émergence et le développement du problème de la violence en milieux de vie conju
gal et familial au cours des dernières décennies sont indissociables de l'élaboration des
politiques et des interventions destinées à prévenir ou corriger ce problème. C'est de cette
hypothèse dont découlent les travaux et résultats de recherche présentés dans cet article. Le
cadre théorique à partir duquel s'effectue cette analyse est celui du constructionnisme1
social (social constructionism).
I. Le constructionnisme social et la violence en milieux de vie
conjugal et familial
Le social est un courant théorique relativement jeune, son appari
tion remontant aux années 70 (Rubington, Weinberg, 1995). D'inspiration interactionniste,
ce courant met essentiellement l'accent sur le caractère dynamique et revendicatif du
processus par lequel se construit tout problème social (Schneider, 1985). Sur le plan de
l'analyse, le principe qui sous-tend cette approche consiste à appréhender l'émergence, la
Université du Québec à Hull.
Bien que n'existant pas en langue française, les termes «constructionnisme» et «problématisation», de
même que leurs formes adjectivales et verbales, seront employés ici sans guillemet, et ce, pour alléger le
texte. Le mot « constructivisme » existe en français mais les significations qu'on lui donne (surtout en histoire
de l'art et en épistémologie) sont fort différentes de celle donnée ici au terme constructionnisme. L'expres
sion constructionnisme social, au demeurant, n'est pas plus lourde que d'autres expressions savantes du
genre individualisme méthodologique ou interactionnisme symbolique. 276 Déviance et Société
perception, la définition et le traitement (prévention, dépistage, correction...) de tout pro
blème social comme un ensemble d'activités impliquant la participation de divers acteurs
sociaux qui cherchent à faire valoir leurs points de vue respectifs (assertions of grievances
and daims) au sujet d'une situation dont ils affirment (putative conditions) et dénoncent
l'existence (inspiré de Spector, Kitsuse, 1987). L'idée, même si la critique est parfois adres
sée à ce courant théorique (Best, 1993 ; Miller, Holstein, 1993), n'est pas forcément de nier
ce que l'on pourrait appeler l'« existence objective des faits» ou de chercher à en disqualif
ier l'analyse, mais plutôt de mettre en relief la dimension subjective du processus que
constitue la problématisation sociale d'une réalité. Pour illustrer cette approche, rappelons
par exemple que si le phénomène de la violence en milieux de vie conjugal et familial est
une réalité dont il serait bien difficile et même hasardeux de retracer l'origine, on ne la
conçoit en revanche comme un problème social ou comme un ensemble de problèmes
sociaux que depuis relativement peu de temps. Il est également connu que toutes les socié
tés contemporaines n'en ont pas la même conception, que certains aspects du phénomène
sont ignorés par des acteurs sociaux alors qu'ils sont vigoureusement dénoncés par
d'autres, que les tentatives d'explication qui en sont proposées divergent fréquemment,
qu'il n'existe pas de définition consensuelle du concept même de «violence», etc.
La problématisation sociale d'une réalité est susceptible de mobiliser plusieurs types
d'acteurs sociaux aux intérêts divers et fréquemment divergents. Dans le domaine de la
violence en milieux de vie conjugal et familial, ce phénomène se manifeste de bien des
façons. La littérature constructionniste suggère par exemple que les personnes âgées malt
raitées ou abusées, au cours des années 80, auraient été perçues et présentées par les
«experts» comme les victimes toutes désignées d'une violence essentiellement intergéné-
rationnelle (enfants -> parents), ce qui aurait eu pour effet d'occulter la prévalence de la
violence conjugale dont sont victimes les femmes âgées (Baumann, 1989). Autre exemple,
celui des médias d'information dont la contribution à la construction sociale des mauvais
traitements infligés aux enfants aurait en quelque sorte tendance à dénaturer cette réalité,
au profit d'une représentation dramatisante de cette dernière et virtuellement plus
« attrayante » sur le plan médiatique (Johnson, 1989). Pour citer un dernier exemple, l'ana
lyse constructionniste de la violence conjugale fait ressortir que les experts, les médias et
les intervenants ont spontanément tendance, non seulement à construire cette réalité, mais
aussi à «moraliser» ses protagonistes de même que les actes qui leur sont imputés. La vio
lence conjugale serait ainsi appréhendée de façon s