La structure de la personne indéterminée : le sujet zéro en russe et le pronom on en français - article ; n°1 ; vol.62, pg 197-209
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Description

Revue des études slaves - Année 1990 - Volume 62 - Numéro 1 - Pages 197-209
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 12
Langue Français

Extrait

Madame Marguerite Guiraud-
Weber
La structure de la personne indéterminée : le sujet zéro en russe
et le pronom on en français
In: Revue des études slaves, Tome 62, Fascicule 1-2. En hommage à Roger L'Hermitte. pp. 197-209.
Citer ce document / Cite this document :
Guiraud-Weber Marguerite. La structure de la personne indéterminée : le sujet zéro en russe et le pronom on en français. In:
Revue des études slaves, Tome 62, Fascicule 1-2. En hommage à Roger L'Hermitte. pp. 197-209.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1990_num_62_1_5877LA STRUCTURE DE LA PERSONNE INDÉTERMINÉE :
LE SUJET ZÉRO EN RUSSE ET LE PRONOM ON EN FRANÇAIS*
PAR
MARGUERITE GUIRAUD-WEBER
01. Après les travaux de nombreux linguistes (notamment Gustave Guillaume
et Emile Benveniste) consacrés aux relations de personne dans l'acte d'énonciation,
l'importance de cette question n'est plus à démontrer. Nous nous attacherons à un
aspect en apparence marginal de ces relations en analysant la composition interne
de ce qu'on pourrait appeler « la personne indéterminée », à savoir le sujet zéro
« humain » en russe et son équivalent fréquent, le pronom on en français.
L'analyse révèle d'importantes différences dans le contenu sémantique et référentiel
de ces deux entités. Elle met en lumière la structuration différente des champs du
moi et du hors moi dans les relations de personne propres à chacune des langues.
Après avoir réglé quelques questions préliminaires, nous examinerons tour à
tour la composition interne de la personne indéterminée en français et en russe pour
procéder ensuite à leur comparaison.
02. Le concept de personne indéterminée relève, par un de ses aspects, du
domaine de la détermination et ce dernier est traditionnellement lié à l'existence de
l'article. Ce domaine, comme l'observe à juste titre Denis Paillard, n'a pas été
pendant longtemps reconnu comme objet d'étude et, à plus forte raison, comme
catégorie en russe, dans la mesure où le russe est une langue sans article (Paillard
1984: 3). Les travaux les plus récents, notamment ceux de Denis Paillard lui-
même, montrent cependant la légitimité de ce type d'études. L'opposition déte
rminé/indéterminé n'est pas systématisée en russe, comme elle l'est en français ;
elle s'exprime néanmoins à travers différents faits lexicaux et morphologiques. Elle également au niveau syntaxique par l'emploi du signe zéro en fonction
du sujet de la phrase. Ce signe zéro référant soit à une personne indéterminée, soit
à un objet indéterminé s'oppose ainsi aux signes explicites réservés aux personnes
et aux objets déterminés. Précisons que l'analyse du signe zéro référant à un objet
indéterminé (ou plutôt à une « non personne » indéterminée, comme dans les
phrases : В кустах зашевелилось ; Над головой гудит, etc.) dépasse le
* Je remercie Claire Blanche-Benveniste de ses suggestions et des explications
complémentaires qu'elle a eu l'amitié de me donner.
Rev. Étud. slaves, Paris, LXII/1-2, 1990, p. 197-209. MARGUERITE GUIRAUD-WEBER 198
cadre de la présente communication ; elle a été faite ailleurs (Guiraud-Weber
1978 ; 1984 : 75-80).
03. Le russe possède deux types de propositions à sujet zéro « humain » :
celles dont le verbe est à la troisième personne du pluriel et celles dont le verbe est à
la deuxième personne du singulier. En tenant compte des propriétés syntaxiques
ainsi révélées par l'accord verbal, nous parlerons du sujet zéro à caractéristiques
syntaxiques de la 3e personne du pluriel (0 3 PI) et du sujet zéro à de la 2e du singulier (0 2 Sg). Bien que dans les deux cas il
s'agisse d'une personne indéterminée, le contenu sémantique de ces personnes
n'est pas identique.
Voyons tout d'abord pourquoi il convient de parler à leur propos d'un signe
zéro plutôt que d'un autre type d'absence syntaxique (ellipse, effacement, inclusion
sémantique, etc.).
Comparons les phrases :
В школе над ним смеялись « On s'est moqué de lui à l'école » ;
В ребята над ним смеялись « A l'école, les enfants se sont
moqués de lui »
Bien qu'il soit hors de doute que ces deux énoncés peuvent s'appliquer à une
même réalité extra-linguistique et qu'il soit même probable que le premier concerne
également les écoliers dont il ne parle pas et qui ne sont mentionnés que dans le
second énoncé, les deux phrases ont un sens rigoureusement distinct :
1) la première attribue l'action à un ensemble indéterminé de personnes
localisables à l'école ;
2) la seconde l'attribue précisément aux écoliers et à personne d'autre.
Cette différence de sens, ténue aux yeux de certains, est en réalité
considérable : elle est semblable à celle qui sépare un article indéfini de l'article
défini dans les langues à article et suffit à y fonder une opposition grammaticale.
Le sens « ensemble indéterminé de personnes », parfaitement identifiable
comme tel par n'importe quel locuteur natif, ne possède cependant aucun support
matériel. Il y a donc dans la phrase une absence significative. Cette absence est
aussi définitive : en effet, aucun signe appartenant au contexte ne peut compléter la
phrase. Par conséquent, cette dernière ne pourra être considérée comme elliptique.
Le russe ne possède d'ailleurs aucun lexème pouvant « remédier » à cette absence
et les énoncés à sujet explicite comme :
В школе над ним кто-то смеялся « Quelqu'un s'est moqué de lui à
l'école » ;
В школе над ним некоторые смеялись « Certains se sont moqués
de lui à l'école » ;
ne sont pas sentis comme parfaitement équivalents.
A supposer que malgré tout on admet la synonymie totale des phrases en
question, la transformation du sujet zéro à caractéristiques de la 3e personne du
pluriel en kto-to ou nekotorye n'est pas toujours possible. Dans certains contextes
c'est kto-nibud' qui serait plus approprié ; observons : STRUCTURE DE LA PERSONNE INDÉTERMINÉE 199
Очень хотелось Кате, чтобы ее полюбили. (Panova)
(= чтобы кто-нибудь ее полюбил).
Если бы мне предложили сегодня же вернуться туда [...], я
не вернулась бы. (Garšin)
(= если бы кто-нибудь предложил мне сегодня вернуться).
En contexte négatif, on aura la transformation en nikto :
Там y них с этим не считаются (Kataev)
(= там у них с этим никто не считается).
Да нам-то не поверят. (А. К. Tołstoj)
(= да никто не поверит).
Ces différentes possibilités de transformation montrent qu'il s'agit chaque fois
d'une synonymie partielle. La valeur du sujet zéro à caractéristiques syntaxiques de
la 3e personne du pluriel ne peut pas être déduite de la somme de ses virtualités
transformationnelles puisque ces dernières varient suivant le contexte. La même
démonstration pourrait être faite pour le sujet zéro à syntaxiques de
la 2e personne du singulier.
Nous constatons donc que dans la phrase :
В школе над ним смеялись « On s'est moqué de lui à l'école »
l'absence matérielle du sujet est, en même temps, significative et définitive, ce qui
correspond aux caractéristiques du signe zéro tel qu'il est défini par de nombreux
linguistes (Saussure 1966 : 124 ; Bally 1965 : 248 ; Jakobson 1971 : 211-219,
et bien d'autres). Malheureusement, la plupart des descriptions soviétiques ne
reconnaissent pas le signe zéro en tant que concept linguistique et la confusion
règne dans ce domaine1. La reconnaisance de la nature grammaticale exacte du sujet
dans ce type de proposition permettrait pourtant d'introduire une terminologie plus
appropriée et mettre fin à des obscurités découlant de la terminologie traditionnelle.
Nous verrons plus loin, en effet, que les appellations traditionnelles des
propositions à sujet zéro, à savoir 1) « les propositions référant à une personne
indéterminée » (neopredelenno-ličnye predloženija) et 2) « les propositions
référant à la personne universelle » (obobščenno-ličnye predložen

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