La Zone Franc face à Maastricht - article ; n°136 ; vol.34, pg 881-901
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Description

Tiers-Monde - Année 1993 - Volume 34 - Numéro 136 - Pages 881-901
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Michel Lelart
La Zone Franc face à Maastricht
In: Tiers-Monde. 1993, tome 34 n°136. pp. 881-901.
Citer ce document / Cite this document :
Lelart Michel. La Zone Franc face à Maastricht. In: Tiers-Monde. 1993, tome 34 n°136. pp. 881-901.
doi : 10.3406/tiers.1993.4808
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1993_num_34_136_4808LA ZONE FRANC
FACE A MAASTRICHT
par Michel Lelart*
Les débats qui ont entouré la ratification du traité de Maastricht dans
chacun des pays de la Communauté ont concerné les chances que repré
sentait pour eux la mise en place d'une monnaie unique à la fin de la décenn
ie. Cette perspective trouve un large écho en Afrique, particulièrement
dans les quatorze pays de la Zone Franc qui ont décidé de constituer entre
eux un véritable système monétaire régional (Lelart, 1985 et 1990). La
construction monétaire européenne est en effet susceptible d'avoir des
conséquences importantes pour les pays membres de la Zone Franc.
La Zone Franc est d'abord une zone monétaire à peu près parfaite.
Le franc cfa est en effet une monnaie commune à tous les Etats memb
res depuis leur indépendance. A vrai dire il existe deux francs cfa : l'un,
le franc de la Communauté financière africaine, est une monnaie com
mune aux sept Etats membres de I'umoa, émis par la Banque centrale
des Etats de l'Afrique de l'Ouest. L'autre, le franc de la Coopération
financière en Afrique centrale, est une monnaie commune à six autres
Etats, émis par la Banque centrale des Etats d'Afrique centrale1. La
Zone Franc apparaît ainsi comme la préfiguration de l'union monétaire
européenne au sein de laquelle une même monnaie sera émise par une
seule banque centrale.
Cette union monétaire européenne est l'aboutissement d'une longue
et lente évolution qui a débuté avec le Marché commun, complété par le
Grand Marché intérieur et pendant laquelle les progrès économiques
ont accompagné les progrès monétaires. Dans la Zone Franc au
contraire, l'union monétaire instituée dès le départ n'a pas engendré
* Directeur de recherche au cnrs, Institut Orléanais de Finance.
1. Il y a aussi le franc comorien, égal au franc cfa, émis par la Banque centrale des Comores.
Mais il n'est la monnaie que de la République islamique des Comores qui est le quatorzième pays
africain membre de la Zone Franc.
Revue Tiers Monde, t. XXXIV, n° 136, octobre-décembre 1993 882 Michel Lelart
d'union économique et n'a même pas favorisé les échanges entre les pays
membres qui ne dépassent pas 10 % de leurs extérieurs ! Les
raisons en sont diverses (Hugon, 1990, p. 30). Les unes tiennent aux
contraintes d'ordre réel, telles que les difficultés de communication, l'i
mportance de l'agriculture, la faiblesse de la production industrielle, l'ab
sence de spécialisation, la du revenu... ; d'autres sont plus poli
tiques et tiennent aux contraintes de nature réglementaire ou à l'absence
de coordination au niveau du budget ou des investissements. La Zone
Franc a même eu un effet négatif : les pays qui, au moment de l'indépen
dance, ont accepté de renoncer totalement à la souveraineté monétaire,
ont tenu à conserver un minimum d'attributions et à exercer pleinement
leur souveraineté dans le domaine économique. Au moment où l'Europe
monétaire s'enracine dans l'Europe économique, cette incapacité de la
Zone Franc depuis plus de trente ans à dépasser la coopération monét
aire a rendu celle-ci plus vulnérable.
La Zone Franc est plus qu'une simple zone monétaire, car le franc
CFA est rattaché au franc français dans des conditions originales. D'une
part, le rapport du premier au second est fixe depuis le 17 octobre 1948.
D'autre part, le franc cfa est convertible en franc français grâce aux
comptes d'opérations ouverts auprès du Trésor français aux trois ban
ques centrales africaines. Quand l'un de ces comptes est créditeur, la
France accorde à ses partenaires africains une garantie de change sur le
dts. Quand il est débiteur, certaines clauses tendent à éviter tout déra
page, mais aucun plafond n'existe formellement. La différence est plus
nette avec le Système monétaire européen où l'on retrouve une grande
stabilité des taux de change, et une convertibilité limitée aux soldes d'in
tervention des banques centrales.
L'Union économique et monétaire, prolongement naturel du Sys
tème monétaire européen (sme) qui a appelé d'abord la mise en place de
l'espace financier européen, va elle-même aboutir à faire de l'écu la
monnaie unique de la Communauté, remplaçant notamment le franc
français. Cela ne s'est pas fait et ne va pas se faire sans poser bien des
problèmes à la Zone Franc.
— Le franc cfa lié au franc français l'est donc indirectement aux
autres monnaies de la Communauté. C'est pourquoi on a pu dire que le
sme regroupait en réalité non pas douze, mais vingt-six pays (Sandretto,
1987). La relation est certes plus souple, du fait des marges existantes et
des réalignements intervenus. Mais la stabilité du franc depuis quelques
années fait que le franc cfa est aujourd'hui une monnaie aussi forte que
le deutsche Mark..., n'est-il pas surévalué, notamment par rapport aux
monnaies des pays voisins ? La Zone Franc face à Maastricht 883
— La libéralisation des capitaux et des services financiers accroît la
compétitivité des institutions financières dans la Communauté et incite
l'épargne locale à venir se placer en Europe. Cette sortie de capitaux
rendue possible par la convertibilité du franc cfa a été en partie com
pensée par les crédits et surtout les investissements français et étran
gers en Afrique, mais les uns et les autres ont sensiblement diminué
depuis quelques années. Ce phénomène s'étend aux pays situés en
dehors de la zone qui, par des voies détournées, convertissent leur
épargne en francs cfa.
— La convergence des économies européennes rend nécessaire une
plus grande rigueur dans les politiques budgétaires qui resteront natio
nales mais qui, dès à présent, doivent respecter certaines règles
contraignantes. Les pays doivent déjà s'efforcer d'éviter des déficits
excessifs et s'interdire de les financer par la création monétaire. Ces
nouvelles dispositions ne sont pas de nature à favoriser une aide
accrue de la France à ses partenaires africains, au moment où les pays
de l'Est sollicitent une aide massive pour soutenir leur transition vers
l'économie de marché.
— L'adoption d'une monnaie unique va faire disparaître les monn
aies nationales. Le franc sera donc remplacé par l'écu. Que va devenir
le franc cfa, au moment où la nouvelle monnaie européenne va être
émise par une nouvelle banque centrale dont l'objectif principal est cla
irement précisé par le traité de Maastricht : c'est la stabilité des prix,
comme le souhaitaient les Allemands dont on connaît la hantise face à
l'inflation. L'écu sera donc une monnaie forte.
On comprend que les élites africaines s'interrogent et que leurs
inquiétudes trouvent un écho naturel en France. Les difficultés que
semble entraîner la construction monétaire européenne sont encore
accrues par la situation actuelle de la Zone qui s'est beaucoup dété
riorée depuis quelques années. Les chocs extérieurs n'ont pas manqué
pendant la décennie 80, qui ont affecté l'ensemble des pays en voie de
développement (Gérardin, 1992, p. 26-28). Mais on reproche surtout
aux Etats de la Zone de n'avoir pas maîtrisé la progression des
dépenses publiques, aux banques commerciales d'avoir pratiqué une
politique de crédit hasardeuse, aux banques centrales de n'avoir pas
réagi avec assez de vigueur. Il s'en est suivi une crise profonde des
systèmes bancaires qui ont dû faire l'objet ici ou là de « restruc
turations », et un recours excessif des Etats au financement extérieur
qui a conduit les créanciers à accepter des mesures de rééchelonne
ment, puis d'allégement. Deux observations peuvent compléter ce trop
rapide tableau : 884 M

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