Le commerce des Français à Cadix d après les papiers d Antoine Granjean (1752-1774) - article ; n°3 ; vol.9, pg 311-327
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Le commerce des Français à Cadix d'après les papiers d'Antoine Granjean (1752-1774) - article ; n°3 ; vol.9, pg 311-327

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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1954 - Volume 9 - Numéro 3 - Pages 311-327
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 29
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

François Dornic
Le commerce des Français à Cadix d'après les papiers
d'Antoine Granjean (1752-1774)
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 9e année, N. 3, 1954. pp. 311-327.
Citer ce document / Cite this document :
Dornic François. Le commerce des Français à Cadix d'après les papiers d'Antoine Granjean (1752-1774). In: Annales.
Économies, Sociétés, Civilisations. 9e année, N. 3, 1954. pp. 311-327.
doi : 10.3406/ahess.1954.2289
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1954_num_9_3_2289ъ\\
LE COMMERCE DES FRANÇAIS A CADIX
d'après les papiers d'Antoine Granjean (1752*1774)
Les archives du Rhône conservent, en neuf liasses, une correspondance
et des registres d'affaires, rédigés en français et en espagnol, dont la lecture
ouvre d'intéressants aperçus sur le commerce des Français, et particuli
èrement des Lyonnais, à Cadix dans la seconde moitié du xvine siècle. *
Documents de premier ordre, non encore dépouillés, dont l'intérêt
m'était apparu lors d'un sondage fait au cours de l'été 1952, alors que j'allais
en Italie sur les traces des négociants en étamines du Mans, dont quelques-
uns avaient eu des relations avec leur confrère de Lyon installé pendant
vingt ans à Cadix. Il s'agit des papiers du négociant et commissionnaire
en soieries Antoine Granjean. L'essentiel est constitué par la correspondance,
laquelle couvre sans interruption la période 1752-1774 : deux copies des
lettres envoyées par Granjean — et, classés par ordre alphabétique, les
originaux des lettres par lui reçues. Un autre registre, sur lequel se trouvent
relevées les factures de 1753 à 1764, n'est pas non plus sans intérêt. Enfin
figurent aux dossiers des mémoires impersonnels, tables de changes, génér
alités sur le commerce de Cadix et de l'Amérique espagnole, etc., dont
plusieurs méritent d'être retenus.
I. — Le négociant
Sur les antécédents d'Antoine Granjean, nous ne savons rien. M. Lacour,
archiviste en chef du département du Rhône, n'a trouvé aucune trace de
ses origines lyonnaises. Une lettre du 24 décembre 1720 conservée par je ne
sais quel hasard dans les liasses de la correspondance et adressée de Cadix
à un certain Edmond Granjean, banquier à Lyon, pour lui donner avis de
l'arrivée de la flotte dans la baie, indiquerait cependant que sa famille
n'était pas étrangère à la ville ni à ses affaires, même lointaines.
Jeune homme, il fait un premier voyage à Bordeaux en 1748, puis y
travaille en 1750 et 1751 dans la maison d'Antoine Limonas, pour laquelle
il voyage à plusieurs reprises à Paris et à Lyon. Il s'initie ainsi dans un port,
comme à la même époque beaucoup d'autres fils de bourgeoisie destinés
au négoce, aux grands courants du commerce international auquel la France 312 ANNALES
prenait, surtout pour les étoffes, une part prépondérante. Il a appris l'espa
gnol. Il a un oncle religieux à Lyon. Son frère Benoît est fabricant de cha
peaux de castor à Paris. Ses deux sœurs ont épousé des négociants lyonnais,
Antoine Gibial et Antoine Linossier. Ce dernier, opulent marchand passe
mentier, semble l'avoir occupé quelques mois dans sa maison, avant de
l'envoyer en Espagne. C'est en effet principalement comme commissionnaire
de son beau-frère qu'Antoine Granjean fera des affaires à Cadix, travail
lant à l'occasion pour son compte, mais ne disposant pas d'assez de capi
taux — il s'en plaindra à maintes reprises — pour se lancer dans le
grand négoce personnel et y faire la fortune qu'il recherche, et que d'autres,
à son amertume, continueront de faire autour de lui.
En mai 1752, il est prêt à partir, en compagnie d'un autre négociant
lyonnais, Perrin (qui, en 1753, « commence à faire ici de jolies affaires »),
avec lequel il doit s'établir en société. Emportant des lettres de recom
mandation de Liriossier, dont une pour l'importante maison française de
Cadix, Requier Père et Fils, il va à Montpellier, de là à Bordeaux. Il se
trouve à Madrid en novembre 1752.
De Cadix, il envoie, le 18 décembre 1752, sa première lettre à Linossier :
« Vous me conseillés d'entrer dans une maison plutôt que de vouloir en
commencer une nouvelle... », mais « les jeunes gens sont icy très abondants
et à bon compte, puisque la plupart paye des pensions... ». Aussi envisage-t-il
de suivre l'avis de ceux qui lui « ont bien fait sentir qu'avec de la conduite
et du crédit il n'estoit pas bien difficile de faire icy une maison qui comme
tant d'autres ne feroit peut-estre pas une fortune aussy rapide mais du
moins en feroit une satisfaisante ». Il ajoute : « Pour suivre aujourd'huy le
projet que je me suis proposé en partant de France j'ay eu de longs
entretiens avec M. Perrin, qui pour le mettre à exécution se réduisent à une
société qu'il m'a proposé, comme vous scavés que nous en étions convenus. »
II demeure d'abord chez un correspondant français de Linossier, Pierre
Bastiat, riche, dit-il, de 25 à 30 000 piastres, puis en 1753, chez Dominique
Cureau, négociant manceau sorti d'une famille étaminière ; enfin il s'installe.
Les affaires languissent. L'époque, nous le verrons, n'est pas favorable.
On sent d'année en année s'effriter ses espoirs et tomber ses châteaux en
Espagne.
Il n'a pu entrer en société avec Perrin. En 1755, Linossier lui suggère
de retourner à Lyon, où il lui donnera un intérêt dans son commerce ; il
refuse, préférant rester à Cadix : « L'on y fait des grandes fortunes et l'on y
en peut faire encore1. » Mais, malgré la contrebande, la guerre de Sept Ans
paralyse les affaires. Les beaux jours du commerce lyonnais avec l'Espagne
et l'Amérique espagnole ne reviendront plus. Les relations personnelles
1765," entre Linossier et Grranjean s'aigrissent. En Granjean explose : «Le
voyage que vous m'avés fait faire en ce pays en m'y promettant un fonds
de 30 000 1. pour y travailler, ainsi que pour la société que vous m'avés
1. Il apprend en février 1756 la mort à Paris de son frère Benoît ; il ne déclare pas le deuil
pour éviter des frais d'habits. La môme année lui arrive de Lyon, d'une certaine veuve Nallet,
amie de sa sœur, Mme Cibial, la proposition de lui remettre son commerce en commandite. Ce
n'est que fumée. LE COMMERCE DES FRANÇAIS A CADIX 313
promis dans votre commerce à la mort de mon père ... Vos promesses réité
rées qui m'ont détourné de suivre le commerce de mon père.... » — La réponse
de Linossier, qui se trouve pris à ce moment dans la faillite de la maison
Rouge et G1®, est atroce : « Je vous chasseray de chez moy.... Vous et Rouge
m'avés mis à l'extrémité ... Nous sommes entre mains des arbitres vis-à-vis
de Rouge et nous le serons bientôt vis-à-vis de vous ... Toute votre famille
m'a pillé. » .
On se raccommode, mais c'est, semble-t-il, du bout des lèvres. Au même
moment, Granjean projette de repasser en France. Ce ne sera encore qu'un
rêve, repris d'année en année. Ses affaires restent difficiles.
Un de ses neveux, Gibial, qui a travaillé cinq ans sur un métier à fabriquer
des bas, se trouvant « sur le pavé de Paris sans occupation », n'y pouvant
travailler qu'en qualité de compagnon pour « tout au plus gagner 20 à
25 sols et manger le pain sur le pied de 4 s. la livre », lui ayant fait part en-
avril 1769 de son désir de s'établir en Espagne, qui apparaît décidément du
dehors, à l'époque, comme un pays de Cocagne, Granjean l'en dissuade, en
faisant état de son expérience personnelle. Deux ans après, il écrira à une
de ses sœurs sur le même ton désabusé :
II y a dix-huit ans et plus que je suis éloigné de ma patrie ... Quand je vins dans
ce pays je me flattay que je pourrois m'y procurer une fortune comme tant d'autres.
Je désiray seulement de pouvoir former un petit capital pour estre à mesme de travailler
à l'augmenter en France, mais j'ay bien éprouvé que, sans appuy et sans aucun fonds,
il est impossible de l'acquérir ... Aussi regreté-je

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