Le concept keynésien du coût d'usage et les prévisions du producteur - article ; n°4 ; vol.37, pg 697-722

Gilbert Koenig

Description

Revue économique - Année 1986 - Volume 37 - Numéro 4 - Pages 697-722
The keynesian concept of user cost and the producer's short term expectations
The keynesian user cost measures the sacrifice of future benefit expected by an entrepreneur who, in deciding on the amount of his production, has to make a choice between using up his equipment and preseroing it to be used later on. Therefore it gets in the composition of prime cost whose marginal value determines the production, and it puts the theory of costs and production in an intertemporal perspective.
The adoption of this viewpoint require the definition of the factors whose previsions determine the user cost. Therefore one must specify the methods of evaluation of this cost which are applicable to working, liquid and fixed capital. The effects of user cost on producers decision are analysed in the keynesian frame of aggregate supply and demand. They are expressed by an autonomous or an induced variation of the marginal user cost which acts on the aggregate supply throught variation of the firm's supply price.
Le concept keynesien de coût d'usage et les prévisions du producteur
Le coût d'usage keynésien mesure le sacrifice de valeur qu'un entrepreneur prévoit de supporter lorsqu'on décidant de produire il doit choisir d'utiliser son équipement plutôt que de le réserver à un usage ultérieur. Il constitue donc une composante du coût premier dont la valeur marginale fonde la décision du producteur et il place l'analyse des coûts et de l'équilibre du producteur dans une perspective intertemporelle.
L'adoption de cette optique nécessite la définition des facteurs dont les prévisions déterminent le coût d'usage. Cette définition se fonde sur une évaluation de ce coût dont les modalités diffèrent selon la nature de l'équipement dont la dépréciation est estimée.
L'inffuence du coût d'usage sur la décision du producteur est analysée dans le cadre du schéma keynésien d'offre et de demande globales. Elle se manifeste par une variation autonome ou induite de sa valeur marginale qui, en agissant sur le prix d'offre individuelle, modifie le prix d'offre globale keynésienne.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: REVUE_ECONOMIQUE
• Publié le: 01 janvier 1986
• Nombre de lectures: 21
• Langue: Français
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Extrait

Monsieur Gilbert Koenig
Le concept keynésien du coût d'usage et les prévisions du
producteur
In: Revue économique. Volume 37, n°4, 1986. pp. 697-722.
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Koenig Gilbert. Le concept keynésien du coût d'usage et les prévisions du producteur. In: Revue économique. Volume 37, n°4,
1986. pp. 697-722.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1986_num_37_4_408935Abstract
The keynesian concept of user cost and the producer's short term expectations
The keynesian user cost measures the sacrifice of future benefit expected by an entrepreneur who, in
deciding on the amount of his production, has to make a choice between using up his equipment and
preseroing it to be used later on. Therefore it gets in the composition of prime cost whose marginal
value determines the production, and it puts the theory of costs and production in an intertemporal
perspective.
The adoption of this viewpoint require the definition of the factors whose previsions determine the user
cost. Therefore one must specify the methods of evaluation of this cost which are applicable to working,
liquid and fixed capital. The effects of user cost on producers decision are analysed in the keynesian
frame of aggregate supply and demand. They are expressed by an autonomous or an induced variation
of the marginal user cost which acts on the aggregate supply throught variation of the firm's supply
price.
Résumé
Le concept keynesien de coût d'usage et les prévisions du producteur
Le coût d'usage keynésien mesure le sacrifice de valeur qu'un entrepreneur prévoit de supporter
lorsqu'on décidant de produire il doit choisir d'utiliser son équipement plutôt que de le réserver à un
usage ultérieur. Il constitue donc une composante du coût premier dont la valeur marginale fonde la
décision du producteur et il place l'analyse des coûts et de l'équilibre du producteur dans une
perspective intertemporelle.
L'adoption de cette optique nécessite la définition des facteurs dont les prévisions déterminent le coût
d'usage. Cette définition se fonde sur une évaluation de ce coût dont les modalités diffèrent selon la
nature de l'équipement dont la dépréciation est estimée.
L'inffuence du coût d'usage sur la décision du producteur est analysée dans le cadre du schéma
keynésien d'offre et de demande globales. Elle se manifeste par une variation autonome ou induite de
sa valeur marginale qui, en agissant sur le prix d'offre individuelle, modifie le prix d'offre globale
keynésienne.LE CONCEPT KEYNESIEN DE COÛT D'USAGE
ET LES PRÉVISIONS DU PRODUCTEUR
J. M. Keynes élabore le concept de coût d'usage « pour obtenir une
définition inattaquable du revenu » 1 qui lui permet de présenter sa
théorie de l'emploi d'une façon cohérente. Il contribue ainsi au débat
méthodologique concernant la construction des agrégats macro-écono
miques. Mais cette contribution est rendue obsolète par les réflexions
qui ont fait progresser la Comptabilité nationale depuis 1936 2. De ce
fait, en se plaçant dans une perspective purement agrégée, on peut
être incité à présenter la théorie keynésienne de l'emploi dans le cadre
comptable moderne et à éliminer de cette façon toute référence au
concept de coût d'usage 3. Cette élimination semble d'autant plus inoffen
sive que dans la Théorie générale, l'offre et la demande globales keyné-
siennes qui déterminent la demande effective et le niveau de l'emploi,
sont définies nettes du coût d'usage total.
Une telle optique néglige les efforts réalisés par J. M. Keynes pour
fonder sa définition du revenu global sur des bases micro-économiques
dans l'appendice du chapitre 6 de la Théorie générale. Ces efforts qui
portent sur la définition du revenu de l'entrepreneur ont, pour l'analyse
des coûts et de la décision du producteur, des conséquences dont
l'ampleur est souvent sous-estimée.
Avec le concept de coût d'usage, J. M. Keynes introduit dans
l'analyse des coûts les charges de dépréciation qui sont engendrées
par la production et qui sont généralement négligées dans la pratique
néo-classique. Une correction de cette pratique est déjà amorcée par
1. Keynes [1973], II, p. 189. Ce concept élaboré par J. M. Keynes en 1934,
après son retour des Etats-Unis (Keynes [1973], I, p. 472 et 484-485) lui permet de
surmonter l'une des trois difficultés qui l'ont arrêté dans la rédaction de la Théorie
générale : ki définition du revenu (Keynes [1936], p. 59).
2. Voir Millar [1972], pour l'analyse du cadre comptable de la Théorie générale.
3. La plupart des manuels de macro-économie procèdent de cette façon à l'inst
igation de Hansen [1953], p. 39-40.
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Revue économique — N° 4, juillet 1986 Revue économique
A. Marshall qui utilise le concept d'usure supplémentaire du matériel
(extra wear and tear of plant) 4. Elle est cependant insuffisante parce
qu'elle se fonde sur une définition trop étroite de la dépréciation du
capital due à la production et qu'elle ne fournit « aucune indication sur
la manière de calculer ce facteur, ni sur son importance » 5. J.M. Keynes
s'efforce d'approfondir l'analyse du phénomène de dépréciation du
capital, ce qui permet d'élargir la conception marshallienne de coût
d'usure et de préciser les particularités d'un tel coût.
Le coût d'usage supporté par un entrepreneur est constitué des
« sommes qu'il paye aux autres entrepreneurs pour les choses qu'il est
obligé de leur acheter jointes au sacrifice qu'il fait en utilisant son
équipement au lieu de le laisser inactif » 6. En mesurant « la valeur
actuelle du rendement additionnel qui serait obtenu quelque jour si
l'équipement n'était pas utilisé immédiatement » 7, il prend la forme
d'un coût d'opportunité. En fondant cette mesure sur la comparaison
entre l'utilisation immédiate du capital et son usage alternatif ultérieur,
il établit « un lien entre le présent et le futur » 8.
L'introduction du coût d'usage dans l'analyse des coûts et de la
production ne consiste pas à juxtaposer un concept nouveau à une
théorie ancienne. Elle modifie l'optique et la portée de cette théorie
dont la perspective est exclusivement statique et dont la valeur expli
cative est limitée par certaines hypothèses restrictives. De plus, elle
nécessite l'utilisation, dans la théorie des coûts. et de la production, d'un
mode d'estimation des valeurs anticipées qui, fondé sur le principe
d'actualisation, n'est habituellement employé que dans la théorie du
capital. L'évaluation qui en résulte permet de préciser les déterminants
du coût d'usage.
L'intégration de ce coût dans le coût premier permet « de substituer
à la définition habituelle une définition plus claire du prix d'offre de
courte période d'une unité de production vendable d'une entreprise » 9.
En tant que composante du prix d'offre individuelle, le coût d'usage
marginal entre dans la définition du prix d'offre globale keynésienne
4. Marshall [1920], p. 299.
5. Keynes [1936], p. 93. Selon Gee [1983], p. 184-191, il est possible de
déduire des travaux de Marshall une conception du coût d'usure du matériel
analogue à celle du coût d'usage keynésien. Cette interprétation met en cause celles
de Frisch [1950] et Blaug [1978] qui sont couramment admises.
6. Keynes [1936], p. 47-48.
7. Ibid., p. 90.
8. Ibid.
9. Ibid., p. 86. Il s'agit de mettre fin à la pratique qui, négligeant le coût
d'usage, « crée une différence entre " le prix d'ofFre " d'un article et son " prix "
au sens habituel du mot » (ibid., p. 87).
698 Gilbert Kœnig
qui détermine avec la demande globale le niveau d'activité d'une
firme. Il place donc, grâce à ses caractéristiques, la décision de pro
duction et d'offre de l'entrepreneur dans une perspective inter-tempo-
relle.
L'objet de cet article est de préciser, dans une première partie, la
signification du concept keynésien de coût d'usage et son rôle