Le paysan, le village et l utopie - article ; n°75 ; vol.19, pg 573-599
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Description

Tiers-Monde - Année 1978 - Volume 19 - Numéro 75 - Pages 573-599
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Maxime Haubert
Christiane Frelin
Walthère Franssen
Le paysan, le village et l'utopie
In: Tiers-Monde. 1978, tome 19 n°75. pp. 573-599.
Citer ce document / Cite this document :
Haubert Maxime, Frelin Christiane, Franssen Walthère. Le paysan, le village et l'utopie. In: Tiers-Monde. 1978, tome 19 n°75.
pp. 573-599.
doi : 10.3406/tiers.1978.2819
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1978_num_19_75_2819LE PAYSAN,
LE VILLAGE ET L'UTOPIE
par Maxime Haubert*,
avec la collaboration de Christiane Frelin**
et Walthère Franssen***
On oublie trop que les paysans forment la plus grande partie des
populations du Tiers Monde, et de très loin la plus misérable. Aussi tout
projet de société doit-il être d'abord un projet pour et par les paysans.
Cela soulève deux questions importantes et indissociables :
— Pour réaliser un développement qui doit les concerner au premier
chef, quelles forces, quelles ressources économiques, sociales et
culturelles les sociétés paysannes sont-elles capables de puiser en
elles-mêmes ? Cette question concerne les moyens, autrement dit le
modèle de développement.
— Ce développement doit-il rapprocher les sociétés paysannes des modes
de vie, de pensée, d'action, de production et de consommation des
sociétés urbaines et, par-delà celles-ci, des pays industrialisés ? Cette
question concerne les fins du développement, autrement dit le modèle
de société.
Ces deux questions sont au centre des débats actuels sur le développe
ment rural, lequel ainsi n'échappe pas (bien que ce soit avec quelque
retard) à la remise en cause radicale dont sont l'objet les modèles domi
nants de développement et de société. Peut-être même cette remise en
cause conduit-elle parfois à exagérer à la fois les capacités ď « autodéve
loppement » des sociétés villageoises et leur caractère idéal. A la limite,
le développement rural perdrait tout son sens, les sociétés paysannes des
pays du Tiers Monde étant désignées comme modèles pour les citadins
de ces pays, ainsi que pour les sociétés décadentes d'Occident. Le seul
* Maître assistant à Tiedes, Université de Paris I, responsable de l'Equipe de Recherche
« Socio-Economie du Développement rural ».
** Chargée de recherche à I'iedes, Université de Paris I.
♦** Technicien agricole.
Rente Tien Monde, t. XIX, n° 75, Juillet-Septembre 78 MAXIME HAUBERT 574
problème serait de persuader les paysans de ne pas quitter des villages où ils
mènent une vie si bucolique, où la pauvreté est heureuse, où chaque case est
une maison de la culture et chaque champ un laboratoire de créativité.
Que la remise en cause des modèles dominants soit quelquefois outrée,
cela n'enlève rien toutefois à sa pertinence. Aussi notre propos dans ces
quelques pages sera-t-il de souligner à la fois la nécessité, la possibilité
et la difficulté de modèles différents. Mais nous le ferons en nous plaçant
autant que faire se peut au point de vue des paysans, c'est-à-dire que
nous allons essayer de traduire tant bien que mal — et plutôt mal que
bien, malheureusement — le « discours » des paysans sur le développe
ment rural, tel qu'on peut le saisir à travers leurs comportements et leurs
dynamismes — positifs ou négatifs — face à certaines situations ou à
certaines interventions. Ces comportements et dynamismes seront étudiés
dans quatre cas choisis dans différents pays d'Afrique « francophone »,
en fonction de la gradation qu'ils offrent par rapport à Г « utopie vill
ageoise », depuis la simple organisation des producteurs agricoles jusqu'au
retour à la campagne de jeunes chômeurs urbains :
— les groupements coopératifs agricoles dans le Haouz de Marrakech
(Maroc);
——— les les les communautés cités chantiers de pionniers populaires rurales au de Shaba dans reboisement le (Zaïre). bassin arachidier dans les Aurès de Thiès (Algérie); (Sénégal);
Dans un précédent numéro de la Revue Tiers-Monde, Gilbert Etienne
a, de façon très salutaire, confronté les discours actuels sur la pauvreté
rurale et la self-reliance paysanne aux réalités du sous-développement et
du développement dans le contexte du Bangladesh1. C'est un peu ce que
nous voudrions faire ici pour nos quatre cas africains. Bien entendu, il ne
s'agit pas d'un « échantillon » ayant une quelconque prétention à la repré
sentativité, mais plutôt d'exemples fragmentaires jalonnant une démarche
de recherche. En tout état de cause, ce n'est qu'en multipliant ces confront
ations entre les modèles et les réalisations, entre la poésie des théories
et la prose des pratiques sociales, que l'on pourra cerner plus correct
ement à quelles conditions la situation des paysans peut être améliorée.
* *
Quels sont les traits principaux de la situation des paysans et des inte
rventions de développement dans les quatre cas étudiés ?
i. Gilbert Etienne, Du Bengale britannique au Bangladesh. Comment faite reculer la
pauvreté rurale ?, Revue Tiers Monde, t. XVIII, n° 72, octobre-décembre 1977, pp. 709-722. LE PAYSAN, LE VILLAGE ET L'UTOPIE 575
i) Les groupements coopératifs agricoles
dans le Haou% de Marrakech
Comme dans le reste du Maroc, les structures agraires dans le Haouz
(littéralement la « zone appropriée », qui entoure la ville) de Marrakech
sont caractérisées par une répartition très inégale des facteurs de product
ion. Un tiers environ des paysans sont dépourvus de terre, et un très
grand nombre d'autres n'exploitent que des parcelles très réduites, sous
des régimes juridiques d'une grande diversité. La disponibilité de l'eau
est un puissant facteur d'inégalité entre zones et entre exploitations.
C'est dans la zone irriguée qu'étaient implantées principalement les fermes
de colonisation, qui constituent aujourd'hui l'essentiel du secteur agri
cole moderne, disposant d'un capital d'exploitation important.
Un tiers environ des anciennes terres de colonisation est à présent
exploité par des fermes d'Etat, un autre tiers a fait l'objet de lotissements
dans le cadre de la réforme agraire, le reste est passé aux mains d'exploi
tants privés (appartenant le plus souvent à la bourgeoisie urbaine). Outre
les terres récupérées, le fonds de réforme agraire comprend les terres
confisquées aux personnes frappées d'indignité lors de la décolonisation
(et notamment au Glaoui), certaines terres domaniales, ainsi que les
terres collectives de tribu mises en valeur par des investissements hydroa
gricoles de l'Etat; ce fonds correspond à 20 % environ des terres irr
iguées et il paraît actuellement épuisé.
Les attributaires de la réforme agraire sont obligatoirement regroupés
au sein de coopératives, de production et de services si le lotissement est
collectif, de services uniquement s'il est individuel. De même la majorité
des autres groupements coopératifs (notamment les groupements d'irri-
gants et les coopératives de ramassage du lait) sont organisés par l'Etat
autour d'équipements réalisés ou financés par lui; il cherche ainsi à la
fois à encadrer étroitement la paysannerie dans l'utilisation de ces équi
pements, et à se décharger sur elle d'une partie des tâches d'entretien
et de gestion.
L'action coopérative apparaît donc comme une modalité parmi
2. Nous synthétisons ici les résultats d'un séminaire organisé du 2 au 7 janvier 1978 à
Marrakech par l'Office du Développement de la Coopération (Rabat), l'Institut agronomique
et vétérinaire Hassan-II (Rabat) et le Collège coopératif (Paris). Animé par Paul Pascon
(professeur à l'Institut Hassan-II) et Maxime Haubert, ce séminaire regroupait des praticiens
du développement agricole et coopératif dans le Haouz. L'ensemble des communications et
résultats fera l'objet prochainement d'une publication au Maroc. Concernant les structures
agraires dans la région, on se référera à la somme de Paul Pascon, Le Haouz & Marrakech,
Tanger, Editions marocaines et internationales, 2 t., 1977, ainsi qu'à sa contribution à
N. Bouderbala, M. Chraïbi et

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