Le syndicalisme entre corporatisme, clientélisme, paternalisme et mondialisation  - article ; n°171 ; vol.43, pg 601-616
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Tiers-Monde - Année 2002 - Volume 43 - Numéro 171 - Pages 601-616
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Robert Cabanes
Le syndicalisme entre corporatisme, clientélisme, paternalisme
et mondialisation
In: Tiers-Monde. 2002, tome 43 n°171. Trajectoires latino-américaines. Regards sur Cuba. (sous la direction de
Rémy Herrera). pp. 601-616.
Citer ce document / Cite this document :
Cabanes Robert. Le syndicalisme entre corporatisme, clientélisme, paternalisme et mondialisation . In: Tiers-Monde. 2002,
tome 43 n°171. Trajectoires latino-américaines. Regards sur Cuba. (sous la direction de Rémy Herrera). pp. 601-616.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2002_num_43_171_5892SYNDICALISME LE
ENTRE CORPORATISME, CLIENTÉLISME,
PATERNALISME ET MONDIALISATION
par Robert Cabanes*
Le syndicalisme ouvrier brésilien se trouve à une croisée des chemins
définie par l'interaction entre ses tendances historiques, les choix natio
naux en cours (les élections d'octobre 2002) et l'entrée de l'industrie
dans le processus de mondialisation. Cette article tente d'évaluer les
conditions offertes à son évolution à travers l'évocation rapide de sa fon
dation et l'histoire récente de ses trente dernières années.
Le syndicalisme ouvrier a eu une si forte actualité, au niveau natio
nal, depuis 1977, plus particulièrement à Sâo Paulo, et à partir de Sâo
Paulo, que nul ne peut l'ignorer. On peut retenir de son histoire, larg
ement débattue par les historiens, sociologues et politistes brésiliens, les
éléments de compréhension de la période actuelle. Vingt ans après les
grands mouvements syndicaux et sociaux de la fin des années 1970 qui
ont mis fin au régime militaire et qui ont conduit à la Constitution
de 1988, peu après les demi-échecs (ou les demi-succès) du Parti des
travailleurs aux élections présidentielles de 1990, 1994 et 1998 et après
sa victoire de 2002, au moment de l'entrée du pays dans la mondialisat
ion et en plein débat sur l'adoption de nouvelles formes de travail et
de gestion, le moment est tendu d'enjeux.
Deux acteurs principaux, État et patronat, constituent les entités
puissantes où s'enracinent les rapports sociaux du travail. Le paterna
lisme patronal a géré le travail urbain avant l'État, à l'époque de la
pénurie de main d'œuvre et de l'immigration européenne de la fin du
XIXe siècle jusqu'aux années 1930. Il est puissant, tant dans la domina-
* Chercheur, Institut de recherche pour le développement.
Revue Tiers Monde, t. XLHI, n° 171, juillet-septembre 2002 602 Robert Cabanes
tion (absence de législation syndicale et despotisme d'usine) que dans
la protection (nécessité d'arracher les travailleurs au milieu rural et
naissance du « quartier ouvrier »), et paraît indispensable à la mobili
sation de la main d'œuvre. À partir des années 1930, ce paternalisme
s'inscrit dans le cadre d'une législation du travail corporatiste promue
par un État modernisateur. Devenu moins utile au développement
industriel, car la main-d'œuvre arrive «naturellement» du milieu
rural, il reste présent, utile à des tactiques ou stratégies patronales spé
cifiques visant telle ou telle catégorie de main-d'œuvre.
LE SYNDICALISME D'ÉTAT ET LE PROJET CORPORATISTE
Le syndicalisme a existé au Brésil dès la fin du xixe siècle, avant
que l'État ne s'en préoccupe, sous des formes anarchistes puis commun
istes mêlées. Mais il y eut un acte politique étatique de fondation de
la classe ouvrière exprimé par diverses vagues de législation du travail
inaugurées par le gouvernement Vargas dans les années 1930, systémat
isées pour la première fois en 1943, sous l'inspiration de la Car ta del
lavoro mussolinienne, dans la clt (Consolidation des lois du travail),
et plusieurs fois complétées par la suite.
Les auteurs qui ont étudié l'intervention de l'État sur la législation
du travail dans les années 1930 divergent sur l'interprétation à donner
à cette intervention : législation progressiste destinée à attirer la main
d'œuvre rurale dans l'industrie ; législation à favoriser le déve
loppement d'un marché intérieur, ou à stabiliser à la baisse les frais de
main d'œuvre. Des interprétations plus politiques tournent autour de
l'idée du nécessaire contrôle d'une classe naissante et potentiellement
dangereuse1. Dans tous les cas, l'encadrement de l'activité de travail et
de sa représentation, tant du côté patron que du côté ouvrier, vise la
création d'un État moderne (novo), censé assurer une collaboration de
classes harmonieuse.
L'encadrement syndical est si fort que la question qui se pose est
de savoir si les groupes sociaux, et plus particulièrement la classe
ouvrière, sont « derrière » l'État qui les a constitués et qu'ils suivent
1 . On peut se rapporter pour ce débat au chapitre X du volume X de YHistoria Gérai da Civilizaçâo
brasileira de L. M. Rodrigues : « Sindicalismo e classe operaria, 1930-1964 », p. 509-555, Diffel, Sâo
Paulo, 1951. En ce qui concerne l'interprétation politique on peut se rapporter à l'article de J. S. Leite
Lopes, Lectures savantes d'un syndicalisme paradoxal, la formation de la classe ouvrière et le syndicat
officiel, Genèses, vol. 3, 1991, p. 73-96. syndicalisme entre corporatisme, clientélisme... 603 Le
(atrelados), ou bien « dans » un État hors duquel ils ne peuvent pen
ser leur existence. De ces deux formes de dépendance, la seconde, plus
étroite, est aussi la plus capable d'efficacité puisqu'une intervention
permanente est politiquement légitimée, et pas seulement octroyée.
Elle semble davantage caractériser le péronisme argentin1, au moins
jusqu'au néo-libéralisme de ces dernières années. Le contexte brésilien
suggère une dépendance forte mais une tutelle souple.
LA «STRUCTURE SYNDICALE» BRÉSILIENNE
La tutelle s'observe en premier lieu dans l'exclusivité de la repré
sentation syndicale accordée à un seul syndicat (représentant une caté
gorie donnée sur un territoire donné) qui doit être reconnu par l'État.
Tout autre syndicat concurrent, nécessairement minoritaire, ne peut
exister : principe de Г « unicité » syndicale. Par ailleurs, une fois les
« directeurs » du syndicat élus et reconnus par l'État, tout manque
ment (parfois minime, cela dépend des conjonctures) à la législation
du travail peut être sanctionné par la suspension des dirigeants élus et
la nomination, sans élection, de nouveaux dirigeants par le ministère
du Travail. L'arbitrage de la justice du travail, émanation du
du Travail, commence dès les élections et se poursuit durant tout
le mandat des élus-directeurs. En fait, le syndicalisme n'exprime
qu'indirectement les intérêts d'une couche sociale donnée ; il est plutôt
« investi d'une charge » (Leite Lopes, 1991) de défense des travailleurs
par l'État et sous son contrôle. L'activité principale annuelle est celle
du dissidio (dissenssion, controverse), où patronat et syndicat d'un
même territoire et d'une même catégorie négocient, à date fixe, et cha
cun à ses dates, ce qui évite les mouvements de masse, les clauses de
leurs rapports sous la houlette du ministère. Ainsi est assurée la repro
duction du corporatisme et de la segmentation de la classe ouvrière.
C'est dans le cadre de cet événement et de la campagne de mobilisa
tion qu'il autorise que d'éventuels arrêts de travail peuvent voir le
jour. Une fois l'accord établi, tout arrêt de travail est par principe illé
gal. Lorsque la grève se poursuit après avoir été déclarée illégale, les
dirigeants peuvent être cassés. Le quotidien syndical est alors formé
des plaintes ou des procès, individuels et collectifs, qui s'accumulent
1. Jean Bunel, Pactes et agressions, syndicalisme et relations professionnelles en Argentine, Éd. du
CNRS, Lyon, 1991. Robert Cabanes 604
au fil des ans, qui sont instruits et jugés par les avocats et les juges des
deux parties (patronat, syndicat), sous la houlette du ministère du Trav
ail ; le jugement intervient après de longs délais d'attente, alors que
dirigeants syndicaux et ouvriers ont déj

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