Les écarts des niveaux de développement économique entre pays développés et pays sous-développés de 1770 à 2000 - article ; n°47 ; vol.12, pg 497-514
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Les écarts des niveaux de développement économique entre pays développés et pays sous-développés de 1770 à 2000 - article ; n°47 ; vol.12, pg 497-514

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Description

Tiers-Monde - Année 1971 - Volume 12 - Numéro 47 - Pages 497-514
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1971
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Paul Bairoch
Les écarts des niveaux de développement économique entre
pays développés et pays sous-développés de 1770 à 2000
In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°47. pp. 497-514.
Citer ce document / Cite this document :
Bairoch Paul. Les écarts des niveaux de développement économique entre pays développés et pays sous-développés de 1770
à 2000. In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°47. pp. 497-514.
doi : 10.3406/tiers.1971.1797
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1971_num_12_47_1797LES ÉCARTS DES NIVEAUX
DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
ENTRE PAYS DÉVELOPPÉS
ET PAYS SOUS-DÉVELOPPÉS
de 1770 à 2000
par Paul Bairoch*
Une des questions les plus importantes que l'on peut se poser au
sujet de l'an 2000 est celle de l'écart qui existera alors entre les niveaux
de développement du Tiers Monde et des pays industrialisés. La pau
vreté étant aussi, et surtout, une question de niveau relatif, le critère
par excellence de la réussite des efforts de développement sera celui
du degré de rétrécissement ou d'élargissement de l'écart qui sépare
les nantis des autres. L'objet de cet article est de jeter un regard rétros
pectif sur l'évolution de cet écart depuis le début de la révolution indust
rielle — révolution industrielle qui non seulement est à la base du déve
loppement économique des nantis, mais est aussi largement facteur de
paupérisation du Tiers Monde — et d'en tirer quelques implications
susceptibles d'éclairer un peu ce vaste problème du sous-développement.
L'attrait des chiffres arrondis étant difficile à surmonter et, dans ce cas,
étant justifiable, nous ferons deux sauts dans le passé, respectivement
de un et deux siècles avant de nous interroger sur les trois décennies
qui nous séparent de la fin de ce millénaire.
I. — 1770 : Un monde
OÙ IL N'Y AVAIT QU'UN SEUL PAYS « INDUSTRIALISÉ »
Si l'on excepte les sociétés dites primitives, on peut avancer, avec
assez de certitude, que, jusqu'à la fin du xvne siècle, les écarts dans les
* Professeur de science économique à Sir George Williams University, Montréal.
Directeur d'Etudes associé à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes (VIe Section, Sorbonně).
497
т. m. 47 33 PAUL BAIROCH
niveaux de développements économiques et techniques des divers pays
étaient peu importants. Le niveau des pays aujourd'hui développés
était alors voisin, voire, dans certains cas et certains domaines, inférieur
à celui de la majorité des pays aujourd'hui sous-développés. Certes,
entre la France de Louis XIV, l'Angleterre de Guillaume II, la Prusse
de Frédéric Ier et la Russie de Pierre le Grand d'une part, et l'Inde
d'Aurangzeb, la Chine de K'ang-Hi d'autre part, pour ne parler que de
l'Europe et des deux principales puissances de l'Asie, il y avait des
différences profondes dans les structures sociales et religieuses des
sociétés qui les composaient. Il y avait également, et il s'agit ici d'un
élément persistant, des différences climatiques importantes. Mais, pris
dans leur ensemble, il est très difficile de déterminer lequel de ces deux
groupes de sociétés avait atteint, à l'époque, un niveau de développement
économique plus avancé ; lequel de ces deux avait un niveau de vie plus
élevé. Dans ce domaine, il y avait certainement plus de différences d'un
pays à un autre à l'intérieur du même groupe que d'un groupe à l'autre.
Une telle absence d'écart significatif entre les niveaux de développe
ment économique des diverses sociétés non primitives était une cons
tante de l'histoire depuis quelques millénaires. Evidemment, durant ces
millénaires, la localisation géographique des centres les plus dynamiques
de ces deux groupes de sociétés s'est constamment déplacée et le niveau
de développement social et économique des Etats évolua tant dans le
sens d'une progression que dans celui d'une régression. Mais cette évo
lution était contenue dans des limites assez étroites. L'écart d'une société
à une autre ou les différences de niveau d'une même société dans le
temps ne devaient pas dépasser 50 %-~jo % dans un sens comme dans
l'autre autour de la moyenne. Cela toujours en excluant les sociétés
primitives, lesquelles sociétés, vers 1700, ne représentaient, au point
de vue démographique, qu'entre 15 % et 20 % de la population mondiale.
Puis, et on pourrait ajouter « tout à coup », apparut un phénomène
nouveau et lourd d'implications. Vers 1700, toute la structure écono
mique anglaise commença à subir des mutations très rapides. Ce que les
historiens ont appelé, à juste titre, la révolution industrielle débutait.
Au point de vue niveau de développement, cette révolution indust
rielle n'avait pas encore apporté de bouleversement pour l'Angleterre.
Entre le début du xvine siècle et 1770, le niveau du produit par habitant
avait progressé, selon les estimations disponibles, de 30 % au minimum
et de 100 % au maximum, avec comme moyenne la plus probable
498 LES ÉCARTS DES NIVEAUX DE DÉVELOPPEMENT
50-60 %. L'Angleterre de 1700, sans être le pays le plus développé,
avait un niveau de développement s'apparentant à celui des pays les
plus « riches » d'Europe (France, Pays-Bas), c'est-à-dire se situant,
selon toute vraisemblance, à quelque 20-30 % au-dessus de la moyenne
générale et à quelque 60-80 % au-dessus des pays les plus pauvres
d'alors. En 1770, grâce aux progrès réalisés, l'Angleterre dépasse la
moyenne de quelque 80-110 % et les pays les plus pauvres d'environ
160 %. Donc l'écart, entre ce que l'on peut appeler — avec les réserves
d'usage quand il s'agit de transposer des concepts actuels aux sociétés
du xviiie siècle — le monde développé et le Tiers Monde, était passé
d'un peu moins de 2 à 1 à un peu plus de 2, 5 à 1 . Un tel accroissement
de l'écart, sans être dramatique, constitue déjà en lui-même une modif
ication des rapports des forces. Mais, beaucoup plus que l'ampleur
même de cet écart accru, ce sont ses causes qui sont importantes par leurs
implications dans le rapport futur des forces économiques et, par là,
politiques.
En effet, sans parler des progrès agricoles qui ont été à la base de ce
développement et qui ont même permis à l'Angleterre de devenir, au
milieu du xvine siècle, le principal exportateur de céréales, justifiant par
là le qualificatif de « grenier de l'Europe » (1), il faut insister sur deux
innovations techniques déjà entrées en 1770 au stade de l'application
pratique : la production du fer, grâce au charbon, et la mécanisation
de la filature de coton. Vers 1770, probablement plus de 50 % du fer
produit en Angleterre provenait de hauts fourneaux utilisant la nouvelle
technique (taux que la plupart des autres pays européens n'ont atteint
que dans la seconde moitié du xixe siècle). La mécanisation de la fil
ature était moins avancée; mais 1770 marque le début de sa diffusion
réelle; diffusion qui sera extrêmement rapide, entraînant un accroiss
ement considérable de la production, et surtout de la productivité, de ce
secteur. La consommation de coton brut, qui avait mis plus de trente
ans pour doubler avant 1770, se trouve multipliée par plus de 13 les
trente années suivantes. Robert Owen, qui, ne l'oublions pas, fut aussi
(1) Afin d'alléger cet article de multiples renvois, nous nous abstiendrons de citer les
sources des éléments historiques qui ont été déjà utilisés et justifiés dans nos études anté
rieures. Les lecteurs intéressés pourront se référer à dévolution industrielle et sous-développement,
Paris, S.E.D.E.S., 1963 (3e éd., Paris, 1969); Diagnostic de Г évolution économique du Tiers Monde,
1900-1968, Paris, Gauthier- Villars, 1967 (4e éd., Paris, 1970), Agriculture and the Industrial
Revolution, Collins, Londres, 1969 et Le Tiers Monde dans l'impasse, Le démarrage économique
du XVIIIe au XXe siècle, Paris, Gallimard (coll. « Idées 

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