Les insectes et la couleur des fleurs - article ; n°1 ; vol.13, pg 67-79
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Description

L'année psychologique - Année 1906 - Volume 13 - Numéro 1 - Pages 67-79
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1906
Nombre de lectures 20
Langue Français

Extrait

Félix Plateau
Les insectes et la couleur des fleurs
In: L'année psychologique. 1906 vol. 13. pp. 67-79.
Citer ce document / Cite this document :
Plateau Félix. Les insectes et la couleur des fleurs. In: L'année psychologique. 1906 vol. 13. pp. 67-79.
doi : 10.3406/psy.1906.1288
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1906_num_13_1_1288IV
LES INSECTES ET LA COULEUR DES PLEURS
Ceux qui se sont quelque peu occupés des choses de la
nature savent que, pour qu'une fleur produise des graines
fertiles, ses organes femelles représentés extérieurement par
le stigmate du pistil doivent recevoir le contact des corpus
cules d'une matière plus ou moins pulvérulente, le pollen,
produite par les organes mâles ou anthères des étamines.
Tantôt la fleur se féconde elle-même (autofécondation),
tantôt, fait beaucoup plus fréquent et résultant alors de la
structure ou de dates de maturité différentes des organes des
deux sexes, le stigmate de chacune des fleurs est saupoudré
de grains de pollen provenant soit d'autres fleurs du même
pied, soit de celles de pieds distincts (fécondation croisée).
La fécondation croisée nécessite évidemment l'intervention
d'agents mécaniques transportant le pollen de fleur en fleur.
Pour un grand nombre de plantes dites anémophiles, comme
nos céréales, bon des arbres forestiers, le chêne, le
charme, le bouleau, par exemple, c'est le vent qui transporte
le pollen sous forme de poussière; pour des milliers d'autres
végétaux appelés entomophiles, ce sont les Insectes et surtout
les Hyménoptères, les Diptères et les Lépidoptères qui se font
les transporteurs inconscients de la précieuse poudre fécondat
rice adhérant momentanément soit à leur trompe, soit aux
poils de leur dos ou de leur ventre.
L'Insecte ignore absolument le rôle important qu'il remplit,
la fécondation de la fleur n'étant qu'une conséquence d'autres
actes ayant pour but la récolte de matières alimentaires, jus
sucré ou nectar, pollen, etc., destinées ou bien à apaiser sa
faim, ou bien à nourrir ses larves. Il est si mu exclusive
ment par cet appétit prosaïque que si la conformation des
enveloppes florales s'oppose à sa pénétration et si ses mandi
bules sont assez puissantes, il n'hésitera pas, comme le font sou
vent les Bourdons, à couper un trou à la base de la corolle et MEiMOIRES ORIGINAUX 68
à sucer par là le nectar au grand détriment de la fleur qui
risque fort de rester stérile l. Bien plus, si des sucs sucrés ana
logues au nectar sont quelque part à sa disposition, sur des
feuilles, sur des fruits mûrs, etc., l'Insecte le plus destiné en
apparence à la fécondation des fleurs négligera celles-ci d'une
façon absolue pour ne plus s'adresser durant de longues
heures qu'à ces sources extra-florales de butin. Ici je citerai
comme exemple les Abeilles récoltant en masse la miellée sur
les feuilles de certains arbres2, les Abeilles et des Papillons
visitant assidûment les poires avancées, les du
genre Vanesse suçant le liquide qui découle des plaies des
troncs, etc., etc.
On pourrait énumérer de multiples faits analogues. J'en ai
rappelé quelques-uns afin de poser nettement ce principe :
l'Insecte qui se rend à une fleur n'est poussé que par le besoin
impérieux de se procurer du nectar ou du pollen, parfois ces
deux substances à la fois, pour son alimentation ou celle de sa
progéniture.
Or, dans le plus grand nombre des cas, le nectar est profon
dément caché dans le fond de la corolle et souvent la présence
du pollen n'est visible que de tout près. Comment l'animal
est-il guidé vers la fleur qui recèle ces substances?
Deux sens peuvent intervenir ici, l'odorat et la vue; les
fleurs sécrètent en effet des matières volatiles odorantes et
beaucoup d'entre elles sont parées de couleurs plus ou moins
vives contrastant avec la teinte verte du feuillage.
Christian Konrad Sprengel, qui fut probablement le pre
mier observateur sérieux captivé par l'intéressante question
de l'intervention des insectes dans la fécondation des végétaux
et dont l'ouvrage curieux3, quoique gâté par les idées téléolo-
giques en honneur à son époque, mérite un examen attentif,
ayant remarqué chez le Myosotis palustris un cercle de couleur
jaune entourant l'entrée de la corolle et tranchant nettement
sur la teinte bleue des pétales, ayant constaté ensuite chez de
nombreuses autres fleurs l'existence de laches ou de stries
1. Divers auteurs et moi-même avons constaté ce fait curieux et fréquent
de la perforation des fleurs.
2. Gaston Bonnier, L'accoutumance des Abeilles et la couleur des
fleurs (Comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris, t. CXLI, n° 24,
11 décembre 1905, p. 993).
3. Sprengel, Das entdeckte Geheimniss der Natur im Bau und in der
Befruchtung der Blumen, Berlin, 1793. 11 en a été publié une bonne
réédition en 1894 chez Engelmann à Leipzig. PLATEAU. — LES INSECTES ET LA COULEUR DES FLEURS 69 F.
colorées semblant indiquer la voie à suivre pour arriver aux
glandes nectarigènes, en conclut que si les colorations de cer
taines parties de la corolle guident l'Insecte posé sur la fleur
vers le nectar, c'est la couleur de l'ensemble de la fleur qui
guide ou attire l'Insecte de loin.
Bien que rempli d'observations d'une réelle valeur sur la
structure des fleurs appartenant aux familles les plus diverses
et sur l'adaptation plus ou moins réelle de ces structures aux
visites des animaux fécondateurs, le livre de Sprengel resta à
peu près ignoré pendant plus de soixante ans. Il fallut l'appa
rition de l'ouvrage célèbre de Charles Darwin sur l'origine
des espèces, en 1859, et l'impulsion que donna cette œuvre
aux recherches concernant l'influence réciproque des êtres
vivants les uns sur les autres, pour faire sortir le travail de
Sprengel d'un oubli immérité.
Non seulement on relut Sprengel, mais on s'éprit de cer
taines de ses idées au point de se laisser dominer et de ne plus
voir dans la nature que ce qui cadrait ou paraissait cadrer
avec celles-ci.
C'est ainsi, en nous limitant à la question de la c,ouleur des
fleurs, que la plupart des naturalistes éminents qui étu
dièrent la biologie florale, Hermann Müller, Delpino, John
Lubbock, L. Errera, Paul Knuth, etc., etc., sans nier absolu
ment le rôle des émanations odorantes, mais en ne lui attr
ibuant qu'une valeur secondaire, en arrivèrent à considérer la
coloration comme le facteur attractif capital.
Hermann Müller formule ainsi une de ses conclusions :
« Toutes choses égales d'ailleurs, une fleur est d'autant plus
abondamment visitée par les Insectes qu'elle est plus visible »
et L. Errera, dans une discussion verbale, compara devant
moi la couleur des corolles aux enseignes des restaurants des
tinées à attirer les consommateurs.
Obsédé par une idée fixe, on ne s'arrêta pas en si beau
chemin; ce n'était pas assez que les Insectes fussent guidés
vers les fleurs par la couleur et l'éclat de celles-ci, il y avait
mieux, les Insectes possédaient un véritable sens esthétique,
ils choisissaient entre les couleurs, certaines espèces ayant de
la préférence pour la couleur bleue, d'autres pour la couleur
jaune, etc., enfin, couronnant le tout, des Insectes manifest
aient par leurs allures une réelle admiration pour les fleurs
de quelques plantes !
Tout cela est-il vrai et les auteurs dont je rappelais les noms 70 MÉMOIRES ORIGINAUX
plus haut n'ont-ils pas commis Terreur, si fréquente chez les
biologistes, d'attribuer à des animaux les perceptions sensor
ielles et les idées humaines ?
Le seul moyen d'arriver à la solution de la question était
de soumettre toutes ces assertions sur le rôle attractif de la
couleur au double contrôle de nombreuses observations minut
ieuses et d'expériences variées.
Gaston Bonnier a accompli une partie de cette tâche en
1879 * et à la suite de recherches très intéressantes que je ne
pourrais résumer ici sans allonger cet article outre mesure,
arriva à la conclusion que le rôle important donné aux colo
rations des fleurs, la préférence de certai

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