Les obstacles sociologiques au développement du Congo - article ; n°30 ; vol.8, pg 435-453
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Description

Tiers-Monde - Année 1967 - Volume 8 - Numéro 30 - Pages 435-453
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Paule Bouvier
Les obstacles sociologiques au développement du Congo
In: Tiers-Monde. 1967, tome 8 n°30. pp. 435-453.
Citer ce document / Cite this document :
Bouvier Paule. Les obstacles sociologiques au développement du Congo. In: Tiers-Monde. 1967, tome 8 n°30. pp. 435-453.
doi : 10.3406/tiers.1967.2362
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1967_num_8_30_2362LES OBSTACLES SOCIOLOGIQUES
AU DÉVELOPPEMENT DU CONGO
par Paule Bouvier*
Le problème qui doit être abordé dans le cadre de cette étude limitée
sera envisagé sous un angle essentiellement sociologique. C'est dire assez
qu'un certain nombre de facteurs n'entreront pas dans l'exposé que nous
nous proposons d'entreprendre. Des faits tels que : les charges que fait peser
l'infrastructure sur l'ensemble de l'économie, ou l'état fortement détérioré
des finances publiques, ou encore l'accentuation des phénomènes dualistes
entre le secteur moderne et le secteur traditionnel de l'économie, ne seront
qu'incidemment évoqués. Non qu'ils ne constituent des obstacles importants
dans la voie du développement et partant de la croissance de la République
démocratique du Congo, mais ils ressortissent à une autre discipline que celle
dont nous entendons nous réclamer ici.
Du point de vue qui nous occupe, trois caractéristiques essentielles des
structures sociales nous semblent jouer un rôle déterminant. Considérée
globalement, la société congolaise apparaît en effet comme profondément
atomisée, intensément déstructurée, fortement déséquilibrée. Examinons tour
à tour chacun de ces éléments.
L'une des constatations les plus frappantes que l'on est amené à formuler
lorsque l'on observe systématiquement la société congolaise concerne le pro
cessus de parcellisation, d'émiettement qui la marque en divers domaines.
En effet, les différentes zones économiques ne sont pas peuplées de façon homog
ène (i). La région cotonnière, par exemple, englobe dans le nord les populat
ions Zande, Ngbandi, Ngwaka notamment ; au sud elle couvre quasiment tout
le Kasaï, le sud-ouest du Kivu, l'ouest du Katanga incluant donc plusieurs
groupes ethniques dont les Baluba, les Bakuba, les Batetela, les Lunda, les
* Maître de recherches à l'Institut de Sociologie (Bruxelles).
(i) Si tel est aussi le cas de nombreux autres Etats africains, soulignons toutefois qu'au
Ghana, par exemple, les zones cacaoyères sont principalement localisées en pays Ashanti,
qu'en Ouganda, c'est parmi les Baganda que se recrute la grosse majorité des planteurs
de coton.
435 PAULE BOUVIER
Bakusu, les Basamba... Les lieux où l'on cultive l'élaeis sont situés entre
autres en pays Bakongo, Mongo, Bambala, Babunda, Babua, Budu... Même
constatation en ce qui concerne les ressources minières. Au Kasaï, la zone
diamantifère broche à la fois sur les populations Lunda et Baluba. La région
cuprifère s'étend au sud du Katanga parmi des groupes divers tels les Baushi,
les Baseba, les Balamba, les Kaonde... Les sous-sols qui recèlent entre autres
de l'étain sont au Kivu le fait des Bangu-Bangu, Balega, Babinja, Bakomo...,
au Katanga des Baluba, des Bahemba...
De même, la plupart des subdivisions administratives ne correspondent
pas aux entités ethniques. Sur le plan théorique, le colonisateur avait conçu
ces subdivisions comme devant protéger et regrouper les entités coutumières.
Mais les nécessités de la gestion quotidienne, l'emprise de mobiles économiques
ou politiques, le détournèrent souvent, en pratique, de ces options théoriques.
Aussi, les cellules de base (chefferies et secteurs) (i), comme les unités plus
vastes (provinces) ne respectaient pas, le plus souvent, les limites des grou
pements autochtones. Qu'il nous suffise de rappeler que les populations
Mongo étaient réparties dans au moins quatre des anciennes provinces congol
aises, que les régions habitées par les Baluba s'étendaient de part et d'autre
de la frontière du Katanga et du Kasaï, que les Lunda ainsi que les Tshokwe
résidaient en même temps au Katanga, au Kasaï et dans l'ancienne province
de Léopoldville, que les Wagenya occupaient des territoires sis à la fois au
Kivu et en Province Orientale (2). Les changements apportés aux structures
administratives (3) depuis le 30 juin i960 n'ont pas modifié cet état de choses.
(1) La chefferie était au Congo la subdivision administrative correspondant théoriquement
aux entités coutumières. Mais dès les premiers temps de l'ère coloniale, de nombreuses
chefferies furent créées artificiellement. Voir A. F. G. Marzorati, The political organisation
and the evolution of African Society in the Belgian Congo, African Affairs, vol. 53, n° 211,
avril 1954, pp. 104-112.
Le secteur était une entité comprenant plusieurs chefferies où par conséquent les règles
coutumières ne pouvaient pas être rigoureusement observées notamment à propos du mode
de désignation du chef.
Soulignons qu'en 1958, il y avait au Congo 343 chefferies et 523 secteurs. Voir Rapport
sur l'administration du Congo belge pendant l'année 1958 présenté aux Chambres législatives, Chambre
des Représentants, session 1959-1960, Bruxelles, 1959, p. 95.
(2) Les situations évoquées dans ce texte étant généralement antérieures à 1966, les
villes et lieux géographiques ont été mentionnés sous leur ancienne appellation. Signalons
qu'aujourd'hui Léopoldville, Stanleyville, Elisabethville, Jadotville dont il est fait état
dans la suite, sont devenues respectivement Kinshasa, Kisangani, Lubumbashi, Likasi.
(3) Par la loi constitutionnelle du 9 mars 1962, la loi du 27 avril 1962 et l'ordonnance
du 15 août 1962, 16 provinces étaient officiellement agréées. A la suite de nouvelles modif
ications survenues dans l'intervalle, la Constitution du Ier août 1964 fixait à 21 le nombre
des provinces, plus la ville de Léopoldville. Enfin l'ordonnance-loi du 6 avril 1966 stipule
que la République du Congo se compose, outre la ville de Léopoldville, de 12 provinces
autonomes. Dans le discours qu'il prononça à Kinshasa, le 25 décembre 1966, le lieutenant
général Mobutu annonçait que le nombre de provinces serait ramené à 8 à la date du Ier jan
vier 1967, L'Etoile du Congo, 26 décembre 1966.
436 OBSTACLES SOCIOLOGIQUES AU DÉVELOPPEMENT DU CONGO LES
Ils ont consacré seulement un morcellement des entités provinciales préexis
tantes puis tenté un nouveau regroupement sans arriver pour autant à créer
un meilleur parallélisme entre structures ethniques et structures administratives.
Les centres d'évangélisation tant catholiques que protestants eux-mêmes
se sont éparpillés sur l'ensemble du Congo (i), de telle sorte que catholicisme,
protestantisme, animisme, islam (2), syncrétismes religieux divers se côtoyent
en de nombreux endroits. En ce domaine, non plus, il n'est donc pas possible
d'isoler des régions plus ou moins homogènes. Il n'est donc pas question
ici d'une ligne de partage entre le nord islamisé et le sud animiste et chrétien,
comme c'est le cas pour plusieurs États de la côte occidentale et par exemple
le Nigeria où l'on peut distinguer, même si cette description reste sommaire,
le nord musulman, le sud encore largement animiste, surtout dans l'est, le
nombre de chrétiens restant inférieur à 10 % de la population totale (3), et
certaines populations (les Tiv) échappant presque totalement aux efforts
d'évangélisation. De même en Côte-d'Ivoire, l'islamisation s'estompe au
fur et à mesure que l'on descend vers le sud ; Senoufo, Malinké, Dioula...
comportent de plus ou moins fortes proportions de Musulmans ; Koulango
et Lobi sont restés fortement animistes ; les populations des savanes préforest
ières et des forêts se sont ouvertes au christianisme à l'exception des Baoulé
tandis que les lagunaires ont été fortement touchés par l'évangélisation. Au
Sénégal 70 % environ de la population est musulmane, mais certaines ethnies
(dont les Sérère) ont résisté à l'islamisation et l'effort d'évangélisation a surtout
porté, outre les centres urbains, sur les régions encore animistes de la Petite
Côte et de la Casamance (parmi les

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