Les projets de désarmement et les perspectives de développement économique et social - article ; n°28 ; vol.7, pg 731-740
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Description

Tiers-Monde - Année 1966 - Volume 7 - Numéro 28 - Pages 731-740
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 6
Langue Français

Extrait

Jacques Vernant
Les projets de désarmement et les perspectives de
développement économique et social
In: Tiers-Monde. 1966, tome 7 n°28. Désarmement et développement. pp. 731-740.
Citer ce document / Cite this document :
Vernant Jacques. Les projets de désarmement et les perspectives de développement économique et social. In: Tiers-Monde.
1966, tome 7 n°28. Désarmement et développement. pp. 731-740.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1966_num_7_28_2300DÉSARMEMENT
ET DÉVELOPPEMENT
ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
par Jacques Vernant (i)
L'idée que l'énergie et l'argent dépensés à des fins militaires pourr
aient et devraient être affectés à d'autres fins et plus précisément au
développement économique et social est une idée normale et saine,
facilement assimilable par l'opinion publique. Elle a pour effet heureux
de contrebalancer les pressions qui dans tous les pays s'exercent en
faveur de l'augmentation des budgets militaires. Mises à part toutes les
raisons qui peuvent valablement être invoquées pour étoffer toujours
plus les appareils militaires, les intérêts et les groupes de pression jouent
plus efficacement en faveur des armements que du désarmement. Ceci
dit, le lien entre désarmement et développement n'est contrairement
à l'apparence, ni évident, ni simple. Il l'est d'autant moins que l'on
prend soin de raisonner non pas sur des abstractions, mais en tenant
compte des réalités du monde tel qu'il est. Aussi est-il d'autant plus
nécessaire de dégager les données logiques des problèmes évoqués par
le titre de cet article que le thème dont il s'agit est plus « populaire ».
Toute réflexion sur les rapports éventuels entre désarmement et
développement doit être précédée de quelques mises au point de termi
nologie et de logique :
i° II faut en effet d'abord savoir ce qu'il faut entendre par désarmement.
Ce terme est en effet utilisé, abusivement sans doute, pour désigner :
a) L'arrêt ou le ralentissement d'un effort national d'armement;
b) La limitation ou la réduction des effectifs; c) La réduction des
(i) Secrétaire général du Centre d'Etudes de Politique étrangère.
73 1 JACQUES VERNANT
armes par fixation contractuelle d'un plafond ; d) La destruction d'un
système d'armes; e) L'élimination générale et complète des armes
existantes ; f) L'interdiction sous contrôle, non seulement de la déten
tion, mais de la production et de la vente des armes;
2° II faut distinguer ensuite entre l'affectation éventuelle par un gouver
nement de crédits militaires à des dépenses civiles tendant au dévelop
pement économique ou social du pays dont ce gouvernement est
responsable et l'affectation de crédits libérés par la réduction des
dépenses militaires au développement d'autres pays. Dans les sociétés
industrialisées dites développées, les besoins non satisfaits des
secteurs civils croissent en proportion du développement. D'où une
pression pour que les ressources éventuellement rendues disponibles
soient affectées à l'équipement hospitalier et sanitaire, à l'infr
astructure des transports, à l'équipement scolaire, à la recherche
scientifique, à la liquidation du paupérisme, etc. Un pays aussi
puissant que le sont les États-Unis connaîtrait sans nul doute une
telle pression si des ressources venaient à être libérées par des accords
de désarmement. Il faut par suite tenir compte du fait que la décision
de réduire les dépenses militaires n'implique pas la décision d'affecter
ces ressources au développement de pays étrangers rentrant dans
la catégorie des « sous-développés » ;
3° II faut aussi distinguer selon que l'effort de développement serait
entrepris dans un cadre bilatéral ou dans un cadre international;
4° Enfin, l'affectation au développement économique et social des
ressources libérées par la réduction des crédits militaires n'implique
en aucun cas l'efficacité de cette « aide ». Les résultats d'une telle
affectation de crédits seront conditionnés par une multiplicité d'autres
facteurs qui ont trait, tant à la manière dont les crédits libérés seraient
utilisés, qu'aux conditions prévalant dans les pays bénéficiaires.
Ces remarques comportent une première conclusion : la décision
prise par des gouvernements de limiter leurs dépenses militaires, que
cette décision résulte d'un acte unilatéral ou d'un accord comportant
un engagement international n'a pas nécessairement pour conséquence
une réorientation des ressources vers des tâches de « développement ».
Les sociétés industrialisées qui ont les budgets militaires les plus import
ants en valeur absolue auront en toute hypothèse (même dans celle
d'un désarmement général et contrôlé), des besoins croissants de
732 DÉSARMEMENT ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
développer leur équipement économique, social et culturel et la
recherche scientifique. Le « développement » des sociétés industrialisées
s'accompagne en effet souvent d'un décalage croissant entre le degré
d'évolution des divers secteurs économiques et le niveau de vie des
diverses catégories sociales. Par exemple, l'expansion économique des
États-Unis peut se produire sans affecter sensiblement les conditions
de vie des noirs américains; ou encore les progrès accomplis en U.R.S.S.
peuvent ne pas affecter la situation de la paysannerie, l'infrastructure
des transports, le réseau de distribution des biens de consommation, etc.
Et ce qui est vrai des deux Grands l'est aussi des autres. Parmi les déve
loppés, il subsistera ainsi des secteurs retardataires, dont le retard relatif
peut même être apparemment accentué par les progrès accomplis dans
d'autres secteurs.
La seconde moitié du xxe siècle est marquée, dans les pays indust
rialisés, par l'accroissement considérable des dépenses de recherche
par rapport aux dépenses de production. Comme aucun accord de
désarmement ne peut conduire à fermer les laboratoires pas plus qu'à
stériliser l'esprit des hommes, les réductions éventuelles des budgets
militaires s'accompagneront vraisemblablement d'une augmentation des
budgets de recherche, recherches à toutes fins utiles d'ailleurs. D'autre
part pour passer à des considérations plus politiques, les projets les
plus poussés de désarmement général et contrôlé laissent subsister des
forces de police ou des forces d'urgence, des forces d'intervention
nationales ou internationales dont l'équipement et l'entretien impliquent
des dépenses. Ce n'est donc pas par un lien nécessaire que d'éventuelles
mesures de désarmement peuvent entraîner la relance ou le démarrage
du développement économique et social des pays dits « sous-développés ».
C'est au contraire le développement qui doit s'imposer comme une
nécessité prioritaire. Aussi longtemps que le progrès économique et
social des pays sous-développés d'Asie, d'Amérique latine, d'Afrique
n'apparaîtra pas comme une nécessité vitale pour les pays industrialisés
eux-mêmes, les besoins de développement n'exerceront nulle pression
en faveur d'un désarmement; et à supposer qu'un désarmement inter
vienne, je l'ai déjà dit, rien ne prouve que les ressources ainsi libérées
aillent aux pays dits sous-développés plutôt qu'aux autres.
Des distinctions qui précèdent, une deuxième conclusion me paraît
découler : on peut parfaitement imaginer que des mesures de « désa
rmement » (aux sens divers indiqués ci-dessus) soient décidées unilatérale-
733 VERNANT JACQUES
ment ou contractuellement par les grands pays industrialisés, sans que
cela ait une incidence sur la politique militaire des pays dits en voie de
développement. Par exemple, des mesures de désarmement ou de limi
tation d'armement décidées et appliquées par l'U.R.S.S. et les É

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