Mariage et naissance chez les Fidjiens de Kadavu - article ; n°2 ; vol.2, pg 79-92
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Description

Journal de la Société des océanistes - Année 1946 - Volume 2 - Numéro 2 - Pages 79-92
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1946
Nombre de lectures 35
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Raymond Jarre
Mariage et naissance chez les Fidjiens de Kadavu
In: Journal de la Société des océanistes. Tome 2, 1946. pp. 79-92.
Citer ce document / Cite this document :
Jarre Raymond. Mariage et naissance chez les Fidjiens de Kadavu. In: Journal de la Société des océanistes. Tome 2, 1946. pp.
79-92.
doi : 10.3406/jso.1946.1521
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jso_0300-953X_1946_num_2_2_1521MARIAGE ET NAISSANCE
CHEZ LES FIDJIENS DE KADAVU
Les Fidjiens, comme tous les peuples de l'univers, groupent leur vie
sociale autour d'un- certain nombre de circonstances plus importantes.
J'ai cru intéressant de rassembler ici les principales en décrivant les
cérémonies auxquelles elles donnent lieu : naissance, mariage, funér
ailles ont gardé, dans les parties les moins civilisées de Fidji, leur carac
tère primitif et sont l'occasion de fêtes et réjouissances (danses, échanges
de richesses, offrande et réception de nourriture, etc.).
Je crois utile de faire remarquer que, si ces cérémonies sont à peu près
similaires dans l'ensemble de l'archipel, il y a bon nombre de détails qui
varient avec chaque île ou portion d'île. Ma connaissance insuffisante de
l'ensemble de Fidji ne me permettant pas d'indiquer ces variations, je me
bornerai à décrire les faits et cérémonies tels que je les ai observés à
Kadavu,~et limite à cette seule île la valeur de ces notes.
>«.
I. — Naissance.
La plupart des coutumes et célébrations que je vais décrire ne s'appl
iquent qu'à la naissance d'un premier né, et sont d'ailleurs identiques
quel que soit le sexe.
Une femme est dite « faible », malumu, pendant les premiers mois de la
conception. Elle se rend ordinairement chez ses parents et tout travail lui
est interdit jusqu'au troisième mois. Une crainte superstitieuse entoure la
femme nouvellement enceinte aussi longtemps que son état n'est pas appa
rent : il faut se garder de lui confier un enfant ou de lui laisser toucher
la nourriture d'un malade. Je fis faire, il y a quelques mois, un barrage
à poisson. Contrairement à ce qui a lieu d'ordinaire, nous ne capturâmes
que très peu de poissons. On chercha la raison de cette anomalie et, après
de minutieuses enquêtes, on découvrit qu'une femme « faible » s'était
assise sur la palissade en voie de confection : il ne fallait pas chercher SOCIÉTÉ DES OCÉANISTES. 80
ailleurs la cause de notre échec. Autre exemple : sur le point de partir
pour un voyage en mer un jour de mauvais temps, je remarquai que mon
capitaine indigène faisait descendre à terre une femme qu'il avait aupara
vant admise comme passagère. La raison donnée ne me paraissant pas
plausible, je demandai ultérieurement des explications. Les Fidjiens répu
gnent à exposer leurs croyances à des étrangers, sachant qu'elles ne sont
pas partagées et souvent tournées en dérision. Ce ne fut qu'après de lon
gues hésitations que le capitaine consentit à me donner le vrai motif de
son refus : « J'avais entendu dire, m'avoua-t-il, que cette femme était
enceinte de deux mois. Le baromètre avait baissé, il serait arrivé un mal
heur au bateau et à nous si nous avions emmené cette femme. »
L'usage veut que quelques jours avant la naissance, outre une sage-
femme, le mari de la femme enceinte fasse venir sa propre mère et la
mère de sa femme. A défaut de la mère il faut s'assurer de la présence
d'une parente âgée, mais il est indispensable que les familles des deux
conjoints soient représentées. Le motif de cette règle est assez subtil : au
cas où la femme sur le point d'accoucher aurait eu des amants — soit
après soit avant son mariage — elle sera physiquement obligée de pro
noncer le nom du père de l'enfant en accouchant. Je dis physiquement,
car si elle s'y refusait, disent les fidjiens, l'accouchement serait imposs
ible ou « l'enfant tuerait sa mère en naissant ». Dès lors, on comprend
l'importance des mères ou parentes des deux conjoints : leurs deux
témoignages établiront définitivement l'identité du père de l'enfant.
J'énumère les pratiques qui président à la naissance ou la suivent imméd
iatement, quelques-unes purement superstitieuses, d'autres marquant un
certain souci thérapeutique. Si le nouveau-né est chétif au point de donner
des inquiétudes, les assistants frappent des mains contre le sol ou entre
choquent des boîtes de fer blanc de manière à produire le plus de bruit
possible, ce qui aura pour effet de donner un surcroît de forces au nou
veau-né. Avant de couper le cordon ombilical, la sage-femme le comprime
des doigts en le suivant dans toute sa longueur : grâce à cette traction, une
partie de l'âme de la mère passera dans le corps de l'enfant. Le cordon
une fois sectionné à l'aide d'un couteau ou de ciseaux, qui remplacent
aujourd'hui le bambou effilé des anciens fidjiens, la sage-femme a soin
de comprimer fortement l'extrémité — pour que l'âme ne s'échappe pas —
jusqu'au moment où elle est nouée. Après un bain sommaire, le eorps de
l'enfant est oint d'huile de coco parfumée de santal et de malawari {Prophis
anthropophagorum) . La sage- femme aspire des lèvres le mucus du nez
et de la bouche du nouveau-né et, pour achever d'expulser les humeurs
malsaines, un vomitif, ordinairement feuilles de malawate, est aussitôt
administré. En guise de premier repas, un morceau de tapa ou de fibre LES F1DJIENS DE KADAYU. ■ 81
de cocotier est imbibé de jus de coco, un morceau de noix étant préalable
ment grillé puis mastiqué. Ce n'est qu'après avoir goûté à la noix de coco
qui jouera un si grand rôle dans son alimentation, que le jeune fidjien est
allaité pour la première fois. Une nourrice, vakube-sucu, remplace la mère
dans cet office pendant les quatre premiers jours. Pendant les quatre pre
miers jours de son existence l'enfant passera de bras en bras, un certain
nombre de femmes, parentes ou amies, se relayant dans ce rôle. C'est le
kevekeve, du verbe keveta, qui veut dire : porter dans les bras. Ce n'est
que le cinquième jour que l'on pourra étendre le nouveau-né sur ses nattes.
Ici s'arrête la partie médicinale et commence le côté soeial ou cérémo-
niel de l'événement. En voici les principales phases : A reguregu ou
« action d'embrasser ». Le lendemain de la naissance, — ou beaucoup
plus tard pour les étrangers qui souvent viennent de fort loin, — les
parents et connaissances de la famille font au nouveau-né leur visite offi
cielle, apportant de menus présents, tels que vêtements, savon, pétrole, etc.
Les parents les plus proches et surtout les grands-parents devront faire
un cadeau plus important, plusieurs grandes nattes ou moustiquaires.
Comme le nom de la cérémonie le suggère, les visiteurs baisent l'enfant,
v ce qui, à la manière fidjienne, consiste à appliquer le nez sur le visage en
aspirant légèrement. La conclusion est un magiti, festin préparé par le
père de l'enfant.
Un nombre variable de jeunes femmes (pouvant aller jusqu'à 100) sont
l'accessoire indispensable de la naissance d'un premier anfant. Ce sont les
marama moce ou « dames dormeuses ». Cette appellation indique la nature
de la fonction de ces « dames » qui consiste strictement à « manger et
dormir », suivant la formule fidjienne qui décrit l'heureux état de ceux
qui n'ont pas à travailler. Ces « dormeuses », nourries pendant quatre jours
par le père du nouveau-né, n'ont d'autre obligation que celle de rester
confinées en compagnies de la femme accouchée, occupant leurs loisirs à
deviser, faire des danses, mekes, ou, d'une manière plus moderne, en
jouant aux cartes. La présence des dormeuses dans la maison entraîne
l'interdiction aux hommes d'en franchir le seuil dans certaines tenues
ou attitudes, par exemple en. ayant le cou entouré d'un foulard ou d'une
serviette, ou d'une guirlande de fleur3, ou la chevelure couverte de cen
dres ou de produits végétaux, etc., toutes pratiques familières aux fidjiens
et qui, parce que, j'imagine, elles dénotent un certain laisser-aller, sont
prohibées en présence des marama moce. Les délinquants sont punis
d'une amende, leur entrée é

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