«Peuple » et « Nation » : Notes sur la littérature dialectale italienne à l époque romantique - article ; n°37 ; vol.12, pg 3-18
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«Peuple » et « Nation » : Notes sur la littérature dialectale italienne à l'époque romantique - article ; n°37 ; vol.12, pg 3-18

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Description

Romantisme - Année 1982 - Volume 12 - Numéro 37 - Pages 3-18
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pietro Gibellini
«Peuple » et « Nation » : Notes sur la littérature dialectale
italienne à l'époque romantique
In: Romantisme, 1982, n°37. pp. 3-18.
Citer ce document / Cite this document :
Gibellini Pietro. «Peuple » et « Nation » : Notes sur la littérature dialectale italienne à l'époque romantique. In: Romantisme,
1982, n°37. pp. 3-18.
doi : 10.3406/roman.1982.4552
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1982_num_12_37_4552Metro GIBELLINI
« Peuple » et « Nation » : Notes sur la littérature dialectale italienne
à l'époque romantique
Grandeur de la poésie dialectale pendant le Romantisme...
Parmi les rares sommets qui s'élèvent sur le paysage de la poésie
italienne de l'époque romantique, émergent Carlo Porta et Giuseppe
Giochino Belli. En effet en 1945 Attilio Momigliano regrettait qu'on
ne reconnût pas encore suffisamment leur grandeur européenne (qui
n'avait d'autre part pas échappé à deux talent-scouts comme Stendhal
et Gogol) ; en 1969, enfin, la plus importante histoire de la littérature
italienne, dirigée par Emilio Cecchi et Natalino Sapegno, consacre
aux deux poètes dialectaux deux chapitres, en leur accordant un privi
lège réservé à bien peu de contemporains : Monti, Foscolo, Manzoni,
Leopardi, Tommaseo. D'ailleurs le Romantisme donne une importance
particulière au rapport littérature-peuple : on est donc porté à consi
dérer cette période comme la plus favorable à une riche floraison
d'œuvres dialectales, écrites dans une langue « populaire » (les guille
mets sont ici nécessaires).
... et limites de sa floraison
Si toutefois nous changeons de point de vue en passant de la
qualité à la quantité, nous remarquons avec surprise que le diagramme
de la production dialectale présente, pendant les années du Risorgi-
mento, un certain fléchissement par rapport à celui du XVIIIème
siècle, qui offrait d'abondants et souvent estimables ouvrages, et par
rapport à celui de la fin du XIXème, qui donnera une impulsion éner
gique à la poésie et surtout au théâtre dialectal. Entre la grâce arca-
dienne (typique de l'Académie de l'Arcadia, qui exerça une grande
influence au XVIIIème siècle) d'une littérature que Croce appela
« réflexe » et le goût pathétique et vériste de la fin-de-siècle, les deux
grands écrivains dialectaux demeurent solitaires, comme des géants
dans le désert.
Implications politiques de la poésie dialectale
Pour rendre mieux compte de cette contradiction apparente,
il faut souligner la notion polyédrique et souvent ambiguë' de « peuple »
et/ou de « nation » telle qu'elle se forma et se modifia durant l'époque Pietro Gibellini 4
qui relie les deux siècles « l'un contre» l'altro armati ». Il s'agit naturell
ement d'un terrain plein d'embûches et d'équivoques (la poésie dialectale
n'est pas toujours populaire, et vice versa). A l'époque du Risorgimento
cependant, et malgré certains auteurs, on conçut la poésie
surtout comme l'expression d'un sentiment populaire de révolte.
L'anecdote selon laquelle Césare Correntí crie aux Autrichiens qui,
en 1848, s'enfuient de Milan insurgé : « Giovannin Bongee est enfin
vengé », a une valeur presque symbolique. (Le personnage de Bongee,
crée par Porta, avait subi, en vérité, la violence des soldats français,
qu'il appellait « croates » ; pour lui, les langues étrangères, le latin
et le langage italianisant ambitieux et ridicule des nobles étaient l'e
xpression d'une arrogance commune.) Ce furent d'autre part les parti
sans de Mazzini qui favorisèrent la diffusion des sonnets de Belli,
un auteur qui n'aimait point Mazzini et qui prenait pour patrie Rome,
et non pas l'Italie. La véritable connaissance de son œuvre date de
1870, l'année où paraît l'anthologie que Luigi Morandi, futur sénateur
sur les bancs de la gauche, consacre « ai Romani che vendicheranno
l'onte nuova del vecchio servaggjon » ; quelques mois après les troupes
italiennes conquirent Rome.
Morandi n'hésitait pas à considérer comme sans importance le
manque des manuscrits de Belli, car selon lui la version orale pouvait
« superare per naturalezza l'originale » : il croyait en effet que « il
popolo, accentandon e variando i versi a modo suo, li ha fatti più
consonanti al proprio linguaggion e al proprio genio ». Depuis lors,
beaucoup d'eau a coulé sous les ponts de la philogogie.
Napoléon en Italie : espoirs et déceptions
D'ailleurs un rapport étroit entre art et société, est de plus en
plus souligné chez les critiques et les historiens de la littérature de
l'époque romantique : Corniani, Scalvini, Foscolo, Ugoni, Tommaseo
marquent les étapes d'un chemin qui conduira aux ouvrages fonda
mentaux de Settembrini et De Sanctis. Il est rare, en effet, de trouver
une période où les événements littéraires et les faits politiques et
idéologiques s'enchevêtrent autant que dans celle qui va de Marengo
à Waterloo, jusqu'à la puissante secousse de Quarante-huit : année
qui devient tout de suite dans les dialectes synonyme de révolution.
A l'attente confiante des « Lumières » d'au-delà des Alpes succède
le « ritorno d'Astrea » (1), le retour d'une Autriche qui avait échangé
le visage aimable de Marie Thérèse et de Joseph II pour les traits durs
de la Restauration. Des « lumières » différentes de celles souhaitées
brillaient, malheureusement, sur les baïonnettes françaises, et le passage
d'un optimisme général à une attitude plus prudente ou à une haine
irréductible pour les Français (« misogallismo ») est un chapitre com
mun à Y intelligentsia italienne la plus sensible : de Verri à Parini,
(1) Ritorno d'Astrea est le titre d'un ouvrage de Vincento Monti qui célèbre le retour
des Autrichiens (il y a paronomase entre Astrea, déesse de la justice, et Austria). La littérature dialectale italienne 5
d'Alfîeri à Foscolo, du trop calomnié Monti au jeune Manzoni. On
en trouve des traces remarquables dans la poésie dialectale : les fac
tieuses et anonymes « bosinade » (2) entre jacobins et réactionnaires
employaient le dialecte dans des intentions pratiques (pensons à un
poème intéressant comme Meneghin sotťai Franzes) (3), mais d'autre
part le piémontais Edoardo Calvo, qui venait de composer la plus vio
lente chanson révolutionnaire (Passaport ďij aristocrat, 1798-99),
confiait en 1 802-03 à ses fables en vers une âpre critique de la mauvaise
administration française. Porta aussi, qui avait levé son verre pour
un toast poétique à Napoléon, couvre d'amères injures les Français
qui s'enfuient (« Paracarr che scappee de Lombardia... » (4), 1814) :
certes, écrit-il, ils céderont leur place à d'autres étrangers voleurs
eux aussi ; mais les violences subies ont été telles que les Milanais
préfèrent être tourmentés par un autre bourreau.
Fils d'une nouvelle génération, Belli allait mettre dans la bouche
de ses personnages populaires un jugement plus complexe ; d'un côté
il dénonçait la politique réactionnaire de Grégoire XVI, toujours prêt
à s'appuyer sur « l'arisorta der todesco » (5), et il se moquait de ceux
qui imputaient au régime français passé les fautes de l'administration
so' stato ferito) (6), d'un autre côté Belli pontificale (Monzignore,
soulignait la méfiance des plébéiens à l'égard des « giacubinacci »
(« Un po' più che durava Napujone / со quel'antri muzù scummuni-
cati / Roma vieniva a diventà Frascati... ») (7).
La leçon de l'historicisme, de Naples à Milan
En effet à Rome, et surtout à Milan, l'attitude des hommes
du peuple envers les Républiques jacobines et les régimes napoléoniens
avait été hostile ou tout à fait passive. En traçant sa magistrale géo
graphie et histoire de la littérature italienne (8), Carlo Dionisotti
pouvait à juste titre affirmer que « feneomeno tipicamente piemontese
e lombardo ê il romanticismo italiano

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