Prescription, intuition et usage : le subjonctif français et la variabilité inhérente - article ; n°1 ; vol.54, pg 5-33
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Description

Langage et société - Année 1990 - Volume 54 - Numéro 1 - Pages 5-33
Poplack, Shana - Prescription, intuition and usage: inherent variability and the French subjunctive.
Is mood choice in French syntactically or semantically motivated ? Systematic empirical analysis of mood usage in a corpus of spoken Canadian French leads to the conclusion that the subjunctive is one variant of a linguistic variable which may alternate with the indicative and the conditional in certain embedded noun clauses. Variable rule analysis of the contribution of semantic versus morphosyntactic factors to the choice of subjunctive mood reveals that this process is conditioned by the latter, suggesting that the choice of subjunctive is inherently variable and not determined by meaning. Moreover, it appears that the contemporary state of affairs is neither an innovation nor limited to Canadian dialects, but is rather a synchronie reflex of mood variability throughout the history of French language.
L'alternance subjonctif/indicatif en français a-t-elle un sens ou découle-t-elle de la nature du verbe principal ? L'examen d'un corpus de français canadien parlé nous amène à penser que le subjonctif n'est qu'une variante d'une variable linguistique qui alterne avec l'indicatif et le conditionnel dans certaines propositions nominales enchâssées. Une analyse statistique des contributions respectives des facteurs sémantiques et morpho syntaxiques révèle que ce sont plutôt ces derniers qui conditionnent le processus, ce qui suggère que l'alternance modale n'est pas déterminée par des variations de sens. Cette variabilité n'est ni une innovation ni limitée au français canadien ; il semble que ce soit la trace synchronique de la variabilité modale à travers l'évolution du français.
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Shana Poplack
Prescription, intuition et usage : le subjonctif français et la
variabilité inhérente
In: Langage et société, n°54, 1990. pp. 5-33.
Abstract
Poplack, Shana - "Prescription, intuition and usage: inherent variability and the French subjunctive.
Is mood choice in French syntactically or semantically motivated ? Systematic empirical analysis of mood usage in a corpus of
spoken Canadian leads to the conclusion that the subjunctive is one variant of a linguistic variable which may alternate
with the indicative and the conditional in certain embedded noun clauses. Variable rule analysis of the contribution of semantic
versus morphosyntactic factors to the choice of subjunctive mood reveals that this process is conditioned by the latter, suggesting
that the choice of subjunctive is inherently variable and not determined by meaning. Moreover, it appears that the contemporary
state of affairs is neither an innovation nor limited to Canadian dialects, but is rather a synchronie reflex of mood variability
throughout the history of French language.
Résumé
L'alternance subjonctif/indicatif en français a-t-elle un sens ou découle-t-elle de la nature du verbe principal ? L'examen d'un
corpus de français canadien parlé nous amène à penser que le subjonctif n'est qu'une variante d'une variable linguistique qui
alterne avec l'indicatif et le conditionnel dans certaines propositions nominales enchâssées. Une analyse statistique des
contributions respectives des facteurs sémantiques et morpho syntaxiques révèle que ce sont plutôt ces derniers qui
conditionnent le processus, ce qui suggère que l'alternance modale n'est pas déterminée par des variations de sens. Cette
variabilité n'est ni une innovation ni limitée au français canadien ; il semble que ce soit la trace synchronique de la variabilité
modale à travers l'évolution du français.
Citer ce document / Cite this document :
Poplack Shana. Prescription, intuition et usage : le subjonctif français et la variabilité inhérente. In: Langage et société, n°54,
1990. pp. 5-33.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lsoc_0181-4095_1990_num_54_1_2499INTUITION ET USAGE : LE SUBJONCTIF PRESCRIPTION, INHÉRENTE*
FRANÇAIS ET LA VARIABILITÉ
Shana Poplack
Université d'Ottawa
La valeur du subjonctif dans les langues romanes, et en particulier
en français, préoccupe les grammairiens depuis des siècles, et conti
nue à tracasser les linguistes contemporains. Plus précisément, le
choix du mode dans certaines propositions enchâssées découle-t-il
automatiquement de la nature du verbe principal, auquel cas le mode
subjonctif pourrait être interprété comme une simple marque redon
dante de subordination ? C'est bien ce que les exemples en (1)
suggèrent, puisque en (la) on observe que le mode indicatif suit le
verbe penser, alors qu'en (lb) le subjonctif suit le verbe aimer1.
Nous sommes reconnaissante au Conseil de Recherches en Sciences Sociales et en
Humanités du Canada pour leur soutien au projet dont cette étude fait partie. Nous tenons
à remercier Keltie Purcell et Chris Miller pour leurs efforts herculéens dans la localisa
tion, l'extraction, la codification, l'entrée et la correction des données sur le subjonctif,
et Maggie Trudel-Maggiore et Sali Tagliamonte pour leur aide dans la préparation du
manuscrit. Cet article est la version française de « The inherent variability of the French
subjunctive », à paraître dans Morgan, T. et C. Lauefer, (dirs.) Proceedings oflSRL XIX.
Amsterdam : Benjamins (1990). Natalie Dionne, Josiane Boutet et Pierre Achard ont
collaboré à la traduction. Qu'ils en soient ici remerciés.
Les codes se réfèrent au numéro du locuteur et au numéro de ligne sur lequel se
trouve son énoncé dans le Corpus du français parlé à Ottawa-Hull (Poplack 1989)
d'où sont tirées les données sur lesquelles se base cette étude. Les exemples
reproduisent exactement les énoncés des informateurs.
langage et société n° 54 - décembre 1990 6 SHANA POPLACK
(la) Je pense qu'ils en font (I) pas assez pour le vieux monde. (051/1005)
(lb) T aimerais ça qu'ils la fassent (S) petite comme ça moi. (019/1065)
Mais il existe des paires de phrases comme en (2), où le verbe
principal est le même, bien qu'à la forme négative en (2b), ou
encore, comme en (3), où les propositions principales sont
identiques, mais où l'on observe néanmoins tantôt un subjonctif
tantôt un indicatif dans la proposition enchâssée. Ceci rend
douteuse l'hypothèse que le choix de mode soit entièrement
automatique, et confirme l'idée que l'alternance subjonctif/indi
catif exprime une variation de sens, qu'on peut définir grosso
modo comme le degré d'engagement du locuteur quant à la réalité,
la probabilité ou la vérité de la proposition enchâssée.
(2a) Mais quand tu es jeune, moi je crois que c'est (I) une bonne chose. (034/1125)
(2b) Je crois pas que ce soit (S) la fin du monde. (060/195)
(3a) Admettons mes deux petits soient (S) détachés, ils peuvent me donner une
amende pour deux fois vingt-huit piastres. (027/1938)
(3b) qu'elle peut (I) pas ou que l'enfant est (I) malade, on peut pas
l'envoyer. (117/851)
C'est là, en effet, la position traditionnelle, bien que souvent
implicite, des grammairiens prescriptivistes, qui présentent
l'usage des modes comme s'il était déterminé lexicalement,
c'est-à-dire, par des listes de verbes, ou de classes de verbes
(volitifs, émotifs, épistémiques, etc.) qui prennent ou ne
prennent pas le subjonctif, tout en expliquant cet usage en
termes sémantiques. On trouve donc dans ces traitements de
nombreux contre-exemples, tel un indicatif dans un contexte
"subjonctif", parfois expliqué comme témoignant le désir du
locuteur de marquer "la réalité du fait", ou un subjonctif dans
un contexte indicatif - ici le fait serait simplement "envisagé
dans la pensée" ou encore, un conditionnel dans un contexte
subjonctif, si le fait est "hypothétique ou éventuel"
(e.g. Grévisse 1986). Dans ce qui suit nous examinerons un
certain nombre de propositions concernant l'interprétation du
choix de mode, et nous présenterons des faits du français
canadien parlé qui pourront contribuer à évaluer ces théories
opposées. Subjonctif français et variabilité inhérente 7
LA DISTINCTION ASSERTION / NON-ASSERTION
Dans un corpus assez important de recherche, inspiré par le
travail de Kiparsky et Kiparsky (1970) sur la factivité, Hooper et
ses associés (p. ex. Hooper 1975 ; Terrell et Hooper, 1974 ; Terrell
1976 ; Garcia et Terrell 1977, ; Lantolf, 1978) voient le choix de
mode comme sémantique. Hooper (1975) a proposé une distinc
tion qui recoupe celle des Kiparsky entre factif et non-factif et
qui se définit par des critères syntaxiques et sémantiques, à savoir
la distinction assertion/non-assertion. Elle souligne que certaines
différences entre les prédicats factifs et non-factifs ne se
rapportent en fait qu'à une distinction entre assertions "fortes"
et "faibles". Elle subdivise les prédicats en cinq catégories d'as
sertion et factivité (que nous reprenons dans le Tableau 1) ce qui
lui permet de rendre compte d'un contre-exemple apparent à sa
proposition antérieure (Terrell et Hooper 1974) suivant laquelle
le choix de mode et l'assertion seraient directement liés. Suppos
ant que les semi-factifs sont également des assertions, elle a pu
avancer que les propositions enchâssées possédant des caracté
ristiques liées à l'assertion sont toujours à l'indicatif en espagnol,
alors que celles qui ne les possèdent pas exigent le subjonctif.
Bien que d'autres recherches (p. ex. Rivero 1971, Guitart 1980)
ont déjà démontré que la motivation du choix entre l'indicatif et
le subjonctif n'est pas aussi nette, même en espagnol, l'analyse
de Hooper a l'avantage évident de capter formellement cette
caractérisation répandue du subjonctif comme un mode expri
mant des notions de doute, d'irréel, etc. Si la distinction est
valable, on est en droit de s'attendre à ce qu'elle s'applique au
français également. Nous avons donc examiné nos données selon
cette catégorisation (Tableau 1). Il appert immédiatement, même
à partir du sous-échantillon restreint de données sur

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