Quand les solutions apparentes deviennent de réels problèmes - article ; n°99 ; vol.25, pg 585-602
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Quand les solutions apparentes deviennent de réels problèmes - article ; n°99 ; vol.25, pg 585-602

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Tiers-Monde - Année 1984 - Volume 25 - Numéro 99 - Pages 585-602
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 48
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

André Gunder Frank
Quand les solutions apparentes deviennent de réels problèmes
In: Tiers-Monde. 1984, tome 25 n°99. La dette du Tiers Monde (sous la direction de Jean Masini). pp. 585-602.
Citer ce document / Cite this document :
Frank André Gunder. Quand les solutions apparentes deviennent de réels problèmes. In: Tiers-Monde. 1984, tome 25 n°99. La
dette du Tiers Monde (sous la direction de Jean Masini). pp. 585-602.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1984_num_25_99_3417QUAND LES SOLUTIONS APPARENTES
DEVIENNENT DE RÉELS PROBLÈMES*
par André Gunder Frank**
La crise économique mondiale actuelle, qui commença au milieu
des années i960, se trouve, semble-t-il, dans une phase de transition.
Par analogie avec la dernière crise importante, celle qui prit son essor
au milieu des années 19 10 et se poursuivit jusqu'aux années 1940, nous
serions dans la période de transition des années 1920 aux années 1930.
Cette analogie avec la crise précédente (et aussi avec d'autres crises
antérieures) ainsi qu'une analyse réaliste du développement de la crise
actuelle, nous mènent à croire qu'une grave dépression, semblable à
celle des années 1930, pourrait encore se produire. En plus, un krach
financier important, semblable à ceux de 1929 et de 193 1, est de plus
en plus possible; il ne déclencherait pas la dépression, mais en augment
erait l'intensité.
Les mesures prises dans les années 1970, supposées apporter des
solutions à la crise économique mondiale croissante, ont, en effet, créé
les conditions d'un krach financier violent et/ou d'un « craquement »
plus prolongé dans les années 1980. Toute une série de ces solutions
supposées a été appliquée à l'économie mondiale à travers une création
de crédits, apparemment sans limites. Avec justice, Business Week fait
allusion à une debt economy en 1974 et à une plus importante new debt
economy en 19781. L'apport continuel de crédit aux consommateurs, aux
entreprises, aux gouvernements, au Tiers Monde et aux pays socialistes
a alimenté un « fleuve » de la dette sur lequel le navire de l'économie
mondiale (ou les navires des consommateurs, des entreprises et des
états) a flotté pendant que la crise économique réelle se développait.
Mais cette solution illusoire a créé un vrai problème avec la « bombe »
de la dette, dont la mèche devient de plus en plus courte. La dette du
* Cette étude résume un article Can the Debt Bomb be Defused ?, World Policy
Journal, New York, n° 4, Summer 1984; Economic and Political Weekly, Bombay, July 7, 1984.
** Université d'Amsterdam.
i. Business Week Special Issues, respectivement le 12 octobre 1974 et le 16 octobre 1978.
Revue Tiers Monde, t. XXV, n° 99, Juillet-Septembre 1984 ANDRÉ GUNDER FRANK 586
Tiers Monde — élément important mais non pas seul élément de cette
« bombe » — est devenue de plus en plus insupportable et risque de
faire exploser la « bombe » entière. Et si cette « bombe» éclate, elle
risque de paralyser et le système bancaire qui a contribué à sa fabri
cation, et le système mondial de production et d'échanges que ce méca
nisme financier aurait dû soutenir. Ainsi, ce qui était supposé être une
solution financière est devenu un élément important du problème éco
nomique réel.
Il faut noter que ce n'est pas la première fois que ce appar
aît. A leur époque Adam Smith, Karl Marx et d'autres avaient déjà
remarqué que l'évolution de toute crise économique importante engend
rait une tendance à émettre davantage de monnaie, à augmenter le
crédit, à plutôt spéculer que d'entreprendre des investissements réels
mais peu rentables, dans l'intention de prolonger la croissance. Dans
un premier temps, cette monnaie supplémentaire y parvient. Mais après
un certain risque de déclencher
un krach financier ou bancaire, parce que le système financier est fragile.
Même si le système ne s'effondre pas comme en 1929, le gonflement
de la masse monétaire devient un obstacle au bon fonctionnement du
système.
Nous avons noté que Smith et Marx avaient pu observer et analyser
ce processus; le professeur d'économie Charles Kindleburger du mit
(un des analystes les plus importants de la grande dépression des
années 1930) a pu décrire la répétition de ce même processus à travers
plusieurs siècles dans son livre Manias, Bubbles, Panics and Crashes and
Lenders of the Last Resort. Cela démontre que pendant les périodes où
la crise économique s'accroît, il est difficile de ne pas produire cette
« bombe » de la dette, et qu'il est encore plus difficile de la désamorcer
avant qu'elle n'éclate. Il est difficile de désamorcer la « bombe » de la
dette — et celle du Tiers Monde en particulier — essentiellement parce
que ce qui pouvait apparaître comme les avantages de l'endettement
deviennent des intérêts contradictoires, entre les créanciers, entre créanc
iers et débiteurs, et entre les débiteurs eux-mêmes, sur la façon de
partager les coûts du désamorçage et du démantèlement de la « bombe ».
Personne ne sacrifie volontairement les gains à court terme ou n'est
disposé à supporter les coûts à long terme. Ainsi chacun de ces parti
cipants, banques, entreprises, états ou autres, voit son avantage rationnel
à court terme dans l'expansion de la « bombe »; ce qui la rend plus
explosive.
Nous verrons ci-après comment la « bombe » de la dette du Tiers
Monde a été produite dans les années 1970 par les dispositifs financiers SOLUTIONS APPARENTES ET REELS PROBLÈMES 587
qui étaient supposés soutenir l'économie mondiale en alimentant le
Tiers Monde en monnaie avec les prêts bancaires. Ensuite nous verrons
comment — notamment pendant la récession de 1979- 198 2 — ce qui
avait paru être une solution devint, au contraire, un élément déterminant
du problème, ayant des conséquences graves dans les processus de pro
duction et du commerce mondial.
U évolution des échanges
Durant l'évolution de la crise, un besoin de réduire les coûts de
production s'est fait sentir. Une des façons de les de consiste à baisser les salaires et à diminuer le rôle de l'Etat
providence à l'intérieur du pays, ce qui s'est produit dans le monde
occidental. Une autre possibilité est le « redéploiement » de la pro
duction industrielle du monde occidental vers les pays socialistes de
l'Est et vers le Tiers Monde, au sud, où les coûts salariaux étaient
plus faibles pendant les années 1970. Ainsi entre 1970 et 1980 la contri
bution du Tiers Monde aux exportations mondiales s'est accrue de 18 %
à 28 %. La contribution du Tiers Monde aux exportations de produits
manufacturés était de 1 1 % en 1970 et de 16 % en 1980. Un mouvement
de la production du monde occidental vers les pays de l'Est et ceux
du Sud s'est manifesté dans des produits à faible coût de main-d'œuvre,
ainsi que dans l'automobile, la sidérurgie, la construction navale, etc.
Pour parvenir à ces coûts plus faibles, il est nécessaire d'intensifier
l'exploitation des ouvriers du Tiers Monde, et en particulier de la
main-d'œuvre féminine de l'Asie, de l'Amérique latine et d'ailleurs.
Nous avons analysé ces tendances en détail dans Crisis in the Third
World (New York, Holmes & Meier, Londres, Heinemann, 1981).
Du point de vue de la demande également (c'est-à-dire du pouvoir
d'achat), le Tiers Monde est devenu de plus en plus important. La
part des exportations totales des Etats-Unis, de la cee et du Japon
destinée au Tiers Monde a augmenté de 30 % en 1970 à 40 % en 1980.
En ce qui concerne les exportations de produits manufacturés, la part
du Tiers Monde a augmenté de 21 % à 27 %; cette part était de 30 %
en 1980 pour les machines et de 40 % pour les biens d'investissement.
40 % des exportations des Etats-Unis en 1980 et 45 %, ou presque
50 %, de celles du Japon étaient destinés au Tiers Monde. Cela démontre
l'importance des marchés du Tiers Monde pour les pays industrialisés
en ce qui concerne la demande. De plus, les exportations sont devenues
plus importantes, car l'investiss

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