Rois divins et rois guerriers Images de la royauté à Bali - article ; n°95 ; vol.25, pg 39-70
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Description

L'Homme - Année 1985 - Volume 25 - Numéro 95 - Pages 39-70
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean-François Guermonprez
Rois divins et rois guerriers Images de la royauté à Bali
In: L'Homme, 1985, tome 25 n°95. pp. 39-70.
Citer ce document / Cite this document :
Guermonprez Jean-François. Rois divins et rois guerriers Images de la royauté à Bali. In: L'Homme, 1985, tome 25 n°95. pp.
39-70.
doi : 10.3406/hom.1985.368590
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1985_num_25_95_368590Jean-François Guermonprez
Rois divins et rois guerriers
Images de la royauté à Bali
Jean-François étrangères. dans ou actuel essentiellement royauté être les des à rapportée, représentations Bali. connaissances, La Guermonprez, — rémanence constante A comme Bali, de ne du » la de le saurait qui royauté ixe propose certains Rois se au être serait xixe divins révèlent C. traits décrite Geertz, siècle, fixée et indianisés une rois à au les l'aide à complexité guerriers. variations contact « une d'un ne forme doit modèle des Images qui, perceptibles influences pas culturelle en simple l'état dissde la
imuler l'écart entre une royauté ancienne, apparemment hindouisée et
« divine », et une royauté tardive qui, par contraste, va apparaître indoné
sienne et relativement sécularisée. La reconnaissance de cet écart est une
étape préalable à la quête d'invariants qui ne sont vraisemblablement pas
à découvrir dans les sédiments linguistiques et culturels déposés par l'india-
nisation. L'argumentation s'appuie sur l'analyse d'une chronique dynast
ique, le Babad Buléléng, invitant à voir en Bali une société indonésienne,
et non une curiosité sociologique absolument singulière et réfractaire au
projet d'une anthropologie comparative.
Le grand intérêt tout archéologique de Bali
réside dans le caractère de ses habitants et leur
attachement obstiné depuis des siècles à l'hi
ndouisme.
Cabaton (191 o : 363)
Au début du xixe siècle, la découverte des cours des raja balinais,
de leurs crémations spectaculaires et du sacrifice de leurs veuves captiva
l'attention des témoins occidentaux et contribua à la formation d'une
imagerie vivace faisant de Bali une société indianisée fossilisée1. Ce débri-
1. L'influence indienne, directe ou indirecte, est apparente dès les premières
inscriptions rédigées en sanskrit et en balinais ancien. L'influence de la société
javanaise indianisée est attestée à partir de la fin du Xe siècle. L'adoption du
javanais ancien comme langue écrite officielle en témoigne, ainsi que l'existence
de liens de parenté entre les dynasties javanaises et balinaises à l'époque d'Air-
L'Homme 95, juil.-sept. 1Q85, XXV (3), pp. 39-70. .
40 JEAN-FRANÇOIS GUERMONPREZ
dement d'un imaginaire occidental, fasciné à l'extrême par le spectacle
de la mort des raja, contraste avec les silences d'une littérature eru
dite qui, tout en insistant sur le caractère indianisé de la société balinaise,
ne s'intéressa guère à l'étude de la royauté2.
Rappelons que la tradition orientaliste classique voyait dans l'india-
nisation beaucoup plus qu'un processus d'assimilation d'éléments étran
gers. Elle en faisait l'opérateur par lequel les sociétés d'Asie du Sud-Est
seraient entrées dans l'Histoire. On admettait encore tout récemment que
les voyageurs indiens avaient apporté dans leurs bagages non seulement
la technique de l'écriture et une pensée religieuse élaborée, mais aussi « la
civilisation » et « l'État »3. Selon cette conception, la société indianisée
était le produit de la royauté hindouisée qui elle-même reposait sur le
principe de la divinisation du roi, né de la rencontre avec l'Inde. Une fois
franchi ce seuil historique, il était en outre admis que ces sociétés india-
nisées n'allaient connaître de nouveaux changements décisifs que sous
l'impact d'autres influences étrangères, tout particulièrement celles
résultant de la diffusion de l'islam puis de l'arrivée des Européens. Cette
interprétation d'une histoire qui n'avancerait que par à-coups conduisit à
occulter les capacités de changements internes d'une société telle que Bah,
qui ne fut jamais islamisée et ne tomba définitivement sous la domination
hollandaise qu'en 1908. L'image d'une société balinaise pétrifiée dans le
conservatisme de son indianisation se trouva renforcée par une conception
européo-centrique du mouvement d'islamisation considéré comme une
langga (1037-1049). J. Boon, dans son Anthropological Romance of Bali (1977 :
10-34), présente les divers biais qui ont conduit à voir dans la société balinaise un
réservoir de survivances et d'archaïsmes.
2. On ne trouve que quelques remarques sur la royauté balinaise dans le monu
mental ouvrage de V. E. Korn (1932). Les notes de H. J. Schwartz, publiées
par J. L. Swellengrebel (1947), constituent la principale contribution de
l'ethnographie de l'époque coloniale à cette question qui ne commence à être
véritablement abordée qu'à propos de l'édition du Babad Buléléng (Worsley
1972, 1975). La première étude anthropologique de la royauté est celle de
C. Geertz (1980). On notera la place que tient encore le spectacle de la créma
tion dans l'élaboration du modèle de « l'État- théâtre », en particulier sous la
forme d'une longue référence à la description d'un marchand voyageur du
xixe siècle {ibid. : 98-102).
3. Voir, par exemple, R. O. Winstedt, cité par G. Coedès (1964 : 51) : « ces Hindous
prirent femmes dans les grandes villes indonésiennes et introduisirent les
conceptions indiennes de la royauté ». Coedès lui-même {ibid. : 3) voyait dans
« l'action civilisatrice » de l'Inde les prémisses d'une coupure radicale conduisant
à opposer deux grands types de sociétés en Asie du Sud-Est, à savoir les sociétés
indianisées formant « l'Inde extérieure », et les autres, sur la base d'une série
de contrastes : « organisation tribale /État fortement hiérarchisé ; animisme
assez grossier, cosmologie rudimentaire /religion à dogmes, écritures saintes,
vision du monde cohérente ; tradition orale /droit écrit, littérature ». Sur les
changements de perspectives apportés par les recherches de ce dernier quart de
siècle, voir l'effort de synthèse de O. W. Wolters (1982). Rois divins, rois guerriers . 41
vague conquérante à laquelle seule aurait résisté la petite île, farouche
ment repliée sur ses dogmes hindouistes4.
Alors qu'aujourd'hui peu d'historiens de l'Asie du Sud-Est apporte
raient leur soutien à cette interprétation de l'histoire, elle réapparaît
explicitement dans les études balinaises sous la forme d'un modèle
anthropologique de l'institution politique, réduisant la royauté à Bali au
XIXe siècle à n'être qu'une variante de la royauté divine hindouisée telle
qu'elle aurait caractérisé les sociétés indianisées de l'Asie du Sud-Est du
Ve au xve siècle5.
Apparemment, à Bali comme ailleurs en Asie du Sud-Est, la royauté se
prépare à travers ces contacts des premiers siècles de l'ère chrétienne dont
on ne sait et ne saura jamais rien de précis. Elle émerge pour nous au
ix^ siècle, toute constituée, dans ces inscriptions sur bronze qui
contiennent les injonctions administratives et religieuses du monarque
indianisé. Cette forme ancienne de la royauté a laissé des traces épigra-
phiques et archéologiques qui démontrent sa proche parenté avec ce. qu'il
est convenu d'appeler la royauté divine hindouisée en Asie du Sud-Est.
Outre le contenu des édits royaux datés de l'ère £aka et signés de noms
de règne sanskrits, l'archéologie témoigne que les rois défunts étaient
représentés sous les traits d'une divinité hindoue et que des monuments
funéraires étaient consacrés à leur culte6. Or ces signes éminents de la
royauté indianisée disparaissent to

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