Sur quelques rites de purification des Dogon (Soudan français) - article ; n°1 ; vol.10, pg 65-78
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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1940 - Volume 10 - Numéro 1 - Pages 65-78
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1940
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Denise Paulme
Sur quelques rites de purification des Dogon (Soudan français)
In: Journal de la Société des Africanistes. 1940, tome 10. pp. 65-78.
Citer ce document / Cite this document :
Paulme Denise. Sur quelques rites de purification des Dogon (Soudan français). In: Journal de la Société des Africanistes.
1940, tome 10. pp. 65-78.
doi : 10.3406/jafr.1940.2485
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1940_num_10_1_2485QUELQUES RITES DE PURIFICATION SUR
DES DOGON
(SOUDAN FRANÇAIS).
PAR
Denise PAULME;
Attachée au M user de l'Homme.
La guérison des maux-par leur transfert sur un objet inanimé, plus
souvent encore sur un animal, est une pratique fréquente, notamment
dans les sociétés africaines. Sir James George Frazer, dans son Bouc
émissaire *, cite de nombreux exemples, dont le plus connu reste celui du
Noir malade qui s'attache un poulet vivant au cou : si l'oiseau remue les
ailes ou crie, c'est signe que la souffrance passe en lui et le patient doit
en éprouver du soulagement..
Les pratiques de purification par expulsion des maux sur un objet sen
sible dont on cherche ensuite à se débarrasser paraissent d'usage cou
rant chez les Dogon du Soudan français, où nous pûmes les observer assez
longuement. Toutefois, les explications fournies spontanément par les
indigènes, la nature des faits motivant le recours à ces pratiques d'ex
pulsion, enfin l'ensemble des mythes auquel se rattache le rituel de puri
fication, nous laissent voir ici plus loin qu'un nettoyage ou qu'une
simple substitution. Le mal n'est pas seulement expulsé, il est renvoyé
en un endroit précis qu'il n'aurait jamais dû quitter ; l'élimination se
complique d'une oblation2.
Le rituel de purification est pratiqué • par les indigènes de deux
manières : tantôt publiquement, dans l'intérêt général ; tantôt (le cas est
plus fréquent), en secret et dans un but d'intérêt privé.
1. Frazer (James George). The Scapegoat. London, Macmillanand Co, 1913.
2. « ... presque toujours, il s'agit, non simplement d'évacuer, mais de recon
duire vers son foyer d'origine la substance mystique que le transgresseur s'est indû
ment appropriée. L'élimination même sous sa forme la plus simple, se- complique
d'une oblation. » Hertz (Robert), Ecole pratique des Hautes-études,. Ve section, rap
port annuel, .1908-1909.
Société des Africanistes. 5 * SOCIÉTÉ DES AFUICANISTES G6
Une purification publique a lieu chaque fois qu'un mal menace indi
stinctement tous les membres de la communauté : dans le cas d'épidémie,
par exemple. Elle a lieu aussi, en l'absence de toute calamité, chaque
fois que les indigènes se sentent souillés par un contact interdit, tel
celui d'une femme menstruée. Il n'est pas d'impureté plus redoutée que
celle de la pendant son indisposition périodique ; elle, porte,
malheur à ce qu'elle touche et à qui la touche. Aussi, cinq jours chaque
mois, les femmes doivent-elles quitter leur maison et gagner la ya
punune ginu, la « maison des femmes menstruées », qui leur est réser
vée en bordure du village. Tout le temps qu'elles demeurent là, il leur
est interdit de préparer les repas de leurs maris ; elles-mêmes doivent,
pour leur nourriture, se servir de calebasses et de poteries spéciales.
Qu'on voie l'une de ces y a punu, de ces femmes impures, traverser l'a
gglomération, une purification générale devient nécessaire ; sans quoi,
expliquent les indigènes, les gyinu, génies des arbres, entreraient dans
le village et tueraient tous les enfants. Pour éviter ce malheur, les habi
tants traînent par les rues un oiseau de proie et une petite tortue d'eau,
kiru ; ils vont ensuite pendre l'oiseau dans un arbre hors du village et
déposer la tortue sur une-fourmilièrer à une croisée de chemins. Toutes
les poteries des maisons sont vidées et remplies d'eau propre. Enfin, les
autels des différents cultes, publics et privés, sont frottés d'écorce de caïl-
cédrat ' et arrosés du sang d'un poulet.
On purifie de la même manière, à l'aide d'un oiseau de proie et d'une
tortue, le champ souillé par l'intrusion d'une femme menstruée, la mai
son où une femme est morte en couches, le lieu d'un meurtre — et aussi
le terrain qui ne porte qu'une récolte insuffisante, car en l'absence de
toute autre cause, le petit nombre des épis est attribué au fait qu'une
infraction de cet ordre a pollué le, champ et attiré le malheur sur lui.
Les rites de purification individuelle semblent présenter une impor
tance beaucoup plus considérable. Il n'est personne qui, de temps à autre,
n'éprouve le besoin de procéder à ces rites, soit qu'il ait commis sciem
ment une infraction aux conséquences de laquelle il désire échapper ;
soit qu'il ne retrouve plus le souvenir d'une faute dont l'existence lui
paraît suffisamment attestée par la maladie ou par la malchance qui le
poursuivent depuis quelque temps — et malchance étant les con
séquences qu'entraîne normalement une infraction de cet ordre.
Voyons d'abord en quoi consiste le rituel de purification individuelle.
Selon le vieil informateur Ambibé Babadyé, du village d'Ogol-du-bas,
région de Sanga, l'homme, pour se purifier, va la nuit sur une fourmil
ière, à une croisée de chemins; il emporte un poussin, une petite tortue
i. Rite habituel de purification; voir plus bas. QUELQUES RITES DE PURIFICATION DES DOGON 67 SUR
d'eau, kiru, quelques fragments d'écorce de caïlcédrat, quelques bandes
de coton tissé ou une poignée de coton égrené. Arrivé sur ,1a fourmilière,
le patient ôte ses vêtements, ne gardant qu'un cache-sexe ; mâche
l'écorce amère, qu'il crache presque aussitôt par trois fois ; s'essuie la
figure, les aisselles, la plante des pieds, la plante des mains, l'anus, avec
le coton qu'il jette par-dessus son épaule sur la fourmilière ; enfin s'ac
croupit et fait passer le poussin, puis la tortue, entre ses jambes, et pro
nonçant les mots suivants :
hake l tafia ma ivoy woy
prenez tous tous péchés mes
Poussin, tortue et coton sont abandonnés sur place. L'homme reprend
ses vêtements et rentre au village sans tourner la tête, avec le sentiment,
de s'être débarrassé de toute souillure, de. s'être nettoyé, au sens littéral
du mot.
Parfois aussi interviennent dans le rituel d'élimination pratiqué sur la
fourmilière une gousse de petine à sept graines, que le purifiant se passe
sur le corps ; sept cauris intacts, qu'il fait couler sur sa tête ; à défaut
d'écorce de caïlcédrat, du charbon, mâché et craché par trois fois. Enfin,
un œuf peut remplacer le poussin.
Parmi les principaux événements" nécessitant le recours aux rites
décrits ci-dessus, les indigènes citent : le meurtre (auquel est parfois assi
milée la provocation au suicide) ; le vol ; le mensonge grave ; l'enjambe
ment d'un homme par une femme, celui d'une femme par un homme ; de
l'avis des vieillards, le manque de respect à l'égard des personnes âgées.
Une femme se purifiera après un accouchement, "après un avortement
ou après la mort d'un enfant en bas âge ; elle se purifiera encore dans le
cas de stérilité ou lorsque la durée de ses règles excède le temps normal.
Un homme malade, ou dont le bétail est frappé par une épizootie, prat
iquera le rituel de l'expulsion des maux. Enfin, il n'est pas jusqu'à l'he
rmaphrodite, ni jusqu'à la jeune fille insuffisamment développée; qui ne
trouverait la guérison par ce moyen 2.
1. Hake, mot arabe, « le droit ». Mgr Bazin, dans son Dictionnaire bambara-fran-
çais, Paris, Imprimerie Nationale,, 1906, donne pour hake les trois sens suivants :
1) dû, droit; 2) quote-part, é-juivalent, prorata; 3) faute, péché, tort, manquement.
Les Dogon semblent n'avoir retenu que ce troisième sens.
2. L'hermaphrodite va la nuit sur une fourmilière à une croisée de chemins, a ccom-
pagné de son chef de famille (gina baňa). Ce dernier procède sur le garçon aux rites
habituels de purification, puis prononce les paroles suivantes :
key bana nani a woy . woye i woy папа
fourmis comme accouche tous tous enfant l

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