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Publié par | Actes-de-la-recherche-en-sciences-sociales |
Publié le | 01 janvier 2001 |
Nombre de lectures | 97 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 3 Mo |
Extrait
Monsieur Loïc J. D. Wacquant
Symbiose fatale
In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 139, septembre 2001. pp. 31-52.
Citer ce document / Cite this document :
Wacquant Loïc J. D. Symbiose fatale . In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 139, septembre 2001. pp. 31-52.
doi : 10.3406/arss.2001.3353
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_2001_num_139_1_3353Resumen
Simbiosis fatal. Cuando el gueto y la prisión se asemejan y se confunden.
Si se quiere dar cuenta de la sobre representación de los presos negros como consecuencia de la
reclusión masiva en los Estados Unidos, es necesario romper con el paradigma de « crimen y castigo »
y considerar la función extrapenal del sistema jurídico criminal concebido como un instrumento de
gestión de grupos desheredados y desacreditados. En este articulo se vuelve a situar la prisión en la
cadena histórica de las «instituciones especiales» que, al igual que la esclavitud, el régimen de Jim
Crow y el gueto, han sido las encargadas de categorizar y confinar a los afroamericanos. La reciente
recrudescencia del encarcelamiento de los negros deriva de la crisis del gueto como instrumento de
control de casta, así como de la consiguiente necesidad de encontrar un aparato sustitutivo para
contener a los afroamericanos de los sectores más desfavorecidos. En la nueva era iniciada por la
conquista de los Derechos Civiles, los vestigios del gueto negro y el sistema carcelario en expansión se
encuentran unidos por una triple relación de equivalencia funcional, homologia estructural y fusion
cultural. Esta relation ha engendrado un continuum carcelario que atrapa en sus redes a una población
constituida por jóvenes negros excluidos del mercado « desregulado » del salariado. Las
transformaciones que remodelaron el « Cinturón Negro » urbano de la posguerra han consolidado esa
intrincada malla carcelaria, de modo tal que el gueto se ha tornado cada vez más semejante a la prisión
; a su vez, dichos cambios han minado la « sociedad detenida » de los establecimientos penitenciarios
estadounidenses, de tal manera que la prisión se ha vuelto cada vez más semejante al gueto. La
resultante simbiosis entre gueto y prisión perpetúa la marginalidad socioeconómica y la deshonra
simbólica del subproletariado negro, alimentando el desenfrenado crecimiento del sistema carcelario.
Pero no sólo eso : la mencionada simbiosis también desempeña una función primordial en la
reelaboración de la «raza», la redefinición de la ciudadanía — a través de la producción de una cultura
publica marcada por la denigración racial de los criminales - y la construcción de un Estado
poskeynesiano que sustituye la anterior forma de tratar la pobreza - bajo la responsabilidad de la
asistencia social - por su gestión penal.
Abstract
A fatal symbiosis.
When ghettos and prisons are of a feather.
If one wishes to account for the stupefying over-representation of Blacks in prison resulting from mass
imprisonment in the US, one must forget the «crime and punishment » paradigm and consider the extra-
penological function of the criminal justice system, conceived as an instrument for managing deprived
and disgraced groups. The present article places prisons alongside slavery, the Jim Crow laws and the
ghetto, in the historical chain of the «special institutions» which have been charged with classifying and
confining African-Americans. The recent upsurge of Blacks imprisonment results from the crisis of the
ghetto as an instrument of caste control, and from the subsequent need to find a substitute restraining
device for African-Americans from underprivileged backgrounds. In the new era which opened with the
Civil-Rights victories, the vestiges of the black ghetto and the expanding prison system found
themselves linked by a threefold relationship of functional equivalence, structural homology and cultural
fusion ; together these gave rise to a penal continuum which caught up in its dragnet a population
comprised of young black men excluded from the « deregulated » market of salaried work. The
imprisoning mesh was consolidated by the changes which reshaped the post-war urban « Black Belt »
in such a way that the ghetto came to look more and more like prison, and undermined the «inmate
society » of the US prisons so that prison was made to look more and more like the ghetto. The
resulting symbiosis between ghetto and perpetuates not only the socioeconomic marginality and
the symbolic defilement of the black under-class by fuelling the unbridled growth of the prison system, it
also plays a pivotal role in the re-manufacture of « race », the redefinition of citizenship by way of the
production of a racialized public culture of denigration/belittling of criminals, and the construction of a
postkeynesian State which replaces the treatment of poverty by the social worker with its penal
management.Résumé
Symbiose fatale.
Quand ghetto et prison se ressemblent et s'assemblent.
Si l'on veut rendre compte de la stupéfiante sur-représentation des Noirs en prison à laquelle a conduit
l'emprisonnement de masse aux États-Unis, on doit rompre avec le paradigme du « crime et du
châtiment » pour considérer la fonction extra-pénologique du système judiciaire criminel, conçu comme
un instrument de gestion des groupes déshérités et déshonorés. Cet article resitue la prison dans la
chaîne historique des « institutions spéciales » qui ont été chargées de catégoriser et de confiner les
Afro-Américains, avec l'esclavage, le régime de Jim Crow et le ghetto. La recrudescence récente de
l'incarcération des Noirs résulte de la crise du ghetto en tant qu'instrument de contrôle de caste, et de la
nécessité qui s'est ensuivie de trouver un appareil de substitution pour la contention des Afro-
Américains des classes défavorisées. Dans la nouvelle ère qu'a ouverte la conquête des Droits civils,
les vestiges du ghetto noir et le système carcéral en expansion se sont trouvés liés par une triple
relation d'équivalence fonctionnelle, d'homologie structurale et de fusion culturelle, engendrant un
continuum carcéral qui piège dans ses filets une population constituée de jeunes hommes noirs exclus
du marché « dérégulé » du salariat. Ce maillage carcéral s'est trouvé consolidé par les changements
qui ont remodelé la « Ceinture Noire » urbaine de l'après-guerre en sorte que le ghetto a été rendu de
plus en plus semblable à la prison, et miné la «société détenue» des pénitenciers étatsuniens en sorte
que la prison a été rendue de plus en plus semblable au ghetto. La symbiose entre ghetto et prison qui
en résulte ne perpétue pas seulement la marginalité socio-économique et la souillure symbolique du
sous-prolétariat noir, en nourrissant la croissance effrénée du système carcéral. Elle joue aussi un rôle
pivot dans la re-fabrication de la « race », la redéfinition de la citoyenneté par l'intermédiaire de la
production d'une culture publique racialisée de dénigrement des criminels, et la construction d'un État
post-keynésien qui substitue au traitement de la pauvreté par l'assistance sociale sa gestion pénale.:
Loïc Wacquant
SYMBIOSE FATALE
Quand se ressemblent ghetto et prison et s'assemblent
l'aube du nouveau millénaire, trois faits bruts Au cœur des anciennes métropoles industrielles du
appellent l'attention du sociologue de l'inégal Nord, berceau des grands ghettos du pays, cette pro
ité raciale et de l'incarcération en Amérique. portion dépasse fréquemment les deux tiers.
Premièrement, depuis 1989 et pour la première fois Une troisième tendance interpelle le sociologue de la
dans l'histoire nationale, les Afro-Américains consti domination raciale, de l'État et de l'institution pénale
tuent la majorité des personnes franchissant chaque en Amérique les deux dernières décennies ont vu se
année les portes d'un établissement pénitentiaire. De creuser à un rythme soutenu l'écart entre le taux d'em
fait, en l'espace de quatre courtes décennies, la compos prisonnement des Noirs et celui des Blancs (il est
ition ethnique de la population carcérale des États-Unis passé d'environ un pour 5 à un pour 8,5), et cette
s'est inversée, passant de 70 % de Blancs au milieu du « disproportionnalité raciale » croissante s'avère être
siècle à 70 % de Noirs et Latinos aujourd'hui, bien que l'effet d'une seule politique fédérale, à savoir la
la distribution ethnique de la criminalit