Un académicien traducteur et historien de l empereur Julien : l abbé de La Bletterie - article ; n°1 ; vol.144, pg 93-113
22 pages
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Un académicien traducteur et historien de l'empereur Julien : l'abbé de La Bletterie - article ; n°1 ; vol.144, pg 93-113

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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 2000 - Volume 144 - Numéro 1 - Pages 93-113
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Bruno Neveu
Un académicien traducteur et historien de l'empereur Julien :
l'abbé de La Bletterie
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 144e année, N. 1, 2000. pp. 93-
113.
Citer ce document / Cite this document :
Neveu Bruno. Un académicien traducteur et historien de l'empereur Julien : l'abbé de La Bletterie. In: Comptes-rendus des
séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 144e année, N. 1, 2000. pp. 93-113.
doi : 10.3406/crai.2000.16100
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_2000_num_144_1_16100COMMUNICATION
UN ACADÉMICIEN DU XVIIP SIÈCLE, TRADUCTEUR
ET BIOGRAPHE DE L'EMPEREUR JULIEN : CARRÉ DE LA BLETTERIE
PAR M. BRUNO NEVEU
On voudrait ici remettre en lumière un chaînon historiogra-
phique entre Le Nain de Tillemont, avec son Histoire des emper
eurs et des autres princes qui ont régné durant les six premiers siècles
de l'Eglise, et Edward Gibbon, auteur du Décline and Fall ofthe
Roman Empire, c'est-à-dire entre l'exact critique de la fin du
XVIIe siècle formé aux écoles de Port-Royal et l'historien artiste
qui a donné, presque cent ans plus tard, aux lettres anglaises
un chef-d'œuvre dont la séduction s'exerce toujours. Ce
chaînon, c'est l'abbé de La Bletterie, membre de l'Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres de 1742 à 1772, professeur
d'éloquence latine au Collège royal, devenu plus tard Collège
de France.
Sans songer à offrir le portrait en pied d'un personnage qui pour
n'avoir pas brillé d'un vif éclat a tenu une place distinguée dans le
monde savant du XVIHe siècle, à un moment où recherche érudite
et réflexion historique ne s'affrontaient pas systématiquement,
comme on l'a souvent écrit en n'écoutant que les diatribes du clan
des Philosophes, on tentera au passage de raviver quelques traits
de cette physionomie de lettré.
Un rappel biographique s'impose donc, avant d'évoquer les tra
vaux imprimés qui nous sont parvenus par-delà deux siècles et
demi, et plus particulièrement la Vie de l'empereur Julien, parue
pour la première fois en 1735 et dont on ne peut séparer Y Histoire
de l'empereur Jovien, publiée en 1748, qui contient une traduction
d'un certain nombre d'écrits de Julien. L'abbé de La Bletterie s'est
fait à la fois traducteur et biographe du prince si longtemps dési
gné comme l'Apostat et ce double exercice confère à son récit un
évident cachet d'authenticité.
En dépit de sa notoriété en son temps, Jean -Philippe René de
La Bletterie (La Bléterie est également attesté, on suit ici la forme
adoptée dans les registres des procès -verbaux de l'Académie)
demeure enveloppé d'une ombre que l'on ne parvient pas à
percer.
1999 7 94 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
Testament, inventaire après décès, qui décrirait peut-être le
contenu d'une bibliothèque, n'apparaissent pas dans les archives1.
Aucune trace de correspondances ou de papiers personnels ne se
révèle2. L'indiscutable appartenance au groupe des jansénistes
appelants de la bulle Unigenitus, qui lui coûta l'Académie française,
ne se reflète pas dans les documents conservés sur cette intermi
nable controverse. Son enseignement au Collège royal comme pro
fesseur durant de longues années — de 1746 à sa mort — n'est mal
heureusement pas mieux connu que celui de ses collègues au sein
de ce grand établissement3. L'essentiel est livré par la conscien
cieuse notice de son confrère de l'Académie L. Dupuy, Eloge de
M. l'abbé de La Bletterie, écrit et prononcé en 17734.
On ne retiendra ici que la naissance à Rennes, le 26 février 1696,
d'un père originaire d'Auvergne, l'entrée dans la congrégation de
l'Oratoire, le cours de théologie suivi à Saumur, la régence d'hu
manités à Soissons, qui lui donna familiarité avec les meilleurs
écrivains de la Grèce et de Rome. Il est chargé en 1723 de confé
rences théologiques à Tours. « II entreprit un cours d'histoire
ecclésiastique qu'il continua pendant six ou sept ans avec un
grand concours d'auditeurs et un applaudissement mérité. »
Appelé au séminaire de Saint-Magloire (à Paris) pour les mêmes
fonctions, « il crut devoir faire une étude plus particulière de
l'Écriture sainte, et par conséquent de l'hébreu, dont il avait senti
la nécessité ». Il s'attacha au système de l'abbé Masclef, dont il
édita la Grammatica en 17315, avec des Vindiciae Methodi Masclefia-
nae, « où l'on admire [...] le talent de répandre des grâces sur une
matière qui semblait les repousser ».
Saint-Magloire était à cette époque le centre le plus actif d'une
culture ecclésiastique où érudition, jansénisme et gallicanisme se
conjuguaient. Le pouvoir royal prit à plusieurs reprises des
mesures de police contre certains oratoriens et leur entourage. La
Bletterie, expulsé en décembre 17296, se retira d'abord à la Maison
1. Aux Archives nationales on ne relève son nom ni dans les scellés après décès ni dans
les insinuations.
2. B.N.F : nouv. acq. fr. 15589, fol. 99-100 (à propos du conflit Bossuet/ Fénelon) ; nouv.
acq. fr. 15590, fol 16 v°.
3. Voir A. Lefranc, Histoire du Collège de France, Paris, Hachette, 1893, appendice T,
« Liste chronologique des professeurs », p. 386. La Bletterie succéda à J.-B. Souchay,
Charles Lebeau occupant l'autre chaire de 1752 à 1778. Les registres du Collège font appar
aître de nombreuses présences de La Bletterie, à compter du 10 décembre 1746.
4. Publié dans l'Histoire de l'Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XL, Paris,
1780, p. 206-216.
5. B.N.F :X 6228.
6. Supplément des Nouvelles ecclésiastiques pour les mois d'octobre, novembre, décembre
1729, p. 238 : « le P. Le Roi, assistant et premier directeur (du séminaire) et le P. de La Blet
terie, théologien pour la scholastique, ont été destitués. » l'abbé de la bletterie 95
Saint-Honoré de l'Oratoire, « asile renommé de l'érudition sacrée
et de l'éloquence chrétienne », et s'y absorba dans les recherches
sur l'Antiquité gréco- romaine qui devaient le conduire à ses
publications et par là aux honneurs de la vie académique.
Contraint de quitter définitivement l'Oratoire « à la suite d'un
décret de discipline dressé dans une assemblée générale », et
devenu prêtre séculier, il se trouva alors dans une situation matér
ielle ingrate, sans fortune. Sa délicatesse lui fit cependant refuser
les asiles qu'on lui offrait, mais « il accepta de veiller sur l'éduca
tion des deux fils d'un magistrat (M. Thomé) ».
En 1735 la Vie de l'empereur Julien avait paru chez Prault en un
volume in- 12 de XVI et 493 pages, qui connut le succès et lui per
mit d'aspirer à une place à l'Académie des Inscriptions, laquelle
comptait alors parmi ses membres titulaires français des honor
aires, des pensionnaires et des associés. C'est dans cette dernière
classe, la plus nombreuse, que l'abbé de La Bletterie fut élu le
mardi 16 janvier 1742. Au premier scrutin, « les suffrages au
nombre de 26 se sont trouvez pour M. de La Bletterie et ensuite au de 10 pour M. Dégly » (d'Egly). La fut présent en
séance dès le 19 janvier, suite à la lettre du comte de Maurepas,
datée de Versailles le 17 janvier 1742, informant le président de
l'Académie de la nomination par le Roi7.
L'entrée de l'abbé de La Bletterie dans le temple de l'érudition
française n'était pas seulement la reconnaissance de ses talents de
critique, tourné vers l'étude de l'Antiquité romaine que l'on culti
vait en priorité à l'Académie. Sa personnalité jouait également un
rôle. Son élection l'agrégeait en effet à un milieu que le pouvoir
royal protégeait, contrôlait mais ne privait pas d'une discrète indé
pendance. S'y trouvaient à l'aise des représentants déclarés d'un

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